Fiction: Visions d'un Dieu Endormi

Pour Tenten, une mission banale au Pays du Vent va prendre des proportions épiques qui vont la plonger, elle et l'équipe chargée de la retrouver, au cœur d'une machination qui pourrait bien menacer le monde entier. Car les fidèles du Dieu à la Main Sanglante, Jashin, ont décidé de réveiller le Dieu Endormi…
Classé: -16I | Action/Aventure / Horreur / Spirituel | Mots: 125927 | Comments: 38 | Favs: 34
Version imprimable
Aller au
Kris'ter (Masculin), le 09/11/2010
Tout d'abord, et avant toute choses, je tien à présenter mes plus plates excuses à ceux qui ont commencé à lire ma fic (et à la vingtaine de personnes qui l'ont apprécié, haha) pour la longue attente… presque un an sans rien écrire…

Mais j'ai des excuses. L'une d'entre elle s'appelle Manon, c'est l'amour de ma vie et avec elle je ne m'ennui pas une minute.
Cependant ne la blâmez pas, comme c'est une grande fan de ce que j'écris, elle m'a poussé à m'y remettre, donc voilà un nouveau chapitre :)




Chapitre 12: Petite Prise de Risque



L'esprit de Tenten commençait à refaire surface, lentement…

Son corps était engourdi, elle avait l'impression de flotter, sa vision était brouillée…

Était-elle morte ? Non, sûrement pas, elle se sentait trop mal pour être passée de l'autre côté…

Sa vision commençait à s'éclaircir, elle voyait les toiles d'araignées accrochées au plafond défiler devant elle… Elle était donc couchée, mais elle se déplaçait… Elle était sur un brancard… On la déplaçait sur un brancard… Que s'était-il passé ?

Les souvenirs refirent soudain surface, et avec eux un sentiment d'horreur lorsqu'elle revoyait toutes les atrocités qu'elle avait commises dans l'arène. Un ouragan de honte et de culpabilité s’empara d'elle en même temps qu'elle se rappelait l'intense sentiment de satisfaction qu'elle avait éprouvé au massacre des esclaves, des hommes, des femmes et des enfants, incapables de se défendre, mais qu'elle avait pourtant exécutés avec une joie perverse. Elle ressentit dans sa chair la douleur de leurs morts violentes, la souffrance de leurs spasmes d’agonie et eut envie de pleurer.

"Tiens, elle s'est réveillée." fit remarquer le garde qui se tenait derrière.

"Tant mieux, c'est pas drôle sinon, haha." ricana celui à l'avant.

Arrivés devant sa cellule, les deux gardes basculèrent le brancard et la kunoichi s'écroula mollement sur le sol dur et froid, puis ils la poussèrent avec le pied vers l'intérieur de son cachot crasseux. La traiter comme une serpillère les faisait visiblement beaucoup rire. En son for intérieur, la kunoichi maudit le poison tueur de chakra qui coulait dans ses veines et l'empêchait de bouger. L'un des gardes la retourna et l'observa avec l'œil du chasseur contemplant une harde de chevreuils. Tenten lui rendit son regard sans se démonter.

"Quoi ?" demanda-t-elle sèchement.

"T'es complètement dingue Sefrou." s'indigna l'autre garde, "Nos têtes vont y passer si on se fait prendre."

"La ferme Hadj ! Et ne me dit pas que tu n'as pas envie de t'amuser avec elle toi aussi. De toute façon elle va bientôt crever, ça serait bête de passer à côté d'une occasion pareille."

Le garde ne répondit pas et détourna les yeux de son comparse qui se pencha sur la prisonnière. La kunoichi sentit une bouffée de panique monter en elle en même temps que la main de Sefrou glissait sur l'intérieur de sa cuisse et remontait vers son entrejambe. Il avait un air si naturel, presque paternaliste.

"Enlève tes sales pattes de là !" hurla Tenten, impuissante, "Je t'interdis de me toucher !"

"Ah oui ? Et qui va m'en empêcher ?" demanda le garde, hilare.

"Moi."

La voix inconnue avait résonné derrière lui et Sefrou se retourna juste à temps pour recevoir en plein visage le coup de pied d'Erwan dont la violence le souleva du sol. Le garde porta les mains à son nez brisé en poussant un cri étranglé. Aucun des deux gardes n'avait vu ou entendu arriver le med-nin, et maintenant ils savaient qu'ils étaient déjà morts, tous les deux, ils avaient enfreint un ordre et s'étaient fait prendre par un Exécuteur de Jashin. Et pas n'importe lequel : le fils du Grand Prêtre en personne !

"Attendez, attendez. Ce n'est pas du tout ce que vous croyez." croassa Sefrou, dont le nez saignait abondamment.

"Menteur !" protesta Tenten avec véhémence.

L'Exécuteur se planta au milieu du cachot, les mains sur les hanches, le regard sombre. Il regardait les deux morts en sursis comme on regardait un insecte englué dans un pot de miel, amusé par le spectacle de sa lente noyade dans la douceur gluante.

"Vous aviez clairement reçu comme consigne de ne pas toucher à cette fille." lâcha Erwan d’une voix plate. "Il me semble que vous avez désobéi messieurs, et l'un de vous deux va devoir en payer le prix."

Hadj réalisa en premier ce que voulait dire Erwan, son arme jaillit dans sa main et il l'abattit froidement sur son partenaire au sol. La tête roula jusqu'aux pieds du med-nin qui la ramassa avant de la tendre vers le garde survivant.

"Tu t'en tires bien, pour cette fois." lui dit sombrement l'Exécuteur, "Mais tu n'auras peut-être pas toujours autant de chance."

Il grava quelque chose sur le front de Sefrou avant de lancer la tête à Hadj, en lui ordonnant d'emporter le cadavre pour le mettre avec les autres, et d'aller placer la tête à la caserne, afin qu'elle serve d'exemple. Le garde s'empressa d'exécuter les ordres, et tandis qu'il traînait le corps de Sefrou dans le couloir, il regarda ce qu'Erwan avait écrit sur le front de son infortuné (mais néanmoins stupide) compagnon.

Le med-nin y avait gravé le mot «Traître»…



Au travers les rideaux en soie diaphane de la grande baie vitrée, le soleil du désert inondait de lumière le bureau de Dohyou, l’organisateur des jeux de l’arène de Commoragh. La pièce était plutôt grande et décorée avec un raffinement extrême. Les meubles magnifiques étaient dorés à l'or fin et marquetés de pierres précieuses, sur les murs étaient tendues des tapisseries de valeur inestimable, dépeignant d'effrayants banquets sanguinaires où des créatures démoniaques se repaissaient de chair fraîche. Le plafond était soutenu par de hautes colonnes autour desquelles s'enroulaient des lianes finement sculptées dont les feuilles étaient faites d'émeraudes. Le centre de la pièce était occupé par un large bureau en arc de cercle dont la surface était constituée d'une mosaïque de cristaux qui réfléchissaient la lumière entrant par la baie vitrée, créant sur le plafond et les murs une fresque changeante de couleurs spectrales. La présence de tous ces trésors délicats au cœur de cette cité sanglante et crasseuse semblait parfaitement incongrue.

Assis dans son fauteuil moelleux derrière son bureau, Dohyou transpirait légèrement. Cela n'était toutefois pas dû à la température de la pièce, mais plutôt lié à la personne qui se tenait en face de lui : Akane, une des prêtresses de Jashin. Cela faisait bien cinq minutes qu'elle était entrée dans la salle, mais n'avait toujours pas prononcé un mot, se contentant de dévisager avec une moue condescendante, les bras croisés sous sa poitrine, l’organisateur des jeux de l’arène dont la gêne allait en grandissant.

Dohyou tentait de regarder la prêtresse le moins possible. Il savait que les corps de ces femmes étaient des armes tout aussi mortelles que leurs poignards. Le regard se laissait prendre sur leurs courbes souples et généreuses, l'esprit se laissait embrumer par leurs paroles douces et mielleuses, jusqu'à ce que la raison s'y perdit et que la victime finisse par s'offrir avec joie à la lame sacrificielle.

La prêtresse éclata soudainement de rire.

"Je t'aime bien Dohyou." finit-elle par dire joyeusement, "Tu n'es pas comme ces riches bourgeois qui ne pensent qu'à s'enrichir et qui ne se soucient du Dieu à la Main Sanglante que lors du festival de la Récolte des Âmes. Toi au moins tu participes activement et ça, Jashin s'en souviendra quand tu te présentera devant lui."

L’organisateur des jeux de l’arène la remercia d'un sourire nerveux. Le ton employé par Akane le mettait mal à l'aise, car bien qu'elle lui parlât comme si les deux étaient des amis de longue date, il savait fort bien qu'elle était tout à fait capable, à tout instant, d'effectuer une pirouette au dessus du bureau afin de lui poignarder les yeux et/ou la jugulaire, sur un simple coup de tête.

"Bien, trêve de plaisanterie." reprit la prêtresse, "Le messager est-il parti pour la citadelle ?"

"Heu… oui." répondit prestement Dohyou, "Le Roi devrait recevoir l'invitation à assister au match de Karn'Aj dans l'heure. Je… j'ai pris toutes les dispositions nécessaires pour qu'il… enfin… pour l'encourager à faire le déplacement."

"Excellent." acquiesça Akane.

Elle allait se retourner pour quitter la pièce quand l’organisateur des jeux de l’arène toussota et s'enhardit à poser une question :

"Mais… heu… Pourquoi… Pourquoi faîtes-vous tout cela ? Pourquoi organiser un combat entre… Karn'aj… et…"

Il n'arriva pas à terminer sa phrase, la prêtresse s'approchait du bureau, et Dohyou s'enfonça dans son fauteuil afin de garder une distance raisonnable entre elle et lui. Il lui sembla entendre un petit carillon au loin.

"Ne pose pas de questions dont tu ne veux pas connaître la réponse." lui conseilla-t-elle fermement.

L’organisateur des jeux de l’arène n'arrivait plus à détacher son regard d'Akane, il sentait qu'il était en train de tomber sous son influence mais il n'était plus capable de se forcer à vouloir s'en soustraire.

"Ah, encore une chose…" poursuivit la prêtresse, à présent penchée au-dessus de la mosaïque de cristaux dont les lueurs dessinaient sur son corps sublime de complexes motifs multicolores, "Lorsque Karn'Aj sera dans l'arène, tu vas faire en sorte que la porte arrière de sa cellule soit déverrouillée et les sécurités débranchées."

Dohyou accepta immédiatement. D'ailleurs, il aurait pu accepter tout ce qu'elle lui aurait demandé de faire sans l'ombre d'une hésitation puisqu'à ce moment là, son esprit ne voyait plus que la prêtresse, sa voix, son parfum, il n'existait que pour satisfaire les caprices de sa nouvelle maîtresse. Il aurait même été honoré de rendre son dernier soupir entre les mains d'Akane.

Une dizaine de minutes après le départ de la prêtresse, l'esprit de Dohyou refit enfin surface. Il n'arrivait pas à croire qu'il était encore vivant, Akane avait utilisé sur lui le jutsu de Soumission, auquel nul ne pouvait résister, et ceux qui s'en étaient sortis indemnes se comptaient sur les doigts d'une seule main. Il se souvint de ces histoires, celle d'un groupe d’impétueux Oinins qui avait fait vœu, devant leur Kage, de tuer une Nukenin devenue prêtresse de Jashin ou de mourir en essayant. Mais avant la fin du combat, les Oinins avaient tous été réduits à l’état d’imbéciles bégayants, esclaves du moindre caprice de la prêtresse. Celle-ci leur avait alors passé des colliers autour du cou et les avait fait marcher à quatre pattes comme des chiens pour amuser son dieu Jashin. Ou l'histoire du Juunin qui avait reçu pour mission de protéger un homme qu'une prêtresse devait tuer, et qui avait fini par s’agenouiller devant elle en lui offrant sa loyauté jusqu’à sa mort. En riant, la prêtresse avait arraché le cœur du Juunin, qui était resté immobile, convaincu de la nécessité de l’acte.

Une seule conclusion s'imposait : si elle l'avait laissé vivre, c'est parce qu'il fallait qu'il le soit pour leur être utile. Il était le seul et unique à pouvoir couper les sécurités situées sur la cellule de Karn'Aj, qui n'y était d'ailleurs pas installé pour rien, puisque celle-ci se situait pile en dessous de la tribune royale… celle où le Roi Hakkyou se tenait lorsqu'il décidait d'assister aux combats. Le fait de devoir débrancher ces sécurités allait permettre à n'importe qui d'entrer impunément dans cette cage, qui sera alors vide puisque son unique occupant serait à se moment là en train d'équarrir la jeune Tenten. Dohyou en était sûr maintenant, les membres du culte de Jashin conspiraient contre le maître de la cité, mais que pouvait-il faire ? La prêtresse avait usé de son pouvoir sur lui pour l'asservir, et il ne pouvait se soustraire à son influence maintenant. Il allait faire ce qu'elle avait ordonné et serait responsable, bien malgré lui, de ce qui allait arriver au Roi Hakkyou.

Il leva les yeux vers la fresque multicolore qui s'étalait au plafond, tentant de trouver une issue pour lui-même et pour celui dont la clairvoyance les dirigeait tous.



Le sol des couloirs de la prison était essentiellement constitué de pierre, mais il était recouvert de sable et de débris rocheux qui crissaient sous les pas de Neji et Shikamaru, toujours déguisés en gardes. Avançant avec d'infinies précautions afin de ne pas trahir leur présence par le moindre bruit, les ninjas inspectaient chaque cellule pour retrouver Tenten, essayant de ne pas prêter attention à la puanteur et à l'humidité ambiante. Finalement, le tunnel aboutissait à un pallier d'où partait un escalier abrupt s'enfonçant plus profondément dans la prison, tandis que, de part et d'autre, s'ouvraient deux cellules plongées dans les ténèbres aux entrées condamnées par des barreaux rouillés, dans lesquelles Neji pouvaient voir des formes sombres, entremêlées, qui s'entassaient dans les coins.

Les deux ninjas virent, ça et là, s'ouvrir un œil, puis un autre, puis encore un autre. Peu à peu, un torse et des membres se dégagèrent de cet amoncèlement confus et une silhouette émergea de l'ombre. Alors, qu'elle s'approchait en titubant des barreaux de sa cellule, Shikamaru et Neji frémirent d'horreur à la vue de cette pitoyable silhouette vaguement humaine dont le corps boursouflé portait les stigmates d'une virulente maladie. Le manipulateur d'ombre reconnut immédiatement les symptômes de la Takadea, communément appelée «pourriture des prisons», les geôliers devaient confiner ici les esclaves atteints de cette affliction, contagieuse par contact, afin d'éviter qu'elle se propage aux autres prisonniers. L'homme devant eux était de toute évidence au stade terminal, à un détail près : ses yeux luisaient d'une étrange lueur verdâtre. Les ninjas furent partagés entre la pitié et le dégoût pour cette lamentable créature, mais ce sentiment fit rapidement place à la peur lorsqu’ils se rendirent compte que l'éclat vert n'émanait pas de ses propres yeux, mais se reflétait en eux !

Ils firent immédiatement volte-face en se mettant instinctivement en position de combat. En haut des escaliers se trouvaient une monstrueuse silhouette, entièrement faite de flammes verdoyantes, un trou béant de noirceur semblait faire office de gueule et deux tentacules ardents fouettaient rageusement l'air autour d'elle. Voyant la créature de feu s'approcher des «gardes» avec des intentions inamicales, les prisonniers sortirent de leur torpeur et se mirent à secouer les barreaux de leur cellule avec frénésie. Le Pechdrazil (car c'en était un) s'éleva dans les airs et s'immobilisa au dessus des ninjas.

Voyant ses tentacules se détendre brusquement, ils firent un bond en arrière pour leur échapper, mais le monstre se rapprochait inexorablement, encouragé, semblait-il, par les hurlements des prisonniers. Pendant un bref instant, Neji et Shikamaru virent le corps du Pechdrazil se dilater et se contracter, comme si il respirait profondément, puis, tout à coup, il exhala un souffle d'énergie psychique qui transperça le crâne des deux ninjas comme un fer chauffé à blanc !

C'était du Genjustu sous sa forme la plus basique et aussi la plus brutale. Le ninja aux yeux d'ivoire vacilla sous le choc, ses facultés innées à peine capable de le protéger face à la soudaineté et la puissance de l'attaque, tandis que le manipulateur d'ombre s'effondrait en hurlant, la tête entre ses mains, incapable de résister à la violence de l'agression. Dans un hululement fantomatique, le Pechdrazil s'approcha pour concrétiser son avantage, mais Neji réussit à le prendre de vitesse : plongeant au sol et roulant sur lui-même à l'instant précis où la créature arrivait au dessus de lui, le Hyuuga se remit prestement debout pour contre-attaquer en utilisant la technique du Poing Souple. Le ninja aux yeux d'ivoire sentit un choc glacial lui parcourir le bras quand son doigt toucha le corps spectral de son adversaire, mais le râle de douleur qui retentit encouragea Neji à poursuivre la lutte.



Les cinq ninjas marchaient dans une large rue bordée de tavernes et d'auberges, remplissant l'air d'odeurs de cuisine et de saké. La foule se pressait au marché, des vendeurs ambulants s'affairaient à réquisitionner un bout de trottoir pour installer leurs tréteaux et la rue résonnait des cris et des bavardages de la population tandis que les chalands déambulaient entre les étalages des marchands. Le groupe aurait presque pu se croire sur la voie marchande de Konoha s’il n'y avait pas les trois cadavres allongés dans le caniveau qui bordait la rue.

Flânant d'échoppes en magasins, les ninjas donnaient vraiment l'impression d'être des touristes. En apparence tout du moins, car en vérité ils étaient aux aguets. Shikamaru et Neji, en plus d'observer la foule qui les entouraient, étaient également attentifs à leurs niveaux de chakra, ceux-ci étant anormalement bas du fait qu'ils s'étaient clonés. Le manipulateur d'ombre se sentait déjà plutôt faible et savait qu'il ne tiendrait plus très longtemps. Il avait cependant pris le temps d'expliquer en signes codés à Sakura et Lee ce qui se passait, et à partir de ce moment, les deux adoptèrent une attitude bien plus décontractée.

Malheureusement, ces gestes en code étant spécifiques à Konoha, Temari n'avait pas pu les saisir, ou même les remarquer. Pour elle, le Nara avait décidé pour on ne sait quelle raison de prendre du bon temps au lieu de poursuivre leur mission. La kunoichi de Suna était excédée par la passivité du manipulateur d'ombre, et encore plus désappointée par le comportement des autres ninjas qui semblaient suivre l'exemple du chef de l'équipe comme des moutons.

"Je peux savoir ce qu'on est en train de faire là ?" s'exclama la blonde du désert, exaspérée par l'inertie du groupe. "Vous croyez pas qu'on a d'autres trucs plus importants de prévu ?"

Shikamaru préféra ne pas relever le propos et se concentra d'avantage sur le présentoir sur lequel étaient exposés bibelots et curiosités en tout genre (et pour la plupart des attrape-nigauds), écoutant d'une oreille distraite le marchand lui vanter les mérites d'un kunai magique ayant prétendument appartenu à un vague ninja célèbre. Le Nara avait espéré que Temari comprenne la situation d'elle-même, mais celle-ci était visiblement trop remontée contre lui pour pouvoir se rendre compte qu'ils étaient suivis. Sakura décida d'intervenir :

"Bin… Si mais Shikamaru a dit qu'on devait en profiter pour visiter la ville le temps qu'il réfléchisse à un plan, et c'est le chef de l'équipe d'ailleurs."

"Tu parles d'un chef d'équipe ! Môssieur préfère faire les boutiques !" tonna Temari dont la colère enflait de plus en plus.

"Je crois qu'on parle de vous là." fit remarquer le marchand au manipulateur d'ombre.

"Je sais, je sais…" répondit celui-ci avec un air las, "Pitié, faîtes comme si on discutait d'un truc super-important."

C'en était trop pour la blonde du désert, avant que quiconque ait pu réagir, elle avait bondi sur l'objet de son ressentiment, le retourna et lui décocha un violent crochet du droit dans la mâchoire.

Le résultat fut immédiat : Shikamaru disparut dans un nuage de fumée, laissant la kunoichi de Suna comme deux ronds de flanc.

"Bien joué, Temari." la félicita cyniquement Neji avant de s'évaporer à son tour.

Une bagarre éclata soudain alors qu'une patrouille de garde tentait de se frayer un chemin dans la foule. Dans la confusion, un étalage de fruits fut renversé et son propriétaire se mit à maudire d'une voix forte la maladresse des soldats. Subitement, un silence de mort s'abattit sur les lieux : l'infortuné marchand venait d'être décapité pour son insolence. D'un commun accord, Sakura et Lee entrainèrent Temari à l'écart et les trois ninjas s'enfoncèrent discrètement dans une venelle déserte et malodorante. Dans la rue marchande, un couple n'avait rien perdu de la scène ou les deux shinobis avaient disparu.

"Intéressant." admit la femme, "Ils sont doués, il faut le reconnaître."

"Continue de les suivre." lui ordonna l'homme, "Je fonce à la prison prévenir la garde qu'ils ont deux visiteurs indésirables."

Les deux Exécuteurs de Jashin avaient immédiatement compris ce qui s'était passé et ils se séparèrent donc, il fallait réagir, et vite. La kunoichi de Konoha ne devait surtout pas parvenir à s'échapper, non seulement leurs vies en dépendaient, mais aussi leurs âmes. Le grand prêtre du Dieu à la Main Sanglante ne tolérait aucun échec, et il pouvait avoir la rancune tenace…



Au moment où Neji et Shikamaru lui portèrent le coup de grâce, le Pechdrazil s'évapora en poussant un couinement aigu, ne laissant aucune trace derrière lui à part une odeur d'ozone, âcre et métallique. Visiblement déçu par l'issu du combat, les esclaves emprisonnés se traînèrent lamentablement au fond de leurs cellules infectes où ils finirent par se calmer. Reprenant son souffle adossé contre le mur, Shikamaru essayait de chasser le mal de tête qui lui vrillait les tempe, l'attaque du Pechdrazil l'avait vraiment secoué et il lui avait fallu plusieurs longues minutes pour recouvrer suffisamment ses forces et aider son partenaire face à la créature de feu qui, naturellement dépourvue d'ombre, était insensible aux jutsus familiaux des Nara. Les deux ninjas remercièrent toutefois la providence que leur combat n'ait pas attiré l'attention d'une patrouille de gardes.

"Nous ne devrions pas nous attarder par ici." signala Neji, qui ne semblait pas du tout essoufflé par le combat qu'il venait de mener, "Il ne nous reste plus beaucoup de temps pour retrouver Tenten."

Le manipulateur d'ombre approuva et se redressa pour se mettre en route quand il se raidit soudain. Le Hyuuga haussa un sourcil en se demandant ce qui arrivait à son coéquipier qui se massait la joue, visiblement endolorie, quand il se raidit à son tour.

Dans les rues de la ville, leurs clones venaient de disparaître.

"Temari n'a pas fait dans la demi-mesure." souligna le ninja aux yeux d'ivoire en souriant.

"Cette fille a définitivement un caractère de chien." grommela Shikamaru. "C'est galère, notre ruse est éventée et l'endroit ne va pas tarder à grouiller de gardes… où pire encore. On ferait mieux de dégager d'ici au plus vite."

Un voile de déception passa sur le visage de Neji, qu'il atténua très vite.

"Ok." dit-il, "mais puisqu'on est là, on peut faire l'étage d'en dessous rapidement ? Je pense qu'on a encore quelques minutes avant qu'ils ne réalisent où nous sommes vraiment, et ça serait dommage d'être allé jusqu'ici pour rien."

"Mais ça serait encore plus dommage de se faire prendre ici." rectifia le manipulateur d'ombre qui n'avait pas envie de prendre des risques inconsidérés.

"Une «petite prise de risque»." marmonna Shikamaru pour lui-même en se rappelant cette mission galère où Asuma-Sensei avait failli frôler la mort.

"Que dis-tu ?" demanda le ninja aux yeux d'ivoire qui n'avait pas bien entendu.

"Rien, dépêchons-nous de trouver Tenten." répondit le manipulateur d'ombre en se dirigeant vers l'escalier abrupt. Neji lui emboîta le pas.


Cela remontait à pas si longtemps, juste après l'examen Chuunin, l'équipe d'Asuma-Sensei avait été envoyé en mission enquêter sur le vol d'une relique. Ils devaient découvrir ce qui s'était passé, retrouver l'objet en question et si possible appréhender le responsable. Menées par Shikamaru et son incroyable esprit de déduction, leurs investigations avaient rapidement mené vers un riche négociant d'import-export qui avait bien évidement tout nié dans un premier temps, mais les preuves étaient indiscutables et lorsque le marchand, visiblement peu impressionné par les ninjas de Konoha, ordonna à sa garde personnelle de le débarrasser de ces gêneurs, l'équipe n°10 compris qu'il n'était plus temps de discuter.

La plupart des adversaires n'étaient que valetaille qui ne posèrent pas vraiment de problèmes, mais Shikamaru remarqua que deux panneaux secret dissimulés dans les murs avaient coulissé de part et d'autre du bureau, deux Nukenins allaient se joindre à la fête et le manipulateur d'ombre senti l'étau de la peur se refermer sur lui lorsqu'il les vit tout les deux faire les signes d'une technique katon. Ce n’était pas l'élément le plus puissant, mais lorsque ces jutsus explosaient dans un espace confiné comme le bureau où ils se trouvaient, le katon pouvait s’avérer particulièrement dévastateur.

Shikamaru hurla pour prévenir ses compagnons du danger, il fallait qu'ils se replient avant d'être transformés en grillades. Le manipulateur d'ombre commençait à se diriger vers la porte quand il vit Asuma-Sensei se ruer vers l'un des Nukenins. Shikamaru lâcha un "Galère…" et bondit en avant, appelant Chôji à ses coté. C'était de la folie, seul et sans soutien, son Sensei allait faire une cible parfaite ! Les Nukenins utilisèrent la technique de la Balsamine et crachèrent leurs projectiles de flammes droit sur Asuma qui les chargeait. Le manipulateur d'ombre vit son Sensei grimacer de douleur lorsqu'une des langues de feu le toucha au niveau de l'épaule, mais ça ne l'arrêta pas et, poussant un terrible cri de guerre, le Juunin frappa son adversaire du poing en plein visage. Le chakra infusé dans son arme lui permit de réduire la tête du Nukenin en morceaux. Son camarade n'eut pas le loisir de venger sa mort, immobilisé par l'ombre de Shikamaru, il fut proprement aplati par les mains géantes de Chôji.

Alors que la poussière retombait, les membres de l'équipe n°10 observèrent le bureau dévasté dont les murs étaient striés de sang. Tout était calme. Tous étaient morts. Le marchand apeuré pleurnichait en se blottissant dans un coin de la pièce, ses manières hautaines avaient complètement disparu depuis que sa garde personnelle s'était faite massacrer et il tremblait de tous ses membres.

"Et bien, on dirait que la mission est terminée." s'exclama Asuma-Sensei en riant.

Le manipulateur d'ombre opina, un brin renfrogné.

"En effet, mais vous n'auriez pas dû charger bille en tête les deux Nukenins, Sensei." répondit-il.

"Peut-être." accorda Asuma en massant son épaule endolorie, "Mais je ne voulais pas perdre de temps."

"Votre témérité aurait pu vous coûter la vie, Sensei." répliqua Shikamaru "Nous aurions pu quitter la pièce pour les attirer à l'extérieur, ou leur techniques katon auraient été bien moins dangereuses qu'ici. Nous aurions dû…"

"Shikamaru !" l'interrompit le Sensei, "Tu sais que je te respecte et que, malgré ce qu’en pensent d’autres, toi y compris, je suis convaincu que tu deviendras bientôt un grand ninja. Mais tu dois accepter que tout ne se passe pas toujours comme prévu et qu’il est parfois nécessaire de faire les choses un peu… sauvagement." puis, s'adressant à toute l'équipe, "Oui, ces deux Nukenins n'étaient pas prévus et nous aurions dû battre en retraite pour jouer la carte de la sécurité mais regardez autour de vous. Nous avons démantelé une organisation criminelle et leur chef va être remis à la justice. Une telle récompense n’est-elle pas digne d’une petite prise de risque personnelle ?"

"Sauf votre respect Sensei, il me semble que charger à travers les projectiles enflammés de deux Balsamines n’est pas ce qu’on peut appeler une «petite prise de risque»." protesta le manipulateur d'ombre. Ino et Chôji approuvèrent.

Azuma sourit en s'allumant une cigarette :

"Certaines situations nécessitent de réaliser des actions en dépit du bon sens, un bon ninja doit aussi savoir prendre des risques. Un jour vous comprendrez ce que je veux dire."



Dans la cellule, Erwan avait porté Tenten sur sa paillasse pour l'y déposer délicatement. Il avait ensuite vérifié, sous couvert de l'habituel examen post-combat, que les organes de la kunoichi n'avait pas souffert de la potion de grifsan. Le med-nin connaissait fort bien la redoutable accoutumance que provoquait l'usage de cette drogue de combat et il fut soulagé de constater que la maître d'arme n'avait pas été intoxiquée. Pourtant, elle n'avait pas prononcé un mot depuis l'épisode du garde et évitait de regarder Erwan.

"Tenten ? Quelque chose ne va pas ?" finit-il par lui demander.

"Ce que j'ai fait dans l'arène…" murmura-t-elle dans un souffle.

"Tu parles du combat ? Je ne vois pas pourquoi ça te perturbe, je l'ai vu, c'était un très beau spectacle d'ailleurs." la félicita le med-nin.

"Comment peux-tu dire ça ?" se récria la kunoichi, "J'ai… J'ai massacré ces esclaves, et le pire c'est que j'ai adoré ça !"

"Bin, si ça peut te consoler, dis-toi que tu n'as fait qu'abréger leur souffrance en leur offrant une mort rapide." expliqua Erwan pour tenter de la réconforter, "Ceci dit, tu es une kunoichi, ça a déjà dû t'arriver de tuer des gens, non ?"

"Si, bien-sûr mais… Jamais comme ça ! Je ne suis pas une meurtrière, je n'ai rien à voir avec les sicaires1 qui vivent dans cette ville ! Comment ai-je pu faire ça ?"

Le med-nin fit semblant de réfléchir un instant, il avait prévu que la kunoichi se pose des questions, et avait en prévision préparé une réponse qu'il espérait assez convaincante :

"Je pense que tu es tombée sous l'influence meurtrière de Jashin." finit-il par dire le plus sérieusement du monde, "C'est en tout cas l'explication la plus logique à ce qui s'est passé."

Tenten le regarda comme si il avait abusé de boisson, essayant de savoir si il était sérieux ou si il blaguait. Constatant le manque flagrant de crédibilité de ce qu'il avait dit, l'Exécuteur se lança donc dans un discours décrivant la «vie» du Dieu à la Main Sanglante :

"Vois-tu, lorsque les premiers humains se mirent à parcourir les continents et qu'il rencontrèrent leurs semblables, les premiers mots qu’ils s’échangèrent ne furent ni paisibles ni amicaux, mais remplis haine et de malveillance. C'est là l'amère et tragique ironie de l'humanité : même dans un monde où il peut mourir à chaque instant, un monde où son seul allié est son frère, l'Homme porte la main sur son prochain aussi surement que sur ses ennemis. Jashin incarne cette nature sombre et paradoxale de l'Homme, il est l'incarnation de tous les meurtres gratuits et de toutes les atrocités qui entachent la longue et triste histoire de l'humanité."

Erwan lui avait récité ce qu'on apprenait aux jeunes enfants de Commoragh dans les cours de théologie : la «naissance» du Dieu à la Main Sanglante. Il enchaina sur le Credo que ses adeptes devaient suivre pour lui rendre hommage.

"Le plus grand désir de Jashin est de voir le mondé dévasté, les cités en proie aux flammes, les mers remplacées par des océans de sang et les terres transformées en déserts arides recouvert de monticules de cadavres empilés en son honneur. Il exige de ses serviteurs qu'ils versent le sang et tuent à la moindre occasion. La plupart de ses adeptes sont des ninjas, mais quiconque est prêt à tuer sans se soucier des conséquences peut entrer dans les bonnes grâces du Dieu à la Main Sanglante. Jashin parle à la partie sauvage et inhumaine qui réside en chacun de nous, ainsi un ninja emporté par la frénésie du combat pourra finir par entendre le chant de Jashin le bercer. Certains finissent par y succomber, comme toi tu l'as fait dans l'arène, et embrassent alors le chemin qui les mènera devant le trône du Dieu à la Main Sanglante, un monument à la gloire de la mort et de la douleur, construit sur des fondations de meurtres et de conflits."

"Cela veut dire que je suis… damnée ?" demanda anxieusement Tenten qui se voyait déjà rejoindre les rangs des tueurs psychotiques qui peuplaient Commoragh.

"Non, rassure-toi. La culpabilité que tu éprouves démontre que tu es encore maître de ton destin. En fait, ceux qui servent avec zèle le Dieu à la Main Sanglante finissent par perdre toute inhibition imposée par les codes moraux, laissant derrière eux des sentiments futiles comme le remord, la compassion ou l'empathie. Bientôt, les meurtres qui les faisaient autrefois frissonner deviennent banals et même les supplices les plus atroces perdent de leur attrait, ces disciples doivent donc chercher de nouvelles façons plus sadiques et dépravées de célébrer Jashin, jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'un besoin effréné et lancinant de se vautrer dans le sang."

La kunoichi ferma les yeux et resta silencieuse un moment. Erwan la laissa méditer sur qu'il lui avait dit, satisfait que son histoire ait pu permettre à la maître d'arme de donner une explication au soudain accès de rage qu'elle avait eu dans l'arène sans qu'il ait eu besoin de lui expliquer qu'il l'avait droguée à la potion de rage. Ceci dit, si l'histoire semblait si véridique, c'est parce qu'elle l'était, sauf sur un point : les gens ne devenaient pas adeptes de Jashin à l'insu de leur plein gré, ils savaient parfaitement ce qu'ils faisaient en s'offrant corps et âme au Dieu à la Main Sanglante. Ils savaient aussi ce qui les attendaient lorsqu'ils se présenteraient devant le trône d'airain de leur divinité… enfin… pour la plupart d'entre eux en tout cas…

Le med-nin cherchait une parole réconfortante à rajouter quand un bruit de pas se fit entendre dans le couloir, apparemment une patrouille arrivait pour faire sa ronde. Les deux gardes s'arrêtèrent devant la porte ouverte d'ou ils balayèrent l'intérieur de la cellule du regard, faisant des allers-retours entre Tenten et Erwan, puis se focalisant sur ce dernier, l'observant avec une prudente curiosité. La kunoichi réalisa qu'il se passait quelque chose d'anormal, ces gardes étaient, comment dire, nerveux, et il ne semblait pas reconnaître le med-nin qui s'était relevé pour venir se placer devant eux, un petit sourire amusé était apparu sur son visage.

L'un des gardes ouvrit la bouche pour parler, mais Erwan lui coupa la parole :

"La comédie a assez duré, ninjas de Konoha !"





[1] Terme littéraire ou historique pour désigner un tueur à gages. Il a également désigné les activistes juifs, les assassins pieux, dans l'antiquité hébraïque.




Voilà, j'espère être resté à la hauteur malgré cette période sans rien écrire. Il n'est pas dit que j'arrive à tenir le même rythme de parutions qu'avant, mais je vais essayer, promis !



Chapitres: 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 [ 12 ] 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 Chapitre Suivante »



Veuillez vous identifier ou vous inscrire:
Pseudo: Mot de Passe: