Visions d'un Dieu Endormi


Fanfiction Naruto écrite par Kris'ter (Recueil de Kris'ter)
Publiée le 27/06/2011 sur The Way Of Naruto



Et voilà, le dénouement, le chapitre final de la saga de Commoragh, avec ce qu'il faut de combat et un gros feu d'artifice à la fin ;)

Bonne lecture.



Chapitre 17: le Crépuscule du Maître (quatrième partie)



Shikamaru et Temari avançaient difficilement dans un escalier étroit et abrupt, faiblement éclairé par la lumière du feu à main que la blonde du désert, qui marchait en tête, avait craqué. Outre l'éclairage, le feu était également très utile pour brûler les toiles d'araignées qui pendaient du plafond en longues guirlandes. Le Nara marchait derrière Temari, le nez au niveau de son postérieur. Plongé dans ses pensées impudiques, il continua à monter sans réagir alors que la kunoichi s'était arrêtée net puisque l'escalier se terminait sur ce qui semblait être une impasse et lui rentra dedans.

"Excuse-moi, j'étais dans la lune." se justifia-t-il vaguement.

"Pas n'importe laquelle, je suppose." rétorqua la blonde du désert en grimaçant.

Shikamaru détourna les yeux, mal à l'aise. Satisfaite d'être parvenue à le troubler, Temari se retourna et se mit à examiner la paroi devant elle. Elle remarqua une étroite porte en bronze encastrée dans le mur qui n'avait, à première vue, pas de serrure ; mais le manipulateur d'ombre nota une pierre qui dépassait légèrement et il appuya dessus. Il y eut un faible déclic suivi d'un léger tremblement lorsque la porte s'ouvrit en pivotant lentement sur ses gonds. Après s'être assurés que la voie était libre, Shikamaru et Temari s'engagèrent rapidement dans l'ouverture et la porte se referma aussitôt derrière eux, aussi doucement qu'elle s'était ouverte.

D'instinct, ils réalisèrent qu'ils se trouvaient dans la partie haute du palais, surtout parce que les dalles de marbre blanc du sol avaient laissé la place à des plaques d'opale et de platine étincelantes. Le manipulateur d'ombre sortit le plan de la citadelle donné par Erwan et essaya de se localiser. Il finit par y parvenir, constatant avec joie que le passage secret que leur avait fait prendre les devins avait été un formidable raccourci. Ils prirent donc à gauche, en direction des luxueux appartements du Roi Hakkyou, mais durent stopper en arrivant près des cuisines car un contremaître à l'aspect cruel, armé d'un long fouet, montait la garde sous le porche. Il passait son temps à malmener les esclaves qui allaient et venaient autour de lui, les frappant de son fouet et les houspillant méchamment.

Aussi forte qu'en était leur envie, les deux ninjas jugèrent qu'il était trop dangereux de s'attaquer à lui et essayèrent de trouver un autre chemin. Heureusement, une occasion se présenta quand le contremaître se trouva un nouveau jouet - un malheureux esclave qui venait de renverser un panier de fruits - qu'il se mit à battre violemment et il leur fut donc possible de passer en courant, sans se faire remarquer.

La porte suivante donnait sur le Shokubutsuen, la Serre du Roi. Il s'agissait d'un espace parfaitement circulaire dont la voûte, semblable à celle d'une cathédrale, paraissait entièrement tapissée de velours vert. De la terre sombre qui recouvrait le sol s'élevaient des plantes exotiques de toutes les formes et de toutes les tailles, certaines communes, d'autres plus rares, et quelques-unes totalement inconnues. Les deux ninjas se faufilèrent discrètement le long d'une allée de gravier et tandis qu'ils longeaient le bord d'un petit lac aux eaux cristallines au centre duquel le jet d'une fontaine accrochait la lumière du soleil qui s'y réfractait en un arc en ciel aux couleurs éclatantes, ils se retrouvèrent en face d'un arbre gigantesque et magnifique.

Il avait la forme d'un chêne de plusieurs dizaines de mètres de haut. Des racines se tortillaient avant de s'enfoncer dans la terre, lui donnant un aspect solide et immuable. Des fruits semblables à des pommes pendaient aux branches, ils étaient gros et appétissants, gorgés de vie, les deux ninjas avaient l'impression qu'ils n'avaient qu'à tendre la main pour en attraper un et croquer dedans à pleine dents. Les fleurs de cet arbre étaient étrangement belles et ressemblaient beaucoup à des lys aux pétales écarlates dont le parfum à l'arôme enivrant et agréable embaumait le Shokubutsuen. Tout ceci, combiné à la musique du vent qui jouait dans ses branches et son feuillage protecteur, semblait inviter les deux ninjas à faire une halte pour s'adosser contre son écorce rugueuse pour s'endormir côte-à-côte en oubliant le monde derrière eux.

Ce fut Temari qui se rendit compte que quelque chose n'allait pas. Se rappelant les dernières paroles du devin Vai'Gar à propos du danger de ce qui était vert, elle brisa l'illusion et la réalité qui lui apparut dans toute son horreur fut un terrible choc pour elle ! L'arbre, si magnifique il y avait un instant, révélait sa forme indescriptible et son essence corrompue, des visages déformés étaient apparus sur son écorce sombre, des centaines de visages, aussi détaillés qu'horribles à voir. Les fruits si appétissants il y a peu étaient désormais aussi difformes que l'arbre, leur peau noire, tavelée, tendue à craquer, laissait suinter une mixture de sang et d'ichors noirâtres et huileux. Les fleurs aussi avaient changé, leurs pétales étaient devenus rouge sang, striés de filaments noirs, elles dégageaient un parfum piquant, assez semblable à celui du jasmin auquel se mêlait la senteur du cuivre oxydé et du sang fraîchement versé. Les cadavres de ceux qui s'étaient laissé prendre au piège étaient au pied de l'arbre. Rendus épais par la pourriture, ils étaient devenus une terre grasse et riche dont se nourrissait la plante monstrueuse. Transpercés par les racines, les morts avaient bougé une dernière fois.

La Blonde du désert se tourna vers Shikamaru, pensant que lui aussi était parvenu à déjouer l'illusion de l'arbre maléfique. Malheureusement, elle se rendit immédiatement compte que ce n'était pas du tout le cas. Son visage semblait transfiguré, ses lèvres étaient légèrement ouvertes et ses yeux contemplaient l'arbre devant lui. Il commença à murmurer des mots que Temari eut tout d'abord du mal à entendre.

"Douce chaleur." marmonnait-il. "Intense lumière. Immense beauté. Douce chaleur. Intense lumière. Immense beauté." et il continuait le même credo d'une manière ininterrompue.

La kunoichi considéra rapidement les options s'offrant à elle pour réveiller le manipulateur d'ombre, et choisit la méthode la plus direct : elle lui colla une baffe monumentale qui le fit basculer en arrière et lui remit les idées en place. Shikamaru cligna des yeux et se redressa, il grimaça un "Galère…" en portant sa main à sa joue endolorie sur laquelle perlaient quelques gouttes de sang. Temari avait en effet infusé un peu de son chakra dans sa gifle, ce qui donnait l'impression au manipulateur d'ombre d'avoir été frappé avec une râpe à fromage.

Libérés de l'illusion, ils n'étaient cependant pas encore sortis d'affaire car soudain, comme si l'arbre avait compris que ces proies allaient s'échapper, un enchevêtrement de lianes tomba de la cime de l'arbre en s'agitant convulsivement vers les deux ninjas. Grâce à l'acuité de leurs sens, le couple réussit à éviter les vrilles en effectuant un roulé boulé sur le sol spongieux du Shokubutsuen. La vivacité de leurs réflexes leur permis d'échapper à la première attaque mais une autre masse végétale s'abattit près d'eux et les vrilles s'agitèrent en tout sens pour essayer de les localiser. D'autres commencèrent également à sortir du sol et l'une d'elle s'enroula autour du pied de Shikamaru. Les autres se mirent immédiatement à ramper dans la même direction. Le manipulateur trancha rapidement la liane avec un kunai et la blonde du désert décrocha son éventail pour lancer une Lame de Vent qui tailla furieusement la masse de tentacules frémissants. Un flot d'humeur visqueuse jaillit de chaque vrille tranchée et un grondement de douleur sourd remonta du cœur de l'arbre.

Les lianes indemnes continuaient de chercher les deux ninjas à tâtons, cette fois cependant elles n'étaient plus souples et élastiques mais dures et hérissées de pointes, comme du fil de fer barbelé. Elles se dressaient vers les gorges du couple qui s'écarta vivement pour échapper aux vrilles rampantes avant de s'élancer aussi vite que leurs jambes le leurs permettaient vers la sortie. Hélas, à peine avaient-ils fait quelque pas qu'un tentacule lacéra la jambe de Temari. Elle tomba à genoux en poussant un hurlement de douleur, mais trouva la force de se relever prestement pour fuir avant de recevoir de nouvelles blessures. Les deux ninjas sortirent du Shokubutsuen sans se retourner, ne s'arrêtant pour reprendre leur souffle que quand ils furent certains d'être hors de danger.

Ils étaient arrivés dans la Salle des Trophées, où régnait un inquiétant silence. Cette grande salle constituait à la fois une remarquable collection de pièces inestimables ainsi qu'un véritable florilège de fautes de goût : d'immenses idoles primitives à l'attitude menaçante ramenées du Pays de la Terre côtoyaient de somptueuses tapisseries volées dans les temples baroques du Pays de la Foudre, des calligraphies soigneusement enluminées dérobées dans les sanctuaires du Pays du Feu se trouvaient aux cotés de tatouages tribaux grossiers récupérés sur des ninjas du Pays de l'Eau écorchés vifs.

Il y avait aussi une étrange collection de têtes empaillées qui bordait les murs de cet endroit très secret. La plupart d'entre elles étaient celles de créatures monstrueuses du désert, souvenirs de chasses royales dans les canyons de Bran-Ô-Kor. Mais, beaucoup plus terrifiant que ces trophées de chasse, au milieu des têtes d'animaux, se trouvaient des têtes humaines ! Témoins macabres des victoires du Roi Hakkyou, c'étaient les têtes des chefs ennemis tués au combat lors des innombrables batailles menées par Commoragh.

Shikamaru remarqua alors que la blonde du désert tremblait. Il mit tout d'abord ça sur le compte de ce qui venait de se passer, mais elle avait l'air fébrile. Il lui demanda si tout allait bien, et elle lui répondit par la négative : sa cuisse - blessée par la liane barbelée - la lançait douloureusement. Temari sentait qu'il se passait quelque chose d'anormal. La blessure était loin d'être bénigne, certes, mais elle en avait déjà subi des plus graves. Les deux furent soudain saisis d'une indicible angoisse lorsqu'ils réalisèrent ce qui arrivait à la blonde du désert. Les épines de la vrille étaient très certainement empoisonnées et le sang de Temari charriait déjà des toxines parmi les plus dangereuses ! Ses muscles commencèrent à trembler douloureusement et elle s'effondra comme une masse.

Shikamaru s'élança vers elle. La kunoichi tremblait de la tête aux pieds, saisie par un froid glacial. Dans un brouillard, elle vit le manipulateur d'ombre sortir de sa sacoche un objet rond et vert avant de sombrer dans une miséricordieuse inconscience.



Au même moment, au Pays du Feu, l’Administrateur de Kogane, Mahiro Maeda, observait du haut du balcon de son palais le pilori monté dans la cour sur lequel était attaché son premier secrétaire, Shintaro Ishihara. Il resserra sa fourrure de renard argenté autour de lui, saisi malgré lui d'un frisson qui n'avait rien à voir avec la température tandis qu'on entassait des fagots de bois au pied du pilori. L'homme qui avait été son premier secrétaire - et son ami - était vêtu de haillons crasseux, déchirés, maculés de sang. Il était brisé, pitoyable, et n’avait plus rien à voir avec le fringant jeune homme qu'il avait été avant l'arrivée des ninjas.

À côté de l’Administrateur se tenait stoïquement Ibiki Morino qui observait la scène avec un froid détachement, aucune émotion n'apparaissait sur son visage dur couturé de cicatrices. Quelques pas derrière lui se tenait Kariya Kagetoki, le deuxième ninja de l'équipe, un homme musculeux à l'allure redoutable et intimidante. Azusa Nakano, la kunoichi du groupe, attendait devant le pilori, afin de prévenir toute tentative de fuite du condamné à mort, bien qu'elle doute que cela soit possible avec les ligaments des jambes sectionnés. La quatrième membre du groupe, qui en était aussi la med-nin attitrée, n'était pas ici mais l’Administrateur était trop occupé pour se demander où celle-ci pouvait bien être. Dans quelques heures, le groupe de ninjas allait rentrer chez lui avec la satisfaction d'avoir mené sa mission à bien et son village allait enfin retrouver sa quiétude routinière, et lui son train de vie habituel.

Kogane était un village fortifié d'une importance stratégique, placé au milieu de montagnes fort riches en minerais, dont les fonderies qui fonctionnaient jour et nuit crachaient une fumée sombre et polluée qui plongeait la cité dans un brouillard permanent. Aucune personne saine d'esprit ne venait à Kogane volontairement, on y était envoyé. C'était un village d'exilés, de prisonniers, de criminels et d'agitateurs politiques ; la caste dirigeante faisait régner l'ordre par la terreur et toute manifestation pour changer le statut quo était sauvagement réprimée dans la violence.

Malgré tout, Kogane était la principale source d'approvisionnement du Pays du Feu en fer, en cuivre, en zinc en nickel et en or et de fait, le village était souvent attaqué par des bandits désireux de faire main basse sur les trésors que ces entrepôts détenaient. Mais récemment, le nombre d'attaques réussies avaient augmenté dans d'effarantes proportions, obligeant le Daimyo du Pays du Feu à diligenter une équipe de ninjas de Konoha pour enquêter sur place.

Ibiki Morino était l'ANBU tout désigné pour ce genre de travail, lui et son équipe avaient passé une semaine entière à fouiner partout, attaquant les caches de bandits, remontant toujours plus loin au fur et à mesure que leurs investigations et les interrogatoires les rapprochaient de l'homme à la tête de l'organisation : Shintaro Ishihara lui-même. Comprenant ce qu'il risquait, le premier secrétaire avait cherché à fuir mais le présumé coupable s'était rapidement fait rattraper et ramené devant Iibki qui l'accusa d'entrave au bon fonctionnement d'une enquête, de vol avec circonstance aggravante, de dégradation de matériel, d'homicide volontaire avec préméditation, de rébellion et d'association de malfaiteurs. L'homme avait été jugé et condamné dans les plus brefs délais. Toute défense était superflue en de telles circonstances, personne ne pouvant plaider non-coupable devant l'ANBU. Celui-ci considérait de toute façon que cela entraînait la perte de son temps comme chef d’accusation supplémentaire.

La foule s'était entassée devant les grilles du palais, Ibiki Morino avait en effet décidé que la mort du traître devait être un exemple pour tous ceux qui voudraient tenter de répandre l'anarchie. Les actions du premier secrétaire le rendaient également directement ou indirectement responsable de la mort d'un grand nombre de villageois, aussi ceux-ci étaient-ils impatients de voir leur bourreau payer ses méfaits de sa vie. Azusa Nakano s'approcha du pilori et annonça d'une voix forte :

"Ishihara Shintaro. Suite à vos actions infamantes pour lesquelles vous avez été jugé, vous avez été reconnu coupable de tous les chefs d'accusation. Comme la loi l'exige, vous serez mis à mort par la flamme et ainsi rendu à l'Esprit du Feu afin qu'il vous apporte la rédemption dans la mort, vous qui n’avez engendré que la corruption durant votre vie. Néanmoins, si vous le souhaitez, vous pouvez vous confesser et implorer notre clémence afin d’obtenir une mort rapide et honorable par ma lame."

C'était là le discours d'usage. Azusa laissa s'écouler les 66 secondes règlementaires, bien qu'elle doute qu'Ishihara puisse se confesser, même s’il le voulait, étant donné qu'il avait été bâillonné. Lorsque le temps fut écoulé, elle invoqua une Boule de Feu Suprême pour immoler Shintaro et ainsi le laver de sa corruption.

"Par tous les Dieux, qui aurait pu croire cela." souffla l’Administrateur, "Ishihara. Un traître."

Ibiki ne répondit pas. Il observait le feu réduire le premier secrétaire à l'état de carcasse carbonisée. La lueur des flammes se reflétait dans les cheveux argentés d'Azusa qui ondulaient sous les vagues de chaleur, sa tunique était maculée du sang des hommes de main que Shintaro leur avait envoyé pour les retarder. Son katana dégoulinait du même liquide carmin. Ibiki l'avait vu venir à bout de dizaines de gardes d'élites, son agilité et son adresse ne leur avait laissé aucune chance.

Lorsque le feu commença à s'éteindre, elle se retourna pour bondir le balcon, elle s’avança alors vers Ibiki, Kariya et l’Administrateur, et s’arrêta devant les trois hommes.

"Il est mort." déclara-t-elle simplement.

"Parfait." acquiesça l'ANBU.

"Oui, parfait." renchérit Mahiro Maeda, "Toute trace de cette trahison a désormais disparu."

Ibiki Morino secoua la tête et soupira en regardant Azusa.

"Pas encore, car quand la corruption touche le pouvoir, c’est bien souvent grâce à la négligence de certains hommes."

L'ANBU se tourna lentement vers Mahiro Maeda tandis que Kariya Kagetoki s’avançait derrière l’Administrateur. Celui-ci se raidit en comprenant ce qu'Ibiki voulait dire.

"Non !" supplia-t-il. "Je suis un loyal serviteur du Daimyo ! Je ne suis pas un traître !"

Le Jounin saisit l’Administrateur en pleurs par les bras et le traîna au travers de la salle du trône, jusqu'à une lourde porte aux décorations baroques qui était entrouverte et laissait apercevoir un chevalet d’où pendaient de grosses chaînes. La med-nin du groupe attendait à côté, occupée à aligner sur une table des lames toutes plus aiguës les unes que les autres.

"Je suis innocent…" sanglota l’Administrateur en voyant cela.

"Qu’en savez vous ?" répondit Ibiki Morino en refermant la porte derrière lui.



Quinze minutes s'étaient écoulées depuis que la blonde du désert s'était effondrée dans la Salle des Trophées quand Shikamaru constata avec soulagement que Temari revenait enfin à elle : son pouls s'accéléra pour revenir à un rythme normal et quelques gouttes de sueur perlèrent à son front. Elle reprenait lentement conscience, émergeant d'un sommeil qui eût pu durer éternellement et se redressa péniblement. Elle vit que sa cuisse était enroulée dans un bandage de fortune et remarqua aussi un étrange goût sucré dans sa bouche. Le manipulateur d'ombre lui expliqua rapidement qu'il avait utilisé un «remède familial» pour la soigner, sans pouvoir donner plus de détail car Temari vit aussi qu'il y avait une deuxième personne penchée sur elle, une femme d'une vingtaine d'années, plutôt mignonne, et complètement nue !

Le Nara intervint rapidement pour faire les présentations : elle s'appelait Mio Akiyama, c'était une des concubines du Roi Hakkyou et elle avait surpris le manipulateur d'ombre alors qu'il était occupé à tenter désespérément de sauver le vie de Temari.

"Une concubine, mmmh ?" répéta la blonde du désert en plissant les yeux, "Ce qui explique sûrement qu'elle n'ait pas de vêtements."

Le ton employé par Temari n'échappa pas à Mio qui s'empressa de répliquer :

"Exact, le Roi Hakkyou estime que les habits sont superflus pour des filles comme nous." La concubine se redressa en mettant les mains derrière sa nuque, bien cambrée, affichant un bon 90D encore ferme, "Qui plus est, moi j'ai des trucs à mettre en avant… pas comme certaines…"

Shikamaru - qui devait faire de gros efforts pour ne pas laisser son attention être monopolisée par la poitrine généreuse que la concubine exhibait sans aucune gêne - eut tout juste le temps de bloquer avec son ombre la blonde du désert qui s'était levée d'un bond avec l'intention de se jeter sur Mio et lui faire ravaler ses paroles.

"Bon, les filles-galères, si on pouvait arrêter ici les échanges d'amabilités, ça serait sympa car je rappelle qu'on a une Wyvern à emprunter."

"Exact." approuva la concubine, "Suivez-moi."

Les deux ninjas emboîtèrent le pas à Mio qui se dirigea vers la sortie de la Salle des Trophées. En chemin Temari se rapprocha du Nara et lui demanda discrètement :

"Pourquoi elle sait pour la Wyvern ?"

"Parce que je lui ai dit." avoua Shikamaru en détournant le regard.

"Comment ça «tu lui as dit» ?" gronda la kunoichi en fronçant les sourcils.

"Bin, on a un peu discuté en attendant que tu te réveilles." avoua le manipulateur d'ombre, "On avait pas grand chose d'autre à faire de toute façon."

"Ah ouais, je vois !" s'offusqua la blonde du désert, "Elle s'est tripoté les seins devant toi et t'a ensuite tranquillement tiré les vers du nez !"

"Mais qu'est-ce que tu vas imaginer ?" protesta le ninja qui avait du mal à croire ce qu'il venait d'entendre.

"Jalouse ?" demanda la concubine qui avait suivi toute la conversation.

Temari piqua un fard et démentit énergiquement. Mio sourit et lui expliqua que l'idole devant laquelle la kunoichi s'était évanouie avait été saisie en même temps qu'elle lors d'un raid de pillards sur son village, la concubine se tenait souvent devant elle afin de se rappeler qu'elle avait eu une vie avant tout ça. Apparemment le Dynaste responsable de l'attaque avait besoin de cadeaux et d'esclaves à offrir au Roi Hakkyou pour tenter d'apaiser la colère de celui-ci à son encontre. Lorsque le maitre de la cité avait vu Mio, il lui laissa le choix : soit devenir sa concubine, soit finir sa vie à trimer dans les mines de fer.

"Depuis je suis l'un des jouets sexuels du Roi Hakkyou." expliqua-t-elle, "C'était il y a un an, et je peux vous assurer qu'il m'est arrivé plus d'une fois de me dire que j'avais fait le mauvais choix."

La blonde du désert commença à regretter ses paroles un peu hâtives à l'encontre de cette femme qui était obligée d'offrir son corps à un monstre juste dans l'espoir de rester en vie un jour de plus. Trop d'hommes ne considéraient les femmes que comme des objets de décoration tout juste bonnes à être utilisées pour combler un besoin que tous les pouvoirs avaient échoué à satisfaire. Le groupe arriva devant un couloir étroit éclairé par des torches qui ne produisaient aucunes fumées, disposées à intervalles réguliers sur les murs.

"Les autres concubines sont dans les pièces de part et d'autre du couloir." chuchota Mio.

"Mais il y a combien de filles ici ?" s'inquiéta le manipulateur d'ombre.

"Trente-sept." répondit la Akiyama, "Mais vous inquiétez pas, vous n'aurez pas à vous soucier de les sauver, la plupart d'entre elles se soumettent et coopèrent, cherchant à séduire le Roi Hakkyou pour «l'attendrir»."

"Et pour celles qui refusent de coopérer ?" demanda Temari.

"Simple, il les gave de suc de fleurs de Karmo."

"La drogue du violeur…" murmura le manipulateur d'ombre en frissonnant.

Les Karmos étaient des fleurs d’un jaune vif dont on pouvait presser les bourgeons pour en extraire une - voire deux - goutte de suc qui, une fois ingérée, induisait une levée des inhibitions suivie d'une entrée dans un état passif, voire soumis, de la victime. L'agresseur pouvait ensuite faire ce qu'il voulait sans que la fille - qui restait consciente de ce qui lui arrivait - ne puisse y faire quoi que ce soit. Une utilisation fréquente ou à haute dose entraînait une forte dépendance et transformait de manière permanente la victime en une sorte poupée vivante dénuée de toute volonté. Les Karmos étaient heureusement très rares, et surtout impossible à cultiver en dehors de leur habitat naturel.

Les deux ninjas réalisèrent que si le Roi Hakkyou possédait auparavant auprès d'eux une certaine aura de prestige - même s’il était un mégalomane paranoïaque et un boucher sanguinaire - il avait désormais perdu toute classe en se comportant finalement comme un membre de cette élite bourgeoise reconnue pour ses célébrations fastueuses et son style de vie décadent. L'argent et le pouvoir étaient-ils donc capables de corrompre tous les hommes quel que soit leurs fonctions et leurs ambitions ? Shikamaru laissa de côté cette question philosophique pour le moment et se mit à réfléchir aux options pour avancer. Lui et la blonde du désert pouvaient faire irruption dans les chambres et tuer les concubines les unes après les autres, mais le fracas des combats allait sans doute donner l'alerte. D'un autre côté, les portes étaient fermées et il n'y avait pas de fenêtre, ils pouvaient donc tenter de passer sans se faire remarquer.

"Déplaçons-nous discrètement." finit-il par dire, "Si nous pouvons éviter de nous battre, nous pourrons atteindre la chambre du roi rapidement."

Mio et Temari hochèrent la tête avant que le groupe ne se mit à avancer de nouveau, cherchant à éviter le plus possible de faire du bruit. C'était plutôt facile puisque l'entrainement des ninjas leurs permettaient de se déplacer aussi silencieusement que des ombres et ils réussirent à passer d'un couloir à l'autre sans attirer l'attention. Le suivant était à la perpendiculaire au précèdent et Shikamaru pu voir à son extrémité les lourdes portes en améthyste qui donnaient sur les appartements du roi qu'ils cherchaient à atteindre.

Alors qu'ils y étaient presque, la porte à droite de Shikamaru s'ouvrit subitement et le manipulateur d'ombre se trouva face à face avec une concubine dotée d'un bandeau noir sur l'œil et le corps percé de très nombreux piercings - dont certains à des endroits que les deux ninjas n'auraient jamais jugés envisageables. Elle resta un instant à le fixer, surprise, son cerveau prenant un moment pour analyser le message que son œil unique lui envoyait.

Ce moment fut suffisant pour le Nara. Il fonça comme une flèche pour planter son kunai dans la gorge de la concubine qui se raidit d’un seul coup, les yeux écarquillés, rendue muette par l’incompréhension - et la lame qui lui avait sectionné les cordes vocales. Elle toussa. Quelques gouttes de sang s’envolèrent de sa bouche comme elle tombait à genoux, retenue par Shikamaru qui la déposa au sol en silence. Mio s'était recroquevillée contre la porte en améthyste alors que les deux ninjas s'étaient mis en position de combat, tous les sens en alerte, jetant nerveusement des regards en direction des portes de part et d'autre du couloir. Par chance, aucune ne s'ouvrit : soit la concubine était morte suffisamment silencieusement pour que les autres n'aient rien entendu, soit le bruit n'avait pas été suffisant pour les pousser à aller voir ce qu'il se passait.

Une fois qu'ils furent sûrs que personne n'allait bouger, ils expirèrent lentement et le manipulateur d'ombre traîna le cadavre de la concubine dans sa chambre pour y dissimuler le corps. Il rejoignit ensuite Temari et Mio qui se trouvaient dans la luxueuse chambre du roi. De l'autre côté, sur l'immense balcon, ils trouvèrent la Wyvern, la monture personnelle du Roi Hakkyou, perchée sur ses pattes arrières, accoudée sur ses pattes avant qui faisaient aussi office d'ailes, elle était en train de dévorer la carcasse d'un cheval dans un concert de craquement d'os et de viande déchirée.

"Elle est énorme." murmura Shikamaru. Il y avait de toute évidence assez de place pour transporter facilement tout le groupe sur son dos.

"Peut-être que le Roi Hakkyou a quelque chose à compenser…" insinua la blonde du désert.

"Non…" répondit Mio en grimaçant, "Pas vraiment…"

Les deux ninjas touchaient enfin au but, mais il restait un dernier problème : le garde-palefrenier qui était accoudé sur le parapet, contemplant d'un air absent la ville en contrebas. Mais l'éliminer risquait d'être compliqué car la plate-forme où se trouvaient la Wyvern et le balcon étaient reliés par une passerelle exposée à la vue de tous. Il allait falloir agir avec autant de rapidité que de discernement si le groupe voulait s'emparer du monstre et s'enfuir de Commoragh. Heureusement, Shikamaru avait déjà un plan.


• Que l'âme du Capitaine aille à Jashin ! • pensa rageusement le garde-palefrenier en jetant un bref coup d'œil à la Wyvern.

Il eut un peu de réconfort à l'idée de défoncer le crâne de son supérieur à coup de botte. Il avait suffi d'un rien pour que son Capitaine l'envoie ici alors qu'il était auparavant un gardien de prison heureux. Être affecté ici était une punition, tout le monde le savait. À part faire monter les repas du monstre avec le palan spécialement prévu pour ensuite nettoyer ses immondes déjections, il n'y avait strictement rien d'autre à faire ici et même les esprits les plus endurcis finissaient par déprimer.

Bon d'accord, il avait été incapable d'assurer la relève après avoir picolé toute la nuit, mais ce n'était pas comme s’ils gardaient là-bas des prisonniers super dangereux. Il avait juste eu du mal à se réveiller après une bonne cuite et ne s'était pas présenté en temps et en heure. Ça lui était déjà arrivé par le passé et il n'avait jamais eu de problème jusque là. Il avait suffit qu'on le chope ivre-mort au moment où le Roi Hakkyou demandait un «volontaire» pour remplacer le précédent garde-palefrenier qui avait eu la mauvaise idée de s'endormir et était devenu une source de protéines pour la Wyvern.

Il maudit une fois de plus son manque de chance et donna libre court à son imagination pour trouver de nouvelles façons d'exploser la tête de son Capitaine.

Le plus pénible était en fait de côtoyer les concubines et de ne pas pouvoir y toucher. Ces espèces de bonnasses ne manquaient pas une occasion de l'aguicher, mais se laisser tenter était la dernière chose à faire. Un de ses prédécesseurs s'était fait prendre et avait dû en conséquence manger ses propres organes reproducteurs. Enfin, au moins il y avait les concubines shootées à la fleur de Karmo, sur celles-là au moins il pouvait se soulager sans qu'elles aillent tout raconter, ce qui rendait son calvaire un peu plus supportable.

Il attrapa son arme et fit quelques passes pour abattre des adversaires imaginaires. Après avoir facilement gagné le combat, il se félicita lui-même quand une voix enivrée l'interpella :

"Heeey… Toi… J'ai été une vilaine fille… Il faut me puniiir…"

Le garde-palefrenier ne reconnut pas immédiatement la jeune concubine qui se malaxait un sein et se caressait l'entrejambe, appuyée au montant de la porte qui donnait sur le balcon, mais vu son état elle devait être sous l'influence. C'était inespéré ! Il n'hésita pas un instant :

"Tu veux être punie hein ? Je vais te punir moi, salope !"

"Oooh oui, viens…" s'exclama lascivement Mio en reculant dans la chambre, "Viens me donner ce que je mérite…"

"Tu vas voir ce que je vais te donner, moi." dit le garde-palefrenier, courant presque sur la passerelle.

Mais à peine était-il entré dans la chambre qu'il se retrouva incapable de bouger : une espèce… d'ombre l'avait paralysé ! Il leva les yeux vers la concubine qui lui adressa un sourire moqueur en lui faisant un petit geste d'adieu de la main.

"Mais qu'est-ce que…" furent les seuls mots qu’il parvint à prononcer avant qu'une blonde ne lui tranche la gorge d'une oreille à l'autre.


"Voilà qui est fait." approuva le manipulateur d'ombre en se redressant.

"T'as vraiment des idées de pervers." le réprimanda Temari, "Il n'empêche que je suis surprise que ça ait aussi bien marché."

"S’il y a bien une chose que j'ai apprise ici," expliqua Mio en défaisant le grand lit, déchirant les draps pour s'en faire une sorte de toge, "C'est que les Hommes pensent d'abord et avant tout avec leur bite. Il a cru qu'il allait pouvoir me baiser et que j'allais me laisser gentiment faire, il a donc foncé sans réfléchir."

"J'ai vu ça." marmonna la blonde du désert tandis que Shikamaru sortait de sa sacoche une petite radio et un puissant émetteur.

Il tourna la manette sur la console en face de lui et commença à balayer les canaux. Il n'y eut aucun résultat au début et le Nara commença à craindre d'être définitivement trop loin pour capter quoi que ce soit. Il continua à ajuster les fréquences, atteignant les plus hautes de ces dernières et se mit même à penser qu'Erwan n'avait en fait jamais eu l'intention de les aider quand il capta enfin le signal émis par celui-ci. Il poussa un soupir de soulagement en poussant le bouton émission.

"Ombre Un à Ombre Sanglante, est-ce que vous me recevez ?"

La radio grésilla l'espace d'un instant, puis une voix lointaine se fit entendre :

"Je vous reçois faiblement mais clairement Ombre Un. Êtes-vous arrivé au sommet de la citadelle ?"

"Ouais, ça a été un peu galère mais on y est." confirma le manipulateur d'ombre, "Comment ça se passe pour les autres ?"

"Tout est en place, vous pouvez venir chercher le colis quand vous voulez."

"Ok, on arrive. Terminé." Shikamaru coupa la radio avant de se retourner vers Temari et Mio - qui était enfin dans une tenue plus décente, "Allez les filles, on s'arrache."

Le groupe avança vers la Wyvern qui fit battre ses puissantes ailes membraneuses en poussant des rugissements rauques. Ses yeux jaunes, reptiliens et cruels fixaient le manipulateur d'ombre qui s'approchait avec circonspection de la dangereuse créature, les yeux fixés sur la selle, craignant à tout instant qu'elle ne le tranche en deux d'un coup de sa mâchoire dont les dents acérées étaient crénelées comme des couteaux à viande. Shikamaru essaya de monter sur la selle en s'accrochant au pommeau mais la Wyvern ne semblait pas vouloir l'entendre de cette oreille et, vive comme l'éclair, elle se retourna contre le Nara qui bondit en arrière, échappant de justesse à la morsure fatale.

Temari soupira, faisant remarquer au manipulateur d'ombre que le maître de cette créature était une brute, donc il ne fallait pas essayer de l'approcher prudemment. Pour prouver sa théorie, la kunoichi avança à son tour vers la Wyvern et s'arrêta devant elle dans une posture de défi, les yeux dans les yeux, les mains sur les hanches. Le monstre rugit de fureur mais la blonde du désert ne bougea pas d'un pouce et la créature finit par se soumettre. Le loup venait de se changer en agneau et la Wyvern baissa la tête avec docilité pour laisser Temari s'installer sur la selle rembourrée et pourvue d'un haut dossier.

"Elle en a dans le pantalon, ta copine." lança Mio en passant a côté de Shikamaru sur un ton légèrement sarcastique.

Le Nara grimaça en grommelant un "Filles galères…", car bien qu'il lui en coûta de l'admettre en prenant place à son tour sur le dos de la Wyvern, il devait bien reconnaître qu'elle avait raison. D'une légère traction sur les rênes incrustées de joyaux, la blonde du désert fit décoller la créature qui prit son envol sans effort, battant des ailes dans un bruit de tonnerre, piquant droit sur l'arène en contrebas.



Quelques minutes plus tôt, loin au-dessus des gradins, assis à l’ombre d’une des immenses statues grimaçantes qui ornaient le pourtour du stade, Erwan observait à l’aide de jumelles le combat entre Tenten et Karn'Aj, et il fallait reconnaitre que la kunoichi se débrouillait sacrément bien. Elle avait bien été en mauvaise posture quatre ou cinq fois, mais dans l'absolu, c'était elle qui dominait. Mais pour combien de temps encore ? Un combat contre le champion de l'arène n'avait jamais duré aussi longtemps, or plus le temps passait, plus Karn'Aj devenait furieux.

Et plus il était furieux, plus il devenait fort.

Irrité par son bras mort qui cognait, inutile, contre son flan, le champion de l'arène se l'était tout simplement arraché et s'en servait désormais comme d'une massue. Une gigantesque et horrible massue de chair et de muscle. Il avait déjà perdu des litres de sang, mais ne semblait pourtant pas souffrir d'anémie. Karn'Aj pouvait-il seulement être tué ?

Un des grands charognards qui peuplaient le ciel de Commoragh se posa à coté d'Erwan qui dégaina immédiatement un kunai avec l'intention d'embrocher le volatile, mais l'oiseau disparut dans un nuage de fumée, laissant la place à Sakura et le med-nin se détendit en baissant la main. Sans préambule, il lui demanda si tout s'était bien passé. La Rose répondit par l'affirmative en tapotant sa sacoche, préférant éviter de donner des détails quant à la destruction quasi-complète de l'Azukarijo. Sakura reporta son attention sur le combat entre Tenten et Karn'aj tandis qu'Erwan lui indiqua que Lee et Neji l'avaient contacté il y a peu pour le prévenir qu'eux aussi avaient réussi leur mission. Ils n'allaient donc surement pas tarder à les rejoindre.

"Et pour Temari et Shikamaru ?" demanda la Rose.

"Aucune nouvelle pour le moment, mais je ne m'inquiète pas. La forteresse est immense, ça va leur prendre du temps pour…"

Il s'interrompit lorsque le ninja aux yeux d'ivoire arriva à son tour au sommet du colisée, transportant un Lee en piteux état qui eu tout de même la force de prendre la pose de Nice Guy © en grimaçant un sourire. En bons med-nin, Sakura et Erwan se précipitèrent vers lui et ils eurent tôt fait de le remettre sur pieds. Alors que le Fauve de Jade esquissait quelques mouvements hésitants pour éprouver ses membres fraîchement guéris, Erwan demanda ce qui avait bien pu le mettre dans un état pareil.

Sakura ne sut que répondre. Elle avait rapidement compris - pour avoir déjà vu Lee avec de telles blessures - qu'il avait ouvert les Portes Célestes et utilisé le Lotus Verso, ce qui voulait également dire qu'ils avaient dû rencontrer une opposition sérieuse, le Fauve de Jade n'était pas du genre à utiliser cette technique aux effets dévastateurs à tort et à travers. Ce fut Neji qui répondit laconiquement :

"On a rencontré une grosse bestiole qui avait très envie de nous transformer en sashimi.1"

Erwan voulut demander des détails quand la radio posée à côté de lui grésilla et une voix lointaine se fit entendre :

"Ombre Un à Ombre Sanglante, est-ce que vous me recevez ?"

Malgré les parasites, la Rose reconnut sans difficultés la voix de Shikamaru. Erwan attrapa le communicateur et appuya sur le bouton émission :

"Je vous reçois faiblement mais clairement Ombre Un. Êtes-vous arrivés au sommet de la citadelle ?"

"Ouais, ça a été un peu galère mais on y est." confirma le manipulateur d'ombre, "Comment ça se passe pour les autres ?"

"Tout est en place, vous pouvez venir chercher le colis quand vous voulez."

"Ok, on arrive. Terminé."

Le med-nin se tourna vers Sakura, affichant une mine satisfaite :

"Il semblerait que votre évac' soit en route." affirma-t-il en rangeant prestement la radio, apparemment désireux de partir d'ici au plus vite.

La Rose pouvait le comprendre, la bombe n'allait pas tarder à exploser ici - du moins, le croyait-il - et il valait mieux qu'il mette un maximum de distance entre lui et l'arène. Il souhaita bonne chance aux ninjas de Konoha et disparu en un instant. Sakura sortit un petit miroir de sa sacoche, il était temps de prévenir Tenten qu'elle devait en finir avec ce combat.



En plein combat, Tenten fut ébloui un instant par un reflet venant du haut des gradins. Elle comprit immédiatement que c'était le signal de ses coéquipiers : Shikamaru et Temari allaient bientôt arriver pour la faire sortir de là, il fallait donc qu'elle se débarrasse du gros monstre pour qu'elle puisse tuer le Roi Hakkyou. Malheureusement, la maitre d'arme avait perdu sa concentration pendant quelques secondes et ce laps de temps fut suffisant pour que Karn'Aj arrive à lui envoyer son genou dans l'estomac. La kunoichi se plia en deux tandis que ses poumons se vidaient, et le champion de l'arène enchaîna avec un mouvement de taille de la gauche vers la droite avec son énorme bras-massue.

Il n'y avait aucun moyen d'éviter le coup. À la place, Tenten bondit sur le côté et rentra la tête dans ses épaules.

La force déployée était étourdissante, la percutant comme un taureau en charge et lui déboitant l'épaule malgré ses efforts pour absorber au maximum l'impact. Elle vola sur une dizaine de mètres et atterrit durement sur le sol sablonneux où elle glissa sur six bon mètres supplémentaire. Luttant pour refluer la souffrance atroce, elle frappa vigoureusement son épaule sur le sol pour la remettre en place, sans retenir un hurlement de douleur. Elle jura et se releva, cherchant à dissiper un étourdissement momentané. Elle venait de prendre un sale coup, mais au moins elle était pile au bon endroit : à une dizaine de mètre de la tribune officielle, là où se trouvait sa cible.

La kunoichi se retourna juste à temps pour voir Karn'Aj se ruer sur elle pour l'hallali, son œil valide brûlant de la soif de tuer. C'était le moment où jamais. Elle lâcha une poignée de fumigènes autour d'elle qui l'enveloppèrent rapidement dans un nuage de brume. Le champion de l'arène ne s'en soucia guère, il se précipita sur le rideau de fumée sans réaliser qu'il courrait vers sa perte. Tenten tourbillonna autour de Karn'Aj comme de l'eau autour d'un rocher, tranchant et perçant au niveau des artères et des organes vitaux avec les Lames Jumelles d'Oomizu qu'elle avait invoquée et auxquelles rien ne pouvait résister.

Lorsque le champion de l'arène émergea du nuage de fumée - à peine un instant après y être entré, il ne fit qu'une dizaine de pas avant que son corps ne finisse par réaliser qu'il était mort et il s'effondra dans un râle. Dans les gradins, un silence de mort s'était abattu. Personne ne pouvait y croire, et surtout pas le Roi Hakyou qui, dans son incrédulité, s'était penché en avant pour voir de ses propres yeux le corps sans vie de Karn'Aj qui gisait - immobile - dans une mare son propre sang, sans réaliser qu'il commettait là l'erreur qui allait lui couter la vie.

Dans le nuage de fumée dont les trainés grises commençaient déjà à se dissiper, Tenten focalisa son attention sur sa cible, et plus particulièrement sur son visage, le seul point vulnérable de son armure. Elle expira lentement, bloqua sa respiration et se prépara à faire feu.

Son champ de perception se résuma soudain à la trajectoire de son tir et elle appuya sur la gâchette de son arbalète.

Le maître de Commoragh eut-il le temps de comprendre qu'on lui présentait la note pour toutes les horreurs qu'il avait commises tout au long de sa vie ? Réalisa-t-il que Jashin venait réclamer l'âme qui lui avait été promise il y a bien longtemps ? Seul lui-même ne le saura jamais, car une brève explosion écarlate engloutit les sens du Roi Hakkyou et il sombra dans le néant. La pointe d'acier du carreau de Tenten venait de pénétrer par son œil gauche pour traverser son cerveau de part en part, l'envoyant rejoindre ses ancêtres sans même lui laisser le temps de souffrir.

La fumée se dissipa totalement, laissant apparaitre la kunoichi victorieuse et les gradins explosèrent d'une joie féroce d'avoir pu assister à un combat aussi spectaculaire. Toutefois, les vrais gagnants de l'histoire furent les bookmaker : l'inattendu triomphe de Tenten venait de faire d'eux des hommes riches car la vaste majorité des spectateurs avaient pariés sur la victoire de Karn'Aj. Une bagarre éclata dans le public lorsqu'un homme se fit prendre en train de faire les poches de son voisin. Il advint que lui et un certain nombre de ses «collègues» avaient profité du fait que les spectateurs furent trop absorbés par le combat qui était en train de se dérouler sous leurs yeux pour les délester de leurs biens.

La bagarre dégénéra rapidement en une émeute qui gagna tout le colisée et personne ne remarqua les 3 ninjas qui profitèrent de la confusion pour descendre rejoindre la maître d'arme. De la même façon, peu de personnes notèrent l'immense Wyvern qui se posa au milieu de l'arène. Tenten, Lee, Neji et Sakura sautèrent immédiatement en croupe et Temari tira sur les rênes de la créature qui décolla en poussant un rugissement rauque avant de s'envoler à tire d'aile vers Suna sans que personne ne songe même à l'arrêter.

Le groupe passa au dessus des murailles à bonne hauteur et abandonna avec joie la terrifiante cité du meurtre derrière eux. Alors qu'ils survolaient les canyons de Bran-Ô-Kor depuis 5 minutes, un flash blanc éclaira le ciel au moment ou la bombe explosa…



Dans sa cache secrète au dessus des égouts, le Grand Prêtre de Jashin lisait et relisait les différents rapports que ses Exécuteurs lui avaient apportés, cherchant à y discerner un lien ou une logique. Des gardes avaient été retrouvés morts dans le temple, la nature de leurs blessures laissait supposer qu'ils avaient été tués par des ninjas spécialistes en Taijutsu. Des ninjas avaient également été signalés dans la forteresse, ils s'étaient fait repérer par une patrouille de Gardes Noirs mais avait réussi à leur fausser compagnie et étaient depuis introuvables. Le dernier rapport faisait état de la destruction quasi-complète de l'Azukarijo, des Exécuteurs qui avaient réussi à s'en sortir vivants avait mentionné la présence d'une kunoichi de Konoha aux cheveux roses.

Qu'est-ce que tout cela pouvait bien signifier ?

"Seigneur. Les ninjas de Konoha se sont enfuis avec la Wyvern du Roi." annonça un nouvel Exécuteur venant d'arriver.

Le Grand Prêtre de Jashin releva le nez de ses rapports et ses yeux se plissèrent. Enfuis ? Cela expliquait bien de choses, mais son vieil «ami» ne devait pas être ravi de voir sa petite bestiole préférée partir de la sorte. Il devait déjà avoir quitté l'arène en furie, mais tout n'était peut être pas perdu. Après tout, la bombe était suffisamment puissante pour le tuer s’il n'était pas encore trop loin.

Un Exécuteur fit son entrée dans la pièce, visiblement essoufflé et annonça sans même reprendre son souffle :

"Seigneur ! Le Roi Hakkyou est mort !"

"Parfait !" s'exclama le Grand Prêtre de Jashin avec un grand sourire, qui s'effaça aussitôt, "Mais comment ? La bombe n'a pas encore explosé."

"Justement Seigneur." répondit le nouvel arrivant, la bombe alchimique n'est pas dans l'arène, le Roi Hakkyou est mort d'un carreau d'arbalète en pleine tête. Personne ne sait comment les ninjas de Konoha ont réussi à passer son champ de force."

La paranoïa accompagnait le Grand Prêtre de Jashin depuis si longtemps qu'il demeura un instant à envisager toutes les possibilités, toutes plus catastrophiques les unes que les autres, de sorte qu'il fut envahi d'un mauvais pressentiment. Le sol se mit à trembler et un bruit d'explosion se réverbéra le long des tunnels. Des morceaux de plafond et de la poussière tombèrent sur le groupe et le Grand Prêtre de Jashin se protégea la tête du bras. Ça ne pouvait qu'être la bombe qui venait d'exploser, mais il pensait pourtant être suffisamment loin de l'arène. Où donc les ninjas de Konoha avaient-ils bien pu la mettre alors ?

La mâchoire inférieure du Grand Prêtre se relâcha lorsqu'il réalisa…



Dans la crypte sous le temple, Caduceia était en train d'escalader avec difficulté le mur abrupt vers la sortie. Elle avait réussi, grâce à son indomptable volonté, à résister aux âmes tourmentées et à s'extraire du Lac de Sang, bien que l'effort l'ait laissée à bout de force. Elle jura qu'elle allait retrouver ces deux ninjas et leur briserait tout les os du corps un par un avant de leur arracher le cœur à la petite cuillère2. Une intuition la fit se retourner vers l'autel et son regard se posa sur la bombe.

"Non…" murmura-t-elle.

Les deux bonbonnes de fluides commencèrent à se mélanger. Le temps sembla se ralentir pour la commandante des armées qui observait, trop faible pour faire quoi que ce soit pour l'empêcher. Puis la triple sécurité du liquide déclencheur se souleva et la réaction alchimique se déclencha.

Le temple tout entier fut secoué…

Les gardes au dessus perdirent l'équilibre…

L'énergie de la bombe entra en résonance avec les milliards d'âmes prisonnières du Lac de Sang aux pieds du Dieu Endormi, chacune d'elle y ajoutant le poids de sa haine et de sa souffrance…

Il n'y eut pas une seconde pour se demander se qui se passait. Pas une seconde pour courir, ou même jurer…

Un feu blanc enveloppa tout et réduisit le rêve d'un homme en cendre…



La bombe avait explosé tel un soleil avec un résultat dévastateur dans la crypte sous le Temple de Jashin qui fut littéralement vaporisé par cette puissance phénoménale alors qu'une lumière aveuglante en jaillissait telle une fontaine, couchant tout sur un rayon de huit cent mètres et creusant un cratère de pas moins de deux cent mètres de profondeur. Le tonnerre de la détonation fut si tonitruant qu'on aurait dit qu'un Dieu courroucé avait frappé la ville de son marteau. Au dessus de ce qui fut le temple s'élevait un champignon de plus de mille mètres de haut. Le cratère s'était étendu à une vitesse terrifiante, engloutissant des quartiers entiers de la ville dans son sein enflammé.

Les murs de la citadelle toute proche se fissurèrent avant d'exploser sous une pression qu'ils n'étaient pas destinés à endurer et la haute forteresse si arrogante s'effondra sur elle-même. L'onde de choc expédia des morceaux de murs gros comme des bateaux à travers les airs comme de vulgaires cailloux, précédant une gigantesque avalanche de rochers, de gravats, de poussières et de fumée qui se déversa sur la partie occidentale de la ville en produisant un grondement apocalyptique. Les rues furent enfouies sous le flot de pierre, enterrées à jamais sous des tonnes de débris et dans l'affaire, plusieurs milliers de personnes perdirent la vie.

Des centaines d'explosions secondaires retentirent lorsque des débris enflammés percutèrent les silos à grains, embrasant les poussières volatiles qui s'y trouvaient. Au passage, d'innombrables maisons prirent également feu et l'anarchie se répandit comme une traînée de poudre alors que les habitants tentaient d'éteindre les incendies, mais à l'image de fourmis tentant de combattre un feu de forêt, ils étaient impuissants : rien ne pouvait empêcher les flammes voraces et la destruction de se répandre.

Le nombre de morts avait presque atteint les trente mille lorsque les derniers échos de l'explosion moururent et que la lumière aveuglante commença à s'éteindre. De Commoragh, il ne restait que les remparts qui entouraient les ruines de ce qui avait été une ville.

En un seul jour, une équipe de cinq genins et un Chuunin venait de réussir par la ruse là ou trois armées de ninjas différentes avaient échouées par la force.

Ils venaient de mettre l'arrogante citée du meurtre à genoux.



[1] Mets traditionnels de la gastronomie japonaise composés de tranches de poisson cru.
[2] Parce que moins c'est tranchant, plus ça fait mal.



Alors ? "Tout ça pour ça" ? ou "Spectaculaire" ?

En tout cas c'est loin d'être terminé…