Fiction: Môjin (terminée)

Version imprimable




Une gifle réveilla rudement l'adolescent, jeté contre le sol glacé d'une caverne. Devant lui, sept shinobis de Kumo, debout, le visage dissimulé par la violente lumière de l'extérieur qui l'éblouissait, le toisaient de toute leur hauteur.
“Les infos.”, demanda sèchement l'un des plus petits, à peine plus grand que lui. Par expérience, cependant, il savait que c'était de lui qu'il devait se méfier le plus : un petit chien était toujours bien plus tenace et hargneux qu'un gros...

-------------------------------------

Attaché par une corde grossière à un anneau de métal qui pendait au mur, Tonbo ferma les yeux, et remua la tête, niant.
“Ourgh !”
Un premier coup l'atteignit à l'estomac, faisant remonter son déjeuner, auquel était désormais mêlé un goût de sang chaud.
“Les infos.”, répéta sobrement celui qui semblait en toute définitive être le chef.
Tonbo ouvrit la bouche, et feignit d'être aphone. Peut-être sa simulation lui ferait-elle gagner le temps dont il avait besoin...
“Il est muet.”, siffla l'un des combattants, retenant à grand'peine un geste de franche colère.
-Muet ?”, ironisa l'un des shinobis, une femme en vérité. “Non, je ne crois pas... C'est l'excuse la plus fréquente, et c'est toujours ainsi que commencent les interrogatoires...
-Alors peut-être sauras-tu le faire parler ?”, reprit le nain.
-Bien sûr...”, sourit-elle étrangement.

-------------------------------------

Elle s'agenouilla devant le prisonnier, qui se débattait contre ses liens, et sa main se posa avec douceur sur sa joue. Tonbo tourna un regard vindicatif vers elle, et la détailla attentivement. Son visage, d'une extraordinaire finesse, était surmonté d'un bandeau sale et abîmé par de nombreux combats. Ses longs cheveux noirs, parfaitement entretenus malgré, vu l'état de son habit, la longueur de leur mission, reflétaient doucement les rayons solaires.
“Tu ne devrais pas t'agiter...”, sourit-elle doucement.
Une intense douleur monta du bras de Tonbo, alors que, vive comme l'éclair, son interlocutrice l'attrapait et, d'un mouvement sec, le brisait en deux.
Le hurlement qu'il tenta de retenir franchit ses cordes vocales, puis ses lèvres et rebondit sur les parois de la grotte, alors que ses larmes se mêlaient au sang qui coulait de la plaie.
“GWAAAAAAAAH !
-Et bien voilà, il n'est pas muet.”
Il hurla longtemps, sa position le faisant d'autant plus souffrir que le bras qu'elle venait de briser était son bras d'appui. Ses yeux se révulsèrent, alors qu'il manquait s'évanouir sous la douleur, mais une autre gifle violente l'empêcha de sombrer.
“N'en profite pas.”, prévint le nain.
Tonbo tenta vainement de se redresser, au moins pour soulager son bras cassé, mais, comble de malchance, le sol était recouvert d'une sorte de mousse grisâtre, saturée d'humidité, et ses sandales glissèrent, ne trouvant aucune accroche stable, déclenchant une nouvelle vague de souffrance, de nouveaux cris, et de nouvelles larmes.
“Alors...”, s'agenouilla le nain. “Semble-tu disposé à nous donner les infos que vous deviez remettre à cette équipe de Juunins ?
-Non.”
La réponse sèche s'accompagna d'un violent coup de tête, envoyant le bourreau au sol, arrachant un autre gémissement de douleur à l'attaché.
“Tsss...”, siffla le nain en se relevant, alors que les coups de pied pleuvaient sur le prisonnier, visant la fracture douloureuse, “Espèce de larve...”
D'un geste, il ôta les gants qui dissimulaient ses mains.
“Takaya...”, commença la jeune femme, son visage prenant une teinte plus pâle alors que le nain s'avançait vers le prisonnier. “Je peux m'en charger...
-Pas question.”, siffla le bourreau en s'approchant. “Ce gamin m'a humilié, il va payer le prix fort.
-Takaya !”, lança un autre. “Inutile de l'abîmer ! Un Genjutsu suffira !”
Tous les shinobis présents semblaient vouloir l'empêcher de l'approcher, semblant terrorisés par l'hypothétique utilisation d'un jutsu de toute évidence particulièrement redoutable. Le bourreau siffla en voyant les visages qui lui faisaient face, à la fois effrayés et déterminés...
“Faites donc votre Genjutsu.”, cracha-t-il en se détournant.

-------------------------------------

Un soupir de soulagement parcourut la troupe de shinobis, et l'un d'entre eux s'approcha du prisonnier. S'agenouillant devant lui, il joignit les mains et composa à une vitesse faramineuse, avant de murmurer le nom de la technique, fixant Tonbo au fin fond de ses prunelles.
Rien ne se passa.
“Hideki...”, demanda un shinobi. “Tu as terminé ?
-Oui.”, anonça le nommé en se relevant, “mais je ne ressens pas l'influence du jutsu. Il a avorté.”
Le ninja jeta un regard mauvais à l'adolescent, scrutant son visage...
“Ses pupilles l'ont protégé.”
Tonbo ne put empêcher une expression de surprise de naître sur son visage : ainsi donc, son regard, non content d'être perçant, s'avérait un tant soit peu efficace contre le Genjutsu ? Jamais sa famille ne lui avait parlé d'un tel attribut...
Le nain se tourna brusquement, un sourire torve sur les lèvres.
“Ses yeux, dis-tu ? Retenez-le.”

-------------------------------------

Tonbo ressentit une vive douleur, alors que ses bourreaux attrapaient, l'un ses pieds, l'autre sa main valide, un troisième retenait le bras cassé, et un dernier glissait ses doigts dans ses cheveux et les agrippant violemment, le poussant à pencher la tête en arrière dans un cri de douleur.
Ses pupilles se rétrécirent violemment lorsqu'il vit le nain s'approcher, tenant un kunaï.
“NON !”, hurla-t-il en se débattant avec désespoir, devinant ce qui allait suivre. “NOON !”
Mais celui qui retenait sa tête le secoua violemment, tirant sur ses cheveux, et un autre frappa sa fracture, lui arrachant un cri de souffrance. Chacun resserra sa prise, lui interdisant tout mouvement, et il vit avec horreur la pointe d'acier s'approcher de son visage.
“Dommage.”, soupira la shinobi qui lui avait brisé le bras. “Il avait vraiment de très jolies prunelles...”
Et la lame s'enfonça dans son oeil droit.

-------------------------------------

La douleur qui suivit était indescriptible : remontant tout le long du nerf optique, élançant son cerveau, il sentait le sang, les larmes et le vitré de son oeil qui coulaient à flot sur sa joue.
“Au second.”, grogna le nain. “Je déteste les borgnes.”
Faisant preuve d'un sadisme digne des plus grands bourreaux, il pointa sa dague sur le dernier globe oculaire, attendant patiemment que l'adolescent rouvre l'oeil... Et ne se mette à pleurer de frayeur et de désespoir devant sa cécité prochaine.
“Parfait.”, sourit-il en enfonçant la dague une seconde fois.
Tonbo, encore sous l'emprise de la première douleur, en sentit une plus vive encore remplir son oeil gauche, alors que les ténèbres remplissaient sa vue à tout jamais.
“Lâchez-le.”
Les mains quittèrent leurs prises, et il se débattit violemment, contre son invisible douleur, contre le sel de ses larmes qui brûlait ses yeux, contre sa fracture, qui crissait dans un bruit horrible à chaque fois qu'il esquissait un mouvement.
“Donne-moi la boîte blanche...”, entendit-il vaguement, alors que ses hurlements de douleur résonnaient contre les parois de la caverne.
Il sentit une main griffue s'enfonçer dans ses cheveux, et agripper violemment son crâne.
“Donne les infos.”, commença la voix du nain. “Et on te tuera rapidement.”
Mais lui se contentait d'exhumer sa souffrance.
“Attends un peu, Takaya. D'ici dix minutes, tu pourras l'interroger.”, continua la voix féminine.
En effet, pendant un certain temps encore, il continua à se débattre, s'infligeant ses propres douleurs en pleurant, en bougeant. Plus que tout, il se maudissait de n'avoir pas été assez attentif lors de l'observation de l'avant-poste : s'il avait un tant soit peu prêté attention... Un tout petit peu... Ses yeux ne seraient pas morts... Il verrait encore...
Ses hoquets et spasmes se calmèrent, alors que la douleur lancinante se logeait dans un coin de son cerveau, battant à ses tempes, mais lui rendant contact avec le réel, et sa périlleuse situation dans la grotte.

-------------------------------------

Une nouvelle fois, il se sentit agrippé par les cheveux, sa tête fut violemment rejetée en arrière...
“Je ne vais pas me répéter dix mille fois. Les infos.”
Il avait eu raison de penser que les petits chiens étaient tenaces... A bout de forces, il baissa les épaules, résigné : ces gens lui avaient ôté son bien le plus cher, ce regard dont il était si fier... Plus jamais il ne pourrait être shinobi après cette torture. Un shinobi aveugle, quelle utilité ? Il se prépara à avouer qu'ils s'étaient trompé de cible : lui ne possédait aucune information. Mais soudain, l'image de son équipe lui revint en mémoire. Iwashi, Anko, et Tsukiyo-senseï. Si il avouait, car il allait finir par avouer au vu du traitement que lui faisait subir son bourreau, qu'Anko portait le rouleau, ces gens allaient le tuer, abandonner ici son cadavre inerte, puis repartir à la recherche du document. Il vit ses amis et son professeur combattre contre sept Juunins... Dont sans doute plusieurs de rang Spécial... Il les vit se faire tuer, le rouleau passer aux mains de l'ennemi... Et Konoha... Le village en danger après le cuisant échec de leur mission... Toutes ces visions d'horreur lui arrachèrent un gémissement, qu'il parvint à transformer en réponse :
-N... non...”
Un silence glacial remplit la grotte, à peine troublé par les gouttes d'eau suintant du plafond, s'écrasant dans un petit «Ploc !» sonore sur le sol saturé d'humidité.
“Très bien. Ouvre-moi ça.”
Il entendit quelque chose se dévisser, puis un crissement de mauvais augure... Avant qu'une cuisante douleur ne remplisse à nouveau ses yeux.
“GWAAAAAAAAH !
-Le sel sur les plaies, ça fait mal, n'est-ce pas ?”, ricana le nain en étalant violemment le cristal blanc dans les mares rouges et transparentes qui occupaient désormait la place des yeux de Tonbo. La victime hurla fort, longtemps, tentant dérisoirement de chasser le sel en agitant la tête, mais, une fois dissous dans son sang, le désinfectant ne pouvait plus être enlevé...
“Les infos.
-N...nn...”
Cette fois ci, le boureau n'attendit même plus la fin de la phrase, et gifla violemment sa victime, faisant couler le sang au coin de ses lèvres.
“Espèce de...
-TAKAYA !”
C'était la voix de l'un des shinobis de Kumo... Terrorisée. Tonbo devina que le nain avait de nouveau ôté ses gants, hypothèse qui se confirma lorsqu'il sentit une paume chaude se poser sur son front, et non l'habituel contact avec les mailles fines et régulières du tissu de ses gants.
“RAITON !”
Ce fut pire que tout. Une violente décharge électrique vola sur son crâne, pénétrant les os de la voûte, filant vers les centre de la douleur... Il sentit à peine les doigts de son ennemi appuyer légèrement sur son front, alors qu'une insupportable souffrance emplissait ses jambes. Touchés par un arc électrique, ses cheveux s'enflammèrent, et c'est sans aucun doute ce qui le sauva : craignant d'être brûlé, le nain recula vivement, stoppant le jutsu... Mais la kératine de ses cheveux, enflammée, colla sur sa peau, laissant d'horribles traces, et lui infligeant une douleur sans limite.
Cependant, au beau milieu de toute sa douleur, il entendit une lueur d'espérance.
“TONBO !
-SENSEEEEEEEI !”
Son appel monta, supporté par son cri de souffrance...
“TONBO !”
Des pas claquant dans les flaques d'eau... Ils l'avaient retrouvé !

-------------------------------------

“Tue-le !”, siffla le nain. “Tout de suite !”
Pourtant, aucune nouvelle douleur ne vint s'ajouter à celles qu'il supportait déjà.
“Ugh...
-Tonbo !”
Une voix alarmée, terrorisée...
“I... I...washi...”, parvint-il à articuler en reconnaissant.
-Tsukiyo-senseï !”, cria la voix d'Anko. “Il est... Il est là ! Tonbo... Mais... qu...qu'est-ce qu'ils t'ont fait subir ?
-Quelle horreur...”, murmura une voix masculine qu'il peina à identifier.
-Ya...manaka-san...”
Le prisonnier sentit qu'une lame tranchait ses liens, et il s'effondra dans des bras qui le soulevèrent, le portèrent avec douceur...
“Pauvre gamin...”
Akimichi Chôza.
“Bande de lâches...”, entendit-il siffler près de lui, et il reconnut la voix du troisième membre de l'équipe, Nara Shikaku. “Vous mettre à sept contre un adolescent... Maintenant, à votre tour d'être torturés... Mais vous avez de la chance, je suis bien plus généreux que vous... je ne vous ferais pas souffrir longtemps... Kage Nui !”
Quelques borborygmes lui parvinrent, alors qu'il pressentait la mort de ses bourreaux. Un soupir de soulagement monta près de lui, avant qu'il ne sente une paume fraîche contre sa joue :
“Tonbo...”
C'était la voix tremblante de leur instructrice.
“Tes yeux... Ton visage... Ils t'ont massacré...
-J... Je...
-Tais-toi...”, lui ordonna-t-elle. “Nous rentrons à Konoha, tu seras soigné, tu nous diras tout là-bas...”
Cependant, il tenait à insister. C'était important... Vital.
“J... Je... n...n'ai... rien... dit...”, murmura-t-il à grand'peine, le sang coulant dans sa gorge.
Ce fut la dernière chose qu'il parvint à faire.

-------------------------------------



Merci beaucoup à tous pour vos commentaires sympathiques ^.^ J'espère continuer à vous satisfaire... Encore, encore et encore !
N'hésitez pas à laisser un commentaire, cela m'encourage et me fait extrêmement plaisir !

Veuillez vous identifier ou vous inscrire:
Pseudo: Mot de Passe: