Fiction: Ces quelques mots... (terminée)

Un Sasuke vieilli et au seuil de la mort décide d'écrire à ses anciens amis...
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Sharingan66 (Masculin), le 05/10/2006
Il s'agit d'un One-Shot où Sasuke revient sur sa vie passée et les erreurs qu'il a pu commettre.



Chapitre 1: Ces quelques mots...



Combien de temps me reste-t-il à vivre ? Si je devais me fier à la mine du médecin, son visage renfrogné, ses propos évasifs, son regard fuyant, à peine quelques mois, sans doute moins. Comme il est horrible de vieillir, de sentir ce corps devenir un étranger vous dictant votre conduite, vous infligeant les pires souffrances, vous contraignant dans le moindre de vos déplacements. Je ne parviens même plus à uriner sans sentir cette horrible douleur me déchirant les entrailles. Un rideau noir tombe devant moi, ma tête tourne, le vide s’installe. J’aimerai que ce médecin me dise franchement la vérité, qu’il me réponde sincèrement, qu’à chaque question directe il n’entre pas dans des circonvolutions sans queue ni tête.
Pourquoi ai-je pris la plume ce soir ? Pourquoi ce sentiment irrépressible que je devais vous écrire pour être pardonné, que vous me compreniez ? Lorsque je contemple ma vie au seuil de la mort, les images de mon enfance, de mon adolescence, sont celles qui me reviennent avec le plus de force, avec le plus de netteté. Ces moments passés à vos côtés sans y être vraiment, l’esprit toujours ailleurs, tourné vers un autre objectif. Etrangement en m’interrogeant sur ces années, j’en viens presque à me demander si je fus moi-même l’auteur de ces actes, si je fus réellement cet adolescent imbu de lui-même et prétentieux. Je dois le reconnaître, si une affection légère à votre égard m’étreignait à cette époque, vos sentiments à mon encontre me laissait parfaitement indifférent. J’avais un but dans la vie et vous n’apparteniez pas à cette vie.
Je ne sais même plus pourquoi je ne t’ai pas tué Naruto. Par affection ? Par pitié ? Pour échapper à mon frère ? Ces questions posées derrière le voile obscure de ma conscience, ces mots écrits sur le papier, faiblement éclairés par la flamme de ma bougie, ne trouveront sans doute pas de réponses ce soir, mais elles méritent d’être posées.
De toute évidence, je ne méritais pas cette amitié que vous m’offriez sans ambages. Je ne pouvais supporter ces mains tendus, ces regards complices, je m’enfermais petit à petit dans cette haine, seule planche de salut pour l’enfant que j’étais. Je ne pouvais accepter la compromission, les rigolades alors que quelques années plus tôt ma famille mourait. Cela n’était pas envisageable, vous n’avez pas cherché à comprendre. Naruto tu n’as pas eu de famille, j’en ai eu une, et la voir reposer dans des mares écarlates est un sentiment qui vous poursuit sans cesse, qui vous poursuit dans chacun de vos rêves, au moindre de vos pas. Vous sentez derrière vous l’aura de vos parents, à chaque goutte de sang vous revoyez le carnage de cette nuit. Combien de fois ai-je pleuré en silence le soir ? Mes larmes auraient pu former une rivière mais honteux je les écrasais d’un revers de la main et en moi se bâtissait une forteresse autour de mon cœur pour que ces sentiments ne m’assaillent plus.
Sakura, Naruto, vous auriez pu la briser mais je suis resté seul pendant trop de temps et pas assez avec vous pour que les fissures, les brèches, les entailles que vous êtes parvenues à créer ne dissipent cette brume macabre autour de mon âme. Ces années passées à vos côtés furent sans doute les plus belles avec celles de ma petite enfance. Sur le dos de mon frère je partais m’entraîner, ma mère me souriait tendrement, je guettais un geste affectueux de mon père derrière ce visage sévère. Aujourd’hui cette muraille n’existe plus, la mort éveille en moi une force bienveillante où la vie m’apparaît comme merveilleusement belle. La senteur des fleurs, le chant des oiseaux, les enfants de mon village jouant au ballon ou dans les rizières avec la force de leur innocence.
Pourquoi avons-nous été embrigadés si jeune ? Pourquoi n’avons-nous pas eu d’enfance ? Pourquoi notre seule jeunesse fut celle du sang, des larmes et des armes ? Ces questions m’assaillent lorsque je contemple les mines radieuses de ces gamins près de chez moi. Mon frère n’était qu’un enfant lorsque l’on en a fait un soldat d’élite, une machine de guerre. Ils l’ont tué. Ce sont eux les vrais coupables, ceux qui ont entraîné mon frère, ceux qui l’ont débarrassé de tous sentiments humains, oui ! Ceux qui l’ont armé sont les vrais coupables. J’ai mis du temps à le comprendre, trop de temps. Et je n’ai même pas pu le sauver, ni même le tuer.
Te souviens-tu de son cadavre au pied d’un arbre ? Que mon frère paraissait beau dans la mort ! Immobile, figure impassible, beauté immortelle et éphémère ! Je n’ai même pas pu accomplir ma vengeance. Ce qui m’avait guidé durant toutes ces années était réduit à néant en quelques instants. Comment aurais-je pu accepter cette main tendue ? T’es-tu mis à ma place à cet instant là ? As-tu songé à ta réaction si je t’avais empêché d’être Hokage à vie ! Si j’avais brisé ton rêve en mille morceaux ? Alors certes tu n’es pas son meurtrier, mais qu’importe ! Tu n’avais pas le droit de venir vers moi avec ce sourire en m’affirmant que tout est fini, que l’on pouvait repartir comme avant.
En ce jour plus qu’un autre j’ai haï ma condition de ninja, j’ai haï ce monde où ma place n’était plus. Le seul but que je n’avais jamais eu venait de s’effondrer, je n’étais plus qu’un pantin désarticulé, sans ficelles.
Paradoxalement en voyant le corps de mon frère étendu, j’ai réalisé à quel point ma haine était de l’amour. Combien je l’avais détesté pour avoir trop aimé ce modèle de perfection. De ma plus tendre enfance, j’ai toujours voulu lui ressembler, devenir aussi fort que lui, lui montrer que je n’étais pas que le petit frère maladroit qu’il croyait avoir. Lorsqu’il me portait sur ses épaules, un monde s’éveillait et s’illuminait en moi. Je sentais son corps contre le mien, l’affection d’un frère pour son cadet. Aujourd’hui avec le temps, le recul, je suis persuadé qu’il m’aimait lui aussi. Peut-être que le lustre des souvenirs embellit ces moments mais au fond de moi, je sens qu’Itachi me portait en haute estime, qu’au sein de son cœur refroidit par les meurtrissures de la vie, une place m’était réservée.
L’amour et la haine sont trop proches pour que ma haine à son encontre ne soit pas de l’amour à mon égard. Pourtant il a tué notre clan, notre famille. J’avais sept ou huit ans, je ne pouvais comprendre ce geste.
Des années passées loin de ce monde, j’ai réalisé à quel point nous ne pouvions continuer d’exister, nous membres du clan Uchiha. Notre volonté de garder notre sang pur, nous poussait à une déchéance proche et inéluctable. Itachi les a tués pour les sauver, pour que les Uchiha parviennent au sommet de leur art avec comme derniers représentant voués à s’entretuer, lui et moi. Un combat fratricide, un Remus et Romulus au pays des Shinobi. Une apothéose finale pour une famille de consanguins vouée à la folie, à la dégénérescence ! Cela n’était pas envisageable, il fallait partir en beauté, notre mort commune dans ce combat devait être notre destin. Mais une brindille s’est immiscée, la machine s’est grippée et mon frère fut tué. Je devais donc être l’ultime survivant. Quel poids pour moi, le dernier représentant d’une famille disparue du temps de sa splendeur. La vie de shinobi n’était plus compatible avec mes aspirations, de plus ne pouvant revenir à Konoha, ni retourner chez Orochimaru qui tôt ou tard aurait pris possession de mon corps, je devais partir, loin, très loin de ce monde, me retirer, prendre ma retraite, voir d’autres choses, découvrir un autre univers, un univers où le sang ne coule pas à flot.
Ce que j’aime au sein de cette demeure est le silence qui y règne la nuit venue. Un calme sans pareil, une tranquillité apaisante, loin du fracas des armes, des nuits sur le qui vive.
Durant les cinquante années qui suivirent, j’ai parcouru l’ensemble de notre monde, regardant la diversité humaine, à la recherche de nouvelles cultures, de nouveaux savoirs. J’ai bien œuvré pour quelques basses besognes à mes débuts mais je devais bien vivre ! Et puis le goût du sang ne m’avait pas tout à fait quitté, c’est petit à petit que je m’y suis désintéressé, la mort me révulsait, ces victimes au nom du pouvoir et de l’argent me paraissaient inutiles. Comme les commanditaires ne servaient que leur propre intérêt, ces hommes emplis de vices, de mesquineries. A leur côté, j’ai perdu goût pour la nature humaine ambitieuse. Elle me parait toujours lié à l’écrasement de son prochain, au meurtre, à la guerre. Le pouvoir est lié au sang comme l’écriture aux mots.
En m’éloignant du monde ninja, mon horizon s’est ouvert. Je me suis plongé dans la lecture de tous les livres me tombant sous la main. En moi, une soif irrépressible de savoir me poussait dans cette quête. Je découvrais des mondes tellement éloignés de nos codes qu’une incroyable exaltation s’emparait de mon âme à leur contact. Confucius fut une révélation pour la personne obscure et sans but que j’étais, un mentor, un homme dont la présence éclairait ma route, illuminait mon chemin, embrasait mon cœur. A son contact, on ne peut plus haïr l’homme, on ne peut plus l’humilier, l’écraser, le tuer. Bien sûr, je ne vouais pas mes lectures à ses seuls écrits mais ils en devenaient le centre vital, la planche de salut flottant sur la mer, l’île au milieu de l’océan, l’oasis en plein désert. Je buvais ses paroles et les intégrais, elles devenaient miennes.
A la volée je pourrais t’en citer plusieurs, celle qui m’ont le plus marqué sont :
« L'homme de bien est droit et juste, mais non raide et inflexible ; il sait se plier mais pas se courber ».
Reporte cette phrase à la société secrète à laquelle appartiennent les shinobi, tu comprendras que nous ne seront jamais dans la voie de la bonté et de la sagesse quel que soit nos travaux, quel que soit nos actions. Nous sommes éduqués pour les vils projets, nous sommes éduqués pour œuvrer dans l’ombre des seigneurs sans scrupules. Notre kunai n’est pas celui de la justice, il appartient à l’argent du plus fort, sur lui coule le sang du plus faible. Trop jeune nous ne pouvions comprendre, aujourd’hui à plus de soixante ans cela m’apparaît telle une évidence.
«La vraie faute est celle qu'on ne corrige pas. »
J’ai tenté de corriger mes fautes mais la tâche est rude et ce soir j’œuvre pour la dernière que j’ai commise, celle de vous avoir laisse au fond de mon cœur, de mon âme sans vous laisser la chance d’y pénétrer, de me comprendre. Ecrire ces mots, se révèle bien plus dur qu’escompter. Je sens mon estomac se nouer, mes yeux se mouiller, quelques larmes glissent et d’un revers de la main je tente une nouvelle fois de les effacer… comme quoi l’on ne corrige pas toutes ses erreurs… mais qu’importe, cette lettre est mon testament, celui d’une vie, celui d’un homme fatigué au seuil de la mort, préparé pour le grand voyage. Sans doute aurais-je dû mourir plus jeune mais le destin en a décidé autrement et m’a permis de découvrir le monde, ses joies et ses peines, ses merveilles et ses vices.
Une dernière phrase m’a marqué durant ma quarante cinquième année.
« Quand vous plantez une graine une fois, vous obtenez une seule et unique récolte. Quand vous instruisez les gens, vous en obtenez cent. »
Cela m’a poussé à me sédentariser, à arrêter mes voyages, à me poser. A la bordure d’un petit village, entouré par les rizières, je me suis lancé dans l’éducation des jeunes enfants voués à aider leurs parents dès le plus jeune âge, pour les récoltes. La vie paysanne me paraît bien plus dure, que l’enfance que nous avons vécu. Chez nous, notre métier nous excitait, suscitait une montée d’adrénaline sans pareil, alors que pour eux, il s’agit de la répétition infinie des mêmes gestes, une habitude abrutissant l’homme. Il fallait leur apprendre la valeur des mots, de la littérature, de la musique, ouvrir leur horizon sans orgueil, sans chercher une quelconque reconnaissance. Je devais prouver mon humilité face à ces enfants aux aspirations diverses. Mais quelle joie lorsque dans un sourire ils vous disent merci, le visage radieux. Cela vaut tous les feux réchauffant les chaumières durant les âpres soirées d’hiver.

Je ne me suis pas encore excusé pour mon attitude, Sakura. Lorsque nous nous sommes revus chez Orochimaru, vous n’apparteniez plus à ma vie. Vous étiez de vulgaires étrangers dont le visage m’était familier. Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris tes sentiments à mon égard, pourtant je ne peux aimer. Je n’ai jamais pu aimer une femme. Je n’écris pas que je n’ai pas connu d’aventures passagères, des relations sans importance, aussi légère et futile qu’une feuille de papier. Mais cet amour te possédant m’a toujours été étranger. A cela deux raisons sans doute, la volonté de ne pas perpétuer la famille des Uchiha, de la faire mourir en même temps que moi et l’impossibilité d’engager de relations sur le long terme, de révéler mes sentiments. J’ai toujours été un solitaire, ninja ou simple quidam, cela n’a pas changé.
Je me rappelle durant l’un de mes voyages à travers le monde, m’être arrêté à une auberge pour me sustenter et dormir. Je devais avoir 31 ou 32 ans à l’époque, encore jeune et emplit d’un frais espoir, je cueillais les richesses de la vie avec goût et optimisme. La soirée venue, je déjeunais avec l’ensemble des clients lorsque j’aperçus un homme isolé. Mon œil de ninja ne s’y trompait pas et malgré le camouflage du jeune homme, un shinobi de Konoha se trouvait à mes côtés. Je crus tout d’abord qu’il venait pour moi, après tout j’appartenais à la catégorie des déserteurs et mon Sharingan se trouvait être une arme ne devant pas tomber entre des mains ennemis. Et puis cet accès de vanité passé, je réalisais qu’il devait simplement effectuer une mission pour son village. Quelque peu nostalgique en songeant à ce lieu, je m’assis à ses côtés et engageait la conversation. Je ne me souviens pas exactement de ce que nous nous sommes dit mais en toute objectivité je vais tenter d’en retranscrire la teneure exacte.
« _Bonsoir, vous êtes un ninja n’est ce pas ?
_Non…
_Ne mentez pas, il y a quelque chose en vous qui ne trompe pas…
_Comment pouvez vous en être si sûr ?
_Mon père en a hébergé il y a quelques années… des ninja de Konoha… peut-être les connaissez-vous ?
_Peut-être…
_Vous êtes donc bien de Konoha…

Je lui souriais aimablement. A vrai dire je me surprenais moi-même, je ne pensais pas capable de m’entretenir de manière affable avec un parfait étranger. Peut-être le contact avec les gens m’avait déjà ouvert sur le monde à cette époque ? En tout cas, je ne ressentais aucune gêne à lui parler… peut-être aussi parce que la personne à qu’il parlait n’était pas moi, mais un personnage créé par ma pensée, prêt à l’emploi, là pour jouer un rôle, celui du campagnard admiratif du métier de ninja. En tout état de cause, je poursuivais notre discussion.

_Mon père tenait une auberge au sortir de la forêt, nous avions souvent la visite de ninja rentrant ou partant en mission.
_Hmm… si vous le dîtes… c’est curieux je n’ai pas souvenir de cette auberge.
_Elle a été détruite il y a un peu moins de vingt ans, j’étais encore un enfant d’une dizaine d’année. Je me souviens d’y avoir croisé Hatake Kakashi… vous connaissez ?
_Oui… c’était un ninja légendaire…
_C’est vrai que dans mon souvenir quelque chose de spécial émanait de lui, mais pourquoi était ?
_Il est mort en mission il y a bientôt cinq ans.

Cette nouvelle m’estomaqua, je ne pus poursuivre la discussion. Une foule de souvenirs remontaient à la surface, comme si l’on ouvrait un trappe où s’étaient tapis des ombres malsaines endormis mais prêtes à bondir au moindre signe de faiblesse…

_Vous semblez affecté par cette nouvelle, vous le connaissiez si bien que ça ?
_Il venait souvent et malgré son mutisme et sa manière laconique de s’exprimer, mon père avait bien sympathisé avec lui… D’ailleurs, la dernière fois que je l’ai vu il entraînait un groupe d’élève de mon âge à l’époque. Naruto, Sakura et Sasuke. Vous avez de leurs nouvelles ?
_Vous êtes bien étrange monsieur et semblez en savoir plus que vous n’en avez l’air sur le monde ninja…
_Vous savez les gens parlent beaucoup, surtout dans une taverne où le vin embrouille les esprits et délient les langues.

Accompagnant le geste à la parole, je lui servais un peu de saké dans sa coupelle. J’avais remarqué depuis le début de notre discussion qu’il ne se réfrénait pas sur la boisson et tôt ou tard cela aurait son effet sur organisme.

_C’est vrai, mais quel plaisir que de sentir dans ces entrailles ce liquide libérateur.
_Sans doute, je bois très peu vous savez.
_C’est un tort, vous savez pas c’que vous loupez.
_Je supporte mal les alcools forts à vrai dire.

Moi dire ça ! Alors que je goûtais aux médecines de Kabuto et aux poisons d’Orochimaru avec une constante assiduité, aveuglé par ma haine. Il ne m’étonnerait pas d’ailleurs qu’il y ait un lien entre ce que j’ai ingurgité à cette époque et cette maladie m’étreignant actuellement. Tôt ou tard on finit par payer nos actions, notre corps ne possède pas la capacité de tout ingurgiter et d’éliminer comme si de rien n’était. Nous conservons éternellement ces traces. En tout cas pour mon interlocuteur, l’alcool avait déjà provoqué son effet.

_Baaaaaah, c’est une question d’habitude !
_Oui je n’en doute pas, et à propos des trois élèves de Kakashi ?
_QUI ? AH OUI ! NARUTO, SAKURA ET SASUKE !
_Oui, je ne suis pas sourd vous savez, vous pouvez parler moins fort… surtout que tout le monde nous regarde de travers…
_Hmmmmmmmmmmm, mmmouais vous avez raison. Sasuke est mort il y a près de quinze ans. Sakura est une jônin de Konoha, elle s’est mariée il y a quelques années et a aujourd’hui un enfant… quant à Uzumaki Naruto… c’est notre Hokage… Un Hokage dont je ne partage pas les vues mais que peut dire un simple Chûnin face au chef politique et militaire de notre village ? Il est trop gentil ! Trop impétueux et généreux ! Il ne veut pas comprendre que les ninja ne peuvent survivre que dans le chaos. Si tout le monde s’entend bien, comment voulez-vous qu’après nous ayons des missions ? Nous nous nourrissons de la trahison, on peut croire que c’est triste, malheureux… mais c’est comme ça… c’est la vie ! Il faut faire avec…Enfin… vous voyez ce que je veux dire…
_Tout à fait, mais cela fait longtemps que Naruto est Hokage ?
_Bah, cinq ans… peut-être six… je sais plus, je n’étais qu’étudiant en tout cas lorsqu’il a été nommé à ce poste. Il a pris la succession de la vieille je crois… ou peut-être pas… je m’en souviens plus à vrai dire… mais c’est pas très important non ?
_Non effectivement… et Sakura elle s’est mariée avec qui ?
_Vous êtes bien curieux je trouve pour un simple voyageur, je trouve ! Vous ne seriez pas un des ces espions de Suna ? De ces…

Dans ses yeux une haine farouche brûlait.

_Raaaah, rien que d’évoquer leur nom me met hors de moi ! Et dire qu’il a fallut que cet incapable d’Hokage passe une alliance avec ce village de dégénérés, incapable de se défendre tout seul !
_Merci.

Je n’ai pas poursuivi la discussion, ne voyant pas l’intérêt de discuter avec cet être aviné.
Tu t’étais donc mariée, quel choc ce fut pour moi. J’ai tellement de mal à imaginer le fait que tu ais pu passer ta vie avec un homme, que cet homme ait pu te toucher, te caresser, coucher avec toi… Pour être honnête j’ai toujours perçu ton amour à mon égard comme un entichement d’adolescente, de jeune fille fleur bleue en mal de sensations et vivant un vide affectif. Tu ne me connaissais pas, sans doute mon air de « beau brun ténébreux » t’attirait mais que savais-tu de moi à cette époque ? Rien. A tes yeux, j’apparaissais comme ces idoles dont on affiche les posters dans sa chambre. J’incarnais un fantasme.
En haut de cette montagne, j’aurais pu croire que tes sentiments à mon égard devaient être plus profonds… mais trop centré sur moi, je ne vous voyais plus. Je t’ai apprécié, sans doute. Peut-être aurais-je dû me montrer plus compréhensif, moins renfermé, mais à mes yeux tu n’étais qu’une amie, une amie faible dans ce monde sans pitié. Mes mots apparaissent sous cette plume sans doute plus durs, plus âpres que ma pensée réelle. Mais exprimer de manière intelligible la complexité de ma relation avec toi relève de l’impossible. Avec aucune femme d’ailleurs, je n’ai jamais pu me dévoiler, comme si il me manquait quelque chose, comme si une part de moi mourut durant mon enfance, une pièce d’un puzzle ne pouvant jamais être complété.
Sakura pardonne moi, je fus odieux et ne t’ai pas compris. Tu méritais mieux que mes regards condescendants, que ce coup de poing cette nuit là, celle de mon départ avec les quatre du Son. Nous fûmes proches en cet instant, ce soir en posant ces mots sur ce papier, je ressens la chaleur de ton corps contre le mien, le temps se suspendit pour cette nuit de noce éphémère.
Le jour pointe, ma nuit fut donc réservée à l’écriture de cette lettre ? Quelle étrange sensation… l’impression d’avoir écrit beaucoup de choses tout en n’ayant rien exprimé. Des mots inutiles, vains.

Pardon…

Sasuke

Sasuke, reposa sa plume dans son encrier, la flamme de sa bougie s’estompa, laissant place à une fine fumée grimpant jusqu’au plafond. Les premiers rayons du soleil pointait à l’horizon et éclairait subtilement sa demeure. Il se leva, et parti enfiler un kimono dans sa chambre, en revenant, la lettre avait fini de sécher. Il la plia soigneusement puis la glissa dans une enveloppe où il écrivit : « A Uzumaki Naruto & Haruno Sakura ». Délicatement, le dernier Uchiha la rangea dans une de ses poches et se saisissant d’un bâton sortit de sa demeure. La température fraîche, l’herbe humidifiée par la rosée, autant de sensations régénératrices pour ce corps malade.
Sa route commença, les yeux perdus dans le vide, contemplant l’horizon et la courbure de la terre. Quelques chants d’oiseaux agrémentaient son voyage, il souriait, de plaisir, d’humilité, goûtant le simple fait d’être là, au milieu de ces créatures vivantes… comme lui. Combien de temps dura cette marche ? Plusieurs heures probablement, lui-même ne le sait pas trop, avançant pas à pas vers un destin inéluctable.

Le village de Konoha apparut au détour d’une rangée d’arbres. Une violente émotion l’étreignit, plus de cinquante ans qu’il n’avait pas revu cet endroit et malgré les années, demeurait inaltérable, semblable, immuable. Deux gardes veillaient, puis s’endormirent. Sasuke, entra de la même manière que son frère quelques temps avant son départ. Le village malgré la journée finissante paraissait calme. Peu de monde dans les allées, le vent balayait le sable créant des volutes cinglant le visage des quelques passants. Ses longs cheveux blancs immaculés, son visage pâle, ses traits tirés, attiraient l’attention. Quelques habitants le fixèrent, devant ces regards il répondait par un sourire mélancolique, poursuivant sa route.
La voilà, la stèle des shinobi morts en mission. Il se posta devant. Le rouge, l’orange, le rose du coucher de soleil embrasait l’horizon, créant des reflets mordorés sur ce monument. Au milieu de cette liste, deux noms figurent, ceux de ses amis, Naruto et Sakura. Une larme glissa le long de sa joue. Sa main se saisit de la lettre et la posa devant la stèle.
Las, il s’adossa contre elle et ferma les yeux…



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