Fiction: Arbre étoilé

Deux journées qui commencent, comme les autres. Deux vies qui se croisent, sans se voir. Un seul arbre, traversant les mondes...
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Ichigano (Masculin), le 21/09/2008
Comment ça ? Je poste quatres chapitres dans trois fics différentes, et il n'y a pas d'explosion du nombre de commentaires ? C'est quoi ce bazar ? Va falloir remédier à ça. Non mais !
Gaara : Et voilà la folie des grandeurs qui revient...
Shikamaru : Il est désespérant...
Gna gna gna...




Chapitre 8: Langage incompréhensible



J'ouvre la porte du jardin, qui mène directement sur le "dehors". Au sol, la pierre noire et nauséabonde recouvre presque le sol, sauf percée çà et là de quelques arbres rachitiques, qui me sont totalement étrangers. Maigres, couturés de cicatrices, quelques feuilles les ornant péniblement, ils n'ont rien à voir avec ceux du jardin de Nathanaël. Akamaru me précède prudemment sur l'étrange sol et pose une à une ses pattes dessus. Il jappe faiblement, pour m'indiquer qu'il n'y a aucun danger, sauf peut-être l'odeur qui prend au nez de façon excessive. Je me lance et je commence à marcher le long des maisons. La partie du sol où je me trouve longe une sorte de route, sur laquelle se déplacent en mugissant les boîtes de métal aperçues à mon arrivée.

Je commence à prendre de l'assurance, malgré mes vêtements étroits qui me serrent et entravent mes mouvements. Akamaru de son côté se décontracte et inspire avidement l'air, à l'affût de nouvelles odeurs. Le paysage défile, monotone. Je croise deux ou trois personnes, qui, les yeux fixés au sol, ne m'accordent pas la moindre attention. Aucun ne possède de chakra apparent, ce ne sont que de simples civils.

Quelques centaines de mètres plus loin, je débouche sur un croisement. Quatre routes noires, s'élançant dans quatre directions opposées. J'hésite à pousser plus loin mon exploration, mais la curiosité est la plus forte. De plus, mon sens de l'orientation étant infaillible, je n'ai aucun soucis à me faire pour retrouver ma demeure provisoire. Je poursuis donc sur ma gauche, répugnant à traverser le chemin utilisé par les "voatures" comme m'a expliqué Théophile. Je parcours encore deux cent mètres et me retrouve à une nouvelle intersection. La route entoure totalement la maison de Nathanaël, il va bien falloir me résoudre à la franchir. Je distingue en face, de l'autre côté de l'embranchement, un coin de verdure. Youpi ! Un peu de nature ! Je me concerte d'un regard avec mon partenaire de combat, qui m'indique par un bruit - impossible à décrire décemment - que la voie est libre. Nous nous élançons, bien synchros, et coupons le croisement en diagonale.

En trois enjambées, le trajet est fait, et la route est toujours aussi calme.

"Bien joué Akamaru ! On les a eu ! Ni vus, ni connus !
- Wif !
- T'as bien raison ! Les meilleurs, c'est nous."

Après ce moment d'auto-congratulations, je remarque un détail intéressant. A deux mètres de nous, un garçonnet de quatre ans, sur un tout petit vélo, un tétine dans la bouche et les yeux ronds comme des litchis, me regarde, semblant me prendre pour un demeuré. Je l'ignore superbement et m'avance vers le vert prometteur.

D'un pas alerte, mon fidèle Akamaru à mes côtés, j'entre dans ce qui est à l'évidence un parc, comme l'endroit où j'ai atterri, mais en plus petit. Les hommes d'ici enferment leurs forêts de peur qu'elles ne s'échappent, tant elles sont peu nombreuses. Dans un carré de forêt dense s'ouvre une clairière tapissée d'herbe, à l'exception d'un rectangle de sable en son centre, qui tranche avec la verdure environnante. Trois enfants assis dans le sable rient gaiement, pendant que deux autres se poursuivent sur l'herbe. Un unique banc, façonné à même un énorme bloc de pierre, est posé face au bac à sable et à la ville. Là est assise une jeune fille, dans les seize ans, qui regarde les enfants jouer d'un air bienveillant.

Le cycliste émérite croisé quelques instants plus tôt court vers elle à toute allure, et lui chuchote rapidement quelques mots à l'oreille. Mais elle ne semble pas comprendre, car il répète plusieurs fois, l'air de plus en plus excédé. Finalement, il revient vers son vélo l'attrape d'un air rageur, et, à califourchon dessus, pédale vaillamment sur l'herbe vers moi. Interdit, je le regarde approcher, sans oser esquisser un geste. J'en ai vu approcher des ennemis, plus impressionnants les uns que les autres, mais là, ce nain, le visage plus sérieux que celui de l'Hokage en personne, c'est la première fois. Il finit par se retourner - toujours sur son vélo - vers le banc, et lance par-dessus son épaule :

"Viens !"

Je reste immobile, intrigué par ce petit bout à l'étrange langage. Voyant que je ne bouge pas, le cycliste fait une manœuvre complexe pour se ranger près de moi. Il m'attrape fermement par la manche et me tire en répétant :

"Allez, viens !"

Il a un peu de mal à me tenir et à pédaler en même temps, je décide de le suivre gentiment sans discuter. Akamaru reste sur nos traces, indécis sur la conduite à suivre. Laborieusement, notre étrange trio arrive aux pieds de la jeune fille. Elle a de longs cheveux entre le marron et les yeux bleu très pâles qui ne cessent de fixer le bac à sable et ses occupants devant elle. Un poncho marron recouvre ses épaules, le haut de son corps, et monte jusqu'à son nez. Le petit garçon descend de son bolide et se hisse sur le banc. La demoiselle l'entoure d'un bras protecteur, avant de prendre la parole.

"Veuillez m'excuser, mais mon frère prétend que vous parlez aux chiens, et il aimerait faire de même."

Sa voix est très calme et posée, mais également mélodieuse et pleine de nuance - une voix de chanteuse, ou d'actrice qui s'y connaît. Je décide de jouer la carte de l'infiltration.

"Parler aux chiens ? Mais pas du tout, c'est impossible. En tout cas, si ça existait, j'aimerais bien voir ça."

J'ai l'impression d'avoir été convaincant, car la jeune femme me sourit tout en caressant les cheveux du garçonnet. Mais il ne semble pas d'accord.

"Si, te dis que ai vu !"

Il trépigne et se met à bouder. Akamaru sort la tête de derrière mes jambes, et va renifler les pieds du bambin qui s'agitent en tout sens. Le nain arrête aussitôt de geindre et tend une main tremblante vers le chien blanc. Celui-ci se laisse approcher sans broncher et commence à le renifler sur tout le corps, en insistant bien là où ça chatouille. Le gamin se tortille et s'échappe, suivi par Akamaru bondissant et jappant gaiement.

Je regarde mon camarade courir et se défouler. Depuis son arrivée, il est assez amical avec les étrangers que l'on rencontre, à croire qu'ils ne représentent aucun danger. En même temps, tous les habitants ne sont que de simples civils, sans aucun pouvoir sur un ninja tel que moi. Mais Akamaru a souvent de bonnes intuitions, il sait reconnaître la nature des gens. Je lui fais donc entièrement confiance. La demoiselle me désigne le banc à sa droite.

"Prenez place, s'il vous plaît. Mon frère ne tient pas en place en ce moment, c'est un plaisir de le voir occupé."

Pas très à mon aise, je m'assieds sur le banc près de cette étrange inconnue. Elle n'a toujours pas tourné la tête depuis mon arrivée, fixant le bac à sable de ses yeux clairs.

"Je m'appelle Juliette, ravie de vous rencontrer.
- Moi Inuz... Kiba. Je m'appelle Kiba, enchanté.
- Kiba, quel nom étrange. Mais il a une sonorité agréable. Kiba..."

Elle murmure encore quelques paroles inaudibles. Ne sachant pas trop quoi répondre, ni comment interpréter cette déclaration, je demeure silencieux.

"J'espère que mon frère ne martyrise pas trop votre chien. Il n'est pas méchant, mais fait parfois preuve d'un sérieux... manque de délicatesse."

Sur ma droite, je vois à quelques mètres le garçon en question, poussant des cris de bêtes féroce, gratouillant le ventre d'Akamaru qui frétille de la queue et des pattes. La dénommée Juliette fixe toujours le bac devant elle de ses yeux pâles, si pâles.
Un petit oiseau qui picore le sol un peu plus loin s'envole, frôlant nos têtes de quelques centimètres, toujours sans réaction aucune de la part de mon interlocutrice. J'ai une soudaine prise de conscience.

"Oh, désolé, je n'avais pas vu que vous étiez...
- Belle ? me coupe-t-elle. Séduisante ? Intelligente ?
- Aveugle, ajouté-je faiblement.
- Ah, c'est vrai, j'oublie souvent ce détail."

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Je m'assieds en soupirant sur mon lit, guère plus qu'un fin matelas posé à même le sol. Naruto m'a laissé à la porte de mon nouveau logement, promettant qu'il viendrait me chercher bientôt pour faire un "truc génial". Venant de lui, je peux m'attendre à tout. Je souris en pensant au grand blond. C'est un écervelé, un gamin totalement inconscient, mais je l'aime bien. Il est plein de vie, de joie et de bonne humeur, et c'est communicatif. C'est un gars bien, qui se lie avec une facilité déconcertante aux gens. Je ne suis pas d'un naturel farouche, mais il me faut habituellement un petit temps d'adaptation avant de me rapprocher des autres comme il le fait. C'est ce monde, ce village... J'ai besoin d'alliés, je suis heureuse de savoir qu'au moins l'un des habitants semble m'apprécier.

Ma nouvelle demeure est un petit appartement de trois pièces : chambre, salle de bain, cuisine, amplement de quoi vivre pour une personne seule. Il est situé au second étage d'un petit immeuble, dans une partie de Konoha constituée presque intégralement de vieilles maisons, dans le plus pur style japonais. J'ai ainsi une magnifique vue sur les toits alentours. L'intérieur est blanc, clair, agréable. C'est bien plus que ce que j'imaginais obtenir, en tant qu'étrangère.

J'attrape mon sac à dos et j'étale mes biens sur le lit. Tout d'abord l'arc, et le carquois qui l'accompagne. Le bois est doux au toucher, lisse et tiède, réconfortant. Puis j'extirpe de mon sac ce que j'ai emmené pour mon "escapade nocturne". Alors… Mon iPod aux trois quarts chargé, avec ses écouteurs aux trois quarts cassés, bon réflexe que j'ai eu, je vais pouvoir écouter de la bonne musique de chez moi. Parce qu'ici, ils n'ont pas l'air de connaître. Ma petite couette, c'est mon doudou. Oui, j'ai un doudou, et allez voir ailleurs si j'y suis. L'accompagnent ma montre cassée, deux ou trois élastiques pour cheveux, mon bouquin du jour, déjà entamé, une lampe torche et une demie plaque de chocolat. J'en croque un carré avant de poursuivre ma fouille. Il ne reste pas grand-chose. Une photo de famille, artificielle, faite chez un professionnel, qui n'en fait absolument rien ressortir. Mais la vue des visages de mes proches, si familiers, me réchauffe le cœur. La plaque de mon premier concours de tir à l'arc, récompensant ma neuvième place. Ce machin pèse une tonne, et je me le trimbale partout, toute ma fierté d'archère reposant dans ce rectangle de métal. Je trouve aussi, au fond du sac, une petite boule de papier. Il s'agit d'un dessin tout froissé fait par ma meilleure amie : un petit bonhomme blond aux cheveux en pointe et ornés d'une tache violette, qui sourit de toutes ses dents. Il me redonne le sourire, comme toujours.

Je m'affaire à ranger tout mon bazar. Le chocolat trouve sa place dans la cuisine avec la lampe torche. Je pose ma petite couette - le premier qui rigole… - sur mon lit, et photo, livre, baladeur, montre et élastiques sur le petit meuble que sert de table de chevet. Arc et flèches restent dans un coin de la cuisine-salle de vie. La plaque reste dans une poche de mon sac, qui se retrouve balancé au pied de mon lit. Je suis "installée".

"Et on dit que les filles ont toujours besoin d'une tonne d'affaires ? Mauvaises langues. On sait aussi se contenter de peu."

Je me rassieds en tailleur sur mon lit, qui malgré sa finesse est très confortable. Un brusque accès de solitude me prend à la gorge. Je sens les larmes monter petit à petit, mais cette fois, je les repousse fermement. Pleurnicher fait du bien, mais ça ne sert strictement à rien. Je décide de me détendre et de me vider la tête en nettoyant mon nouvel arc. Je vais le chercher et le pose sur mes genoux, en l'examinant en détail. Il est vraiment… magnifique… Pas surchargé de détail, loin de là, mais simple et sobre, comme je les aime. Et détail que je n'avais pas remarqué, en plus des runes incrustées dans les branches, les poupées sont ciselées d'un profil de chat. Intéressant. On utilise plus des représentations d'oiseaux, ou de grands prédateurs, pour les arcs. Mais un chat, c'est quand même sympa.

J'entretiens un peu l'arme, mais celle-ci n'a pas besoin de beaucoup de soins. Je cire la corde en tendon et j'admire les courbes de l'arc détendu. Le facteur d'arc qui a produit cette œuvre d'art doit être un fin connaisseur, un grand pro. Je me demande si c'est l'armurier qui l'a lui-même fabriqué.

Un grand fracas se fait entendre près de la porte d'entrée, suivie d'une bordée de jurons. L'intrus finit par frapper et Naruto passe la tête pas la porte de ma chambre.

"Hey, t'es là ! Alors, tu es bien installée ?
- Ouais… Merci
- Bah, y a vraiment pas de quoi."

Petit instant de flottement.

"Je dois t'appeler comment ?
- De quoi ?"

Il entre dans la chambre, se grattant la tête, emprunté.

"Je sais pas comment…. Ici on a des habitudes, mais… Enfin, tu veux que je t'appelle comment ?
- Comme tu veux.
- Raah tu m'aides pas !
- Aude !
- …
- Aude, ça ira."

Il retrouve sa bonne humeur et m'attrape l'avant-bras pour m'aider à me relever.

"Mais je garde Gimliam pour les occasions spéciales !
- … Ça marche.
- Bien, vu que t'as fini de ranger tes affaires, je t'emmène aux terrains d'entraînement. Il faut que tu te familiarise avec ton arc. Ça te tente ?"

Je ne réponds pas, mais je ramasse mon arme, sa corde et le carquois. En route.




Pendant ce temps, un tyrranosaure va chez le dentiste...



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