Fiction: Lilas

Des pertes et des séparations, Sakura en a connu, plus qu'elle n'en aurait souhaité, plus violentes qu'elle ne croit pouvoir le supporter. Mais lorsque dix ans après le départ de Sasuke, Naruto se met en tête d'aller le chercher, et que l'Akatsuki se met à menacer la paix, Sakura n'a plus d'autre choix que de s'allier à Shikamaru et aux militaires du Pays du Feu. Peut-être pourra-t-elle ainsi retrouver Naruto et Sasuke... UA
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hane-chan (Féminin), le 17/02/2019
Vous vous souvenez qu'au chapitre précédent je vous avais dit que cette fic ne devrait pas être trop longue ? Eh bien j'ai menti. Ou sinon, c'est qu'une fois de plus l'inspiration est encore venue fourrer son nez dans mes affaires...

Bref, sachez que j'ai déjà plusieurs chapitres d'avance, j'attends juste de ne plus rien avoir à modifier pour les poster.

Sur ce, bonne lecture !




Chapitre 2: Celle qui attend



Il fallut quelques temps à Sakura pour ne plus supporter le silence assourdissant de son petit appartement, sa solitude en écharpe, ses nuits tantôt esseulées tantôt mouvementées à s'exiler une fois de plus dans un lit qui n'était pas le sien. Trois jours plus tard, observant un Shikamaru préparant le café sans un mot, elle sut que le confort apparent de leur relation lui pesait. Il plissait des yeux et pinçait des lèvres, signe que sa présence relevait ce samedi matin plus de l'intrusion que d'une invitation. Elle se devait d'espacer ses visites. Sinon... Sinon elle saccagerait la dernière chose qui lui restait. Si peu saine soit-elle.

Elle replia ses genoux contre elle, ses pieds sur la chaise, tout pour paraître plus petite, plus discrète, moins envahissante. Elle aurait dû s'en aller sur le champ, mais elle attendait, peut-être un brin de motivation au fond de son café.

- Écoute...
- Je sais, le coupa-t-elle.

Elle ne se sentait pas la force d'entendre son discours moralisateur. Pas de suite. Viendrait le temps où elle ne pourrait plus échapper à cette mise au point, mais elle souhaitait juste un petit répit. Un petit quart d'heure où ils n'auraient pas à se foutre sur la gueule, ni à se jeter l'un sur l'autre, quelques minutes sans jugement, sans se faire du mal, juste à se rappeler ce qu'avait été leur amitié avant que tout ne bascule.

Le jugement, elle savait très bien se l'apporter toute seule.

Elle passait ses journées oisives à se torturer l'esprit, à chercher ce qu'elle avait fait de mal, ce qu'elle aurait dû faire autrement, ce qui était sous ses yeux sans qu'elle ne l'aperçoive. Avait-elle ignoré les signes consciemment, n'avait-elle donc rien tenté pour empêcher la situation actuelle ? Était-elle devenue ce qu'elle haïssait, ou haïssait-elle ce qu'elle était devenue ?

Et pourtant, envers et contre tout, Naruto continuait de s'acharner, de penser à elle en priorité, à ce trio d'amis qu'ils avaient été au lycée, avant que Sasuke ne rejette tout. Mais avait-il été le seul dans cette histoire ? Leur avaient-ils apporté le soutien nécessaire ? Peut-être alors que Naruto ne le faisait pas pour elle. Cette croisade désespérée n'était plus le reflet de cette vieille promesse. Pas uniquement. Portait-il aussi le poids de ses péchés d'antan ? De cette absence qu'ils n'avaient pas su combler chez leur ami, de cette trahison qui avait brisé les fondations mêmes de la fragile psyché de Sasuke et qu'ils n'avaient su réparer ?

Elle soupira. Touilla son café posé devant elle, sous un haussement de sourcil perplexe de Shikamaru.

- Depuis quand n'est-on plus capables de se parler normalement ?

La question lui brûlait les lèvres depuis trop de temps pour rester enfermée un instant de plus dans sa tête. Cet accès d'honnêteté aurait dû gêner Sakura, mais ça lui glissait sur le corps comme une pellicule de pluie ; tout juste une évidence soulevée. Une évidence qui cependant lui faisait poindre les larmes, lui donnait envie de baisser les armes tant ses bras s'alourdissaient de regrets accumulés.

Shikamaru la dévisageait, désarçonné. Sakura soupira de plus belle et se leva, laissant sa tasse en plan. Elle défit le t-shirt de Shikamaru qu'elle avait repêché au réveil par terre et lui lança mollement au visage. Elle n'avait pas la force d'être en colère. D'ailleurs, ça aurait été malvenu de sa part. Ils étaient tous deux fautifs, les choses s'enlisaient au fur et à mesure et aucun d'eux n'avait réagi.

Shikamaru n'avait toujours pas bougé de son tabouret quand elle claqua la porte derrière elle.

Retour à la case départ, dans le vide immense et terrifiant de l'anonymat de la capitale. Pas de but dans la vie, pas de raison de se lever le matin, un mois devant elle à n'avoir rien pour bagage que ses propres larmoiements et son incapacité à conserver ses amitiés.

Sakura s'appuya sur le chambranle de la porte de son appartement, hésita un instant, alluma la lumière. Contempla le désastre de sa vie futile, fonctionnelle, vide de sens. Elle avait tenté de rendre son espace de vie plus chaleureux à un moment, mais le bouquet fané traînant sur sa table ne lui inspira qu'une vague de pitié. " Un jour, je t'offrirai du lilas". Merci Naruto, pensa-t-elle, amère, je saurais sûrement très bien par quoi remplacer ce vieux muguet... Alors, dans une tentative désespérée, elle attrapa son téléphone, composa le numéro de Naruto et éclata d'un rire désabusé lorsque le répondeur lui annonça d'une voix détachée " Le numéro que vous avez composé n'est pas attribué. "

Deux jours s'écoulèrent lentement, sans qu'elle ne fasse la vaisselle, ne sorte les poubelles ou ne prenne sa douche, pour la simple et bonne raison qu'elle ne sortit quasiment pas de son lit. Si elle avait été attentive, Sakura aurait pu reconnaître les premiers signes de la dépression, mais elle ne l'était pas, et n'avait pas envie de l'être. Dans tous les cas, qui pouvait bien s'en soucier ? C'est donc avec surprise qu'elle entendit sa sonnette résonner dans son appartement. Elle se leva précautionneusement pour entrouvrir la porte sur un Shikamaru fixant le sol, puis elle. Il fronça les sourcils, et dégagea la porte sans un mot, s'invitant à l'intérieur pour ouvrir brusquement le frigo, et s'atteler à la cuisine.

- Qu'est-ce que...
- C'est quand la dernière fois que t'as mangé ?

Elle baissa les yeux, ferma la porte, et vint s'asseoir devant sa petite table où Shikamaru découpait rapidement les pauvres légumes encore potables. Une envie de pleurer la tenaillait, elle souhaitait lui dire de laisser tomber le couteau, de ne pas tenter d'être gentil, d'arrêter, mais le regard autoritaire qu'il lui lança l'en empêcha. L'assiette posée devant elle lui donnait la nausée, elle repoussa les aliments de sa fourchette, retardant l'instant où il faudrait la planter dans un morceau et la porter à sa bouche, se forcer à mâcher et avaler. Shikamaru ne la lâchait pas des yeux. Elle inspira, et s'obligea à manger.

Il sortit son paquet de cigarettes, en proposa une à Sakura, qu'elle accepta sans rechigner ; elle n'était plus à un vice près.

- Tu sais... Par rapport à ce que tu m'as dit la dernière fois...

Il stoppa sa phrase, ne sachant pas comment continuer, comment formuler sa pensée. Ils n'avaient jusque là jamais eu à mettre des mots sur leur relation. Ou peut-être se l'étaient-ils toujours refusé.

- Si t'as besoin de parler, faut pas hésiter. Je sais que c'est bizarre depuis... Enfin, voilà, t'as été là pour moi, quand, tu sais. Donc juste pour te dire, je suis là.

Elle ne sut comment répondre. Ça la touchait, indéniablement, mais le malaise qui s'était lentement installé entre eux ne pouvait pas être effacé comme ça par quelques mots balbutiés.

- Embrasse-moi.

C'était la seule chose qu'elle était encore capable de dire pour lui faire comprendre qu'elle appréciait sa main tendue.

Il se pencha par-dessus la petite table sur laquelle il s'appuyait, s'approcha lentement, frôla ses lèvres. Se rétracta, entrouvrit les yeux pour croiser ceux verts de Sakura. Posa sa main droite sur sa nuque, caressa sa mâchoire du pouce, l'embrassa à pleine bouche. C'était un merci qu'ils s'échangeaient, un baiser plein de nouveauté, à en perdre haleine de mots jamais échangés. Un nouveau langage, loin de la violence à laquelle ils s'étaient habitués. Une fois n'est pas coutume, ils prirent leur temps. De se découvrir, de se laisser aller aux caresses plutôt qu'aux morsures, d'arpenter le corps de l'autre, de se voir tels qu'ils étaient ; pleins de failles jusque dans un monde qu'ils pensaient maîtriser.

Alors quand, quelques heures plus tard, lovée contre le torse de Shikamaru elle sentit sa main parcourir doucement son bras, son souffle dans ses cheveux, elle lui raconta faiblement. Les derniers mots de Naruto, sa quête insensée pour une promesse oubliée, Hinata abandonnée, portant son bébé, et elle sur le carreau, faisant tout de travers, et surtout rien du tout.

- Et qu'est-ce que tu veux faire, maintenant ?

Elle réfléchit un instant, cherchant les mots adéquats, et souffla :

- Ne plus être celle qui attend.
- Et comment comptes-tu t'y prendre ?

Cette question lui demanda plus de temps pour y répondre. Elle n'était pas sûre de la marche à suivre. Elle connaissait juste les grands axes de son plan, bien pauvre, pour corriger les erreurs qui les plombaient, elle et ses proches, depuis trop de temps. Mais là encore, aucune idée concrète de comment les réaliser.

- Je ne sais pas, avoua-t-elle à demi-mots. Déjà, ramener Naruto à Hinata. Ne plus lui faire peser ce poids. Moi... Je n'ai personne qui m'attend.

Shikamaru inspira profondément contre elle, le nez niché dans ses cheveux. Une phrase s'attardait dans l'air sans être prononcée, et Sakura le remercia de la garder pour lui. Pour eux, elle n'avait pas le même sens. Peut-être même aurait-elle été hypocrite.

- Naruto se laissera-t-il ramener tranquillement ?
- Quand il saura pour Hinata, oui. Probablement. Et si je prends la suite, ça devrait augmenter mes chances. Il n'aura pas ce goût d'inachevé. J'espère.
- Et tu disposes de combien de temps ?
- Un mois.
- C'est court.
- Je sais.

Le silence se fit de nouveau. Pour la première fois depuis bien longtemps, Sakura le trouva agréable. Peu lui importait d'être perdue dans ses pensées. D'être aux prises avec ses réflexions, ses peurs et ses doutes. Un but, si peu réalisable soit-il, se profilait à l'horizon. Fut-il à l'orée de sa vision, à quelques pas de son présent. Un objectif qui n'était pas égoïste. Du moins pas totalement. Certes, l'apaisement de sa conscience, de la culpabilité qui lui grattait les entrailles étaient les premières découlées qu'elle entrevoyait. Que sa vie aie des retombées négatives dans celle des autres, de ses proches qui plus est, ne fait jamais de bien à l'ego. Arrive un temps où il n'est plus possible de se leurrer, et où la meilleure chose à faire est d'agir en conséquence.

Et désormais, elle avait un allié.

La main de Shikamaru vint se poser sur sa hanche, la serrant brièvement, tandis qu'il picorait son cou de quelques baisers.

- Faut que j'aille au boulot.

Il se leva prestement sans se soucier de se couvrir, marchant tranquillement jusqu'à la salle de bain, s'arrêtant sur le pas de la porte pour lui jeter un regard. Elle refusa l'invitation d'un sourire, et s'emmitoufla dans sa couette. Quelque chose lui disait de ne pas trop pousser sa chance. Ce nouveau langage qui se développait entre eux, encore trop fragile, menaçait de voler en éclats à la première bourrasque. Mieux valait ne pas contrarier le vent trop tôt.



Un chapitre un peu plus court que le précédent, qui fait plus office de charnière dans l'histoire.
J'espère qu'il plaira aux lecteurs encore présents !

J'ai déjà une très bonne idée de la suite, mais je ne sais pas combien de chapitres ça prendra à écrire. Dites-vous que j'en ai déjà plusieurs en réserve !




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