Fiction: Lilas

Des pertes et des séparations, Sakura en a connu, plus qu'elle n'en aurait souhaité, plus violentes qu'elle ne croit pouvoir le supporter. Mais lorsque dix ans après le départ de Sasuke, Naruto se met en tête d'aller le chercher, et que l'Akatsuki se met à menacer la paix, Sakura n'a plus d'autre choix que de s'allier à Shikamaru et aux militaires du Pays du Feu. Peut-être pourra-t-elle ainsi retrouver Naruto et Sasuke... UA
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hane-chan (Féminin), le 26/08/2019
Ce chapitre n'a pas été si évident à écrire. Le fait que ce soit Sakura qui donne les directives, alors qu'elle n'a (tout comme moi) aucune connaissance militaire, me chagrinait, et en même temps au vu de l'histoire il me semblait important que ce soit le cas.

Peut-être aussi que je me suis retrouvée confrontée à mes propres limites. Mais bon c'est justement pour tester mes capacités et difficultés d'écriture que je me suis lancé ce défi alors ce n'est pas une mauvaise chose en soi.




Chapitre 14: Sur un fil tendu



Dire que l'unité avait bien pris de devoir rentrer sous les ordres de Sakura aurait été d'un euphémisme passablement irritant. Ils ne discutèrent cependant pas, la passation de pouvoir venait directement de leur capitaine, et Sakura Haruno n'était plus la simple civile innocente et ignorante qu'elle était avant l'opération Sable du Désert. Surtout qu'Ibiki avait annoncé son désir de faire d'elle une militaire à part entière. Elle réfléchissait encore à la proposition, à se demander s'il s'agissait bien là d'une proposition et si elle conservait son libre arbitre.

Son rôle cependant se fondrait dans la masse à l'arrivée de l'équipe de soutien, dans lequel un certain Baki de l'armée du pays du Vent prendrait la relève. Mais les enjeux étaient toujours présents sous la couverture, et alliance ou non, l'armée du Feu ne pouvait se résoudre à se voir ordonner par un autre pays. La nomination de Sakura en cheffe d'équipe était donc aussi un choix stratégique intéressant et discret : en sa qualité de simple civile, elle ne recevait pas d'ordre direct, et ne pourrait pas se voir blâmer dans le cas où elle ne répondrait pas à ce qu'on attendait d'elle.

Peut-être était-ce aussi la raison de la présence de Shikamaru dans l'unité de secours.

Sasuke continuait d'observer sans mots l'équipe bourdonner comme un animal curieux. Ses silences n'étaient plus les mêmes que lorsqu'ils étaient adolescents. S'ils se paraient de ce malaise d'incompréhension qui leur avait tant coûté auparavant, cette dernière n'était elle-même plus la même. Ce n'était plus l'absence de Naruto qui les bridait, mais l'absence de motifs clairs et apparents, de souvenirs communs, de sentiments auxquels se rattacher, à défaut de mots.

Et pourtant, leur silence en disait beaucoup. Leur silence restait aujourd'hui encore la manière la plus limpide qu'ils avaient de communiquer, de transmettre et d'échanger. Leur silence restait encore et toujours leur monde.

Seulement Sakura avait conscience qu'elle ne pouvait le laisser s'éterniser. La présence de Sasuke à leurs côtés était par trop étrange, presque déplacée, dans la quête qu'ils menaient. Elle ne savait quel objectif il cherchait à atteindre, qu'est-ce que lui retirait à demeurer avec eux, et si elle avait passé les derniers mois à rêver de le ramener, elle ne s'était jamais attendue à ce qu'il la rejoigne de lui-même sans s'éclipser de nouveau. Désemparée, elle le fixait de temps à autres, une question tournant en boucle dans sa tête : si lui était là, où était Naruto ?

- Que veux-tu qu'on fasse, Mocheté ?

La question, bien que posée sans animosité, laissait filtrer le mépris qu'avait Sai à devoir répondre aux attentes de Sakura. Seul le respect pour les règles et la hiérarchie, ainsi que celui qu'elle avait glané en sauvant Kakashi et évitant qu'ils ne perdent pieds en l'absence de chef lui permettait de se plier malgré tout à la nouvelle fonction de Sakura.

L'unité d'Ibiki était repartie depuis peu, encombrée par Kakashi qui n'avait pas encore repris conscience mais dont les mouvements légers laissaient présager que les effets de l'anesthésie s'estompait, et des corps des deux membres de l'Akastuki. Ne restait donc dans l'équipe plus que trois membres pour protéger les autres, et elle espérait que cela soit suffisant. L'équipe d'Ibiki se dirigeait au sud-est, avec l'aval du Pays de la Rivière pour se rendre à l'hôpital de la ville de Tani. Sakura les avait laissés partir presque à contrecœur, après de dernières recommandations aux deux médecins quant à l'état de son ancien professeur.

La découverte dans les poches de Sasori de son nouveau joujou l'avait laissée pantoise : si Sasuke n'était pas intervenu à temps, nul doute que lui aussi se serait servi de sa dernière composition. L'avantage, c'est qu'elle avait pu lancer l'analyse du poison directement, et ils étaient encore en train d'attendre les résultats dans une tension relative.

- Il va me falloir un rapide portrait de vos capacités et spécialités.

Elle ne pourrait les exploiter au mieux qu'une fois qu'elle aurait toutes les cartes en main. Kiba commença :

- Comme tu l'as vu, je suis démineur. Je suis aussi spécialisé dans la traque, mais je n'ai malheureusement pas mon compagnon pour cette mission. Mon chien, ajouta-t-il au regard perdu de Sakura. Akamaru a été élevé comme un chien militaire, pour reconnaître tant les odeurs de nombreux composés chimiques que se concentrer sur la piste d'une odeur précise, la cible désignée.
- Dois-je considérer qu'en son absence tu ne peux pas utiliser cette compétence ?
- Pas aussi bien que ce que je le voudrais, mais pour ça, il y a Sai.

Sakura se tourna vers lui, qui lui lançait un sourire étrange, la défiant de le forcer à révéler son jeu. Elle soupira, se contentant du peu qu'elle avait pu récolter auprès de Kiba et sur les quelques jours à le côtoyer. Sa mémoire visuelle et sa capacité à s'orienter étaient de fait, deux cartes maîtresses qu'elle ne savait pas encore comment imbriquer dans la partie qu'elle s'apprêtait à jouer.

- Dernière question, Kiba. Pourquoi ton chien n'est pas de la partie ?
- On traquait Sasori. J'ai pas franchement envie que les capacités olfactives de mon chien se retournent contre lui. Je préfère ne pas pouvoir compter sur lui que le savoir empoisonné, peut-être mort pour un mauvais calcul de ma part.

Sakura acquiesça, avant de faire face à Tenten, qui se tortillait et jetait des regards en coin à Sasuke. Elle ne parlerait pas en présence de cet inconnu. Sakura soupira ; lui non plus ne serait pas prêt à mettre cartes sur table. Seul Kiba lui faisait suffisamment confiance, ou peut-être était-ce parce qu'il avait cruellement conscience qu'il était déjà le plus exposé. La suite de cette mission promettait d'être laborieuse.

- Faites-moi le topo de la situation. Kiba ?
- La voie est libre, plus aucune bombe aux alentours directs.
- Sai ?
- Le repaire se situe à deux kilomètres d'ici, est-nord-est. L'entrée n'est pas gardée, mais potentiellement piégée. Pas de mouvement visible à l'intérieur ni autour.
- Tenten ?
- RAS.

Ainsi donc le repaire de l'Akatsuki n'était habité que par Deidara et Sasori. Les autres membres étaient donc soit en déplacement, soit ils possédaient d'autres planques ailleurs, et l'usage de celles-ci variait en fonction des actions qu'ils souhaitaient mener. Peut-être avaient-ils conscience que celle-ci finirait par être repérée, peut-être même avaient-ils fait exprès de les mener sur cette piste. Les buts de l'enlèvement de Gaara devenaient de plus en plus nébuleux.

- Kiba, Sai, retournez à l'entrée du repaire. Vérifiez si elle est piégée ou non, mais ne tentez en aucun cas une percée. Je veux une observation de celle-ci pendant deux heures. Au moindre mouvement suspect, revenez ici. Tenten, tu couvres leurs arrières. Maintenez un contact radio. Si jamais le moindre soupçon d'être écouté vous parvient, pas un mot. Un coup sur le micro : danger. Deux coups, piège. Et trois, retraite. On vous rejoindra à ce moment. Sasuke, avec moi.
- Qu'est-ce que vous allez faire ?

Elle éluda la question d'un regard glaçant. Elle n'avait pas envie de se justifier. Son bras la lançait à nouveau, et bientôt elle ne pourrait plus affecter un air de façade pour le camoufler.

- Sai, montre-moi ta carte. Je veux savoir quelle zone tu as inspectée. Kiba, indique-moi celle que tu as ratissée au cas où.

Elle sortit le téléphone satellitaire que Temari lui avait mis à disposition, prit la carte en photo, hocha la tête et conclut :

- Si tout va bien, on se retrouve dans deux heures.

Sakura attendit que les trois se soient dispersés pour enfin croiser le regard de Sasuke. Trop de questions tambourinaient à la porte de son esprit, et elle ne savait pas par quoi commencer. Et au travers de la neutralité affichée dans ses yeux noirs, il lui sembla déceler une étincelle de doute. Lui non plus ne savait pas bien comment se comporter en sa présence, peut-être ne l'avait-il jamais vraiment su. La plupart du temps, c'était elle qui faisait le premier pas.

- On va agrandir le périmètre connu. Je compte sur toi pour me protéger.

Elle se voulait confiante dans sa phrase, profitant des derniers restes d'autorité, mais sa voix partit légèrement dans les aigus, la trahissant. Son regard s'échappa des yeux hypnotiques et impossibles à soutenir de son ancien ami. Il se contenta d'acquiescer, confirmant par là même l'implicite sous la deuxième règle énoncée par Suigetsu.

Ils élargirent le secteur délimité par petits cercles excentriques, se concentrant particulièrement sur le nord. Au bout d'une demi-heure de silence, Sakura n'en put plus et se retourna brusquement vers Sasuke pour crever l'abcès.

- Franchement, Sasuke, qu'est-ce que tu fais ici ?

Les yeux de Sasuke s'élargirent fugacement, et fuirent à l'opposé. Elle ne loupa pas la tension dans sa mâchoire, ses sourcils qui se froncèrent imperceptiblement. Et elle comprit. Un petit son étranglé sortit de sa gorge, entre rire et râle. Comment avait-elle pu ne pas faire le rapprochement plus tôt ? Leur rencontre n'était pas préméditée, elle n'était qu'une coïncidence fâcheuse qui avait forcé Sasuke à revoir son plan autrement. Pourquoi, comment, des questions auxquelles elle ne trouvait des bribes de réponse que dans les quelques mots lâchés par Suigetsu et ses souvenirs perdus. L'intuition de Sakura ne lui avait pas fait défaut avant son départ de Konoha.

- Ton frère...

Les épaules de Sasuke se raidirent d'autant plus, accentuant l'envie terriblement paradoxale d'éclater de rire de Sakura. Peut-être que le temps ne changeait pas les gens ; ou pas autant qu'elle ne le croyait. Mais à ce moment, pourquoi restait-il, là où dix ans auparavant il était parti ? Était-ce parce qu'ils n'avaient jamais été aussi près du but de ramener une information concrète ? Ou bien subsistait une part de l'affection que Sasuke lui portait et qu'il n'avait plus la force de renier, maintenant qu'il la prenait de plein fouet, sans y être préparé ?

- Même si j'avais eu les bons mots... Je n'aurais jamais pu te retenir, n'est-ce pas ?
- Ce n'est pas que...

Les mots lui coûtaient, et il stoppa sa phrase sans l'achever. Quelque part, cette conversation, ils l'attendaient et la redoutaient depuis tant de temps, lui avaient imaginée tant de facettes et de possibilités que plus rien ne semblait désormais convenir.

- Personne n'aurait pu me retenir.
- Et maintenant, n'es-tu pas fatigué ?

Il chercha son regard. Ce qu'il souhaita lui transmettre, à cet instant, se perdit sous l'intensité du sien. Sa main vint s'approcher de son visage, hésita, caressa ses cheveux ravagés pour retomber la seconde d'après. Si fatigue il y avait, la détermination demeurait depuis trop de temps pour être occultée.

- Si tu me retires ça, si tu m'enlèves ma vengeance... Même toi, je ne pourrais te pardonner.

Les yeux de Sakura auraient voulu pleurer, elle en était pourtant incapable. Quelque part, son cœur se perdait, chevauchait entre celle qu'elle était désormais et la Sakura de dix-sept ans, à mi-chemin entre le mur de brique qu'elle s'était forgée et le champ à découvert de ses émotions malmenées.

- Un jour...

Il secoua la tête dans un sourire défait, un de ceux qui criait qu'il avait déjà accepté la situation. Un jour, il serait toujours là, à vagabonder, à fuir peut-être, ou en prison pour meurtre, ou mort, plus probablement. Un jour serait comme un autre, survivre ou mourir, ou se laisser mourir. Pour lui, un jour ne sonnerait jamais comme une promesse, sinon celle qu'il ne pourrait jamais tenir.



Si tout le début du chapitre me fait un peu grincer des dents, je suis particulièrement fière de la confrontation entre Sakura et Sasuke. J'aime bien distiller des clins d'œil et des citations du manga, et j'aime bien comment Sasuke se retrouve plus tendre et plus franc sur ses sentiments, comparé au manga. Peut-être un peu plus proche de celui qu'il était avant Shippûden.



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