Fiction: Lilas

Des pertes et des séparations, Sakura en a connu, plus qu'elle n'en aurait souhaité, plus violentes qu'elle ne croit pouvoir le supporter. Mais lorsque dix ans après le départ de Sasuke, Naruto se met en tête d'aller le chercher, et que l'Akatsuki se met à menacer la paix, Sakura n'a plus d'autre choix que de s'allier à Shikamaru et aux militaires du Pays du Feu. Peut-être pourra-t-elle ainsi retrouver Naruto et Sasuke... UA
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hane-chan (Féminin), le 05/08/2019
Près de deux ans que ce chapitre est écrit et attend d'être posté. J'en avais déjà plusieurs en réserve, et je me rends compte avec un peu de dépit que j'avais totalement oublié de les poster. Désolée pour tous ceux qui pouvaient en attendre la suite.



Chapitre 11: Colchique



Le tumulte qui faisait rage dans ses pensées empêchait Sakura d'accéder au sommeil. Les yeux ouverts sur le plafond au-dessus de sa tête, son cœur battant la chamade, elle peinait à effacer de son esprit les mots qu'avaient failli prononcer Shikamaru. Ils tournaient en rond, résonnaient, pulsaient à ses oreilles de la voix grave qui s'était arrêtée en plein vol, s'écrasant sur le mur froid du regret.

Et elle ? Qu'en était-il pour elle ? Pouvait-elle lui rendre la pareille, avec la même franchise avortée ?

Le jour où elle avait pris la pleine mesure de son amour pour Sasuke avait été celui où il l'avait abandonnée. Elle s'était rendue compte, à se torturer en attendant qu'il arrive, en sachant qu'il le ferait, d'à quel point son départ la déchirerait. Puis quand il fut enfin à son niveau, elle avait d'abord tenté de le retenir, lui promettant de le cajoler, de le chérir, de tout faire pour apaiser sa peine et sa haine, de lui offrir des jours heureux. Le désarroi remplaça sa fougue alors qu'elle remarquait qu'elle ne pourrait pas le convaincre, et elle craqua. Elle ne se rappelait plus des mots exacts, ni totalement de la violence de l'émotion qui lui enserrait la gorge.

À dix-sept ans, elle était prête à plaquer l'intégralité de sa vie pour la dédier à une seule autre. À remplacer ses rêves par les ambitions d'une autre personne, à s'oublier pour soulager, porter un peu de cette charge qui l'écrasait. Elle était prête à tout pour ne pas vivre cette séparation qui la mettrait en pièces, pour ne pas laisser seule cette âme torturée avec ce fardeau.

Et maintenant, pouvait-elle en dire de même pour Shikamaru ?

La réponse, plus compliquée qu'il n'y paraissait, maturait dans son esprit sans parvenir à se formuler clairement. Elle n'avait plus le même âge, plus les mêmes envies, plus le même vécu qu'à ses souvenirs adolescents. Les circonstances n'étaient plus les mêmes, les conséquences non plus. Et surtout, en face d'elle, la personne n'était plus la même.

Le visage défait de Temari s'imposa à son esprit. Le sourire piteux de Naruto alors qu'il prononçait cette terrible petite phrase, juste avant de s'en aller, lui nouait encore la gorge. Pouvait-elle se laisser aller à cette passion avec la conscience aiguë de faire souffrir son entourage ? Était-elle à nouveau capable de laisser ses objectifs de côté, alors qu'elle n'avait jamais été aussi près de réaliser ce qu'elle n'avait pas pu faire dix ans auparavant ?

Et Sasuke ? Y avait-il jamais eu une once de son cœur qui ait répondu ne serait-ce qu'un instant aux sentiments de Sakura ? Si oui, qu'avait-il éprouvé, à devoir la laisser derrière lui, à se forcer à couper court à cette affection nouvelle qui faisait obstacle à sa vengeance ?

Elle en était là de ses pensées, à s'étonner du parallèle entre les situations, à repenser aux paroles de Suigetsu, lorsqu'on toqua à sa porte. À cette heure tardive, au vu de la situation, il ne pouvait s'agir que d'une seule personne. Mal à l'aise, Shikamaru peinait à la regarder dans les yeux. Ils s'installèrent de part et d'autre de la petite table, acculés par l'obscurité de la chambre mal éclairée, une tasse fumante de café devant eux, une cigarette à la main. Le tic-tac de l'horloge résonnait dans la pièce, imperturbable. Sakura contempla Shikamaru, tourné à demi, refusant de lui faire face. Que pouvait-il bien se passer dans sa tête à cet instant ? Quelles pensées le traversaient donc ? Lorsqu'il releva enfin les yeux sur elle, ils luisaient.

Incapable de le supporter, Sakura quitta sa chaise pour prendre Shikamaru dans ses bras. Il enserra sa taille, enfouit son visage dans son cou. Elle finit par chercher ses lèvres à tâtons. Elles avaient un goût salé, un goût de perte et de souffrance, et les mains frénétiques se frayèrent un chemin sous les vêtement, pressant la peau comme pour dire " Je suis là ".

Au petit matin pourtant, Sakura ne se sentit pas la force d'affronter Shikamaru. Elle comprit soudain mieux pourquoi Sasuke avait choisi la nuit pour s'éclipser. Qu'aurait-elle fait, si comme elle auparavant, Shikamaru s'était levé pour lui barrer la route ? Aurait-elle eu la même détermination que Sasuke ? La lettre posée contre les clés qu'elle laissait à l'intention de son amant la narguait, se moquait de sa faiblesse, enfonçait le clou de la culpabilité. Mais elle ne pouvait plus reculer. Elle actionna la poignée, jeta un dernier regard au visage paisible de Shikamaru, résista à l'envie de revenir se blottir contre lui, de caresser ses cheveux noirs étalés sur l'oreiller comme de l'herbe folle. Elle inspira pour se donner du courage, et finalement, ferma la porte derrière elle.

L'escouade n'attendait plus qu'elle pour décoller. Kankurô, appuyé sur sa béquille, lui fit un imperceptible signe de tête. Temari à ses côtés, les lèvres pincées, l'ignora simplement. Sakura s'assit sagement entre Kiba et Rock Lee. Elle n'était pas d'humeur à parler, aussi se contenta-t-elle de hausser les épaules lorsque ce dernier lui demanda si elle se sentait prête. On ne l'est jamais totalement lorsque l'on s'attend au pire, et elle aurait tout le temps du trajet jusqu'au pays de la Rivière pour se faire à l'idée. D'ici là, elle espérait encore profiter de quelques minutes de répit.

L'image du corps de Jûgo, qu'elle avait examiné avant de partir, la frappait encore. Son crâne était percé non pas d'une, mais de deux balles. De calibre différent. À l'instant même où il avait causé la mort de Neji, il avait perdu toute valeur aux yeux de Sasuke. Qu'il ait outrepassé l'ordre de ne pas tuer avait donc octroyé à Sasuke le droit de le punir. Le paradoxe froissait Sakura. Un rire amer montait dans sa gorge, son expression se durcit, et elle se tourna vers la vitre.

Ils s'arrêtèrent plusieurs kilomètres avant la frontière, cachant les 4x4 à flanc de falaise. Le pays de la Rivière, toujours hostile envers le pays du Vent ne leur permettait pas de traverser légalement, et ils ne disposaient pas d'assez de temps pour faire le détour. Que des membres de l'Akatsuki aient été repérés traversant ses remparts ne changeait pas la donne, et Sakura se demanda s'il n'avait pas choisi consciemment d'accueillir en son sein les terroristes, en fermant les yeux et se bouchant les oreilles. Peut-être même en retirait-il un avantage certain.

- À partir de maintenant, nous voyageons en terrain hostile, entama Ibiki. Si nous sommes repérés par l'armée du pays de la Rivière, il y a de fortes chances pour qu'ils tirent à vue, que l'on vienne du pays du Vent ou du pays du Feu. Au-delà de la frontière, nous n'avons aucune idée de la distance à parcourir avant de trouver le repaire de l'Akatsuki. Que chaque équipe se mette en place. L'équipe médicale, je veux un médecin de terrain à chaque équipe, et une équipe permanente en stand-by ici, sous la protection de l'équipe trois.

Affublée d'un bandana sous son casque pour camoufler ses cheveux, Sakura se plaça dans l'équipe huit sous les ordres d'Ibiki. Menée par Kakashi, et composée de Rock Lee, Tenten et Kiba, elle semblait cruellement briller par l'absence vivace de Neji à leurs côtés, comblée par un homme silencieux et austère dont le seul signe distinctif résidait dans sa peau extrêmement pale, surtout pour un militaire. Se sentant observé, il fit volte-face.

- Mon nom est Sai. J'espère que vous êtes plus douée que vous n'êtes belle.

Estomaquée, Sakura le regarda s'éloigner avec l'envie de lui faire ravaler son sourire hypocrite. Indignée, elle se tourna vers Kiba, qui haussa les épaules, comme pour lui dire de ne pas faire attention. L'homme, visiblement, n'était pas à son premier coup d'essai. La méchanceté gratuite était donc inscrite dans son code génétique. Juste pour ça, il aurait mérité d'être blessé pour qu'elle refuse de le soigner. Mais Sakura était médecin avant tout et soupira ; quoi qu'il advienne, elle ferait son boulot.

Ils finirent par se mettre en route, Sakura au centre, les autres déployés devant elle, armes au poing, prêtes à servir au besoin. La forêt luxuriante les accueillit, leur annonçant leur arrivée à la frontière, après les kilomètres de dunes et de roche nue. Sakura déjà un peu essoufflée de l'effort conséquent dont elle n'avait pas l'habitude ralentissait le groupe, et Kakashi décréta une pause, en profitant pour observer les alentours et vérifier l'absence d'avant-poste. Lorsqu'il signifia finalement qu'aucun militaire ne les tenait en joue, ils repartirent. Tendus, attentifs au moindre bruit, au moindre mouvement dans les feuillages, ils progressaient lentement, posant délicatement un pied après l'autre sur le sol jonché de branches. Ils durent escalader le grillage barbelé, mais n'eurent que peu de difficultés à le faire, ce qui les convainquit de rester vigilants.

Le trajet avait été jusqu'alors bien trop simple. Que le pays de la Rivière paraisse avoir négligé les faiblesses de sa frontière avec le pays du Vent était inconcevable. À moins que...

À moins que Sakura ait raison, et qu'ils connaissaient la nature des ressortissants qu'ils accueillaient. S'il n'y avait pas de gardes en faction, alors il n'y aurait pas de témoins de la défection du gouvernement. Les terroristes pouvaient ainsi aller et venir sans problèmes. Ce qui signifiait donc qu'ils approchaient grandement du repaire de l'Akatsuki.

Sakura fit signe à Kakashi de venir près d'elle pour lui faire part de son hypothèse. Il hocha la tête avant d'intimer le silence à tous. Sai sortit une carte topographique de la zone et une boussole, s'arma d'un stylo pour redessiner le tracé de ce qu'ils avaient parcouru. Enfin, Kakashi prit sa radio et communiqua aux autres unités l'emplacement vide de la frontière. Quelques minutes plus tard, deux lui répondirent ; quelques coups de feux avaient été échangés plus au sud. Les autres ne répondirent pas. Un quart d'heure s'écoula avant que la radio ne crache de nouveau. L'escouade d'Ibiki, plus au nord, avait aussi rencontré des difficultés. Un mort, deux blessés, ils avaient préféré se retirer avant d'alourdir le bilan.

Ils étaient face à un goulot d'étranglement, duquel ils étaient visiblement la seule équipe à avoir trouvé l'entrée.

Les affrontements tant au nord qu'au sud résonnaient comme une déclaration de guerre aux oreilles de Sakura, et elle pria pour que ça ne soit pas le cas à celles du pays de la Rivière. Ils ne risquaient pas uniquement l'Akatsuki désormais, mais une riposte nette et violente du pays.

Après avoir noté les positions conflictuelles de leurs camarades, Sai dessina un cône grossier sur la carte à partir de leur point de départ, estimant les probabilités de position de la planque de l'organisation terroriste. Kakashi acquiesça, et prit de nouveau la tête de leur convoi. Ils devaient repartir au plus vite, mettre le plus de distance entre eux et la maigre zone non protégée. Les percées échouées des autres unités alarmaient l'armée de la Rivière, nul doute que d'ici peu, une faction si ce n'est plusieurs, allait ratisser la frontière et ses environs.

Au bout de trois heures de marche au rythme tantôt soutenu, tantôt lent mais toujours prudent, Sai déclara :

- On ne devrait plus être trop loin.
- Il va falloir camper pour la nuit, signala Kiba, qui fixait le ciel d'un œil inquiet.

Kakashi les fit revenir sur leur pas de quelques mètres, indiquant à Sakura le sol bosselé : des pièges parsemaient le terrain, qui leur serait impraticable de nuit. Ça aurait pourtant été le meilleur moment pour porter l'assaut, mais avec un effectif aussi réduit et les renforts qui ne les avaient toujours pas rattrapés, traverser un champ de mines sans visibilité suffisante avec un médecin peu habitué au front n'était pas le meilleur choix stratégique.

Le ventre de Sakura se nouait d'appréhensions. L'idée même de dormir à la belle étoile, si proche d'un nid à terroristes, dans un pays sur le pied de guerre, qui préférait tuer sans faire d'histoire le moindre militaire étranger... Sa tenue de camouflage ne la rassurait plus, mais la désignait désormais comme cible à abattre. Pourtant d'un point de vue de touriste du pays du Feu, elle n'avait jamais craint pour sa vie. Mais ses yeux d'adolescente émerveillée, avaient-ils ripé sur les signes cachés sous le vernis attractif sans les voir ? Ou bien était-ce juste parce qu'elle ne s'était jamais aventurée autant à l'ouest dans le pays, aussi près de la frontière avec le pays du Vent ?

Ses pensées la taraudaient et l'empêchèrent de dormir malgré la fatigue écrasante de sa journée. C'est ce qui, paradoxalement, lui permit de réagir à toute vitesse lorsqu'un clic discret vint rompre la cacophonie de la vie sauvage. La sécurité d'un pistolet ? Une grenade ? Elle tourna les yeux vers Rock Lee qui avait eu le premier tour de garde, et réveilla aussitôt les autres membres de l'équipe qui sautèrent sur leurs armes pour fixer les environs. Il ne leur fallut que peu de temps pour repérer la petite lumière rouge clignotant sous un buisson. Kakashi s'approcha précautionneusement, repoussant du bras Sakura qui s'approchait dangereusement. L'expression horrifiée qu'il arbora ne fit que confirmer les doutes de Sakura. Une bombe.



Le titre fait référence à la nostalgie et la mélancolie.



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