Fiction: Lilas

Des pertes et des séparations, Sakura en a connu, plus qu'elle n'en aurait souhaité, plus violentes qu'elle ne croit pouvoir le supporter. Mais lorsque dix ans après le départ de Sasuke, Naruto se met en tête d'aller le chercher, et que l'Akatsuki se met à menacer la paix, Sakura n'a plus d'autre choix que de s'allier à Shikamaru et aux militaires du Pays du Feu. Peut-être pourra-t-elle ainsi retrouver Naruto et Sasuke... UA
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hane-chan (Féminin), le 01/08/2019
Comme je l'ai déjà signifié dans un précédent chapitre, je n'y connais pas grand-chose au langage des fleurs, et me base sur la définition qui me plaît sur des sites internet pour choisir mes titres de chapitre.
Pour celui-ci, le chrysanthème est censé représenter la fragilité des sentiments.




Chapitre 10: Chrysanthème



Après le lycée, Sakura filait souvent chez Ino, qu'elle ne voyait pas souvent la journée. Son amie, décidée à reprendre le magasin de ses parents lorsqu'ils seraient à la retraite, souhaitait ouvrir une bouquinerie spécialisée dans les fleurs et le jardinage en attendant. Et Sakura, de plus en plus souvent fourrée avec Naruto et Sasuke, voyait ses visites à sa meilleure amie s'espacer. Ce n'était pas fait exprès, mais elles avaient, au fil du temps, perdu une partie de ce qui les reliait. Les cours prenaient le pas sur le temps qu'elles pouvaient partager, et les nouvelles amitiés qui en découlaient aussi. Leur bande d'amis se retrouvait encore souvent à la pause, partageaient leurs repas ensemble, mais ce n'était déjà plus pareil.

Et puis un jour, Sakura comprit. Ino, tout comme la plupart des filles du lycée, était aussi amoureuse de Sasuke. Que Sakura se soit si simplement rapprochée de lui, juste parce que Naruto était son meilleur ami, lui était insupportable. La jalousie grignotait leur amitié aussi sûrement que du venin.

Pourtant, ces quelques instants qu'elles passaient encore toutes les deux, assises au comptoir des fleuristes Yamanaka, attendant qu'un client pointe le bout de son nez étaient de ceux, magiques, où les rivalités n'avaient plus lieu d'être. Ino, dans son élément, reprenait l'ascendant sur Sakura. Elle pouvait de nouveau contrebalancer l'infériorité qu'elle ressentait au quotidien, se tenir sur un pied d'égalité.

À vrai dire, la grande majorité de ses connaissances sur les plantes et leurs bienfaits provenait bien plus des explications de son amie que de ses cours.

Sakura écrasa de son pilon l'algue brune, la réduisit en bouillie pour en extraire le jus. Étrange, comme son amitié avec Ino avait retrouvé de sa superbe après le départ de Sasuke. Il avait fallu que Sakura soit aux abois, perdue, déchirée, au plus bas, pour que celle qu'elle considérait envers et contre tout comme sa meilleure amie ne revienne lui offrir son soutien inconditionnel. Elle transvasa le jus dans l'éprouvette, vérifia les autres ingrédients du remède qui chauffaient doucement sur le feu. Lorsqu'Ino avait disparu, l'abandonnant à son tour, qui restait-il pour éponger son chagrin ? Naruto construisant un bonheur neuf avec Hinata, elle n'avait pas pu se résoudre à porter sur lui l'immense perte. Il se relevait à peine de celle qu'ils avaient subi tous les deux, quelques années auparavant, grâce à la douceur de la belle et timide brune.

Du haut de leur vingt-cinq ans qu'ils fêtaient dans un silence accablé, la place vide de leur amie pour seule compagnie, Shikamaru et elle s'étaient retrouvés pour la première fois, dans le bar où ils avaient coutume de finir leurs soirées. Si personne ne pouvait panser leurs blessures, ne leur restait plus qu'à la solliciter pour raviver un instant le souvenir éblouissant d'Ino, retenir encore un peu sa présence avant qu'elle ne s'estompe totalement.

Revoir Temari, deux ans après la chute lente et vertigineuse de leur mariage précipité... Qu'est-ce que ça pouvait bien remuer en lui ? Un miasme de bonheur salement teinté d'amertume, à n'en pas douter. Un regain d'espoir, peut-être, maintenant qu'il s'était stabilisé. Une bouffée de culpabilité, à mettre en face à face la femme qui avait abandonné l'idée de parvenir à le soigner, et celle qui y était parvenue presque par hasard ? Sakura pouvait-elle décemment en vouloir à Shikamaru de l'avoir exclue de sa vie, alors même qu'il était le plus meurtri ?

Probablement pas.

Ce qu'elle ne cautionnait pas, cependant, c'est qu'il puisse se servir de ce qu'ils avaient un jour pu partager comme d'un moyen de lui soutirer des informations.

Un brusque accès de colère s'empara de Sakura, qui défit sa prise autour du tube à essai avant de le casser. Des larmes de rage, de frustration et de peine lui brouillaient la vision, et elle dut se répéter dans sa tête le protocole de fabrication de l'antidote trois fois avant de retrouver un semblant de contrôle sur elle-même.

Shikamaru n'avait pas compris pourquoi elle s'était dégagée, pourquoi elle l'avait giflé avant de s'en aller. Ça se voyait à son regard, à sa main choquée qui avait touché sa joue rougie. S'il n'avait pas joué aux abrutis, s'il ne l'avait pas traitée ainsi, comme un outil, elle l'aurait certainement mis dans la confidence. Ça lui brûlait les lèvres, de lui raconter. Elle avait besoin d'un soutien, d'un point d'ancrage, d'un second cerveau pour démêler et appuyer ou réfuter ses hypothèses. Elle avait besoin de la complicité qu'ils avaient partagé, sur son canapé, à se renseigner sur les agissements de l'Akatsuki.

Shikamaru l'avait après tout autant sauvée que ce qu'elle avait fait pour lui. Jusque là.

Reléguant cette douleur lancinante au second plan, elle toqua à la porte des quartiers de Kakashi. Il lui ouvrit d'un air circonspect. Quelque chose, dans son attitude, laissait présager qu'une fois de plus elle n'était pas là pour faire la conversation. Et puis, elle se tenait suffisamment éloignée de lui depuis leur départ de Suna, blessée par la trahison du véritable rôle qu'il jouait, pour que son apparition soudaine ne soit que le signe d'une mauvaise nouvelle.

- Je veux venir.

Cette simple phrase lui suffit à la laisser entrer, et il referma porte, fenêtres et volets. L'opération Sable du Désert, prévue quelques jours plus tard, s'entourait d'un secret brumeux. La paix relative instaurée ne permettait pas d'oublier l'idée omniprésente que l'Akatsuki puisse bénéficier d'un appui interne à Suna. Sakura, que tous connaissaient maintenant de visage et de nom, symbole de ce cessez-le-feu, serait la première personne visée, suivie et mise sur écoute, en vue de cette discorde. Ses liens étroits avec les membres des forces de l'ordre des deux pays, ainsi que des membres hauts placés du gouvernement en faisaient une cible de choix.

- Je ne pense pas que ça soit une bonne idée.
- Un médecin sur un champ de bataille ? Certes, non, rarement utile.
- Ce n'est pas ce que je voulais dire. Des médecins au front, on en a toujours besoin. Mais il y en a déjà dans l'équipe, et la grande majorité est bien plus habituée et formée que toi pour ce travail-là.

La guerre civile, une fois de plus, et ses conséquences, si évidentes, parfois étonnantes d'un point positif dans ce bourbier.

- Kakashi... Tu sais autant que moi que Sasori est de la partie. Et rien ne m'étonnerait moins qu'un nouveau poison de sa part. Les nouvelles vont vite, et si vous avez pu étouffer dans l’œuf une révolte grâce au communiqué de presse, vous avez aussi annoncé à qui voudra l'entendre que ce poison est désormais inefficace. Le remède que j'ai créé, s'il peut s'avérer toujours utile, aura une portée moindre.
- Pourquoi alors continuer sa production ?
- Le temps que Sasori mette au point un autre poison, qu'il espérera cette fois plus difficile à contrecarrer, je le soupçonne de continuer de se servir de celui-ci. Il ralentira les troupes, au moins un peu. Il est aussi possible qu'il ait déjà piégé le chemin d'accès à leur planque.

Kakashi porta sa main à son menton, grattant le début de barbe qui perçait sa peau nue, et qu'il n'avait pas pris le temps de se raser.

- Et toi, qu'en retires-tu ?
- Une chance de pouvoir partir à la recherche de Naruto.

Parce qu'elle ne mentionnerait pas Sasuke. Celui qu'elle avait le plus vraisemblablement de chances de retrouver. Dix ans après, les rôles s'inversaient. Naruto n'était plus qu'une ombre se mouvant sur une carte. Il pouvait se trouver n'importe où, sur n'importe quel continent, et les mois d'avance qu'il avait sur elle lui donnaient l'air d'une course perdue d'avance. Sasuke, subitement, se trouvait à portée de main. Si tant est qu'il ne se soit pas déjà éclipsé. Et elle comptait bien sur les informations livrées par Suigetsu pour le rattraper au besoin.

- Très bien, je vais voir ce que je peux faire. Je ne te promets pas de parvenir à convaincre le capitaine, encore moins l'ambassadrice.

Temari avait largement plus de pouvoir que ce que laissait supposer sa simple qualité d'ambassadrice. Au fur et à mesure des journées, Sakura pressentait qu'elle tenait plus d'une cheffe des armées. Et obtenir son aval ne serait pas une mince affaire. Risquer de perdre son drapeau blanc dans une marre de sang... Ne restait plus qu'à espérer que son envie d'éloigner Shikamaru et Sakura ne prenne le dessus.

Un sourire sarcastique vint tordre le visage de Sakura. Qui de Shikamaru ou d'elle était le plus calculateur dans cette histoire ?

- Mais attends-toi bien à une chose, si tu dois venir. D'ailleurs, même si tu ne dois pas venir. Quoi que je dise, tu partiras dès que j'aurais le dos tourné. Tu es de la même graine que Naruto et Sasuke, hein ? Tous les soirs, quand tu rentreras de l'hôpital, viens me voir au terrain d'entraînement numéro sept de la base militaire. Tu dois apprendre à te défendre. Je te préviens, je ne serai pas tendre.

En effet, il ne le fut pas. Le corps endolori par la première session, les muscles raides, Sakura passa l'eau brûlante sur sa peau et les multiples égratignures qui la parsemaient. Des bleus feraient leur apparition le lendemain, mais elle n'en fit pas grand cas, satisfaite d'être parvenue à répéter les quelques prises et mouvements que Kakashi lui enseigna, la félicitant de sa rapidité d'assimilation. Elle était une bonne élève, et elle n'aurait jamais cru que cela puisse un jour s'appliquer à autre chose que ses connaissances. Mais ses capacités d'observation, de mémoire, et la minutie avec laquelle elle avait appris à manier le scalpel lui donnait une facilité d'apprentissage surprenante. Ses connaissances de l'anatomie aussi étaient un plus majeur : d'expérience, elle avait déjà intégré les points faibles du corps humain. Ne lui restait plus qu'à apprendre à s'en servir.

À sa troisième session, Shikamaru l'attendait à la sortie. Tendu, les mains dans les poches jouant avec son paquet de cigarettes, il la fixait d'un air grave et dur. Elle s'approcha de lui avec l'envie de partir en sens inverse, alors que ses jambes flageolaient de l'effort qu'elle avait fourni, et qu'elle ne souhaitait que s'effondrer dans son lit.

- T'es complètement folle ! l'apostropha-t-il.
- Merci, ça fait toujours plaisir à entendre. Et toi, sinon, ça va ? Bonsoir, d'ailleurs. Mais est-ce un bon soir ?
- Joue pas à ça avec moi.
- Ah, tu préférerais que je joue à autre chose peut-être ? Oh, je sais pas, disons à celui qui fait semblant d'en avoir quelque chose à foutre ? À moins que tu préfères l'autruche ? Très bon jeu aussi, je me dois d'admirer ta performance.
- Arrête tes conneries. Tu ne peux pas partir. Tu ne peux pas être sérieuse !
- Je ne peux pas être sérieuse ? Avoir envie de me rendre utile, d'être un bon médecin, alors que je sais que je suis actuellement la seule en mesure de préparer des antidotes ? D'avoir envie, moi aussi, d'aller chercher Gaara, de le ramener vivant ? Et si possible en évitant que la moitié des troupes ne soit décimée ?

Elle hurlait maintenant, ne prenant qu'à peine conscience que des rideaux se relevaient pour les observer, que Kakashi, en retrait, tentait de leur assurer un peu d'intimité en forçant à faire rentrer les militaires qui, curieux, venaient assister à la scène.

- Tu cherches tant à crever que ça ? Frôler une fois la mort ça t'a pas suffi ? On prend les mêmes et on recommence, c'est ça ? Ah non pardon, on va rajouter un peu de difficulté, cette fois ça sera pas des pirates mais des terroristes !
- Tu savais d'avance que j'irai ! Tu peux pas faire semblant que ça t'importe maintenant alors que tu savais déjà !
- Ça m'importait déjà ! rugit-il. Bon sang, Sakura, je t'...

Il s'arrêta net, horrifié. Temari, qui venait d'apparaître, se décomposa.



J'aime beaucoup l'interaction finale entre Shikamaru et Sakura, entre honnêteté et silences.
J'avais choisi le titre en grande partie pour cette scène finale.




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