Fiction: Luciole

Timide, douce, souriante, gentille, mordue du dessin et de l'architecture… Seiko avait tout pour être aimée par ses semblables. Et elle l'était, jusqu'au soir où tout son joli petit monde s'est effondré, l'entraînant en un rien de temps vers le fond. Néanmoins, bien que perdue au cœur d'une foule haineuse de ce qu'elle est devenue, quelques personnes ont détecté la détresse dans son regard et ont pris l'initiative de faire revivre cette lumière qui s'était éteinte.
Classé: -16D | Général / Action/Aventure / Drame | Mots: 58213 | Comments: 9 | Favs: 4
Version imprimable
Aller au
MlleChouette (Féminin), le 02/03/2016
« N'éteins pas ta lumière
Continue d'éclairer chaque recoin de cette nuit
Persévère, encore et encore
Toujours
Et tu ensoleilleras le monde »

Ses dernières paroles.
À ne jamais oublier

Jamais.




Chapitre 8: Chenille - Si proche



Seiko ne se sent plus. Ce n'était qu'un rhume, et voilà que son front s'imbibe de sueur en pleine nuit. Ce qui l'a en réalité réveillée, ce n'est pas cette forte fièvre qui échauffe carrément sa chambre, mais c'est qu'elle a soudainement manqué d'air. Elle tente de respirer par le nez, force sur ses poumons qui semblent se bloquer à la moindre tentative, puis reprend son souffle comme si on lui avait plongé la tête sous l'eau durant des secondes interminables.
La gamine essuie la peau de son visage humide et brûlant à la foi avant de se redresser avec faiblesse sur son matelas. Son dos froid parcouru de quelques horribles frissons la fait souffrir, mais son visage garde son calme. En vérité, ses pensées se sont tournées vers Naruto dès qu'elle a ouvert les yeux… Elle a ressenti quelque chose, un mal soudain qui lui mord les tripes avec tous les crocs de la gueule…
C'est en posant ses pieds nus sur le parquet glacial que la jeune fille ressent la morsure de la nuit qui lui donne la chair de poule. Elle demeure cependant assise, haletante, toujours pensive à analyser ses émotions… Son cœur se froisse à l'idée de la mort de son ancien camarade, et ses lèvres en tremblent d'anxiété. Si Sasuke le tue… s'il le tue… elle s'en voudra tellement qu'elle en sera malade avant d'en mourir…

Seiko finit par se lever sur ses jambes et à réfléchir sur le mal qui l'accable, puis quitte sa chambre d'un pas lent sans faire l'effort d'allumer une quelconque lampe. Elle traine ses pas dans l'obscurité d'un couloir qui conduit à sa salle de bain pour ensuite pousser la porte du bout de ses doigts. Elle cherche la lumière en tâtonnant les carreaux glacés à côté de la porte. L'interrupteur est juste là… Trouvé.
Mais non…

— Fait chier…

L'ampoule a dû griller.
La gamine effectue un rapide demi-tour en direction de sa chambre afin de dénicher une lampe de poche. Elle n'a pas l'intention de résoudre cet ennuyeux problème tout de suite, elle s'en occupera demain… La seule chose dont elle a besoin, ce sont des médicaments. Cependant, lorsqu'elle actionne l'interrupteur de la lumière de sa chambre, l'obscurité demeure. Seiko ne jure pas cette fois-ci, et évalue plutôt la situation malgré les quarante de fièvre qui lui plaquent les cheveux sur le front.
Elle se déplace toujours dans l'obscurité vers son lit afin de chercher la lampe de torche normalement enfouie sous ses draps défaits jusqu'à entendre un objet lourd cogner contre le parquet avant de rouler sinistrement. Elle s'immobilise un instant, puis cherche autour du meuble. Elle finit enfin par rencontrer une manche en plastique après s'être accroupie, cependant, elle ne se redresse pas tout de suite… Quelque chose cloche.

Seiko sert l'objet dans ses frêles mines grelotantes de froid, puis bondit avec une vivacité surprenante sur ses pieds en se retournant et balance son bras dans un arc de cercle horizontal qui se finit derrière elle.
Elle n'a pas manqué sa cible, percutée de plein fouet par la tête de la lampe dans un hurlement de douleur. La gamine s'empresse de presser l'interrupteur de son arme de fortune pour chasser les ténèbres de sa chambre. C'est dans un sursaut d'horreur qu'elle illumine un visage masqué d'un tissu sombre. Seiko ne réagit pas, choquée… Cet homme ne porte pas de lunettes sombres comme l'assassin de sa mère, mais il n'en reste pas moins imposant… L'enfant ne se demande pas comment elle tient sur ses jambes tétanisées par l'effroi, néanmoins, elle sait pertinemment qu'elle revit un terrible moment de son existence, et encore une fois, elle se sent impuissante face à la menace. La rage ne l'anime pas, c'est plutôt la terreur qui l'étouffe dans son étreinte passionnelle. La gamine fait tomber la lampe à force de tremblements avant de reculer de quelques pas maladroits. L'objet roule dans un arc de cercle avant de s'arrêter pour éclairer l'homme vêtu de noir. Elle ne le voit pas fuser sur elle, mais elle sent sa gorge se tordre sous la pression de sa poigne et le sol se dérober sous ses pieds.

Non… Seiko refuse catégoriquement d'abandonner… C'est une cuisante douleur au foie qui la ramène à la raison. Elle tâte alors le mur noir de sa main gauche pour saisir un cadre dans lequel se referme un de ses meilleurs dessins et le balance avec une telle impétuosité sur le crâne de son agresseur que des éclats de verre volent par millier dans la pièce de la mort. L'enfant ne se souvient pas qu'elle est gravement malade, alors elle se précipite sur l'homme en oubliant la différence de gabarit après avoir saisit un morceau de verre qui traînait on ne sait trop où. Les ténèbres de la pièce sont seulement chassées par une lumière qui n'éclaire pas du bon côté, mais Seiko connaît sa chambre, et ses capacités sensorielles sont suffisamment développées pour localiser son futur assassin. Elle cherche à planter le fragment transparent dans sa gorge, mais son geste est puissamment bloqué par la main terrible. Néanmoins, ce que l'on ne sait pas, c'est que la combattante a, en fait, attrapé deux morceaux de verre, et c'est le deuxième, logé dans sa main gauche qui vient perforer l'abdomen de l'homme en noir, se plonger dans sa chair, entièrement, jusqu'à disparaître sous son vêtement sombre.

Il suffoque, vacille sur ses jambes, pressant la plaie de sa main gauche et lâchant un kunai ensanglanté. Seiko tremble violemment de tout ses membres, elle ne sait toujours pas comment elle réussit à se tenir droite sur ses pauvres gambettes, ses pieds sont comme plantés dans son parquet tandis que la masse sombre s'agenouille devant elle en empoignant le t-shirt ensanglanté de la gamine.
Mais il se redresse maladroitement et se précipite vers la sortie en bousculant les murs dans le silence de la nuit, jusqu'à disparaître derrière la porte de l'appartement qui mène à la cage d'escalier et laissant Seiko de nouveau seule au milieu du saccage de sa chambre.

La main gauche plaquée sur son ventre au niveau du foie, l'enfant tombe à genou, affaiblie par une douleur intense. Elle n'ose pas découvrir son abdomen, car elle est plus terrifiée qu'autre chose. Respirer la fait atrocement souffrir, et se relever est un geste impensable. Son regard perdu se pose sur le kunai ensanglanté de son assassin. Elle ne peut s'empêcher de grimacer et de serrer les paupières.
Elle finit par s'effondrer sur le côté, mourante… En s'imaginant étendue, là, sur le sol, poignardée, se vidant de son sang, elle ne peut faire le rapprochement avec sa mère. La gamine tousse dans son agonie, recrachant un peu de sang qui s'est logé dans sa gorge, puis respire encore quelques longs souffles avant de fermer les yeux pour un très long moment…

Il est huit heures, et Iruka se tient sur terrain d'exercice à préparer l'entraînement de son élève. L'anxiété et la tristesse habitent son grand cœur, car il a appris ce matin, très tôt, que Naruto a été ramené dans un état d'une extrême critique à la suite d'un combat l'opposant à Sasuke, et puis, Choji a aussi été retrouvé, inerte, au pied d'un arbre. Son cœur ne battait plus…
Du groupe, seul Shikamaru s'en est sorti sans trop graves blessures.
L'instituteur relève la tête, espérant voir arriver Seiko et ainsi, se changer les idées, mais devant lui, seule l'herbe frémit au gré d'un léger vent. Iruka s'étonne. Son élève a toujours été très ponctuelle, à ne se pointer ni trop tôt, ni trop tard, toujours à l'heure pile, à la manière d'un automate. Il aurait pu lui donner rendez-vous à sept heures cinquante-huit, elle serait là à sept heures cinquante-huit, sauf aujourd'hui.
Il lui laisse une petite marge de cinq minutes dans un vent qui balaie la poussière de la nuit, et lorsqu'il pose de nouveau ses yeux sur la grande aiguille de sa montre, dix minutes sont déjà tombée dans le temps. Son anxiété s'intensifie au moment où Ibiki franchit le seuil du terrain. L'inspecteur lui lance un regard interrogateur.

— J’espérais trouver Seiko, lui déclare-t-il.
— J'espérais la voir arriver… Qu'est-ce que tu lui veux ?
— Elle m'a envoyée inspecter ailleurs, hier. C'est ce que j'ai fait.
— Et alors ? se renseigne Iruka.
— J'ai fait comme si elle était vraiment innoncente et j'ai discuté avec la personne qui a démenti son alibi.
— Erwan Kurama ?
— Oui.

L'instituteur hésite, perplexe et sceptique. Il s'agite un peu, avant de demander :

— Si ce n'est pas Seiko, qui a tué Yui, pourquoi ça serait lui ?
— Je ne sais pas… Il n'y a aucun lien direct entre lui et la victime.
— Un lien intermédiaire ?
— Seiko, répond simplement Ibiki. Erwan était l'apprenti de Konohana, mais il n'est pas très net…
— Pourquoi ?
— Il répond toujours en faisant des détours. Il faudra que je discute avec Ema : ils se connaissent bien. Seiko est en retard ou elle sèche ?

Iruka soupire…

— Elle manifestait un certain intérêt, hier. Je doute qu'elle sèche. Peut-être qu'elle ne s'est pas réveillée, mais ça m'étonne, quand même…
— On n'a qu'à aller voir chez elle, propose Ibiki.

Le professeur hoche lentement la tête avant d'ouvrir la marche vers le village.

En traversant les rues tranquilles de Konoha, les deux hommes discutent au sujet de Naruto et de Sasuke, de leur relation, en particulier de l'attachement du jeune Uzumaki envers le rescapé du massacre des Uchiwa, et un peu de l'isolement de ce-dernier. Il est dit que si Naruto n'a pas réussi à changer sa décision, seul Sasuke sera en mesure de trancher.

— Mais il faudrait quand même que quelqu'un le réveille, marmonne Iruka en sonnant à l'interphone de Seiko.

Ils attendent dix secondes avant d’insister. Toujours rien.

— Bizarre…

Ibiki recule de quelques pas afin de distinguer la fenêtre de la chambre.
Le bâtiment où vit Seiko se constitue de seulement deux étages pour quatre appartements dans lesquels logent une femme en congé de maternité, un couple de retraités, un étudiant en économie et la Petite Peste de Konoha. Il s'agit d'une copropriété dont le tuteur de la gamine faisait autrefois parti.

— Les volets sont fermés…
— Hein ?

Iruka appuie une troisième fois sur l'interphone sans qu'aucune réponse ne lui revienne.

— Peut-être qu'elle a oublié de les rouvrir…

Mais Ibiki ne l'entend pas de cette oreille. Son métier lui a appris à différencier les erreurs quotidiennes aux éléments inquiétants. Alors il se déplace jusqu'au balcon de la salle à manger à la manière du shinobi aguerri qu'il est, puis pose sa main sur la vitre afin de distinguer l'intérieur de l'appartement. Rien d'anormal, à première vue. Il retrouve le fauteuil sur lequel il s'est assis pour boire le café de Seiko… Rien d'anormal ? Et ces tâches noires sur le carrelage ? Et ces traînées glauques sur les murs ?…

— Alors ? s'enquiert Iruka, plus bas.

Bien qu'Ibiki doute encore de ce qu'il voit, il n'hésite surtout pas à briser le double vitrage de plusieurs puissants coups de coudes dans un fracas abominable et à se plonger dans l'entrée de fortune aussi tranchante que des lames affûtées. L'instituteur le suit, angoissé, faisant craquer les morceaux de verre sous ses semelles de militaire.

— Putain…

Les traces de sang mènent vers la sortie de l'appartement soigneusement fermée afin d'éviter une découverte morbide qui aurait pu venir plus tôt et proviennent de l'autre côté du couloir qui conduit à la chambre de Seiko. Les deux hommes sont sur le seuil l'instant suivant pour sursauter, après avoir allumer la lumière, devant le corps ensanglanté d'une jeune fille aux couleurs de la mort jonchant au milieu de sa propre essence. Son doux visage est dégagé de ses boucles noires souillées qui s'étendent sur le sol brun. Il est rare de voir Seiko aussi paisible, et si on en oublie à pâleur et tout ce sang, on dirait qu'elle sommeille…
Mais on ne sait pas lequel des deux hommes se jette en premier aux côtés de l'enfant inerte pour vérifier son état, bien qu'apparemment, elle semble être partie depuis bien longtemps.

— Son pancréas a été perforé, remarque Ibiki avec un semblant d'angoisse.

Iruka a libéré le cou de la jeune fille afin d'évaluer son poul.

— Elle…

L'inspecteur lui jette son regard aquilin, attendant avec une juste impatience une suite qui tarde à venir.

— Elle est très faible…

L'inspecteur n'attend pas plus longtemps pour la soulever dans ses bras puissants et se relever sans peine. Seiko est légère, peut-être parce qu'elle s'est vidée de son sang, mais cela permet au shinobi de se déplacer sans être ralenti. Il n'attend pas non plus l'homme qui l'accompagne pour quitter l'appartement par là où ils sont entrés et défiler dans les rues et sur les toits de Konoha tout droit en direction de l'hôpital. Suivit de près par Iruka qui finit par le devancer dans cette course, il ne se demande pas comment l'enfant peut encore être en vie après cette blessure mortelle. Les passants : villageois, commerçants et shinobis, observent d'abord d'un regard inquiet ou choqué cette tentative de sauvetage, mais c'est lorsqu'ils reconnaissent la Peste de Konoha qu'ils finissent par le détourner d'un air méprisant, et les plus culottés hurlent de la laisser crever. Le décor défile autour du trio, et l'établissement ciblé se rapproche rapidement jusqu'à ce qu'il arrive à ses portes. C'est Iruka qui les ouvre avec violence, provoquant ainsi une grande agitation à l'accueil. Ibiki déboulant dans la seconde qui suit avec le corps maculé de sang d'une gamine, les infirmières ne tardent pas à pointer leur uniformes blancs.

— Elle s'est faite poignarder, lâche l'instituteur entre deux souffles.
— Un chirurgien ! commande une d'entre elles.

Deux hommes accourent en conduisant un brancard qui roule sur le carrelage immaculé, et ils semblent, aux yeux d'Ibiki, arracher Seiko de ses bras pour la placer sur leur chariot bizarre et lui fourrer un masque sur le nez. Il regarde, soucieux, la troupe médicale s'enfuir dans un couloir et disparaître dans un virage.

— Ça ira, rassure Iruka. je pense.
— Il doit y avoir le pronostic vital, rétorque l'homme au bandana.

Les bras ballants, il ne sait pas quoi en faire. Alors il les fourre maladroitement dans le fond des poches de son long manteau noir sans manquer de mordre d'inquiétude sa joue.

— Qui est-elle ? se renseigne une femme de l'accueil.
— Seiko, répond le professeur. Seiko Matsuda.
— Ah. Ok.
— Je devais l'entraîner à huit heures, mais elle n'est pas venue… On l'a découvert dans sa chambre dans cet état.

Ibiki jette un coup d'œil sur Iruka. Inconsciemment, ce-dernier s'inquiète assez de Naruto pour se soucier de Seiko. Bien entendu, c'est par affinité… Il est bienveillant d'espérer que les deux s'en sortent, tout comme il est normal se préoccuper plus de l'un que de l'autre.

— Vous pensez que ça ira ? interroge l'instituteur.
— Difficile à dire, on manque de personnel car il y a beaucoup de monde aujourd’hui, notamment avec l'équipe qui est partie hier matin.
— Je vois…
— Je vous propose d'attendre ici. Seiko a été placée en soins intensifs.

Le policier tourne les talons en déclarant, de sa voix grave, qu'il se rend sur le terrain afin d'élucider cette tentative de meurtre.

Ibiki est effectivement revenu seul dans la chambre saccagée de Seiko. Accroupi, il analyse les indices et essaie de restituer la scène : en vain. La lampe de poche étant allumée, les draps complètement retournés… rien n'est connecté, et pourtant… Seuls les éclats de verre et le cadre en bois fracturé signifient la lutte de l'enfant contre l'agresseur. Il a aussi remarqué le kunai qui appartient à un shinobi, sans aucun doute…
Il est bientôt neuf heures, l'inspecteur quitte l'appartement pour interroger avec un calepin les voisins qui déclarent n'avoir rien entendu de suspect.

— Et les traces de sang dans le hall ? insiste Ibiki.
— On est que quatre à vivre ici, répond une femme avec sa fille de quelques mois dans les bras. Et personne ne commence sa journée suffisamment tôt pour voir ces détails…
— Vous avez entendu crier ?
— Non… pas un bruit, c'est le plus étrange.
— Éclats de verre… rien ?
— Non, rien, Inspecteur.

Ibiki soupire…

— Quelque chose d'anormal à signaler, en outre ?
— Oui : une panne de courant, ce matin, en se réveillant. Ça n'arrive pas souvent.

Il fixe un instant la jeune mère, puis gribouille sur ses notes.

— Merci de votre précieuse coopération, fait-il en refermant son calepin sur son stylo.
— Je vous en prie. C'est terrible, ce qu'il s'est passé…

Ibiki la salue poliment d'un hochement de tête silencieux avant de redescendre chez Seiko.

C'est à force de réflexion et de connexions plausibles qu'il parvient à restituer exactement la scène de violence. Il ne comprend néanmoins pas pourquoi un shinobi s'en est pris à la gamine, à moins d'avoir été embauché… Toutes ces pistes le rapprochent méchamment d'Erwan. Il a tué Yui, Seiko le savait, alors il a essayé de la tuer. Mais s'il l'a tué pour elle, plus rien ne correspond… Ibiki ne peut pas se baser sur des déductions trop vagues, car il peut avoir à faire à deux personnes bien distinctes. Il devra interroger Ema, mais avant toute chose : retrouver celui qui a mis Seiko dans cet état. C'est pour cela que l'inspecteur retourne sur le chemin de l'hôpital. Quoiqu'il est passé au préalable au poste de police afin d'envoyer deux officiers surveiller les lieux et veiller à ce que personne ne pollue la scène.

En entrant dans l'établissement médical, il retrouve Iruka qui discute avec un infirmier. Il hoche la tête au moment où l'inspecteur arrive à son niveau en demandant des nouvelles de la gamine.

— Écoutez, Monsieur Morino, fait l'homme en blanc. On manque vraiment de personnel, et comme vous le savez probablement, notre contrat stipule que la priorité est aux shinobi, pas aux civils…
— Donc Seiko agonise dans votre hôpital, écorche-t-il gravement.
— Elle est entre la vie et la mort. C'est un miracle qu'elle ne soit pas décédée dans la nuit, alors il faudra qu'elle tienne encore un peu avant qu'on s'occupe sérieusement d'elle.

Ça, c'était cash. Ibiki n'en revient pas…

— Quitte à perdre quelqu'un, ajoute-t-il, on préfère que ce ne soit pas une force du village.
— Vous savez que l'auteur de cette tentative de meurtre est probablement dans cet hôpital ? Et que vous le sauvez en priorité ?
— Si c'est le cas, nous sommes obligés… Je suis désolé, Monsieur Morino.
— Je veux les noms des personnes et la cause de leur entrée à l'hôpital entre hier soir et ce matin, tranche-t-il. Et Seiko est un élément important de mon enquête, je tiens à ce que vous appliquiez cette priorité sur son cas.
— C'est… c'est impossible, j'en suis navré.
— Vous allez le faire, ou je vous fais incarcérer pour complicité de meurtre.
— Vous n'avez ce droit !
— Vous pariez votre liberté ? La liste, s'il-vous-plait…

Mais l'infirmier n'est pas de taille contre le chef de la police. Ce dernier, sourcils froncés par les muscles du mépris, le dévisage de son regard déstabilisant du haut de son mètre quatre-vingt-treize. Il sait parfaitement qu'il abuse de son autorité, mais la menace et le bluff sont les meilleures des solutions pour obtenir ce qu'on veut dans ce monde continuellement en guerre.
Alors l'infirmier, docile, ordonne à une femme de l'accueil de présenter à Ibiki la liste des patients dernièrement arrivés. Elle se lève maladroitement pour s'avance jusqu'au géant avec une démarche restreinte par une jupe trop moulante et des talons trop hauts, et enfin, lui tend un dossier. L'inspecteur la considère avec un dédain aigu avant de lui chiper d'un geste sec l'ensemble de feuilles, puis scrute les accidents qui lui semblent déconnectés de la norme. Il s'arrête sur Choji Akimichi.

— Choji est mort, dit-il avec indifférence. Pourquoi est-ce que vous cherchez à le ramener ?
— Les progrès de la médecine ont fait qu'on peut sauver quelqu'un en tentant le tout pour le tout.
— Il n'y a qu'un seul homme capable de ramener quelqu'un d'entre les morts, et il n'est pas ici.
— On le sait…

Ibiki n'ajoute rien, il continue plutôt de parcourir la liste, mais dépassant la date sans trouver quoique se soit, il se voit obligé de remonter et de repartir en se concentrant d'avantage. C'est là qu'il s'arrête sur un nom inconnu à sa mémoire, mais dont le diagnostic lui semble carrément suspect et en corrélation avec la scène dans la chambre de Seiko.

— Fujiromi… Que vous a-t-il dit en arrivant ?
— Il était complètement alcoolisé… Il a fait tomber une bouteille en verre avant de s'allonger dessus…
— Quand je pourrai l'interroger ?
— Cet après-midi, je pense.

Ibiki jette un coup d'œil sur Iruka qui a jugé plus sage de se tenir muet durant tout cet affront opposant l'infirmier et l'inspecteur. De toute façon, il n'avait pas à intervenir, car rien ne fait de lui un homme de la police.




L’inspecteur déjeune en compagnie de ses collègues au poste de police de Konoha et ils n'ont de cesse de l'interroger sur l'évolution de son enquête. Leur chef explique clairement qu'il est à deux doigts de mettre la main sur Erwan, qu'il ne lui reste plus qu'à faire parler celui qui a tenté d'assassiner Seiko et de trouver un mobile qui permettrait l'arrestation du couturier.

— Ema a grandi avec lui, lance-t-il. J'ai été la voir après être passé à l'hôpital et ce qu'elle m'a décrit, c'est un enfant diabolique avec des antécédents de psychopathie.
— Seiko a plus l'air d'une psychopathe que lui
— Accuser quelqu'un en fonction des apparences tout en étant flic, rétorque Ibiki, c'est la pire des erreurs…

L'homme se tait, incapable de former ses idées après cette cassure. Il faut dire que son chef l'a coupé à peine a-t-il marqué sa ponctuation… Le jeune officier de police se contente plutôt de pousser le riz du bout de sa fourchette sans oser prendre une bouchée.

— Ibiki-sempai, fait une femme en entrant dans le petit réfectoire. Kurenai voudrait te parler.

Le géant hésite. Il a le nez fourré dans son assiette, et voilà qu'on vient le déranger…

— Elle dit que c'est important…

La policière sursaute lorsque le regard de son supérieur se plante sur elle. Il mord une dernière fois dans sa cuisse de volaille et s'essuie les lèvres et les mains sur une serviette maculée pour soulever la montagne qu'il est et s'avancer lourdement vers elle, la contourner, et laisser son long manteau frôler son uniforme féminin. Elle ne se retourne pas. Il était si proche…

Ibiki finit par franchir les portes du poste de police pour croiser le regard fascinant de Kurenai qui l'attendait patiemment à l'extérieur. Elle arrange une de ses mèches ondulée avant de prendre la parole :

— J'ai appris pour Seiko. Aussi pour les autres, mais ce n'est pas le propos. Je suis venue te parler d'elle.

Elle soupire un instant avant de poursuivre :

— Hinata m'a confiée, ce matin, avoir discuté avec elle.
— Que t'a-t-elle dit ?
— Elle lui a demandé ce que ça fait de tuer quelqu'un, et la réponse de Seiko semble indiquer que le meurtre n'a pas été prémédité.

Ibiki fronce les sourcils, perplexe.

— Elle a répondu quoi, exactement ?
— Qu’elle a tué pour se protéger, soupire Kurenai. Que c'est la peur qui l'avait poussée, et que lorsqu'une sa vie ou celle de quelqu'un qui nous est cher est en danger, il ne faut pas réfléchir aux conséquences et éliminer la menace le plus rapidement possible.

Le colosse plonge ses mains dans les poches de son manteau sans manquer de se mordre la joue.

— J'entraîne Hinata et le reste de l'équipe cet après-midi, indique la belle femme. Si tu veux venir poser quelques questions à Hinata, n'hésite pas.

Ibiki trouve le temps de la remercier avant qu'elle ne se décide à lui sourire et éloigner sa silhouette féminine dans le cœur de Konoha. Le vent soulève le manteau de l'inspecteur dans son hurlement tranquille et transporte avec langueur les nuages par delà la frontière entre les arbres et le ciel.
L'homme balafré inspire à pleins poumons l'air pur qui l'enveloppe dans sa fraîcheur d'automne, expire doucement par le nez, puis retourne à l'intérieur du bâtiment qui lui est dédié afin d'écouter l'aveu de Seiko enregistré par ses soins datant d'il y a maintenant quatre jours…

« Moi, Seiko Matsuda, n'ai pas vu Erwan Kurama au magasin de textiles le vendredi 7 octobre à vingt heures. Pour la simple et bonne raison que je ne dessinais pas au square de Konoha. J'ai menti sur la date du croquis que j'ai travaillé en amont, un jour férié, à la même heure. »

C'est ce que grésille le magnétoscope dans les oreilles d'Ibiki. Les sourcils constamment froncés depuis sa discussion avec Kurenai, il juge que le plus important à retenir est la dernière phrase. Oui, c'est cette phrase qui dément toute cette conspiration, cette mise en scène ; c'est exactement cette phrase qui souligne l'incohérence des propos de Seiko. L'a-t-elle fait exprès ? C'est une possibilité, à ses yeux : cette coopération façonnée lui va à merveille ! Ibiki se surprend à doucement sourire de cette réflexion. Cependant, la savoir entre la vie et la mort ne l'amuse plus autant…
Il se redresse en ne manquant pas de faire traîner la chaise contre le sol bétonné.
Quoiqu'il en soit, il aura quelques mots à lui dire lorsqu'elle se réveillera.
Si elle se réveille…



Chapitres: 1 2 3 4 5 6 7 [ 8 ] 9 10 11 12 13 14 15 Chapitre Suivante »



Veuillez vous identifier ou vous inscrire:
Pseudo: Mot de Passe: