Fiction: Luciole

Timide, douce, souriante, gentille, mordue du dessin et de l'architecture… Seiko avait tout pour être aimée par ses semblables. Et elle l'était, jusqu'au soir où tout son joli petit monde s'est effondré, l'entraînant en un rien de temps vers le fond. Néanmoins, bien que perdue au cœur d'une foule haineuse de ce qu'elle est devenue, quelques personnes ont détecté la détresse dans son regard et ont pris l'initiative de faire revivre cette lumière qui s'était éteinte.
Classé: -16D | Général / Action/Aventure / Drame | Mots: 58213 | Comments: 9 | Favs: 4
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MlleChouette (Féminin), le 13/12/2015
« N'éteins pas ta lumière
Continue d'éclairer chaque recoin de cette nuit
Persévère, encore et encore
Toujours
Et tu ensoleilleras le monde »

Ses dernières paroles.
À ne jamais oublier

Jamais.
__________________

Sujets sensibles à l'horizon, mon capitaine !
PS : Je ne pense pas tout ce que dit le personnage principal, hein :$




Chapitre 2: Chenille - Et après ?



Nous retrouvons la petite Seiko quelques années après le meurtre de sa mère, justement debout devant sa sépulture au milieu de neuf autres sous un ciel d'automne. Les arbres chuchotent autour d'elle, agités par un vent de rumeurs au sujet de la gamine maintenant âgée de douze ans. Son regard noir a effectivement perdu son éclat, et son sourire ne se dessine plus pour les mêmes raisons qu'autrefois. Seiko se recueille dans le silence d'un après-midi assombri par la saison, tandis que le vent transporte les souvenirs au delà des feuillages, par dessus les nuages, pour se perdre dans une contrée lointaine et s'évanouir dans le champ de l'oubli. En effet, personne ne se souviendra de cette nuit atroce que l'on a surnommée le lendemain la Pluie de Sang, car cette affaire a été délaissée par la police. Seiko jette un coup d'œil sur les neuf autres tombes. Plusieurs personnes ont été visées, dont Konohana Matsuda. Aucun témoin n'a pu décrire les meurtriers qui ont évidemment agi en groupe et dans un silence absolu. Pas même les étoiles, tellement le ciel était brouillé…
La jeune fille tient entre ses mains un bouquet de fleurs rouges, blanches et jaunes, car sa mère a toujours adoré le jaune. Elle s'agenouille sans précipitation pour placer convenablement son offrande enveloppée dans une sorte de papier blanc. Elle reste ainsi un long moment à savourer la caresse d'un vent d'automne, ses yeux noirs rivés sur la sculpture de marbre.
Le gravier crisse dans son dos sous des semelles légères. Seiko ne manifeste aucune attention envers la personne qui s'approche de la tombe voisine, ou de celle de Konohana qui a été très populaire de son vivant.

— Bonjour, Seiko, souffle une voix masculine.
— Bonjour.

Quelques oiseaux chantent, tout près, la mélodie de la quiétude sous un rayon de soleil qui défie les nuages.

— Je suis Erwan, un des apprentis de ta maman à la boutique de textiles.
— Je m'en souviens.
— Je voulais te dire que si tu as besoin de parler, je…
— Ça fait longtemps que je ne pleure plus, tranche-t-elle froidement, toujours sans le regarder.

Le jeune homme âgé d'une vingtaine d'années n'ose pas vraiment prendre la parole, sachant parfaitement que c'est un sujet délicat, mais au final, il se relance :

— Ne parle pas, devance-t-elle. Je n'ai pas besoin de ça.

Erwan hésite un instant. Jugeant préférable de laisser la jeune fille seule devant la tombe de sa mère, puisque c'est ce qu'elle réclame, il s'éloigne comme il est venu.
Seiko écoute le murmure de la nature encore quelques minutes, lourdement peinée par cette fameuse nuit où elle a assisté à la mort de la femme qui a pris soin d'elle autant qu'elle a pu durant ses petites années. Elle finit à son tour par quitter les lieux afin de rentrer chez elle.
La jeune fille traverse l'immense cimetière majoritairement peuplé d'anciens combattants, dont certains se sont sacrifiés lors d'une récente attaque menée par une organisation criminelle et savamment orchestrée lors des examens Chuunin. Elle soupire, les mains dans les poches, dans ce vent incessant qui balaie la poussière des sols et qui y apporte les feuilles mortes. Seiko quitte le gravier pour marcher sur des pavés encore humides, mais alors qu'elle fixe le motif interminable de ce tapis de pierre, elle se cogne à un homme, manifestement très grand, vêtu d'un long manteau noir. La gamine lève son regard, et reconnaît, de par les balafres sur son visage, cet air sévère et ce bandana sombre noué à son crâne, le chef de la police.

— Matsuda Seiko.
— Bonjour, Inspecteur, fait-elle sur un ton détestable.
— J'ai quelques questions à te poser.

Seiko constate la présence de son ancien instituteur qui détourne son regard du sien, lui aussi marqué par une cicatrice nasale.

— À propos de la mort de mon tuteur ?
— Où étais-tu vendredi soir ?
— Ça dépend. Quelle heure ?
— Vers vingt heures.

Elle semble réfléchir un instant, puis indique elle se trouvait à côté du square.

— Quelqu'un pourra le confirmer ?
— Non. Enfin, je ne sais pas. Seulement les personnes qui m'ont vue et qui se souviennent de moi. Mais je dessinais, si vous voulez savoir.

Ibiki jette un coup d'œil sur l'instituteur qui prend de suite la parole :

— Seiko dessine énormément, et de préférence en plein air.
— Dites, c'est des questions qu'on pose aux suspects, ça. J'ai la gueule d'une meurtrière psychopathe qui tue dès qu'on l'emmerde ?

L'absence de réponse et le regard inquiet d'Iruka fait réaliser à Seiko son manque de finesse, et par la même occasion, la véracité dans son sarcasme.

— Monsieur Yui était un type à problèmes et un ivrogne, souligne-t-elle.
— On a eu cette confirmation de la part de plusieurs autres personnes qui décrivaient Yui avec ce même profil.

L'instituteur, qui venait de parler, reçoit un bref avertissement de la part du chef de la police.

— Si ce n'est pas un accident, reprend-elle, c'est un meurtre.
— C'est pour cette raison que nous t'interrogeons, rétorque l'homme au manteau noir.
— J’ai que douze ans, putain…
— Tu as toutes les raisons de vouloir le tuer.
— Ibiki…
— Mais, douze ans ! Vous pensez pas qu'il y a plus dangereux que moi en liberté ?

Iruka voit le visage de son ancienne élève déjà fortement contrariée par cette accusation virer à l'indignation absolue. Son regard dans lequel règnent les ténèbres en impératrices s'est détourné de celui d'Ibiki pour s'aventurer sur son col, ce qui lui a permis de découvrir le jeu des deux hommes.

— Vous vous foutez de moi, crache-t-elle.

Seiko contourne les shinobi d'un pas alourdi par sa mauvaise humeur en se permettant de pouffer de désagrément.

— J’ai besoin de voir tes dessins, retient Ibiki de sa voix tonnante.

La gamine se retourne pour défier le regard perçant du policier comme personne n'avait osé. L'homme ne bronche pas pour autant, décidé à ne pas se laisser impressionner par une fillette transformée par un passé pathétique.

— Je ne parlerai pas devant vos putains de micros, grince-t-elle du haut de son arrogance.

L'inspecteur soupire, las, puis porte sa main au col de son manteau de nuit afin décrocher les deux enregistreurs et les jeter dans la rivière. Seiko masque un sourire de satisfaction.

— Suivez-moi, invite-t-elle froidement.

Ibiki et Iruka marchent derrière la gamine sous un ciel brouillé par les nuages. On entend au loin une personne éternuer de toute sa fosse nasale, attaquée par une violente épidémie de grippe qui ronge le village depuis bien une semaine…
À force de traverser les rues, le trio finit par croiser des personnes qu'ils connaissent, dont Sakura qui discute au coin d'une rue avec Ino. Seiko la fixe un instant sans lui adresser un seul mot, un seul geste, ou un seul sourire. La môme aux cheveux roses en fait autant, mais trouve au final à s'enchanter à la manière d'une comédienne de théâtre :

— Bonjour Iruka-sensei ! prolonge-t-elle de son atroce voix aiguë.
— Bonjour Sakura et Ino ! Comment allez-vous ?
— Bien, répondent-elles. Et vous ?
— Super, merci !
— Au revoir ! Passez une bonne journée !
— Merci, à vous aussi !

Le groupe poursuit leur marche encore quelques secondes avec un instituteur souriant niaisement de se savoir aussi populaire aux yeux de ses anciens élèves.

— Suceuse, brise Seiko.
— Oh !

Iruka n'en revient pas. Il a retenu l'épaule de la jeune orpheline et l'a retournée pour lui faire face, les yeux dans les yeux, et elle s'est vivement empressée de dégager sa main. Il est au courant qu'elle a grandement changé depuis la mort de sa mère, qu'elle s'est assombrie. Il a aussi constaté son affreux manque de politesse et sa vulgarité, mais il était loin de s'imaginer qu'elle puisse se montrer aussi insultante en usant de ce genre de références.

— Me dites pas que vous y croyez, Iruka-sensei…
—Tu devrais faire attention à ton langage.
— Je suis étonnée que vous soyez aussi naïf !
— Ce que pensent les élèves de moi m'importe peu. Au moins, elles ont la courtoisie de me saluer.
— Ino, je ne dis pas, mais Sakura, j'ai suffisamment traîné avec elle pour la connaître, insiste-t-elle. C'est pour ça que nous ne sommes plus amies.
— Parce que toi tu te crois plus honnête ?
— Je ne vous aime pas, et je vous le dis.
— C’est pourtant moi qui t'ai…
— C'était un pur hasard, ce jour-là. Et vous n'aviez pas le choix, hein ?

Aucune réponse ne venant de la part d'Iruka, Seiko réouvre la marche en lui lançant un regard rempli d'avertissements.
Ibiki, qui demeure silencieux, a attentivement écouté les propos échangés entre Iruka et la gamine afin de se faire une véritable idée du profil de l'enfant. Il comprend bien qu'elle est perturbée par le décès brutal de sa mère, mais il doute encore de sa culpabilité en rapport avec ce récent meurtre. Il n'a aucune preuve contre elle, il cherche juste à la pousser à bout pour lui faire cracher la vérité et ainsi, déterminer si elle est coupable ou non. Mais avant tout, il doit vérifier son alibi.

— D’ailleurs, je ne comprends même pas ce que vous fichez ici, surenchéri Seiko. Vous êtes censés apprendre les arts Ninja aux élites, non ? Inspecteur, pourquoi ce type vous accompagne ?
— Ça ne te regarde pas, tranche Ibiki.
— Ça me regarde car je n'aime pas sa présence. Sa présence, un peu moins que la vôtre, toutefois… m’insupporte, articule-t-elle en détachant chaque syllabe.
— Nous vérifions ton alibi et nous te laissons tranquille.
— Tant mieux.

L'adolescente stoppe sa marche devant un bâtiment haut de quatre étages. Une des seules choses qu'elle s'est gardée d'apprécier depuis la Pluie de Sang, c'est l'architecture du village. Un véritable bazar séduisant de fer, de bois et de ciment, de câbles et de poteaux électriques, d'escaliers, de ponts, qui parfois, relient deux toits en enjambant une rue, des chemins sinueux dans lesquels il est facile de se perdre… Konoha est ce que l'on pourrait définir comme un urbanisme rural avec l'omniprésence de la verdure et des animaux que l'on retrouvent plus dans les paysages campagnards, comme cet écureuil qui descend avec vivacité un poteau électrique en bois.

— C’est ici, fait-elle en déverrouillant la porte.

Ibiki et Iruka ne suivent pas Seiko. Ils choisissent plutôt de l'attendre au seuil de l'immeuble afin de discuter sans que cette rebelle soit à côté. L'inspecteur regarde la gamine s'éloigner, puis se tourne vers l'instituteur :

— Quel genre d'enfant était-elle ?
— Toujours avec un pansement sur la joue et la cicatrice d'une blessure ailleurs sur le visage. Apparemment, sa maladresse en était la cause. Enfin, c'est ce que disait son père jusqu'à ce qu'on découvre des réalités désagréablement surprenantes qu'elle cachait sous les manches de son kimono, dans son dos et derrière un sourire angélique.
— Oui, je suis au courant de l'histoire…
— C'est vrai qu'elle est maladroite. Elle n'a jamais réussi à manipuler correctement son chakra, d'autant plus qu'elle en a très peu.
— J’ai remarqué pas mal de choses chez elle, déclare Ibiki. Mais je ne vois pas pourquoi elle vous déteste alors que c'est vous qui avez arrêté le geste de son père lorsqu'il…

La porte s'ouvre soudainement, obligeant l'inspecteur à se taire. Seiko apparaît sur le seuil de l'entrée, carton à dessin coincé sous le bras et mesurant à vue d'œil les proportions de son corps. Son regard noir se plante comme deux flèches de charbon incandescent sur l'homme au manteau sombre.

— Bon, fait-elle en ouvrant la pochette.

L'orpheline lui présente un série de croquis rapidement esquissés, comme si tout était joué sur l'instantané lors de leur réalisation. Ce que cherche Ibiki sont des visages nettement identifiables qui pourraient le mettre sur la voie, mais ce qu'il trouve de plus ou moins abouti ne sont cependant que des schémas rapides de constructions, quant à la figuration de personnages, elle n’est présente que pour offrir une échelle de grandeurs.

— Qu’envisages-tu de faire, plus tard ?
— Architecte.

Ibiki s'attarde sur le dessin le plus détaillé représentant une habitation quelconque non loin du parc installé pour les enfants avec des traits vifs et précis. Le vent manque bien d'entraîner les autres feuilles dans les rues du village, mais Iruka et Seiko sont là pour l'en empêcher.

— Tu les retravailles chez toi ? demande l'inspecteur.
— Non, fait-elle en réunissant ses feuilles. Je n'aime pas peaufiner mes croquis.
— Je les prends avec moi, finit-il.

L'adolescente fait légèrement pivoter sa tête sur le côté, un air fâché posé sur son visage au teint caramel. N'appréciant pas ce genre d'initiative, elle lui fait comprendre qu'elle a besoin de ses croquis pour avancer dans ses études, mais Ibiki contre en argumentant qu'ils lui permettront de vérifier son alibi.
Le vent souffle brusquement entre les deux personnages, faisant voltiger la toison de Seiko dans cette atmosphère alourdie par un désaccord complet. Elle lui donne finalement jusqu'à demain pour lui rendre ses dessins tout en exigeant un état de propreté exactement comme il est actuellement.

— Sinon quoi ? s'offense le chef de la police.
— Il n'y a pas de sinon, c'est comme ça. Vous les prenez sans que je sois d'accord, c'est normal qu'il y ait des conditions.

Ibiki la dévisage de toute sa hauteur colossale, le regard fusillant. Il déteste qu'on lui tienne tête, et cela, tout le monde le sait, et tout le monde se garde bien de lui faire le moindre reproche… Tout le monde, sauf Seiko, cette gamine dénuée de retenue. Il finit par tourner les talons, lourdement offensé par le défi lancé. L'adolescente, une épaule appuyée contre le bâti de porte, regarde s'éloigner le duo avec un sourire hautain de satisfaction.



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