Fiction: Le Huitième Péché. (terminée)

(O-S en deux parties) Colère, Paresse, Gourmandise, Envie, Luxure, Avarice et Orgueil. Ces sept pêchés capitaux régissent le Japon en 2098, l'année des vingt ans de Suigetsu. Mais il y en a un huitième que la société ignore et qu'elle aurait mieux fait de reconnaître. Suigetsu va faire connaissance avec ce huitième pêché là où il s'y attendait le moins... « En arrivant ici j'étais C18975, grâce à elle je suis devenu Su. Mais Karin m'a appris à être Suigetsu. »
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Lorely (Féminin), le 13/01/2015
Yo!
Ca faisait un moment que je n'avais pas posté... Une petite envie? J'espère que ça va vous plaire, je suis généralement fière de ce one-shot et j'espère que, quel que soit votre ressenti, vous allez me laisser un commentaire :)
Bonne lecture!




Chapitre 2: Le Huitième Péché. [Part 2]



Le Huitième Péché

Deuxième Partie




C'est un mardi après-midi ensoleillé. Je me pavane dans la cour, nourrissant secrètement l'envie de revoir Karin. Mais je tourne en rond depuis deux heures et je ne l'ai toujours pas aperçue. Je soupire et m'apprête à rentrer dans mon bâtiment quand quelque chose attire mon attention. Une foule de prisonniers forment un cercle et huent, encouragent, explosent. Des poings se lèvent de mécontentement, d'autres de joies. Intrigué, je m'y approche et impose mon corps pour pouvoir couper cet amas de personnes en deux. Après avoir forcé le passage et être arrivé aux premières lignes, je vois deux hommes. L'un a une trentaine d'années, l'autre une vingtaine. Le premier a les manches découpées grossièrement pour qu'il ressemble à un marcel, laissant entrevoir ses muscles épais. Il a du sang qui fend sa lèvre en deux et toute sa bouche en est baignée. Le second est plus petit mais plus teigneux. D'ailleurs, il me semble le reconnaître : c'est Sakon. Avec sa mèche épaisse qui lui barre l'œil et son sourire carnassier. Du sang éclabousse son visage démoniaque. Mais ce n'est pas le sien. Il n'est pas blessé. Et ils se massacrent tous les deux à coups de poings, de pieds, de dents. Sakon fout son adversaire à terre et ils se débattent avec de grands gestes. La foule forment un ring autour d'eux qui leur laisse la place de se faire du mal. J'ai le cœur qui bat à toute allure, ne sachant comment réagir. J'aimerais être horrifié mais je suis fasciné.
- Et le grand, pousse-toi. Les plus petits devant, me vocifère quelqu'un dans mon dos.
-La ferme.
Je suis surpris de mon ton agressif quand un coude frôle le mien. Je suis sur le poing de pousser l'imbécile jusqu'à ce que je reconnaisse Kiba. La personne derrière nous injure mais on s'en fiche. On échange une œillade complice et mon ami me demande :
- C'est le premier défi que tu vois ?
- C'est un défi ?
- On dirait bien. Ce genre de choses n'existent pas dans les manuels scolaires je suppose.
Un défi donc ? C'est vrai que l'adversaire de Sakon -qui se fait mordre méchamment à l'épaule- porte le tatouage d'un Envieux et Sakon celui d'un Luxurieux. Attends. Problème. Sakon n'est pas un Luxurieux. C'est le chef des Envieux. Qu'est-ce que ça veut dire ?
- La moitié des défis sont proposés par Ukon, ce type a besoin de sa dose quotidienne de meurtre.
- Ukon ?
- Le jumeau de Sakon.
J'aurais pu le deviner. Un frisson fait tomber ma colonne vertébrale et je déglutis. A voir ce type à cheval sur son ennemi, à s'acharner, à enchaîner coup sur coup, j'ai un haut-le-cœur. Et les prisonniers l'encouragent. Et il cogne de plus belle. Plus le sang gicle, mieux se porte le meurtrier. C'est son opium. Ça le rend fou. Il aime ça.
J'ai l'impression d'entendre les os de l'autre craquer. Ferme les yeux Suigetsu, bouche toi les oreilles. Éloigne-toi.
- Comment ça se finit un défi ?
- La mort de l'un des deux.
Ha.
- Et il n'y a que deux façons de tuer dans un défi.
Mon ventre se noue. On parle de la mort de quelqu'un. On parle des dernières secondes de cet Envieux. On parle de son décès qui court vers nous à toute allure. Il me semble qu'il vient de souffler dans mes cheveux et qu'il se penche vers l'Envieux, prêt à lui bondir dessus. J'ai envie de chialer.
- Soit un des chef d'une section passe un flingue à son préféré pour qu'il achève le combat. Soit on arrache le cathéter de son adversaire.
- Les chefs ont un flingue ?
- Avant, les rois avaient des couronnes. Mais nous sommes dans une nouvelle ère où nous craignons la surpopulation, la sous-nutrition et la mal-nutrition, l'injustice et l'argent. Alors la couronne est devenu un accessoire de fin de vie.
Casse-toi Suigetsu. T'as rien à foutre ici. Ce monde délire. TU délires. Tu regardes un type se faire arracher son cathéter sous un Ukon fou de...de quoi ? Un Ukon fou. Un Ukon applaudit alors que l'Envieux -E15423- meurt, les yeux révulsés, la langue enfoncée dans la gorge et la peau devenue rouge.
- On est obligé d'accepter le défi de quelqu'un ?
- Non. Mais si tu ne le fais pas, tu passes pour une lopette et tu as les sept sections sur le dos et t'en baves.
Kiba baisse la tête et des larmes invisibles sillonnent ses joues. Je pose une main sur son épaule pour le réconforter de son chagrin inconnu alors que la marée humaine se dissipe, comme si elle avait assisté à l'ouverture des soldes et partait en discuter autour d'une tasse de thé.
- Qu'est-ce qui se passe Kiba ?
- C'est ce qui est arrivé à Naruto.

*

Beaucoup de questions me taraudaient l'esprit. Naruto avait été un pilier pour les Coléreux, un espoir. Comment a-t-il pu se faire maltraité de la sorte ? Comment a-t-il pu mourir ? Pourquoi les Coléreux l'ont laissé se faire avoir de la sorte ? Pourquoi Tayuya n'a pas agit ?
Je marchais dans la cour alors que la nuit m'empêchait d'avoir une vue correcte quand une masse humaine me sauta sur le dos, faisant sortir mon cœur de sa poitrine. La voix criarde de Karin riant :
- Hue Dada !
- Va te faire foutre Karin.
- J'ai un truc pour toi.
Elle descend de mon dos et sautille devant moi avant de se poser sur le roc de la veille. Elle a un poste radio dans les mains et un long sourire qui lui bouffe la moitié du visage. Je m'assois à son côté tandis qu'elle fouille dans sa poche et sort de vieux écouteurs dans le plastique du fil s'envoie en l'air par moment. Elle me tend un écouteur après l'avoir branché et place le CD d'hier dedans. Je vais enfin pouvoir écouter cette fameuse chanson qui rend Karin si belle. Elle tient le boîtier dans ses mains, comme si elle avait un trésor. Les paroles débutent et Karin chante dessus, de son ton qui fait saigner les oreilles. Elle ferme les yeux et se balance d'avant en arrière doucement, le boîtier contre le cœur. Je l'observe tandis que le refrain clame « Oh Happily Ever After... ». Je sais pourquoi Karin est si belle. C'est elle, la chanson. Tout entier. Ses cheveux sont un Do, ses yeux un La, ses mains un Ré. Son corps exotique est un rythme de bonjo qu'on entend en soirée sur la plage des vacances. Sa bouche est une mélodie de piano, auquel s'ajoute de temps à autre un violon. Au début on entend les notes douces du piano, puis le violon se rajoute et ça devient une véritable danse endiablée. On ne sait que faire de ses lèvres. Son regard est une salsa incendiaire qui m'électrise et dont je ne connais aucun mouvement. Je suis nu face à cette danse à laquelle je ne comprends rien mais qui me donne envie de me lever, de bouger les bras, les jambes. Un clap de main, un clap de pied, un tour complet sur soi-même et une pose sexy. Une partenaire dans les bras, tu la guides et elle renverse la tête en arrière en riant. Ses cheveux vermillon touchent le sol avant de te fouetter le dos alors que tu l'envoies à droite. Elle revient vers toi dans un pas sensuel et tu prends sa jambe contre sa hanche. Sa robe glisse sur sa cuisse de façon aguicheuse et tu caresses cette peau alors que le corps de ta partenaire se tord. Tu as ton autre main collée au creux de son dos pour accompagner son mouvement. Elle revient brutalement contre ton torse. Et les notes ne s'arrêtent jamais. Tu es essoufflé face à cette salsa.
Karin m'adresse une pichenette sur le front, la salsa est calme, incrédule. Je dois dire quelque chose.
- Suigetsu ?
- Oui ?
- Alors, t'en penses quoi ?
De quoi elle me... Ha oui ! La chanson ! Elle est finie ? Bordel, je ne me souviens de rien. Les notes du début, plus ou moins. Alors je pense à celles qui forment Karin et sourit bizarrement :
- C'est mon opium maintenant.
Elle pousse un cri de joie qui a certainement réveillé tous les bâtiments et elle me saute dans les bras, enroulant les siens autour de mon cou et me serrant trop fort contre elle. Je rigole sans raison et tapote son dos. Elle rit aussi. Je remonte ma main dans sa tignasse, promet de ne jamais laver ma main pendant qu'elle se détache de moi, sans briser la distance. Il y a un silence qui n'est pas gênant avant qu'elle ne reprenne la parole :
- Suigetsu, tu as l'air pensif...
- Tu étais où cet après-midi ?
- Tu m'as cherché ?
Oui.
- Non. C'est juste pour savoir.
- Tu m'as cherché.
- Non, je voulais just...
- Tu m'as cheeerchééééé, chantonne-t-elle de façon à me foutre en colère.
- Bordel Karin je ne t'ai pas cherché ! C'est juste qu'il s'est passé un truc important !
Soudain elle arrête d'être stupide et remonte ses lunettes contre l'arrête de son nez. Elle écarquille les yeux avant de parler d'une voix grave :
- Tu parles du défi ?
J'hoche la tête.
- Quelle horreur, n'est-ce pas ?
- Oui.
- J'espère ne jamais y participer.
- Pourquoi les gens se défient-ils ?
- En général c'est parce que les gens n'ont pas d'autres façon de régler leur comptes.
- En général ?
- Après y'a des gens comme Ukon.
Ha oui. La soif de sang.
- Suigetsu ?
- Mh ?
- Tu reviens demain soir ?
- Je te manque trop la journée, la taquiné-je.
- Ouais.
Alors elle pose sa tête sur mes genoux et fixe le ciel, en position allongée. J'hésite à caresser sa crinière et me résigne. Ce serait trop bizarre.

*

Il faut que je me lance. Ça fait deux jours que tout ça me trottent dans la tête, le moment est opportun. Allé Suigetsu vas-y ! T'es quoi ? Une poule mouillée ? Non, t'es un putain de requin.
Tayuya sirote un café dans le coin du dortoir. J'avance vers elle, ayant l'impression de reculer, qu'une force invisible me tirait en arrière et me répétait que je faisais une connerie.
Quand je suis près d'elle, je ne sais par où commencer, alors j'y vais franchement :
- Tu aimais Naruto ?
Vu sa tête explosée de surprise, je me corrige :
- J'veux dire, tu l'admirais ?
- C'est vrai, je l'aimais. Comment ne pas l'aimer ? Tout le monde en était amoureux. Même toi tu serais épris de lui. Il était comme ça, à vous rendre dépendant de lui. C'était notre drogue...
Son regard chagriné tombe sur sa boisson, comme si le tourbillon de cette dernière lui remémore des souvenirs quand elle revient brutalement à elle :
- Pourquoi cette question ? Et puis, pourquoi tu me parles, je te rappelles que je suis fâchée contre toi.
Je me gratte la nuque de ma main moite, gêné.
- Écoute Tayuya... Je suis désolé pour ce qui s'est passé. Je te dis la vérité, elle t'a menti. J'aimerais bien qu'on reparte sur de bonnes bases. Tu es... Tu es ma première véritable amie ça me ferait chier de te perdre.
Et c'est vrai. Ma vie sans Tayuya serait comme une terre qu'un tsunami aurait détruit. Elle me guide depuis le début et me sert de soleil le matin. Certes, Kiba et Ino sont tout aussi importants mais elle... Elle est a été la première...
En revanche, je n'ose imaginer ce qui se passerait si je perdais Karin. Elle est tellement chiante cette fille, une véritable gamine qui a crisé hier soir à cause de son bouton d'acné sur le front. Moi j'ai trouvé marrante et je n'ai pas pu m'empêcher de la charrier et comme mademoiselle est susceptible... Voilà, juste perdre ça, ce serait la fin du monde. Du mien en tout cas.
Tayuya pose une main sur mon biceps et je devine à son visage qu'elle m'a pardonné. Je l'adore, elle est vraiment compréhensive.
- Ça n'explique toujours pas pourquoi tu me questionnes sur Naruto...
- Kiba m'a parlé de lui, il y a un ou deux jours.
C'était mardi après-midi. Mais je préfère être vague pour qu'elle croit que je n'y porte qu'un intérêt passager.
- Ha. Et...il t'a dit quoi ?
- Qu'il avait refusé un défi d'une personne et que, du coup, tout le monde le lui faisait payer. Je me demandais...
- Tu ne devrais pas te poser de questions, me coupe-t-elle sèchement.
Elle ne me regarde pas. Elle se perd dans le tableau face à nous. Des Coléreux qui partagent, profitent, discutent. Un fourmillement de personnes rangées par catégorie. Ma nouvelle famille. J'ai le cœur qui bat à fond, je ne sais pas quoi ajouter. J'aimerais m'excuser mais je ne le penserais pas. Je veux la vérité.
- Tayuya je sais que ça fait mal mais je t'en prie, dis-moi juste...
- Non. N'en parlons plus Suigetsu.
Elle pose sa tasse au sol et relève ses cheveux fins comme des fils d'or en un chignon en désordre avant de s'accrocher à mon bras et de me traîner avec elle, un sourire factice sur le visage.

*

Je me suis dit que Karin avait sûrement des réponses à mes questions. Après tout, elle était là à l'époque et Naruto était le centre du monde, non ?
Je l'attends, à notre habituel roc sur lequel je pense sérieusement inscrire nos noms. Comme ça, dans quelques années, quand cette société n'existera plus et qu'on voudra faire sauter ce rocher, les gens s'arrêteront et essaieront de décrypter nos inscriptions. Puis ils se rendront compte qu'il s'est passé un truc ici, qu'une histoire y est née. Et peut-être que ce rocher existera et qu'il sera dans un musée.
- A quoi tu penses ?
Je ne daigne pas de lever les yeux vers mon interlocutrice, sa voix fluette est assez représentative. Et puis, il n'y a qu'une personne qui me rejoint ici la nuit.
- Je voulais écrire nos noms ici, mais c'est assez con.
Je l'entends courir et et je la vois revenir quelques minutes plus tard, un feutre indélébile à la main et s'agenouiller face à la pierre pour écrire, la langue tordue et elle éppelle à haute voix « Sui...Ge...Tsu... ». Je me mets à sa hauteur pour déchiffrer son écriture maladroite et bancale. Elle rigole en disant que oui, c'était stupide comme idée avant de me tendre le feutre et de me demander d'écrire son nom.
- Tu vas voir, moi je ne vais pas salir ton nom en écrivant comme un maternelle.
- Va te faire, c'est l'intention qui compte.
- Tu sais quoi ? Écris-le toi-même ton nom.
- Non toi ! Il faut qu'on partage !
- Non, je te boude pour avoir aussi mal écrit mon prénom.
Elle me pousse du coude et je vois qu'elle est courroucée. Ses joues prennent la teinte de ses cheveux tandis qu'elle met à côté de mon prénom « Karin ! ».Elle a appuyé sur la pointe et le caractère est plus prononcé. Elle s'apprête à ajouter quelque chose au dessus de mon prénom mais j'attrape le feutre avant et marque à mon tour sous sa bouche grande ouverte : « I want my Happily Ever After ». C'est un écriture nouvelle, un alphabet que j'ignore et je ne sais toujours pas ce que ça veut dire. Ça se peut ce sont des dessins, ou alors ça signifie « je suis un gros caca », mais je ne pouvais pas passer à côté de ça. Karin regarde ses poignets, compare l'écriture avant de s'esclaffer :
- T'es un gros nul Suigetsu !
- Arrête, c'est l'intention qui compte.
- Elle est géniale ton attention...
Je suis surpris par son changement de ton brusque. Elle est passée de l'hilarité nerveuse à la voix douce et posée. Je l'apprécierais presque, ce timbre. Puis elle enfonce ses notes de musiques carmins dans mes yeux violacés et on n'arrive plus à se détacher. J'ai mon cœur qui s'arrache de ma poitrine dans un flot de sang et le pouls qui danse le rock dans mes veines. Je le sens, battre le rythme, là, dans mes poignets. Karin se mord la lèvre. Sa lèvre pleine, rouge, pulpeuse. Sa lèvre de femme. Ses doigts se referment sur son pantalon tandis qu'une bourrasque lui balance sa crinière en arrière et lui fait plisser les yeux. J'en peux plus. J'encadre soudainement son visage dans mes mains, comme poussé par le vent, suivant un mouvement qu'on me dicte et pose ma bouche avec force contre la sienne. Nos dents se claquent mais on s'en fiche. Elle a la même hardiesse et ses mains deviennent baladeuses, parcourent mon torse avec envie avant de s'accrocher avec ardeur autour de ma nuque. Je ne respire plus. J'ai sa bouche contre la mienne. Son nez qui effleure le mien. Ses dents ont claqué contre les miennes. Elle resserre l'étreinte et je sens sa ridicule poitrine contre la mienne. J'ai les poumons qui se compressent et la tête qui tourne. On reste un long moment qui ne dure qu'une seconde dans cette position, incapable de faire quelque chose de notre corps quand on se sépare pour reprendre notre souffle. Mais, alors qu'elle entrouvre la bouche pour dire quelque chose qui s'avère inutile, je me raccroche à elle et mes lippes viennent suçoter les siennes, faisant office de distraction pour que mes mains puissent descendre sur ses hanches. Ainsi, je la rapproche à nouveau, désirant briser toutes les distances. Je la veux contre moi. Je ne veux pas m'en séparer. En entier, je la veux en entier. Avec tous ses défauts. Sa mâchoire inférieure qui fait la fête foraine, sa voix de crécelle, son manque de forme et de féminité, sa répartie et son caractère de chien. Je la désire tellement que mon cœur se sert, j'en ai presque envie de chialer. Tu m'étonnes qu'Ino n'arrivait pas à expliquer comment on tombait amoureux. C'est inexplicable cette connerie. Ça te tombe dessus et tu fais avec. Et le pire, c'est que tu apprécies. Pire, tu kiffe. Pire, tu t'en passes plus.
Karin prend les devants et m'incite à ouvrir ma bouche pour que sa langue vienne apprendre la salsa à la mienne. Et putain, que c'est bon. Je ne savais pas qu'on pouvait faire ça, avec une bouche. Le cœur donne le tempo, les lumières sont éteintes, les langues se chevauchent avec appétit, s'écartent, reviennent, repartent. Je ne prends plus conscience de ce que je suis, de ce que je fais. Sont-ce mes mains qui caressent avec autant d'avidité ses cuisses, remontent dans son dos, poursuivies du même sentiment ? Sont-ce ses doigts qui parcourent mes mèches argentés ? Est-ce vraiment moi qui embrasse cette idiote d'Orgueilleuse ?
J'aimerais que ça ne finisse jamais.

*

Dans la nuit de vendredi à samedi, je n'ai toujours pas accompli ma bonne action, mais ce n'est pas ce qui me préoccupe le plus. Je viens de quitter Karin après avoir passé une bonne partie de la nuit avec elle. On était collé l'un contre l'autre, elle était chiante, je l'embrassais quand elle dépassait les bornes, elle me frappait en retour en riant, puis elle a tenté d'inventer une chorégraphie pour sa chanson. Je l'ai insulté, elle m'a embrassé, je l'ai traité, elle m'a roulé une pelle. C'était énorme.
Je pousse la porte de mon bâtiment et quelle surprise d'entendre :
- Qu'est-ce que tu faisais dehors ?
Je reste dos à Tayuya. Je l'imagine les bras croisées et la face furieuse.
- Je ne suis en rien obligé de te répondre.
Je reçois un violent coup de pied dans le dos -elle est vachement souple- et je fais volte-face. Son nez est à quelques centimètres du mien, expirant une fumée de colère.
- Quoi ?! T'es ni ma mère, ni un flic, j'vais pas te répondre !
- Tu étais avec cette salope de O874 ! Comment ose-tu pactiser avec le démon ?!
- Ce n'est ni une salope, ni un démon !
- C'est une putain de garce que tu as embrassé, et pas qu'une fois !
- C'est pas une putain de garce !
- Elle te manipule imbécile !
Je sers les poings et les dents, me retenant de la gifler et, à la place, je fais demi-tour. Il faut que je me calme. Il faut que je me calme. J'ai pas envie de m'énerver contre Tayuya. Pas encore. Mais, c'est trop con, je suis têtu et une question vient de me flasher le cerveau.
- Tu m'observais ?
- Évidemment.
- Et pourquoi ?
- Parce que j'étais partie aux toilettes, j'ai jeté un coup d'œil et qui vois-je batifoler avec cette sirène ? Mon traître de meilleur ami !
C'est difficile. Elle forme un oxymore là. Elle vient de m'appeler son « meilleur ami ». Mais elle vient de m'injurier de traître. Et puis, Kiba et Ino sont ses meilleurs amis aussi. Tant pis, ma fureur a atteint son paroxysme. Je fais face à Tayuya, prêt à la claquer verbalement quand elle me fout une gifle gargantuesque. Je suis encore sonné qu'elle se réfugie dans mes bras, de doux sanglots la berçant. Je suis complètement déstabilisé et je ne sais absolument pas quoi faire... Merde, quand une fille vous frappe et pleure dans vos bras après, ça veut dire quoi ? Si il y a bien une langue qui m'est inconnu, c'est celle des filles.
- Su... Je t'aime énormément, je ne veux pas te perdre. Toi aussi... Karin m'a fait du mal... Elle a...
Mon sang se fige.

- C'est elle qui l' a tué...

Je devine déjà de quoi elle parle. C'est Naruto. Son affliction -pire, son désespoir- envers Naruto, et toute sa haine pour Karin... Tout se justifie. Karin est l'assassin de Naruto.

*

- Su ! Su réveille-toi !
Je remonte mes couvertures jusqu'au haut de mon crâne, voulant me couper du monde extérieur. Mais on me secoue de plus belle avant de me tirer les cheveux. La douleur me fout en rogne et je me relève subitement pour découvrir les yeux affolés d'Ino. Toute mon ire redescend tandis qu'elle panique, les bras croisés de peur sur sa poitrine.
J'ai le pire des mauvais pressentiment.
- Ino, il se passe quoi ?
Elle m'a appelé Su tout à l'heure, pas « le requin ». Tout va mal.
- Tayuya elle...
...est morte ? Oh putain non.
Mais non, raisonne-toi Suigetsu ! Si Tayuya était morte, Ino sera en larmes, au sol, incapable de se relever.
Je pose une main sur son épaule, voulant l'encourager à poursuivre. Elle inspire profondément et m'ordonne :
- Suis-moi, ce sera plus simple.
J'acquiesce, enfile rapidement mon haut de prisonnier et suis mon amie. Elle avance d'une démarche pressée et je me rends compte que le dortoir est anormalement désert. Même au déjeuner c'est noir de monde. Il doit se passer quelque chose de grave pour qu'il n'y ait personne...
Mon pressentiment s'accentue quand je découvre dans la cour une centaine de prisonniers agglutinés en forme de cercle qui font un bruit épouvantable. Comme lorsqu'il y a un défi. Oh non. Oh putain de merde. Non, non, non !
Je cours et pousse les gens autour de moi. Ils m'insultent, me donnent des coups en retour mais je m'en fiche. J'ai le cœur qui bat à toute allure et mon pressentiment gonfle si fort que mon corps ne va pas le supporter plus longtemps. Lorsque je me retrouve au premier rang, je ne fais plus attention à rien. Même pas à Ino qui se réfugie au loin contre Kiba, à Ukon qui fixe le combat avec envie, Sakon qui est hilare avec sa bande comme si il ne se passait rien, Sasuke qui sert une Sakura épouvantée part la taille, Chôji de la section gourmand qui est assis contre un banc avec P1 et le vieux qui était là le premier jour avec moi qui ne voit plus rien. Il n'y a que Tayuya et Karin, au centre, qui s'acharnent l'une contre l'autre, tentant d'arracher le cathéter de leur ennemie. Un combat à mort d'ex-meilleures amies. Tayuya fait sûrement ça pour me protéger. Elle veut me prouver que Karin est du mauvais côté. Mais je ne sais pourquoi, je reste persuadée que Karin est quelqu'un de bien. Sûrement l'amour qui fait ça. Je savais qu'il me jouerait des tours cet enfoiré.
Tayuya frappe avec son pied le ventre de Karin qui se replie de douleur avant qu'elle n'assène un coup de poing sous le menton de son adversaire. Elles sont essoufflées et couvertes de bleus. Depuis combien de temps le combat dure-t-il ?
Je me penche vers mon voisin, tentant de contrôler les tremblement de ma voix :
- Qui... Qui a défié qui ?
- Tayuya a défié Karin. C'est la première fois que je vois un combat de chef de section ! Et je suis là depuis dix ans donc crois-moi, c'est du jamais-vu !
Je m'en balance de l'importance de ce combat, de l'amusement que ça provoque chez les spectateurs. L'une de ces filles va mourir à la fin, et moi je l'aurais vu. J'aurais été impuissant. Non, je ne peux pas laisser faire ça. Je n'arrive pas à imaginer ma vie sans l'une. Dire qu'hier encore j'embrassais Karin avec ferveur et savourait son parfum d'été, que je déjeunais le midi avec Tayuya de bonne humeur. Dire que la semaine dernière j'étais en week-end et je me préparais à aller à mon cours du midi. Dire que la semaine dernière, dans dix minutes précisément, j'allais m'énerver. J'allais être envoyé en prison. Ma vie changerait radicalement.
Non, je ne peux pas supporter ça. Je ne contrôle pas mes jambes qui avancent vers le centre et ma voix qui hurle :
- STOP !
Toutes les têtes se tournent vers moi et le brouhaha s'éteint. J'ai peur. Terriblement peur. La terre se dérobe sous mes pieds alors que je ne sais pas quoi dire face à cette centaine de paires d'yeux dont je suis le sujet de divertissement. Je déglutis, essayant de former des phrases dans ma tête. Sujet, verbe, complément.
Puis Karin qui a perdu ses lunettes dans le combat, Karin et son corps d'adolescente de quatorze ans et aux cheveux de braise se précipite vers moi :
- Suigestu !
Je suis frappé par son timbre de voix. L'aigu a disparu, remplacé par le grave traversé de larmes. Elle ne pleure pas, mais tout son corps est en proie à la tristesse.
Tayuya ne la laisse pas venir vers moi, la prend par la taille et la plaque au sol. La différence physique est impressionnante. Le chaos audio revient, les paris se lancent de nouveau, on proclame si mon intervention est dans les règles et moi je vois Karin qui tente de se défaire de l'emprise de ma meilleure amie.
- Su, ne l'écoute pas ! Elle va te dire n'importe quoi !
- Suigetsu elle te ment ! Elle te manipule depuis le début !
- C'est toi la menteuse !
- Il est temps que la vérité surgisse Tayuya !
Cette fois, c'est Sakura le milieu. A nouveau le silence. Mais le plus silencieux des silences. Sakura et sa longue chevelure lisse et rose, Sakura et ses grands yeux verts, Sakura et sa main dans sa poche. Sakura et son visage de poupée. Sakura et sa beauté magique. Même Sasuke semble curieux.
Karin profite de cette diversion pour se défaire de Tayuya et court vers moi. Sakura lui hurle « Dis-le, dis-le ! ». La rouquine s'accroche à moi et notre contact, non pas physique mais visuel, me paralyse. Mon souffle est bloqué dans ma gorge alors qu'elle me chuchote aussi vite que son articulation le lui permet:
- C'est Tayuya qui a tué Naruto. Pas directement. Tout le monde sait que c'est Ukon qui l'a défié, mais Naruto n'était pas obligé d'accepter...
- Ta gueule Karin ! tempête Tayuya en arrivant vers nous.
- ... Mais Tayuya le poussait dans ses retranchements. Elle poussait indirectement les autres à se moquer de lui. Et si elle s'intéresse à toi c'est parce qu'elle a peur que tu lui prennes sa place un jour. Elle fait pareil avec tous les petits nouveaux susceptibles d'avoir cette place. On se souvient tous de Sa-
- FERME TA GUEULE DE SALOPE !
Tayuya tire Karin vers elle et elles reculent à deux. Elle la fout au sol mais Karin a encore la force de crier :
- Tout ça parce que tu voulais la place de chef ! Tu n'as pas supporté de voir tes deux meilleures amies atteindre la place que tu convoitais. TOUT CA POUR ETRE CH-
- FERME-LA !
Tayuya frappe Karin à la tête et moi je n'en reviens pas. Qui dois-je croire ? Qui dit la vérité ? Karin me ment-elle ? Tayuya me mentait-elle ? J'avais une foi inébranlable en Tayuya. Elle a était la première à me donner une identité. En arrivant ici j'étais C18975, grâce à elle je suis devenu Su. Mais Karin m'a appris à être Suigetsu.
Je secoue la tête de droite à gauche et m'attrape les cheveux. Qui a raison ? Qui a tort ? Tous mes espoirs s'écroulent. Je suis en proie au désordre le plus total. Mes jambes tremblent, prêtes à me lâcher, elles aussi.
- Suigetsu, attrape !
Mon regard perdu se tourne vers Sakura qui me lance un pistolet.
- Tire sur celle qui ment. La vérité avant tout.
Non. Non . Non putain. Ne me demande pas d'en tuer une.
En me voyant avec l'arme, les deux filles se relèvent. Elles parlent en même temps, paniquées. Je ne comprends rien à leurs arguments. Elles se combattent depuis qu'elles se connaissent. Même lorsqu'elles étaient amies elles voulaient être chef de leur section. Mais Tayuya est-elle réellement la dernière à avoir été chef ? Si au contraire, elle avait été la première de la bande, comme elle me de le dit?
- Karin te ment ! Je te le répète depuis le début ! Je te mets en garde contre elle depuis que je te connais, ne tombe pas dans son piège jusqu'au bout!
- Alors pourquoi tu n'as jamais voulu me dire qui a tué Naruto ? Dis-je enfin, ma voix gravissant les octaves.
- Parce que c'est trop douloureux. C'est Ukon qui lui en veut depuis le début !
- Et tu fais porter le chapeau à Ukon ! T'es une pétasse Tayuya !
Suite à ses paroles, Karin attrape Tayuya par les cheveux avant de me transpercer de ses yeux rouges :
- Naruto était mon cousin Suigetsu ! Tu me crois capable de tuer ma seule famille ?!
Ma respiration est saccadée, comme si je venais de courir un marathon. J'entends des prisonniers s'impatienter, désireux de l'issue du combat. Je cherche Ukon pour voir sa réaction mais il est parti. Ou alors c'est parce que ma vision est floue. Me dite pas que je chiale, c'est la honte.
- Tu sais quoi ? Reprend Tayuya d'une voix plus posée mais toujours traversée d'adrénaline. Vas-y, tire. Tire sur celle qui ment. Tire sur celle qui ne mérite pas la confiance.
Ne me demande pas ça. Pitié Tayuya.
- Elle a raison, rétorque Karin avec détermination. Tire sur la menteuse. Fais le bon choix Suigetsu.
Bordel, non. Je n'aurais jamais dû m'énerver. J'aurais dû garder pour moi mes mots. J'aurais dû être bien sage, comme tout le monde. Cette prison n'est en rien un Paradis. C'est le plus cauchemardesque des Enfers. J'ai laissé ma mère toute seule, je me suis fait manipulé et on me demande de tuer l'une des deux personnes qui comptent le plus pour moi. Je lève les bras, braquant le pistolet entre les deux adolescentes qui se tiennent face à moi, debout. Je ne veux pas les regarder dans les yeux. Mais je dois mettre fin au combat qui les lie. Je dois un tuer une. Je dois tuer celle qui me raconte n'importe quoi depuis le début. Je tiens l'épée de Damoclès dans les mains et je ne vais pas tarder à m'en servir. J'entends les « Tire ! Tire ! » qui grimpent en crescendo dans la foule. Elle s'est agrandie. Personne ne veut manquer le spectacle le plus divertissant. Ce défi rentrera dans l'histoire des défis. Je pleure. J'en ai marre. C'est le désordre dans ma vie. Et elles sont toutes les deux là, désireuses de faire surgir leur vision de la vérité. Et je les aime tellement.
Dois-je tirer sur Tayuya ? La première à m'avoir soutenu, encouragée, aidée. Elle avait des tas de petits nouveaux et elle m'a choisi moi, dans ce lot. Mais elle a été mon premier fou rire, mes premières questions. Elle m'a appris à marcher, à parler, à vivre. Elle m'a fait connaître l'amitié, la plus belle des relations.
Dois-je tirer sur Karin ? Je ne peux pas lui briser ses rêves. Elle doit sortir d'ici et jouer de la guitare. Elle doit faire connaître sa voix au monde. Elle a été mon premier baiser, mon premier amour. Elle m'a fait rire jusqu'aux larmes, m'a fait suffoquer face à ce nouveau sentiment. Elle rêve d'ailleurs. Et je l'aime de tout mon être. J'aime cette imbécile de quatorze ans que je supporte pas. Qui m'aura emmerder jusqu'au bout. Je l'aime putain.
Mais Tayuya m'a appris la confiance. Une confiance que j'ai toujours eu en vérité. Et Karin rêve d'un autre monde, elle rêve de l'Happily Ever After.
Alors je pointe mon canon sur Karin et appuie sur la détente. La détonation n'est qu'un bruit sourd lorsque je vois le rictus vainqueur mais mauvais de Tayuya s'agrandir et le regard de Karin me donner tout l'amour qu'elle éprouve pour moi. Avant de tomber.
Et alors, face à ce tableau je comprends.
Oui, je comprends.
Je n'ai pas réussi ma bonne action.
Demain, je vais être exécuté.







Voilà! J'espère que ça vous a plu! N'hésitez pas à laisser un petit commentaire.
Et aussi, si le huitième péché est trop implicite (ce qui peut être le cas) faites-moi signe, je vous le direz. Et puis vous pouvez aussi me donner vos hypothèses!
Merci d'avoir lu!




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