Fiction: La rizière

Chaque soir, elle a regardé le ciel en espérant qu'il le regardait aussi. Chaque jour, ils ont joint les mains pour lui adresser un message silencieux. Chaque heure, il a pensé à eux, eux qui l'attendaient et qu'il ne pouvait rejoindre. Chaque minute, il l'a observé, émerveillé, soucieux, coupable, heureux... C'est une histoire. C'est leur histoire.
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Fujiko-san (Féminin), le 15/08/2014
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Chapitre 1: Retour



- Tu vois, c’est chez moi.
Le petit garçon regarda, soupçonneux, le village fortifié blotti à l’orée de la forêt, en contrebas. Le mur d’enceinte n’était pas très épais et s’ouvrait sur quatre portes aux immenses battants de bois, ouverts pour la journée. Seules deux étaient activement gardées, témoignant de la paix qui régnait dans le monde shinobi depuis plusieurs années. Ses yeux caressèrent les maisons cossues, les immeubles du centre-ville, le palais du Hokage, défiant fièrement les nuages, puis s’accrochèrent à la falaise qui surplombait Konoha. Dardant sur lui leur regard aveugle, cinq visages étaient sculptés dans la pierre rouge. Il s’attarda sur le quatrième, celui d’un jeune homme aux traits graves et résolus, les cheveux en épis. Quelque chose lui disait que, même sans savoir son histoire, il aurait été son préféré. Minato Namikaze, le Quatrième…
- Bonjour, Grand-père, déclara-t-il de sa voix étonnement grave pour un enfant de son âge.
Et son père qui, jusque-là, s’était tenu en arrière, lui adressa un sourire resplendissant.

***

- On va passer par la porte Ouest, elle est la plus proche de mon appartement. Par contre, je te préviens, ça fait des années que je ne suis pas revenu alors ça risque d’être pas mal poussiéreux.
- Te connaissant, je ne pense pas que ce soit que poussiéreux, se moqua l’enfant.
- Dis-donc, jeune homme ! s’indigna son paternel en riant. Je pense que tu me dois un minimum de respect ! Ce n’est pas comme ça que je t’ai élevé !
Pour toute réponse, le gosse lui tira la langue et accéléra le pas pour le dépasser. Il ne vit pas le regard fier que son père posa sur lui, à peine dissimulé sous une mine offusquée.

***

- Eh, dites donc vous ! C’est comme ça que vous montez la garde ?!
L’homme sursauta et bondit sur ses pieds en tirant un kunai, qu’il baissa aussitôt en voyant l’allure simple et l’attitude pacifique des deux voyageurs, malgré leurs vêtements qui trahissaient leur statut de ninja. Le premier était un jeune garçon d’une dizaine d’années aux cheveux noirs mi-longs, la peau halée par une vie en plein air, le visage rond mangé par deux yeux gris à l’éclat vif-argent. Il avait enfilé une cape à capuchon sur un t-shirt sombre et un short de la même couleur, et une paire de sandale ninja complétait sa panoplie. Celui qui l’avait apostrophé était un homme de haute stature enveloppé dans un long manteau rouge, ouvert sur une combinaison noire. Deux grands yeux bleus, un visage bronzé, des épis blonds cascadant sur de larges épaules, le garde n’eut pas le temps d’émettre un cri de stupeur que déjà les voyageurs passaient la porte. Il put juste observer le symbole d’Uzushio cousu dans le dos du manteau tandis que le sosie du Quatrième s’éloignait rapidement, le gosse sur ses talons.
- Tu ressembles à ton père, c’est pour ça qu’il était étonné, affirma Nagato.
Naruto eut un sourire. Son fils observait Konoha avec attention toute particulière. Après tout, c’était là qu’ils allaient vivre, si tout se passait bien.
- Tu penses ?
- J’en suis certain. Dis, c’est par où chez toi ?
- Tourne à gauche, c’est l’immeuble au bout de la rue.
Nagato eut un mouvement de recul en apercevant la façade taguée et décrépie du bâtiment. Naruto, lui, s’y engouffra sans hésitation et gravit les marches quatre à quatre, bouffé par la nostalgie. Combien d’années cela faisait-il ? Quatre ? Cinq ? Un bon nombre en tous cas. Il se pencha soudain par-dessus la rampe pour héler son fils :
- Eh bien, tu ne montes pas ?
- C’est vraiment chez toi ? Je croyais que tu étais un héros ?
- Les héros ont souvent eu une enfance difficile. Je te l’ai déjà raconté, non ?
Avec un grognement, Nagato accepta de s’aventurer dans l’escalier pour rejoindre son père. Il grinçait toujours des dents lorsque la serrure rouillée céda enfin, les laissant entrer dans l’appartenant. Comme l’avait prédit Naruto, le sol était couvert d’une épaisse couche de poussière et chacun de leur pas soulevait un nuage qui avait le don de leur irriter la gorge. Et comme l’avait prédit Nagato, il découvrirent un bordel monstre.
- Terrible ! commenta l’enfant en oubliant momentanément de pester contre con père.
- On va avoir du boulot, confirma Naruto en se débarrassant de son sac. Va donc poser des affaires dans un coin propre, gamin, on s’y met tout de suite.
- J’espère qu’on aura droit à une douche après, réclama Nagato en s’exécutant. Tu as l’eau chaude, au moins ?
- Je pense qu’ils ont coupé l’eau et l’électricité quand ils ont vu que je ne revenais pas. Il faudra aller voir la vieille pour arranger tout ça…
- La vieille ?
- L’Hokage, la Cinquième, si tu préfères, sourit Naruto d’un air nostalgique. Je n’étais pas vraiment un modèle de respect, moi non plus…
Nagato leva les bras juste à temps pour recevoir le sac poubelle que lui lança son père, et l’observa s’armer d’un balai et d’une serpillère avec la ferme intention de faire un peu de ménage. Il étouffa un rire et entreprit de se mettre au travail avant de voir le haussement de sourcil se transformer en lueur malicieuse.

***

Tsunade Senju, méd-in au talent incroyable, membre du Trio Légendaire, Princesse des Limaces et cinquième Hokage de son état avait piqué un somme sur son bureau, au milieu de la paperasse. La bouteille de saké vide qui oscillait sur le haut d’une pile de rapports et l’absence de son assistante Shizune y étaient sûrement pour beaucoup.
Aussi c’est de manière parfaitement légitime qu’elle fit un bond de deux mètres de haut – manquant de s’encastrer au plafond – lorsque la porte de son bureau s’ouvrit avec fracas.
- Salut la vieille ! lança-t-on tandis qu’elle se demandait s’il était juste d’envoyer les inconscients qui l’avaient dérangée en prison pour quelques jours.
- La vi…, s’offusqua-t-elle en se réveillant totalement, et les yeux noisette accrochèrent les épis blonds, les yeux bleus et le sourire malicieux. NARUTO !!!
Son cri avait été surpuissant, le coup qu’elle porta à son ninja préféré le fut tout autant, et Nagato vit avec une stupéfaction mêlée d’inquiétude son père se faire éjecter du bureau à toute vitesse. Entre admiration et crainte, il observa celle dont on lui avait tant parlé. Grande, un visage en forme de cœur éclairé par deux yeux noisette, des cheveux blonds retenus en deux couettes basses, elle paressait avoir 20 ans quand l’enfant lui en savait plus de 50. Elle portait un manteau vert et un pantacourt noir sous un court kimono qui retenait avec peine une poitrine honorable. Les talons de ses sandales claquèrent sur le carrelage tandis qu’elle s’avançait vers lui, et quand leurs yeux se croisèrent il s’immobilisa, tétanisé par la force de ce regard si particulier.
- Et toi, qui es-tu ? demanda-t-elle d’une voix douce qui contrastait avec la violence dont elle avait fait preuve quelques instants auparavant.
Il déglutit, risqua un regard vers la porte et se détendit en voyant son père entrer silencieusement dans le bureau. Alors il se retourna vers la Princesse :
- Je m’appelle Nagato Uzumaki, déclara-t-il d’une voix assurée.
Son nom, il avait eu à le dire des tas de fois mais ce fut comme si, maintenant, c’était fait, il était officiellement le fils de Naruto. Et il s’en senti fier. Tsunade haussa un sourcil et se retourna vers le réceptacle de Kyubi.
- Uzumaki ? releva-t-elle.
- Je vous présente mon fils.
- Tu as fils, maintenant ? Mais qui… D’ailleurs, asseyez-vous vous deux, vous avez l’air d’avoir des tas de choses à me dire. Surtout toi, lança la Princesse des Limaces d’un air mauvais en pointant un doigt accusateur vers Naruto, qui as disparu sans prévenir et qui te pointes comme une fleur des années après… !
Le jeune homme eut un soupir las avant de s’exécuter. Il ne savait pas tant ce qu’il redoutait : qu’on lui en veuille d’être parti soudainement et de revenir tout aussi brusquement ? Mais finalement, la vieille l’avait plutôt bien pris. Qu’on ne comprenne pas les raisons qui l’avaient poussé à disparaître comme l’avait autrefois fait Sasuke ? Officiellement, il était ou mort ou déserteur. Qu’on rejette son fils, qu’on lui demande d’expliquer ce qui l’avait poussé à ramasser ce bambin qui pataugeait dans la boue ? Mais il n’y avait pas de raisons : Nagato avait autant sa place que lui à Konoha. Alors, plantant son regard océan dans les yeux noisette de Tsunade, Naruto commença son récit.

***

- … Pour finir, on a l’intention de s’installer dans mon appartement et pour ça il va falloir qu’on nous remette l’eau et l’électricité, je crois que Nagato a envie d’un bon bain.
L’enfant eut une exclamation indignée qui arracha un sourire à son père mais la Cinquième, elle, garda les yeux fixés sur un point qu’elle seule pouvait voir. Elle se tourna finalement vers le ninja qui ébouriffait les cheveux de Nagato et eut un sourire attendri : qui aurait cru que Naruto fasse un si bon père ?
- Bon, réfléchit-t-elle à voix haute, attirant l’attention de ses interlocuteurs. Naruto, on a dû te faire passer pour mort pour éviter que tu sois considéré comme un déserteur, et maintenant que tu es revenu les vieux du Conseil vont encore râler, mais c’est passé avec Sasuke alors vu tes antécédents pendant la guerre, je ne vois pas pourquoi on ne te réhabiliterait pas.
- En parlant de Sasuke, je…
- Chaque chose en son temps ! Donc, pour toi c’est réglé, et je te précise que tu es désormais Chuunin, tu en as largement le niveau. Je te ferais bien directement passer Juunin, mais ça ferait encore jaser le Conseil et je tiens à l’éviter. Néanmoins, je me chargerai moi-même de ta lettre de recommandation. Quant à toi, Nagato, tu commences dès demain à l’Académie, Iruka se fera une joie de t’accueillir. Pour votre appartement, je vais faire le nécessaire mais ne comptez pas sur des résultats avant demain. Tu voulais, Naruto ?
- Oui, comment vont les autres ?
Tsunade eut un sourire et se tourna vers la fenêtre. C’est en suivant des yeux le vol d’un oiseau blanc qu’elle répondit à Naruto.
- Tout d’abord, il faut que tu saches que ce n’est pas comme quand tu es revenu avec Jiraya. C’était un entrainement, ils étaient au courant et tu n’es parti qu’un an et demi. Là, tu as disparu sans rien dire pendant sept ans. Tu peux imaginer qu’ils vont en vouloir…
Le jeune homme acquiesça lentement. Son attitude n’avait pas été très correcte.
- Je te l’ai déjà dit, mais Sakura, Sai, Sasuke, et Kakashi pour ne citer qu’eux t’ont cherché un peu partout sur le territoire, et Gaara avait promis de m’envoyer un pigeon voyageur si tu venais à t’aventurer au pays du Vent. Je constate qu’il a manqué à sa parole puisque tu viens de me dire avoir passé quelques jours à Suna avant de revenir ici. Et je pense que tes amis vont avoir du mal à pardonner ton abandon – car c’est le mot.
- Je sais.
- Mmh. Ensuite, que sont-ils devenus ? Tous sont des Juunins, même si ça a été difficile pour Sasuke : les vieux du Conseil étaient assez hostiles à l’idée de donner des missions d’importance à un ancien criminel, tu peux l’imaginer. Aux dernières nouvelles, Sakura et Sasuke vivent ensembles, ton départ les a beaucoup rapprochés. Après la guerre, Hiashi Hyûga s’est montré plus laxiste quant à l’honneur du clan et Hinata en est toujours l’héritière. Sai, qui a redécouvert le sens du mot amitié, est resté en contact avec les autres, et la petite Yamanaka semble lui avoir mis le grappin dessus. Shikamaru assume pleinement son rôle de parrain et Asuma, le fils de Kurenai, va bientôt fêter ses 8 ans. Temari, la sœur du Kazekage, est désormais l’ambassadrice de Suna à Konoha et elle vit ici à mi-temps. Après, pour les autres… Kiba est tonton, Shizune et Kakashi sont en ménage et nous ont fait un beau petit, Shino sera bientôt chef de clan… Il s’est passé beaucoup de choses en sept ans, et tu vas avoir pas mal à rattraper.
Nagato regarda son père réfléchir, le menton dans la main. Naruto avait l’air résigné – après tout, lui avait-il confié, il fallait s’y attendre. Une sensation familière au creux de son ventre le fit baisser les yeux. Il savait que c’était à cause de lui que le jeune ninja avait mis de trop nombreuses années à rentrer chez lui. Oh, bien sûr, il ne lui avait jamais dit, mais c’était la vérité : comment en aurait-il pu être autrement avec un gosse à la charge, sans le sou, à des milliers de kilomètres de son village ? Tsunade se racla la gorge, le pli soucieux qui avait fait son apparition entre les sourcils de Naruto la préoccupait.
- Ils seront heureux de te revoir, d’avoir l’assurance que tu es en vie, assura-t-elle au fils du Quatrième. Maintenant, je pense que tu devrais essayer de les revoir, après tout vous serez sûrement sur des missions communes. Allez, filez, c’est que j’ai du boulot, moi !
- Compris ! A plus Mamie Tsunade, tu viens Nagi ?
Ils disparurent dans l’encadrement de la porte, et la Cinquième se frappa le front de la main. Mamie Tsunade ?! Malgré tout, tu n’as pas changé Naruto, soupira-t-elle avec un sourire.
- Tsunade, tu rêves ? demanda Shizune en entrant dans son bureau, les bras chargés de paperasse. Ça tombe bien parce que tu vas avoir du boulot, dégage-moi ton bureau que je pose tout ça, et… Tsunade ?
- Il est revenu, lui apprit l’Hokage en observant le vol d’un faucon messager, derrière la fenêtre ouverte.

***

- On fait quoi, demanda Nagato en dévalant l’escalier du palais du Hokage derrière son père.
- D’abord, manger. Tu n’as pas faim ?
- Si, mais…
- Ensuite, te faire visiter le village. Il y a des endroits superbes que je tiens absolument à te montrer.
- Mais…
- Pour terminer, rentrer à la maison après un détour par la rivière.
- Mais… Eh ! Comment ça, la rivière ?!
- Faute d’eau courante, on va avoir recours aux bonnes vieilles méthodes. Je ne tiens pas à présenter à Iruka un élève couvert de crasse !
- Bon, d’accord, d’accord… Et tes amis ? demanda-t-il soudain, n’y tenant plus. Tu ne veux pas les revoir ?
- Bien sûr, mais à quoi cela servirait-il d’aller me pointer chez eux ? Salut, c’est Naruto, ça fait un bail, pas vrai ? Je suis rentré après sept ans d’absence et je te présente mon fils, Nagato.
L’enfant se renfrogna. Le remarquant, Naruto passa un bras autour de ses épaules pour le serrer contre lui.
- Il n’empêche qu’on a de très grandes chances de les croiser, ajouta-t-il avec un sourire mi-figue, mi-raisin. Dans ce cas, on improvisera – tiens, c’est là.
Ils entrèrent dans un petit restaurant ouvert sur rue. Une salle de taille moyenne où on avait placé quelques tables et, dans le fond, un bar de bois clair. Ichiraku Râmen, déchiffra Nagato sur la banderole accrochée derrière la femme au comptoir. Il leva les yeux vers son père, et remarqua que celui-ci détaillait la salle avec une avidité et un intérêt non-dissimulés. C’était l’heure creuse, et les clients étaient rares. Ils s’installèrent au bar, perchés sur des chaises hautes, et Naruto commanda avec un grand sourire.
- Deux bols de râmens au porc, Ayame.
- S’il vous plaît, compléta Nagato.
Ayame, car c’était elle, contempla un instant l’étrange duo avant de hausser les épaules et de filer dans les cuisine. Elle revint peu après, portant deux bols qu’elle déposa devant les affamés, puis elle resta accoudée au comptoir pour les observer. Elle n’avait pas vraiment changé, se dit Naruto en la contemplant derrière ses épis blonds. Un visage en forme de cœur encadré par de longs cheveux châtains retenus en chignon, une blouse blanche avec, brodé sur la poitrine, l’écusson de l’établissement et, en équilibre sur sa tête, un petit bonnet blanc qui complétait l’uniforme. Ayame, de son côté, dévisageait sans gêne ce jeune homme, 24 ans tout au plus, qui l’avait appelée sans hésiter par son nom et qui avalait ses râmens à toute vitesse. Puis ses yeux noisette croisèrent les iris bleu par-dessus le bol et un sourire incertain étira ses lèvres tandis qu’elle se levait pour rejoindre le duo.
- Je croyais que tu étais mort, lança-t-elle d’emblée au ninja qui releva la tête en souriant.
- Tu peux voir que non.
- Maître Tsunade sait-elle que tu es revenu ? continua l’égérie de l’établissement d’une voix plus assurée.
- On vient d’aller la voir.
- Et tu viens pour rester ?
- Oui, normalement.
Le visage fendu d’un sourire franc à présent, Ayame se leva et passa la tête par la porte des cuisines.
- Papa ! cria-t-elle, attirant l’attention des rares clients qui terminaient leur commande. Ton client préféré est revenu !
- Mon client préféré ? grommela le vieux Teuchi en passant la porte. Mais qu’est-ce que tu racontes encore ?
Il suivit sa fille jusqu’au comptoir où s’étaient attablés Naruto et Nagato, et son visage s’éclaira lorsqu’il reconnut le jeune homme.
- Ben ça alors ! s’exclama-t-il alors que sa fille lui amenait une chaise. C’est bien toi Naruto ?!
- Vous avez vieilli, Teuchi, fut la seule remarque du ninja blond et le vieux tenancier partit dans un grand éclat de rire.
- Tu n’as pas changé du tout ! s’exclama ce dernier avant que son regard ne tombe sur le bol vide. Et je pense que ton appétit non plus. Ayame ! Demande donc au cuisiner de lancer une grande portion de râmens au porc !
- Compris, chef, s’exclama la jeune femme.
Teuchi s’installa plus confortablement sur sa chaise et se pencha vers ses clients.
- Eh bien, j’imagine que tu dois avoir nombre de choses à me raconter, sourit-il alors que sa fille s’installait à ses côtés pour ne pas perdre une miette de l’histoire passionnante qui n’allait pas manquer d’être racontée.
- Et qui est cet enfant qui t’accompagne ? ajouta Ayame en souriant à Nagato qui partit dans une crise de rougissements aigue.
- C’est mon fils !
- Ton fils ? Mais quel âge as-tu, petit ?
- 10 ans, grommela Nagato dans ses râmens.
Le père et la fille se tournèrent vers Naruto en haussant un sourcil, et le jeune homme entreprit de raconter ses aventures pour la seconde fois de la journée.

***

- Et vous, que devenez-vous ? demanda Naruto une fois le récit terminé.
- Tu as remarqué que le restaurant s’est agrandi : nous disposons désormais d’une véritable salle. Les affaires marchent bien, et je dois dire que tu nous as bien aidés.
- Moi ?
- Oui, tu venais souvent là quand tu étais petit, alors forcément, ça a attiré des gens. Tu es un héros, après tout ! Alors on me demandait de raconter de vieilles anecdotes pendant qu’Ayame servait les clients et on s’est constitué tout un réseau de nouveaux habitués.
- Eh ben… Si ça a pu vous aider, héhé ! Et toi Ayame, tu t’es mariée ?!
- Tu as vu mon alliance ? sourit joyeusement la jeune femme. Bingo, mon mari travaille comme menuisier et nous avons eu un petit garçon dernièrement. Il faudra que tu passes nous voir un de ces jours !
- Alors Teuchi est grand-père ?! Héhé, félicitation !!!
- Merci Naruto ! D’ailleurs, Nagato, si tu as le temps, tu pourras nous donner un coup de main pour garder Dai : mon mari et moi nous travaillons toute la journée et je suis souvent obligée de l’amener au restaurant.
Et Nagato, qu’un job de baby-sitter intéressait très moyennement, rougit de plus belle dans ses râmens.

***

- Eh bien, ces premières retrouvailles se sont plutôt bien passées !
- Ils ont été sympa de t’offrir les six bols que tu as englouti !
Naruto ébouriffa tendrement les cheveux de son fils. Ils se promenaient dans Konoha, le grand jeune homme blond et le petit garçon brun. Mettant la suite de son programme à exécution, le Chuunin avait entreprit une visite guidée de Konoha et après un détour par l’arène – où j’ai rencontré Gaara, le futur Kazekage –, la Forêt de la Mort – c’est là qu’on s’était fait attaquer par Orochimaru, je t’ai raconté, tu te souviens ? –, le cimetière – voilà la tombe de Maître Asuma, un chic type celui-là. Et là-bas, ce sont celles des Hokage… Je me souviens encore de l’enterrement du Troisième. Et celle d’Ero-sennin… – et les terrains d’entraînement – je t’ai déjà raconté le test des clochettes ? –, Naruto traîna son fils au mémorial.
- Il y a des gens que tu connais sur la stèle ? demanda Nagato.
- Il y a ma mère, Jiraya, maître Asuma… Tiens, il y a quelqu’un ?
Il était là, accroupi devant la stèle, parlant doucement au petit garçon à ses côtés. Naruto contempla avec émotion les épis blancs retenus par le bandeau frontal et le masque qui lui couvrait tout le bas du visage, tandis que dans son esprit résonnaient des instructions et des conseils donnés à l’équipe 7 au fil des missions.
- Tu vois, Sakumo, c’est de cet homme-là que tu tiens ton nom.
Nagato observa l’homme de profil qui tapotait doucement la stèle et le reconnut aussitôt. Voyant son père pétrifié, il glissa sa main d’enfant dans celle, grande et chaude, de Naruto et tous deux s’avancèrent, quittant l’ombre des arbres pour le soleil qui illuminait le mémorial. Kakashi se releva pour leur faire face, son fils réfugié derrière ses jambes – le jeune Chuunin put voir qu’il possédait les mêmes épis blancs que son père – et ses yeux noirs se posèrent sur les deux inconnus en tenue de voyage.
- Je peux vous aider ?
Une main à la ceinture, l’autre négligemment posée sur la tête de son fils, il était néanmoins sur le qui-vive et kunai ou shuriken aurait à tout moment pu surgir entre ses doigts. Dégageant sa main pour prendre Nagato par les épaules, Naruto offrit à son ancien sensei un sourire 100 watt, les yeux étincelant derrière ses mèches blondes, et le caractère enjoué et provocateur dont il avait fait preuve du temps de l’équipe 7 refit surface :
- B’jour Kakashi-sensei ! lança-t-il en riant, heureux de retrouver son maître.
Le ninja au sharingan accusa le coup par un mouvement de recul puis un sourire se dessina sous son masque :
- Tu n’as pas changé, Naruto, toujours aussi imprévisible ! Tu reviens de chez Tsunade ?
- Oui, vous non plus Kakashi-sensei vous n’avez pas changé. Quoique… C’est votre fils, n’est-ce pas ? Je ne savais pas que vous aviez des vues sur Shizune !
Derrière son père, Sakumo tendit l’oreille. Qu’est-ce que Maman venait faire dans cette histoire ?
- Il a quel âge ? enchaînait Naruto.
- Quatre ans. Sakumo, tu te souviens de Naruto ? Je t’en ai déjà parlé, c’était un de mes élèves et le meilleur ami de Sasuke et Sakura.
Le gosse, sorti de sa cachette, acquiesça en jaugeant les inconnus du regard. Bon, plus si inconnus que ça : le premier, grand, blond, les iris d’un bleu étincelant avait pour nom Naruto Uzumaki. Il était le fils du Quatrième, le héros du village et le prochain Hokage. Sauf qu’il était sensé avoir disparu sept ans auparavant… Quant au second, un enfant un peu plus âgé que lui, il n’avait aucune idée de son nom. Kakashi non plus puisqu’il le jaugea du regard avant de demander à son ancien élève.
- Tu as ramené quelqu’un avec toi ?
- Je m’appelle Nagato Uzumaki, coupa l’autre. Je suis le fils de Naruto.
Et devant le regard interrogatif de son sensei, le fils du Quatrième retint un soupir et entreprit de raconter leur histoire.

***

- Sakura ! Sasuke !
Le couple sursauta mais ne se retourna pas. Côte à côte, les mains jointes, ils se tenaient accroupis devant une petite tombe, isolée dans le cimetière. Gravée en épitaphe, une phrase que tous avaient un jour pensé : Il sera Hokage.
- Sakura ! Sasuke ! reprit Ino.
N’avait-elle aucun respect pour leur ami disparu ? A vrai dire, ils ne croyaient pas en sa mort, comme beaucoup de leurs camarades de promotion, mais cette petite tombe bâtie dans l’ombre de celles des Hokage leur donnait l’illusion que leurs pensées et paroles parviendraient au réceptacle de Kyubi. Ino s’arrêta à leur hauteur et les attrapa par l’épaule, essoufflée, avant leur beugler dans l’oreille avec un grand sourire :
- Vous savez quoi ? Il paraît qu’il est revenu !!!
Pas besoin de demander de qui elle parlait. Les deux ninjas se retournèrent vers leur amie, éberlués.
- Comment ça ?!
- J’ai entendu Ayame – vous savez, la fille d’Ichiraku Râmens ! – le dire à son mari, le menuisier de l’atelier près du palais du Hokage, tout à l’heure. Apparemment, il serait passé au restaurant après avoir vu Maître Tsunade, et vous savez quoi ?! Il paraît qu’il n’est pas revenu seul ! Je ne sais pas qui est la mère, mais j’ai cru comprendre qu’il avait un fils !!!
La jeune femme eut un gloussement hystérique alors que ses compagnons échangeaient un regard indéchiffrable.
- Tu en as parlé à Sai ? finit par demander Sakura.
- Non, pas encore, je suis tout de suite allée vous chercher ! Mais j’y vais sur le champ !
- Attends !
Ino, qui s’apprêtait à repartir, se retourna, étonnée. Les meilleurs amis du disparu la contemplaient d’un air grave. Comme d’habitude, ce fut Sakura qui prit la parole.
- Tu es sûre de ton info ?
- Tu doutes de moi ? s’offusqua la jeune Yamanaka.
- Non, mais je veux dire… C’est Ayame. Ça fait sept ans qu’elle ne l’a pas vu, elle a pu confondre, non ? Et puis, pourquoi reviendrait-il maintenant ? Il est parti sans rien dire, on ne sait même pas si il est vivant ! Et un fils ? Tu y crois, toi ? Personnellement, je le vois mal fonder une famille à notre âge…
- Mais…
- Il y a autre chose, continua Sasuke. Ça doit être très avantageux de se faire passer pour un héros disparu. Et en sept ans, on change, non ? Il suffit d’avoir la vingtaine, des cheveux blonds et des yeux bleus et le tour est joué !
- Mais les marques de Kyubi…, s’obstina Ino.
- Le possède-t-il toujours ? l’interrogea sa meilleure amie. Ecoute, nous aussi on voudrait…
- On est pourtant passés par là tout à l’heure et je n’ai rien remarqué ! Une tombe, quand même ! La vieille m’avait dit qu’on m’avait fait passer pour mort mais là…
Les trois amis sursautèrent. Ils ne voyaient pas les nouveaux venus, cachés par les tombes des Hokage, mais ils tressaillirent en reconnaissant la voix de celui qui s’était exprimé. Comme ils reconnurent celui qui répondit, légèrement amusé.
- Quitte à jouer le jeu, autant le jouer jusqu’au bout ! lança Kakashi, et ils sentirent un sourire dans sa voix.
- Et j’étais aussi sur le monument au mort ? Quelque part, ça me gêne, parce que je n’ai pas donné ma vie pour mon village, au contraire de tous ceux qui sont morts en héros. D’ailleurs, je ne savais pas que votre père y était…
- C’est de lui que Sakumo tient son nom et… Ino, Sakura, Sasuke, bonjour !
Il y eut un silence. Les trois jeunes Juunins contemplèrent le quatuor qui leur faisait face : Kakashi, fidèle à lui-même avec ses épis blancs et son bandeau qui cachait son œil gauche, Sakumo, perché sur les épaules de son père, Naruto, grand, beau, ses yeux océan étincelant derrière ses épis blonds et un enfant d’une dizaine d’année, ses cheveux nuit retenus en catogan, dardant sur eux un regard vif-argent empreint de curiosité. Sakura eut un hoquet, et sa main chercha celle de son petit ami qui la lui accorda immédiatement. Lui fixait son meilleur ami, son frère, celui qui l’avait cherché sans relâche lorsqu’il était parti, et celui qu’il avait cherché désespérément lorsqu’il avait disparu à son tour. Et il était là, les fixant avec une joie non-dissimulée, et ce qui ressemblait à une once de culpabilité mêlée d’inquiétude quant à leur réaction.
- Naruto…, commença-t-il, mais Ino le coupa d’un cri suraigu.
- J’avais raison ! s’écria-t-elle fièrement. Et tu as vraiment un fils ! Mais il est un peu vieux, non ? Enfin bref, on se retrouve ce soir au Ichiraku Râmen, je vais vous ramener toute la bande, moi ! Bon, à tout à l’heure, je vais annoncer tout ça à Sai !
Elle s’éloigna, tornade blonde au milieu des tombes, chantonnant un joyeux « Il est de retour, il est retour ! ». Encore un silence, puis Sakura fondit en larme et se précipita sur Naruto pour le serrer dans ses bras. Un peu désarçonné, le jeune homme lui tapota maladroitement le dos et lança un appel silencieux à Sasuke.
- Content de te revoir, déclara simplement celui-ci.
Mais ses yeux étaient le meilleur des messages de bienvenue.





.............................. Alors ?



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