Fiction: Le jour où j'ai décidé de devenir une pétasse

Si vous deviez me décrire en un mot, vous feriez comme la majorité des mecs que j'ai largué au bout d'une nuit ou des nanas jalouses qui ont eu l'occasion de me croiser dans la rue : "Pétasse". Ils n'ont pas tort, ils m'ont plutôt bien cerné. Car oui, c'est ce que je suis. Ino, 21 ans, une belle pétasse. Ne tentez pas de découvrir l'envers du décor, contentez vous de cette image. La réalité, est plus triste encore.
Classé: -16I | Drame / Romance / Tragédie | Mots: 1925 | Comments: 3 | Favs: 5
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Beverlyy (Féminin), le 08/05/2014
Longtemps que je n'avais rien écrit. Manque de temps et peut-être aussi d'énergie :)

J'avais envie de reprendre le clavier et il y a longtemps que je voulais écrire une fiction avec Ino en perso principal. C'était l'occasion :) En espérant qu'elle vous plaise.

PS : Par souci de "style" et de fidélité à l'atmosphère de cette fiction, j'ai décidé de ne pas censurer de passages "grossiers" ou insultants. Je ne le ferais que lorsque ce sera nécessaire.




Chapitre 1: La naissance d'une pétasse.



" Je vais te raconter une histoire, de celles qui se passent du rébarbatif "il était une fois". Loin d'être un conte de fées, c'est plutôt ce qu'on nomme la triste réalité, celle qui n'a rien de reluisant, d'éclatant ou d'exaltant, celle qui se passe de prince charmant.
Enfant, j'avais compris une chose : L'amour est le pire des sentiments. On voit des gens souffrir, hurler, mourir pour ne serait-ce qu'une dose d'amour. J'avais imaginé un monde où les camés auraient troqué l'héroïne pour la passion à injecter directement dans le coeur, où tous s'arracheraient leur petite part de substance onirique, sans pitié, sans état d'âme. J'avais déjà réalisé que le pire était à venir, que l'amour, dès que j'aurais à m'y frotter, je m'y piquerai.

Tout a commencé lorsque j'ai réalisé qu'une fille est attirante en soi. De grands yeux, une jolie bouche, des joues roses et rebondies, de longs cheveux soyeux... On imagine un océan de tendresse déferlant sur l'âme aride des hommes, forgée de guerre et de violence. Ma mère fût certainement ainsi... Jusqu'à ce que la maladie la consume. Peut-être aurait-elle été autrement si sa santé n'avait pas été inter-dépendante du bon vouloir de mon père ? Peu importe, rien n'est plus compliqué que d'interpréter le comportement d'une personne qui aime. Ce n'était pas de mon ressort, pas à un âge où je n'avais jamais encore porté un seul soutien-gorge.

L'école a été ce moment où j'ai connu les expériences débiles d'enfants qui veulent "faire comme les grands". Il y a eu des petits bisous niais suivi d'une désinfection intensive du revers de la manche, des mariages arrangés dans les couloirs de l'école, de grandes histoires pour de petits êtres. Déjà à cette époque, je savais pertinemment qu'un garçon n'était qu'un énorme tas de préjugés, un espèce de robot articulé qui ne se fie qu'à la beauté et aux choses primaires et éphémères. Tous les garçons étaient les mêmes : Accrocs au sport ou aux mathématiques et autres masturbations cérébrales si le corps d'athlète ne suivait pas, toujours à mentir pour des banalités, à vouloir être impressionnant sans être impressionnable, et, bien sur, aimant le contact de la beauté féminine.

J'avais cette chance insolente d'être belle. Un papillon parmi les chenilles qui n'avaient pas encore forgé leur cocon. On dit que l'enfance est l'âge mignon là où l'adolescence, transition ingrate, mène à l'âge d'or de la beauté, l'âge adulte. Moi, j'avais brûlé les étapes. Certainement avais-je pris le train du mauvais sens ? Tout ce que je sais, c'est que j'étais belle, au delà du "joli" ou du "mignon". J'avais ce quelque chose qui fascine les hommes, qui les rend abrutis, à l'état de loques à la langue pendante. Et, si l'enfance ne se prêtait pas à ce genre de spéculations poussées sur les rapports homme/femme, la puberté allait me faire connaître les joies des hormones en ébullition.
Mes cheveux d'un blond pâle avaient pris du volume, de l'éclat, et une longueur qui n'était pas sans me rappeler celle d'Aphrodite. De vieilles icônes d'un livre poussiéreux m'avaient toujours fascinées, tant et si bien que l'envie de m'identifier à elle me prit très tôt. J'avais les yeux d'un bleu azur, presque olympien et me plaisait à rappeler à chaque compliment qu'on y lisait la pluie et le beau temps. Le ciel de mes iris savait déjà captiver et mettre en relief mes pomettes hautes et rosées, mon nez fin, ma bouche pulpeuse et sanguine, l'éclat de ma peau d'un crème lumineux, le duo de traits fins que formaient mes sourcils. Mon corps avait évolué suivant les modifications successives de mon visage : Ma poitrine avait émergé, mes hanches s'étaient dessinées, laissant imaginer une cambrure quasi naturelle et mes jambes s'étaient allongées de telle façon que le gâlbe de mes mollets semblait suivre celui de mes cuisses. Les hommes auraient sûrement dit, selon leurs mots, que j'étais "canon". Quoi qu'il en soit, j'attirais le regard... Et les ennuis.

On m'a toujours dit de me méfier des pseudos "princes charmants". Les beaux parleurs, ceux qui vous promettent monts et merveilles et qui, finalement, se révèlent être de piteux dragueurs. Même si j'imaginais qu'un jour j'aurais à faire à ce genre de prédateurs, je n'avais pas prévu que le danger serait aussi invisible. Il est tellement plus simple de savoir reconnaître les faux-culs lorsqu'ils sont loin de vous, lorsqu'ils embobinent l'un de vos proches, lorsqu'ils ne s'attaquent pas directement à votre cas. Pourtant, lorsque le connard se pointe, aucun signe distinctif ne se fait voir pour vous signaler de foutre le camp. Pour moi, le connard a été un mec populaire, bien dans ses baskets, assuré, le regard vif et droit, beau comme un Dieu, à la hauteur de l'Aphrodite que je pensais être.

Sasuke était ce genre de mecs qu'on ne pense rencontrer qu'une fois, le genre de lumière trop forte qui vous attire comme un moustique, vous éblouit et vous brûle les ailes. Il avait cette lueur dans le regard qui vous aurait fait croire aux pires mensonges, les phrases que vous n'auriez jamais tenu pour crédibles dans la bouche d'un autre. Bien sur que j'y avais cru, je n'avais pu qu'y croire. Il avait été plus loin que les simples banalités que la gente masculine mobilise lorsqu'il veut obtenir le sexe faible. Pas de sifflements, de mains baladeuses, il n'avait même pas eu besoin d'employer les compliments. Il était arrivé un jour, m'avait regardé avec intensité, comme pour sonder les méandres de mon âme, avait prononcé quelques mots et n'avait rien eu besoin de plus. Il avait en lui ce magnétisme inexplicable, cette force, cette attirance sans pareille... J'avais simplement craqué comme une débutante.

Je l'étais. Tout en sachant pertinemment qu'une paire de seins suffit à conditionner le monde masculin, j'étais novice et n'avais jamais imaginé aller plus loin qu'un simple baiser. Sasuke ne m'avait même pas laissé le temps de m'y préparer que je songeais déjà aux séquences interdites. Notre premier baiser fut dans un fast-food dégueulasse où la moitié des lycéens se retrouvaient après les cours. Entre les odeurs de friture, les restes de nourriture au sol et les emballages encore imbibés d'huile, Sasuke m'avait offert le plus lent et langoureux baiser qu'on puisse offrir. La chaleur de sa langue titillant la mienne avait été la plus merveilleuse des sensations au monde. J'avais connu les premiers instants de ce que les adultes appelaient "la passion". C'était enfantin au possible mais aucune émotion ne vous envahit autant. Il ne suffit pas d'admirer le baiser d'un couple pour en comprendre l'étrange pouvoir. Vous êtes happé, transporté dans un monde où tout vous échappe, quand bien même vous feriez preuve de résistance. J'étais bien faible, j'avais collaboré.

La première fois. C'est toujours le moment que les autres vous font redouter. Les questions fusent, les inquiétudes également. C'est un peu le match de votre vie, celui qui conditionnera tous les autres, le premier pas de milliers d'autres. Sasuke avait été mon adversaire et, malheureusement pour la pauvre fille que j'étais, j'avais perdu en beauté. Le cadre avait été plus glauque encore : sa chambre était certainement l'antichambre des microbes. Entre les cartons de pizza vide, les chaussettes sales qui jonchaient le sol, les fringues en vrac, le bazar environnant, seul le lit avait été épargné par la foule d'objets suspects. Si j'avais été lucide, j'aurais pu me rendre compte que Sasuke n'avait rien de particulier. Il était comme tous les autres : le porc moyen qui apparaît clean une fois sorti de chez lui. Cliché sur pattes entre foot et porno, bière et burger, il n'avait plus rien du mec impressionnant qui semble toujours calme, serein, sûr de lui... Pourtant, à peine avait-il à nouveau capturé mes lèvres que je devins à nouveau aveugle. La chambre n'était plus, pas plus que le bordel qui nous entouraient. La sensation du matelas contre mon dos, les poussées régulières, la douleur teintée de plaisir, les vibrations de nos deux corps et nos haletements combinés... Voilà tout ce dont je me souviens de ce moment crucial.

Je ne me rappelle plus comment avait été les retrouvailles du lendemain. Tout ce que je sais, c'est que j'avais senti en moi un changement étrange. J'étais devenue une femme et, à force de me le répéter, j'avais le goût amer de la nostalgie, l'impression d'avoir perdu mon innocence et mes illusions de petite fille. La seule qu'il me restait encore était de croire que Sasuke serait tombé amoureux de moi après notre scène d'amour. Peine perdue, j'avais été bien trop naïve pour imaginer un conte de fées où il suffit d'un baiser pour se jurer fidélité. Le week end suivant notre ébat, Sasuke avait déjà jeté son dévolu sur une quelconque pétasse rouquine qui n'avait pas mis longtemps à récupérer Crade-boy. Ma vengeance personnelle tenait en cela que j'imaginais aisément le dégoût de la nana face à l'hygiène peu scrupuleuse de son Don Juan. C'était bien maigre en comparaison d'un coeur brisé, une piètre satisfaction lorsque vous ronge la trahison.
J'étais passée par les phases Bridget Jones. Première étape, le pot de crème glacée d'environ cent litres. Deuxième étape, des films à vous faire chialer toutes les larmes de votre corps par excès considérable de nunucheries en tous genres. Troisième et dernière étape, l'assemblage des deux pour panser votre âme brisée en prenant dix kilos qui serviront à rembourrer vos fesses à défaut d'armer votre coeur d'un bouclier de graisse. Que la première personne qui n'a jamais eu de peine de coeur me jette la première pierre. C'est comme tomber du haut d'un immeuble, en sortir avec un choc post-traumatique et rester hagard et désorienté pendant plusieurs jours, tel le plus pathétique des zombies. Vous êtes là, à regarder les minutes défiler sans vous rendre compte que les heures s'enchaînent et que la seule action concrète que vous ayez faite dans la journée fut de vous bouger le cul jusqu'à la salle de bain. Une larve, c'était ce que j'étais, à écouter des chansons niaises en priant pour que Sasuke le cradingue daigne me rendre le petit espoir qu'il m'avait volé. L'espoir d'un prince charmant.

Il arrive pourtant un moment où vos yeux ne coopèrent plus à déverser des océans de peine. Une semaine de dépression m'avait fait comprendre que la vie est ainsi faite. Vous aurez beau crier, hurler, supplier, prier, un connard reste un connard et ne se donnera jamais la peine de faire preuve de la moindre empathie à votre égard. Si vous rêviez qu'il se pointe chez vous avec le plus impressionnant des bouquets de roses, ignorant votre pyjama Snoopy, votre tronche de détérée et les cadavres de Ben&Jerry's gisant au sol, c'est le cas de le dire, vous rêviez. Vous avez plus de chance de voir des grenouilles tomber du ciel ou votre facteur vous déranger en plein milieu de votre dégustation pour vous remettre je ne sais quelle pub à la con de la plus haute importance.

Le déclic survient lorsque vous vous rendez compte que vous ne pouvez pas vous arrêter de vivre pour une banale histoire d'amour, surtout lorsqu'elle fut aussi peu réciproque que la mienne. Vous avez aimé sans l'être en retour, vous y avez cru sans que rien ne présage que Monsieur Blaireau puisse entretenir vos rêve et vous avez plongé seule, dans une phase de déprime, tandis que Jules continuait à rire allègrement, à flirter, à vivre sa vie sans souci ni tracas. Le moment de la revanche avait sonné.

J'avais pris ma décision. J'allais devenir une pétasse. Une vraie.



Voici pour le prélude :) J'espère qu'il vous aura plu.



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