Fiction: Générations désenchantées

Elle est une enfant comme les autres, peut-être plus brillante, plus en avance...non ! C'est une jeune adulte dans un corps d'enfant. Rajeunie par des pilules, elle se voit privée de sa famille, traquée par une organisation cherchant à la faire taire. Pour survivre : accepter son rôle, devenir une autre personne. Et, avec un peu de chance, en profiter pour panser les blessures du passé, faire la paix avec elle-même et peut-être laisser ceux, qu'elle ne voyait pas, l'aimer.
Classé: -16D | Drame / Romance / Suspens | Mots: 28368 | Comments: 18 | Favs: 15
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nana13 (Féminin), le 19/09/2012
Je m'efforce de respecter au mieux la vie des japonais, leurs traditions etc. C'est du boulot.



Chapitre 5: Temari



Revenir dans une maison où trois personnes viennent de se faire tuer n’est pas une chose très agréable, mais ça n’empêcha pas Shikaku de s’y rendre le lendemain matin à l’aube. Trois policiers étaient restés sur place au cas où, mais ils n’avaient vu personne. C’était plutôt logique, quel meurtrier revient sur les lieux du crime au risque de se faire prendre ? Shikaku les congédia et enfila ses gants d’expertise afin de ne rien abîmer. Il entra dans la maison, il régnait encore une forte odeur de sang et de mort. Il commença à inspecter les pièces minutieusement, on aurait vraiment pensé à un simple cambriolage. Pourtant le gangster était entré le soir, alors que tout le monde était éveillé. Il avait pris un risque assez important. À moins qu’il ne sache déjà qui se trouvait dans la maison et comment étaient réparties les pièces. Il s’était renseigné sur la famille no Sabaku avant de les attaquer. Donc il cherchait quelque chose en particulier. Goshi lui avait parlé d’une boite de médicaments blanche avec des cachets bleu fluo. Et s’il savait que ces pilules avaient un effet rajeunissant ? Si c’était pour elles qu’il avait fait tout ça ?

C’est de la fiction...

Mais ça collait parfaitement aux évènements. Shikaku monta à l’étage, dans la salle de bain. Comme il s’y attendait, la pharmacie était encore ouverte, mais pas de trace de cette boite de cachet. Il recommença sa fouille, rien de rien. Il cherchait dans la chambre de Gaara lorsqu’il entendit un bruit sous le lit. Quelqu’un se cachait dessous ?

« Sortez de là ! »

Ça semblait plus léger qu’un humain, un animal alors ? Il sortit quand même son arme et s’agenouilla pour regarder dessous. Il tomba nez à nez avec un petit personnage qui le regardait avec de grands yeux effrayés :

« Mais...mais c’est un... »

*******

Goshi n’avait pas désobéi à Shikaku, elle avait refait sa toilette, s’était rhabillée et jouait maintenant avec les baguettes pour tuer le temps. Elle n’avait ouvert ni les biscuits, ni le lait, ni la boite de sushis. Le chagrin remplaçait la faim, elle ignorait totalement les tiraillements de son estomac. Lorsque Shikaku frappa à la porte, il lui sembla qu’on la tirait d’une léthargie. Elle laissa entrer le directeur qui s’assit sur le matelas et déclara simplement :

« J’ai décidé de te croire. »

Mais elle ne l’écoutait pas, elle s’intéressait plutôt au bébé animal qu’il portait sur son épaule :

« Ce...c’est un singe capucin ça !
-Oui, je l’ai retrouvé dans la chambre de ton frère...
-Gaara ! »

Elle eut un sourire triste en imaginant la colère que sa mère avait dû avoir quand il avait ramené cet animal. Shikaku lui tendit la bestiole, ainsi qu’un sachet en plastique :

« J’y ai mis ses biberons et le guide pour s’occuper de lui. Je crois que la garde te revient.
-Merci... »

Elle ne le montrait pas, mais elle était touchée, une autre personne serait plutôt allée le rendre illico presto à l’animalerie. Elle caressa la tête velue du bébé, il était très mignon. Shikaku se gratta la tête et demanda finalement :

« Ecoute, j’ai une théorie sur la mort de ta famille.
-Un cambriolage qui a mal tourné...
-Oui et non...je suis pratiquement certain que ce sont les pilules rajeunissantes que le malfaiteur cherchait. Il a simplement déguisé son coup en cambriolage plus banal.
-Maintenant que vous le dites...le portefeuille de ma mère était toujours sur la table du salon.
-Je sais, et je me suis permis de te l’apporter aussi. »

Les doigts de Goshi tremblèrent quand elle effleura le cuir et la photo de sa mère à l’intérieur. Shikaku perçut son trouble et changea adroitement de sujet...mais il ne choisit pas le plus facile à entendre :

« Goshi, je crois que le fait que tu vives encore constituera tôt ou tard une menace pour ces gens.
-Je sais, j’y ai réfléchi toute la nuit. Surtout que j’ai vu le visage de l’assassin.
-Vraiment ? »

Elle lui donna quelques descriptions rapides, mais il n’en tira rien.

« Il ne fait pas partie de nos cas les plus connus, à condition même que nous ayons déjà un dossier sur lui.
-Il était japonais, j’en suis sûre.
-Ce n’est pas le plus important pour le moment, s’il apprend que tu es en vie il voudra te tuer. Surtout que tu es la preuve vivante que ces pilules fonctionnent.
-Alors...
-Nous allons profiter de ton rajeunissement et du changement de ta couleur de cheveux pour falsifier ton identité. Désormais tu seras sous ma tutelle. »

Goshi soupira, elle allait devoir recommencer à vivre dans la peau d’une petite fille de huit ans ! Dire qu’elle venait d’entrer à l’université. Pourtant elle ne discuta pas, comme elle l’avait dit : elle y avait déjà réfléchi toute la nuit. Sa mère et ses frères avaient été tués et le criminel courait toujours. Il valait mieux qu’elle se fasse passer pour une innocente gamine, ce qui garantirait sa sécurité le temps de le retrouver. De plus, s’il savait pour les pilules rajeunissantes, il pourrait peut-être aussi lui fournir des informations pour retrouver sa taille normale. À côté de ça, recommencer l’école primaire semblait un inconvénient très léger. Shikaku déclara qu’il l’inscrirait le plus rapidement possible et sous un faux nom à l’école de Tentaï.

« Je suppose que tu ne voudras pas que je t’héberge.
-Non, trouvez-moi une chambre quelque part, ça ira très bien.
-Autant que tu restes ici.
-Comme vous voulez. »

Du moment qu’elle ne dormait pas sous le même toit que lui et sa famille tout lui irait. Il lui proposa d’aller déjeuner quelque part dans un bouiboui puisqu’elle n’avait manifestement pas mangé depuis la veille. Mais même quand elle eut devant elle une délicieuse assiette chargée d’une omelette, une soupe au miso et du thé vert, elle ne fit pas un geste pour saisir ses baguettes. Shikaku était embêté, il avait commandé le petit-déjeuner complet pour être sûr de ne pas se tromper dans ses goûts, mais la blonde restait sans réaction. Elle gardait la tête baissée, contemplant ses genoux. C’était comme quand il lui avait suggéré de changer d’identité, on aurait dit que plus rien ne pouvait l’atteindre.

« Il faut que tu manges, tu es toute pâle.
-Si vous voulez. » Prononça-t-elle avec indifférence.

Elle attrapa ses baguettes et prit un morceau d’omelette. Shikaku se sentait de plus en plus mal-à-l’aise. Il ne pouvait pas lui demander un grand sourire vu le drame qu’elle venait de subir, mais il avait l’impression que ce silence était encore en partie pour lui.

« Comme il faut que tu changes de prénom, y’en a-t-il un qui te plait en particulier ? »

Elle secoua négativement la tête, elle n’avait pas d’idée de prénom. Ils continuèrent de manger en silence, puis Shikaku régla la note et déclara qu’il lui faudrait des vêtements, des affaires scolaires et rénover l’appartement dans lequel elle allait vivre.

« Ne payez rien, prononça-t-elle, je n’ai pas envie de vous devoir quelque chose.
-Tu sais, j’ai un salaire très confortable, ça ne me dérange pas de...
-Ma mère n’a jamais mis son argent dans une banque, elle était un peu paranoïaque sur leur fiabilité. Tout l’argent est dissimulé sous un carreau de la cuisine. Vous n’aurez qu’à vous servir. »

Ça n’enchantait pas particulièrement Shikaku de jouer au cambrioleur, mais il n’avait pas le choix. Et puis au fond cet argent revenait de droit à Goshi et sa femme ne verrait aucun inconvénient à ce qu’il s’occupe d’elle.

« Je m’occuperai aussi de trouver mes vêtements seule.
-Bon, mais pour ce qui est des travaux et de l’inscription à l’école ce sera forcément mon rôle. »

Elle hocha la tête. Ils s’éloignèrent du restaurant et se mirent à marcher dans la rue, Goshi leva les yeux au ciel, il faisait très beau, il n’y avait vraiment que dans les films qu’il pleuvait un jour de deuil. Shikaku devina ses pensées et se décida à aborder ce sujet difficile :

« L’enterrement se fera dans deux jours. Tu...tu veux choisir les vêtements pour ta famille ?
-Ma mère avait une robe noire qu’elle aimait beaucoup, évitez la cravate pour Kankurô il n’en mettait jamais.
-Bien, le rendez-vous sera à 14h au cimetière Pein...
-Pas la peine de me donner l’adresse, je ne viendrai pas. »

Shikaku ne put cacher un mouvement de surprise, pourquoi ne voulait-elle pas venir à l’enterrement de sa famille ? Parce qu’elle avait peur que l’assassin y soit pour finir le travail ? Non, simplement Goshi voulait être forte, et elle craignait de ne pas l’être en voyant l’incinération des personnes chères. C’était juste trop difficile de supporter une telle chose. Shikaku saurait leur rendre les honneurs, elle n’avait pas à s’en faire. Des pensées sincères vaudraient toujours plus qu’une présence à une cérémonie. Elle s’arrêta brusquement et déclara :

« Je vais aller me promener dans un parc.
-Seule ? Ce n’est pas prudent.
-Je sais me débrouiller. »

Ses derniers mots avaient été froids, claquants. Elle lui faussa compagnie et disparut dans la foule. Shikaku n’insista pas malgré son inquiétude, elle était plus têtue qu’une mule et s’arrangerait pour le semer s’il faisait mine de la suivre.

********

Kabuto poussa un profond soupir en découvrant les caisses de médicaments revenues des quatre coins du monde. Il en avait pour des jours et des nuits à étudier minutieusement chacune d’entre elles. Mais c’était le prix à payer pour avoir laissé tomber la disquette, il avait de la chance de s’en tirer à si bon compte. Il ouvrit la première qui provenait de New-York, attrapa une boite au hasard et l’ouvrit. La première pilule tomba sur une petite assiette de verre, parfaitement ronde. Pas besoin de la passer au microscope ou de la traiter, il savait déjà que ce n’était pas un prototype de FDJ-15P. Mais les médicaments n’avaient pas tous cette forme sphérique, une malformation en fabrication n’était pas rare. Et celles-là subiraient des batteries de tests complètes. Tout le doigté consisterait à étudier la pilule sans la détruire.

Si jamais le prototype a déjà été absorbé par quelqu’un, j’aurai dû mal à l’expliquer à Orochimaru.

Il fallait compter sur la chance, prier pour que le FDJ-15P soit encore dans ces caisses et non dans le corps d’une personne. Encore heureux que la Nasa ne produise pas en quantité industrielle ses médicaments, sinon il en aurait eu pour des années à tout vérifier.

********

La cérémonie d’enterrement de Karura, Gaara et Kankurô fut très simple. Peu de gens vinrent, hormis les amis de classe des garçons et quelques connaissances. Les Sabaku ne comptaient plus de famille proche, les grands-parents étaient décédés et n’avaient eu aucun autre enfant. Karura, trop timide pour se faire des amis sans son mari, s’était renfermée dans sa maison, ne sortant que pour le travail, vigoureuse seulement dans l’éducation de ses trois enfants. Et deux d’entre eux allaient maintenant être liés à elle pour l’éternité. Des hommes en noir s’approchèrent des cercueils et les soulevèrent. Le prêtre avait dit tout ce qu’il y’avait à dire, maintenant les trois boites contenant les corps allaient être transportées dans des fours et brûlées. Yoshino serra fortement la main de Shikaku quand les cercueils furent posés sur des tapis roulants et disparurent de l’autre côté du mur avec autant de facilité que des bagages d’aéroport. Ils ne pouvaient pas voir, mais ils imaginaient fort bien les flammes sortirent et s’emparer du bois, puis des vêtements, de la robe de Karura qu’elle aimait tant. Les petits frères de Goshi aussi subissaient le même sort. Leurs peaux, leurs cheveux, leurs chairs, leurs corps devenaient cendres. Une fumée noire allait s’élever des cheminés, emportant quelques parcelles de ces cendres, la vie heureuse de Goshi auprès de sa famille qu’elle avait aimé. Shikaku tournait parfois la tête à droite et à gauche, sans répondre aux questions de sa femme sur son comportement, mais il ne la voyait pas. On leur ramena trois boites, plus petites, contenant les cendres des défunts. Poussière ils étaient devenus. Karura, une maman heureuse de couver ses enfants, poussière. Kankurô, tellement vif et affamé de vivre, poussière. Gaara, les yeux brillants en recevant son singe comme on reçoit un bébé, poussière. Rapidement, car il commençait à se faire tard, on transporta les cendres au cimetière et on les enterra à côté de leur père et mari. S’ils étaient maintenant réunis, ils devaient être bien tristes de laisser seule sur Terre leur fille et sœur chérie. Shikaku et Yoshino furent les seuls à rester auprès de la tombe après que la nouvelle plaque ait été placée. Le Nara songea que le moment était idéal pour parler à sa femme, il fallait qu’il la mette un peu au courant des événements qui allaient se produire. Avec la fin de l’enterrement, une page se tournait.

« Chérie...à propos des Sabaku...
-Tu veux me parler de Goshi ? »

Non, Shikaku ne lui parlerait pas de Goshi, elle devait disparaître définitivement et c’est pour cela que personne à par lui ne connaîtrait jamais son secret. Pour la première fois Shikaku allait mentir à sa famille, dans le but de les protéger eux aussi. S’ils restaient en dehors de cette affaire, il ne leur arriverait rien.

« Ils laissent derrière eux une petite cousine.
-Une cousine ? Ni Karura, ni son époux, n’avaient de frère ou de sœur.
-C’est une nièce du troisième degré par alliance à un des cousins de Karura. »

La retrouver dans un quelconque arbre généalogique ne serait pas facile avec ça, mais déjà il enchaînait avant que Yoshino ne pose la moindre question.

« Karura avait prévu de l’adopter avant le drame, cette pauvre enfant est orpheline.
-Et ?
-Je me suis proposé en tant que tuteur. »

Yoshino ouvrit plusieurs fois la bouche sans qu’un seul son ne sorte. Comme nouvelle elle en avait déjà entendu des moins surprenantes. Shikaku se proposait en tant que tuteur d’une enfant sans lui en parler, pourquoi pas une adoption aussi pendant qu’il y était ? Et comment annoncer ça à Shikamaru qu’une petite sœur allait venir s’installer à la maison ? Après plusieurs années de mariage, Shikaku avait appris à utiliser un petit radar intérieur qui le préparait aux éventuelles colères de sa femme. C’était comme un tsunami, plus la mer mettait du temps à arriver, plus forte serait la vague. Il enchaîna donc une nouvelle fois très rapidement, ayant l’impression d’être dans un jeu vidéo en train d’éviter les obstacles :

« Je ne te propose pas de l’adopter ! Elle vivra ailleurs, dans un appartement.
-Seule ?
-C’est une enfant très débrouillarde, de plus nous n’aurons pratiquement rien à dépenser grâce à l’héritage de sa mère.
-Shikaku c’est ridicule ! Une enfant vivant seule dans un appartement...
-Je t’assure qu’elle est très mature, elle a déjà connu ça auparavant. C’est même elle qui m’a demandé la permission de continuer ainsi. »

Quelque chose lui disait aussi qu’après ce drame la vie de famille ne serait plus l’idéal pour Goshi. Yoshino était encore éberluée, pas par la demande de tutelle de son mari, elle trouvait même ça généreux et son instinct maternel approuvait, mais elle s’étonnait de cette soi-disant maturité. Elle songeait à son fils Shikamaru qu’il fallait tirer du lit le matin, à Choji Akimichi le fils d’un ami qui passait son temps à se bourrer de chips dans le dos des adultes, à Ino Yamanaka qui avait tellement peur des insectes qu’une fois devant une sauterelle elle avait sauté dans une piscine sans savoir nager. Les enfants avaient besoin des adultes, était-elle assez mature pour se lever seule le matin ? Pour choisir ses habits ? Pour se préparer des repas équilibrés ? Pour ne pas pleurer et paniquer au moindre grincement de volet ? Sans être une mère Theresa prête à adopter tous les orphelins, Yoshino était révoltée à l’idée de laisser se débrouiller seule une enfant.

« Pourquoi ne pas la mettre en famille d’accueil au moins ?
-Je t’assure que c’est inutile. Tu sais que je suis responsable, tu peux me faire confiance. »

C’était vrai, Shikaku n’était pas le genre d’homme à prendre une décision, surtout de cette importance, sans réfléchir. Après tout on avait déjà vu des enfants surdoués capables de se débrouiller seuls très jeunes.

« Mais alors en quoi consistera ton rôle de tuteur ? »

Shikaku sentit qu’elle était déjà à moitié convaincue. Tout en sortant du cimetière, il lui expliqua qu’il n’aurait qu’à l’installer le plus confortablement possible, à l’inscrire à l’école élémentaire et à gérer les soins médicaux.

« Bon, je suppose que ça ira, concéda Yoshino, et comment elle s’appelle ta petite protégée ?
-Euh... »

Kuso ! Goshi ne lui avait pas donné de nom encore, pourtant il devait bien répondre à sa femme et tout de suite ! C’est alors qu’il aperçut sur le trottoir deux petites filles qui tressaient des balles à jouer avec des fils de soie. Le prénom idéal le frappa soudain :

« Temari ! Orihime Temari !
-Temari...voilà un prénom qui n’est pas commun. »

Temari la balle de soie, Orihime la princesse tissée...Shikaku avait fait un jeu de mots très mignon, mais il ne se doutait pas que ce nom allait rester pendant bien plus longtemps qu’il ne le croyait. Il songea seulement que la personne à qui il destinait ce nom ne serait pas vexée qu’il l’ait choisi à sa place, elle ne semblait pas vouloir prendre une décision.
Ils s’installèrent dans la voiture et Yoshino attendit que son mari démarre, mais il n’en fit rien et gardait les yeux fixés sur l’extérieur. Elle le secoua :

« Anata, qu’est-ce que tu attends pour démarrer ?
-Pardon. »

Il tourna la clé et alluma le contact, mais Yoshino n’avait pas vu ce qu’il venait d’apercevoir et ne pouvait de ce fait pas expliquer le sourire à la fois satisfait et compatissant qui naissait sur ses lèvres : une petite fille blonde sortait du cimetière. Elle était tout de même venue à l’enterrement. Shikaku se promit de ne jamais lui faire la moindre réflexion.
Le soir même, profitant que sa femme et son fils regardaient un feuilleton, il sortit dans son jardin et téléphona à la blonde. Elle était assise par terre et nourrissait au biberon le petit singe quand le portable qu’il lui avait laissé sonna. Shikaku décida d’être direct :

« Orihime Temari.
-Pardon ?
-C’est sous ce nom que je vais t’inscrire à l’école Tentaï. Il a fallu que je parle de toi à ma femme et donc que je t’invente un nom. Ce n'est pas courant, mais je l'ai toujours beaucoup aimé. Tu apprécies ?
-C’est très bien. »

En fait elle trouvait que Temari était un prénom très délicat, et Orihime la flattait. Shikaku avait été gentil et bien inspiré en lui trouvant un nom aussi agréable à l’oreille. Bien qu’elle veuille être insensible à son égard, cette attention la toucha plus que le reste. Bien sûr elle ne lui avouerait jamais, elle continuerait de le détester quoiqu’il fasse. Cependant, quand il eut raccroché, elle ne put s’empêcher de s’approcher de la fenêtre et de souffler dessus. Sur la buée, elle dessina les kanjis de sa nouvelle identité et les contempla un long moment. Pourtant son attention finit par revenir vers le capucin qui lui tirait ses longs cheveux. Elle ne se fâcha pas, mais le prit dans ses bras et le remit dans la couverture qui allait lui servir de couchette pour le moment.

« Il faut être gentil Saru-kun. »

Il lui rappelait son frère avec ses grands yeux bleu glace cernés de noir. Elle avait toujours aimé les animaux, elle prendrait bien soin de lui en souvenir de Gaara. Lorsqu’il s’endormit, elle toucha ses cheveux qu’il avait pris pour des lianes. Elle ne pouvait pas garder cette longueur, elle ressemblait à une certaine princesse de Disney enfermée dans une tour. Elle prit de l’argent dans le porte-monnaie de sa mère et sortit. Elle avait repéré un salon de coiffure s’appelant Hasaka, dans une petite rue, qui ne fermait qu’à 23h. La propriétaire du salon, une jeune femme de vingt-trois ans habillée en punk coloré, les cheveux au carré, la reçut. Elle était seule, toutes ses employées avaient déjà quitté les lieux. Elle sourit en voyant arriver cette petite blonde toute seule.

« Bonsoir, que puis-je pour vous Mlle ?
-Je voudrais les cheveux mi-longs, répondit Temari en montrant ses épaules, et une permanente pour les onduler un peu.
-Voyons ça. »

La coiffeuse ne remarqua pas le ton professionnel de l’enfant et s’approcha pour observer ses cheveux blonds et les mèches sur son front.

« Vos cheveux sont déjà un peu ondulés et crépus, une permanente stabilisera le tout. »

Hasaka Minayo, c’était ainsi que se nommait la jeune femme, ne se posa pas de question sur le fait que cette enfant soit venue seule pour se faire couper les cheveux. Elle excellait dans l’art de la coiffure et avait rarement eu l’occasion de coiffer des cheveux blonds, Temari lui rappelait une mode qu’elle appréciait beaucoup, elle allait se surpasser. Pendant deux heures la blonde, un magazine en main, se fit laver les cheveux, ses mains tremblèrent légèrement quand Minayo prit ses ciseaux et coupa la première mèche qui tomba sur le sol. Elle aurait fait de la chirurgie esthétique, elle n’aurait pas été plus angoissée. Il lui semblait qu’on ne lui avait pas coupé les cheveux depuis des siècles. Finalement, après une longue permanente, la coiffeuse Hasaka eu l’idée de prendre quatre élastiques et de nouer ses cheveux en quatre couettes. Enfin elle lui plaça des miroirs devant et derrière la tête :

« Qu’en pensez-vous ?
-C’est très réussi...mais les quatre couettes sont étranges.
-C’est parce que vous me faites penser à une ganguro, c’est très rare les japonais blonds naturellement. »

Elle était née châtain et ses cheveux avaient bruni avec le temps, et voilà qu'elle devenait plus blonde qu'elle n'aurait jamais dû l'être. Cependant elle devait reconnaître que les couettes étaient une bonne idée, cela lui donnait un côté fantaisiste qu’elle n’aurait jamais pensé se faire seule. Elle toujours si sérieuse, ne se coiffant qu’en tresse ou en chignon, elle était vraiment transformée.

Si maman me voyait...

Elle paya la coiffeuse et retourna chez elle. Chaque vitrine dans la rue lui renvoyait maintenant la figure d’une totale inconnue. C’était vraiment étrange, mais pas laid pour autant, au contraire.

My oh my ! J’ai l’air d’une pop star ou quelque chose dans ce genre-là.

Cette idée la fit rire, un petit rire nerveux encore empli de tristesse. Un passant dans la rue se demanda pourquoi cette enfant riait ainsi devant son reflet. Quelle histoire s’était-elle inventée ? Le rire continua jusqu’à la porte de son nouvel appartement, puis il cessa brusquement. La fillette redevint sérieuse et songea qu’à partir de cet instant elle ne prononcerait plus jamais le nom de Goshi, elle n’entendrait plus personne le dire, elle allait devenir définitivement une autre personne.

« À partir de maintenant, prononça-t-elle clairement, je suis Orihime Temari et j’ai sept ans. »

Là-dessus, elle entra dans l’appartement et referma la porte sur elle. Demain elle achèterait des produits nettoyants, de quoi s’occuper de son singe et des vêtements. Shikaku avait promis de repasser très vite avec un architecte d’intérieur et une équipe de maçons. Elle ne put s’empêcher de sourire en pensant à la tête qu’il ferait en voyant sa nouvelle coupe de cheveux.

********

Une semaine plus tard, à l’école de Tentaï la classe de seconde année B-1 s’apprêtait à recevoir une nouvelle élève. On ne savait rien d’elle encore, à part que c’était une fille et qu’elle s’appelait Orihime Temari. La plus excitée à l’idée d’accueillir une nouvelle élève était Ino Yamanaka. Son père était allemand, mais avait été adopté par des Japonais et portait donc un prénom et un nom nippons. À l’âge de trente ans, lors d’un voyage en Europe à la recherche de ses racines, il était tombé amoureux d’une jolie allemande qu’il avait ramenée à Tokyo et épousée. Ino Yamanaka n’avait donc de japonais que le prénom et le nom de famille, sa figure était ronde, ses yeux d’un bleu très clair et ses cheveux courts blond platine. Elle était l’une des plus jolies, et surtout l’une des plus coquettes, filles de la classe. Elle passait son temps en compagnie de Chôji Akimichi, un garçon châtain au poids exagérément développé, et Shikamaru Nara, les connaissant depuis le jardin d’enfants. Actuellement ce dernier ne participait pas trop à la conversation, il lisait un livre, à moitié affalé sur son bureau et laissait sa voisine s’extasier toute seule :

« J’espère qu’elle aime les poupées ! On pourra jouer ensemble !
-Moi, surenchérit Chôji, j’espère qu’elle sera jolie et gentille.
-Surtout qu’elle n’ait pas mauvais caractère. » Maugréa Shikamaru.

Un autre garçon du nom de Kiba, aux cheveux châtains ébouriffés, qui passait pour un futur Don Juan, s’exclama :

« Si elle est mignonne je me la réserve ! »

Ino se tourna vers Shikamaru :

« Dis, c’est vrai que ton père est son tuteur ?
-Oui, il m’a annoncé ça il y a deux jours.
-Alors elle va vivre chez vous ?
-Non, dans un appartement. Il paraît qu’elle est très débrouillarde.
-Et tu l’as rencontrée ?
-Non, je ne sais pas à quoi elle ressemble. Donc je ne peux pas te dire si elle aime les poupées, si elle est gentille et si elle est belle. »

Avant qu’Ino ait pu dire autre chose, ils entendirent des pas dans le couloir. Rapidement les élèves se remirent à leurs places. La porte s’ouvrit sur leur institutrice, une brune aux cheveux bouclés comme ceux de Kurenai, au rouge à lèvre carmin, portant des lunettes et sur une petite blonde vêtue d’un short en jean et d’un débardeur rouge. Elle portait un cartable en cuir neuf dans le dos. Ses pieds étaient chaussés d’une paire de tennis blancs, ses quatre couettes et ses mèches sur le front encadraient un visage ovale et des yeux légèrement bridés d’une magnifique couleur verte. Elle ne souriait pas, ne semblait pas nerveuse pour deux sous, elle suivit la maîtresse au tableau sans jeter un seul regard aux élèves, seulement à la classe. L’endroit était très propre, les chaises et les bureaux en plastique orange et métallisées donnaient un aspect design, quelques plantes vertes sur le rebord des fenêtres et des dessins rendaient les lieux plus agréables. Dans un grand aquarium au fond de la salle, quelques poissons exotiques allaient et venaient au milieu des algues et des rochers colorés. Les élèves, eux, n’avaient pas arrêté de suivre la nouvelle des yeux et l’observaient intensivement.

« Génial ! C’est un vrai canon ! Balança Kiba qui aimait utiliser le langage des adolescents.
-Elle est très jolie, mais elle semble froide. » Remarqua Chôji en rougissant.

Shikamaru aussi avait redressé la tête, c’est vrai qu’elle était drôlement mignonne, par contre ce visage ne lui était pas totalement inconnu. L’avait-il déjà croisé quelque part ? Son père ne lui avait rien dit de plus à son sujet hormis qu’elle était sous sa tutelle. La maîtresse inscrivit au tableau les kanjis qui formaient son prénom et son nom de famille :

« Les enfants, votre nouvelle camarade de classe s’appelle Orihime Temari. Je compte sur vous pour lui réserver un excellent accueil. Veux-tu nous parler de toi Orihime-san ?
-Bonjour, je m’appelle Orihime Temari, j’ai sept ans et demi et je suis ravie d’être parmi vous. Déballa-t-elle d’une traite en sondant enfin la classe de ses beaux yeux.
-Avez-vous des questions à lui poser ? » Demanda l’institutrice.

Chôji rougit encore plus fort, mais leva la main d’un air déterminé. Plus qu’une question, c’était une remarque qu’il avait à formuler :

« Tes cheveux sont d’un châtain très clair.
-C’est parce qu’ils ne sont pas châtains, mais blonds, intervint Shikamaru avant que la maîtresse ait pu parler, franchement Chôji ta meilleure amie est blonde et tu ne sais toujours pas comment s’appelle cette couleur ?
-Oui, mais Ino est européenne et ça se voit, alors que Temari-san a un profil nippon comme nous.
-Sans doute a-t-elle un de ses parents d’origine étrangère. »

La phrase de Shikamaru suscita une vague d’intérêt et tous les enfants se tournèrent vers Temari en attente de sa réponse. Cette dernière se mordit intérieurement la lèvre, elle se souvenait parfaitement de ce Nara junior et de leur dernière rencontre assez désagréable. Elle en aurait parié n’importe quoi que Shikaku l’avait placé dans sa classe afin de la surveiller par le biais de son fils qui lui racontait forcément ses journées. Mais il en fallait plus pour la démonter, actuellement son problème était ailleurs : que répondre à cette quarantaine de petites oreilles qui attendaient de savoir pourquoi elle avait les cheveux blonds alors qu’il paraissait évident qu’elle était japonaise. Mieux valait ne pas prendre de risque en inventant une famille imaginaire, sa réponse fut plus scientifique :

« C’est un problème capillaire de concentration d’eumélanine brun.
-De quoi ?!! »

Ils n’avaient rien compris. Oubliant totalement qu’elle se trouvait dans une classe de seconde année de primaire, elle attrapa une craie et dessina rapidement la structure d’une molécule d’eumélanine comme elle l’aurait fait lors d’un exposé dans les laboratoires de son ancienne université.

« Voilà, l’eumélanine est un polymère de la mélanine. La mélanine fait partie des pigments responsables de notre couleur de peau, de cheveux ou des yeux. Tout est une question de concentration, si vous avez une forte concentration d’eumélanine brun, vous serez brun. Au contraire, moins vous en avez et plus vos cheveux s’éclaircissent. On retrouve l’eumélanine dans les cellules du corps appelées mélanocytes. Pour vous souvenir de ça, je vous marque son numéro CAS (ou CAS registry number en anglais) qui est 12627-86-0. »

Elle inscrivit les chiffres sous le schéma et se retourna vers la classe, on aurait dit qu’elle venait de se mettre à parler une langue extraterrestre. Les yeux s’étaient écarquillés, les bouches ouvertes auraient pu faire entrer un shinkansen. La maîtresse rechaussa ses lunettes et effaça le dessin et les chiffres auxquels elle n’avait pratiquement rien compris comme ses élèves.

« Bon...hem...finies les questions, il faut te trouver une place Orihime-san. Ici les filles doivent se mettre à côté des garçons, donc va t’installer près d’Akimichi-kun. »

Le garçon rondouillard sourit, mais Temari répliqua assez froidement :

« Je préfèrerai être à côté de quelqu’un d’autre. »

Ce n’était pas tant le voisinage de l’Akimichi qui la dérangeait, mais plutôt le fait qu’il soit assis juste devant Shikamaru. Chôji se dégonfla comme un ballon de plage. D’autres garçons semblèrent alors très désireux d’expulser leurs camarades féminines. Kiba se pencha vers sa voisine, une petite brune aux cheveux coupés au carré :

« Hinata, tu ne voudrais pas aller te mettre à côté de Chôji ? »

Mais avant qu’elle ait pu répondre, l’institutrice désignait déjà Sai, un garçon aux cheveux noirs et au teint très pâle assis sur un bureau à gauche de la pièce.

« Voilà, va te mettre à côté de Kaiga-kun. »

Cette fois-ci Temari ne protesta pas et alla s’installer à côté du garçon en question. Ino lui jeta un regard envieux, elle avait un petit faible pour Sai depuis l’année dernière. Il était originaire de Nagano et, comme Temari, était arrivé en classe après la rentrée. C’était un garçon assez silencieux qui passait son temps à crayonner. Il vivait chez une tante car ses parents étaient constamment en voyage d’affaires, cette tante était une artiste assez connue et exposait souvent, tout indiquait que son neveu avait hérité de ses dons. Ce talent pour le dessin et le fait qu’il soit aussi très beau faisaient qu’Ino n’avait d’yeux que pour lui. La maîtresse reporta l’attention sur elle :

« Bon, pour bien démarrer la journée nous allons réviser la table de cinq. Allons-y...cinq fois quatre ?
-Vingt ! Répondit la classe en chœur.
-Cinq fois neuf ?
-Quarante-cinq ! »

Temari lâcha un léger soupir, dire qu’elle avait un niveau d’université, elle une élève de presque dix-huit ans, se préparant pour entrer dans la police, allait réapprendre les tables de multiplication...mais aujourd’hui cette classe était encore la meilleure cachette qu’elle puisse avoir en attendant d’avoir une idée pour retrouver les assassins de sa famille. Chôji se retourna pour voir son meilleur ami et lui chuchota :

« Shikamaru, c’est quoi une polie mère ? »

Le Nara junior secoua la tête, il était cultivé et avancé, mais il n'avait pas d'idée pour cette question, ça devait être une molécule. Il se tourna à son tour discrètement vers la table de Sai et Temari. Les cheveux de la fillette n’avaient pas l’air teints, c’était sûrement vrai son manque d’eumélanine, mais quand même c’était une étrange fille. Il pressentait déjà qu’ils n’allaient pas s’ennuyer avec elle.




Et voilà !!!
Adieu Goshi, bonjour Temari et sa nouvelle vie. J'espère que vous allez apprécier.

Je suppose que vous commencez, fans de Détective Conan, à entrevoir qui est qui dans l'histoire. Restez concentrés, il y'aura de nouveaux personnages dans le prochain chapitre, eux aussi sortis du manga.






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