Fiction: Pour le Clan

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Rouge.

Telle était la couleur du ciel cette nuit-là.

Les Kaguya revenaient d’un nouveau carnage le regard fou. Un rictus effrayant accroché aux lèvres, ils se tenaient droits, fiers d’être couverts de sang. Perdu au milieu de l’attroupement d’homme un petit garçon pleurait, étouffant à grande peine ses sanglots mais incapable de cacher les larmes salées qui coulaient sur ses joues claires.

À la tête des hommes, Sakki l’Acéré, le chef du clan, l’avait remarqué.

Le gamin était faible, trop faible. La vue du sang le révulsait et, malgré son aptitude au combat exceptionnelle, il ne serait jamais un vrai Kaguya tant que cette tare persisterait.
Mais ce gamin n’était ni le premier, ni surement le dernier à se montrer réticent. Ils avaient depuis longtemps trouvé un traitement à cette maladie. Car ce n’était ni plus ni moins qu’une tare chez les Kaguya, la maladie des lâches.

À peine rentrés au village, en poussant des cris sauvages plus bestiaux qu’humains, Sakki pris l’enfant à parti.
Ce dernier le suivit en essuyant ses larmes d’une main tremblante. Il ne fallait pas pleurer, il ne devait pas être faible devant Sakki.

Il ne devait pas avoir plus de cinq ans et pourtant il portait déjà la marque de ceux qui ont vu l’enfer au fond de ses grands yeux verts d’eau cerclés de rouge. Comme tout garçon né Kaguya, il portait aussi deux points rouges sur le front. Son petit visage pâle et maculé de sang était encadré par deux longues mèches argentées.

Sakki grimaça, ses cheveux n’étaient pas ceux d’un Kaguya. L’enfant avait manifestement aussi hérité de tares venant de la mère... Il aurait du mieux choisir sa femme avant de l’engrosser.

« Fils, j’ai cru te voir pleurer. Gronda-t-il d’une voix de stentor. »

Immédiatement l’enfant frémit.

« Me serais-je trompé Kimimaro ? Continua-t-il d’un ton lourd de sous-entendus.
- N… Non Père… balbutia le petit garçon.
- Tu es donc un faible ? Malgré que tu sois mon fils ? »
-
Kimimaro ne répondit pas et baissa la tête.
Sakki vit cela comme un aveu et la colère déforma son visage.

« Tsubaki !! Rugit-il. »

Kimimaro aperçut la lueur de folie se rallumer dans les yeux de son père. Instantanément il comprit ce qui allait se passer.
Son cœur s’emballa et la peur lui noua la gorge quand il vit sa mère sortir de la maison.

« Non… non… murmura-t-il tandis que son père avançait avec fureur vers sa femme. Non… Elle n’y est pour rien ! »

L’enfant tendit la mais vers sa mère et fit quelques pas dans sa direction mais le regard suppliant qu’elle lui lança le cloua sur place. S’il intervenait, la fureur de Sakki n’en serait que décuplée.

« Sale chienne ! Trainée ! Hurla Sakki en la giflant. »

D’instinct Tsubaki entoura son ventre de ses mains, son ventre qui depuis quelques mois avait curieusement grossit. Mais le chef du clan ne semblait même pas s’en préoccuper, le viol était une chose courante chez les Kaguya, si cet enfant n’était pas le sien c’était celui d’un des membres.
Une fois enceinte, les femmes devaient assumer leur grossesse et l’enfant à venir. La destinée de l’enfant était ensuite définie par son sexe, les garçons suivaient les traces de leurs pères et les filles étaient vouées à servir les hommes quelques soient leur désirs.
Tsubaki cria, hurla sous les coups de Sakki, le suppliant d’arrêter sous le regard mortifié de son fils.

La vue brouillée par les larmes, Tsubaki ne le lâchait pas des yeux, son adorable fils.
Lui qui était si différent des autres enfants du clan... Alors que ces derniers marchaient déjà sur les traces de leurs pères, Kimimaro était resté doux.

La jeune femme se recroquevilla au sol en gémissant, faisant tout son possible pour protéger au mieux le petit être qui grandissait en elle. Elle ne devait pas le perdre ! Pas encore ! Pas cette fois !
Finalement Sakki fini par cesser de la frapper et se tourna à nouveau vers son fils en le pointant du doigt. Sa colère ne s’était en rien calmée pour autant.

« Je vais te débarrasser de cette faiblesse, fils inutile ! Tu es un échec, une honte pour notre clan ! Tu es un faible, un chien galeux ! Un gamin pleurnichard ! L’ombre de rien ! Gronda-t-il en empoignant les cheveux de l’enfant et en le secouant avec force. Ton existence n’a pas de sens, tu n’es rien ! »

Kimimaro cria, il avait mal, Sakki lui faisait mal.
L’enfant gémit et s’arqua dans la douleur. Il se débâtit et appela même sa mère qui était restée prostrée sur le sol, inerte.
Sans se préoccuper des cris de l’enfant, le chef Kaguya l’entraîna hors du village et l’enferma dans une cellule sombre au cœur de la falaise qu’il entoura de sceaux.

« Tant que ton existence n’aura aucun but tu resteras ici. Tu n’es plus mon fils, tu ne disposes plus de nom, tu n’es plus rien ! Et je laverai la tache que tu as laissée sur le blason de notre clan ! Dit-il avant de claquer la porte avec fracas. »

Kimimaro, se traîna dans le coin le plus éloigné de la porte. Les lèvres serrées, il luttait contre les larmes qui menacées de jaillir à nouveau de ses yeux rougis d’avoir trop pleuré.


Il était faible.


Et c’était de sa faute, tout était entièrement de sa faute…

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