Noel à Konoha


Fanfiction Naruto écrite par cedro (Recueil de cedro)
Publiée le 27/03/2015 sur The Way Of Naruto



La soirée s'annonce belle, c'est Noël ! Les élèves sont réunis dans la Grande Salle et échangent avec leurs professeurs des histoires tantôt drôles, tantôt effrayantes... Seulement, ce soir est aussi un soir où plusieurs secrets demeurés cachés vont se révéler... Et pas de la manière la plus prévisible qui soit...


Chapitre 1: La promesse



La nuit de Noël était calme. Aucun vent glacial ne venait agiter les arbres de la Forêt Interdite, aucun flocon de neige ne venait blanchir un peu plus les toits de l'académie de ninjas . Rien ne bougeait, tout était paisible.

Les fenêtres des différentes tours de l'école de sorcellerie étaient illuminées par la lueur des bougies et jetaient sur la neige au dehors de larges taches dorées.

A la lisière de la Forêt, la Cabane d'Asuma sarutobi était elle aussi éclairée. La cheminée fumait et annonçait qu'un feu était en train de brûler dans l'âtre.



Seul chez lui, Asuma sarutobi faisait tourner sur la broche deux perdrix qu'il avait attrapées plus tôt dans la journée. Il avait d'ailleurs bien cru qu'elles allaient lui échapper et qu'il n'aurait rien à se mettre sous la dent pour le repas de Noël, mais il avait réussi à les coincer en les attendant patiemment derrière un arbre et les avait achevées de deux carreaux d'arbalète bien placés.



Il avait décidé de ne pas passer Noël avec les autres dans la Grande Salle. Cette année, il voulait passer la nuit à contempler ses vieilles photos de famille rien que pour revoir le petit visage de son père. Le retrouver pour une soirée lui faisait le plus grand plaisir.

Il avait toujours différé cette rencontre. Soit parce qu'il n'en avait pas le temps, soit parce qu'il n'en avait pas le courage. Et souvent, Asuma sarutobi s'en voulait de ne pas faire le premier pas. Parfois, il se trouvait faible, et lâche... Mais ce soir, il ne serait pas faible. Ce soir, il ouvrirait la boîte de Pandore.



Asuma sarutobi avait vu les choses en grand pour ce Noël. Il avait fait des guirlandes de papier, bleues et rouges, qu'il avait accrochées d'un bout à l'autre de sa cabane. Les guirlandes bleues représentaient des géants portant des arbres et des pierres alors que les rouges étaient à l'effigie de dragons cracheurs de feu. Il avait passé toute une après-midi à les découper et à les coller ensemble. Et, pour finir, il n'était pas peu fier du résultat !

Le feu qui brûlait dans l'âtre réchauffait l'intérieur de la grande pièce à vivre et projetait sur les objets de grandes traces dorées. Les flammes faisaient bouger leurs ombres et leur donnaient presque un côté humain. Les dragons rouges semblaient s'animer et les géants bleus paraissaient jeter leurs pierres à l'horizon.

Evidemment, rien de tout cela ne se produisait réellement...Asuma sarutobi avait hésité à confier ses décorations au professeur Iruka pour qu'il les enchante le temps d'une soirée, mais il aurait certainement voulu connaître le pourquoi d'une telle requête et le demi-géant n'aurait pas eu le courage de lui révéler la vérité. Cette soirée devait être sa soirée et personne ne devait venir le déranger ou le faire changer d'avis !



Alors, Asuma sarutobi avait cuisiné de petits amuse-bouche, rien que pour lui et Pakoun, et avait sorti une de ses meilleures bouteille de Whisky Pur-Feu. Il avait déposé sur sa table sa plus belle nappe... qui devait dater d'il y a deux siècles et qui était usé à la corde, si bien que tous les motifs qui étaient censés l'orner étaient totalement blanchis. Il avait posé sur sa chaise un coussin bien confortable, orné de petits motifs de fleurs défraichis et dont la mousse s'échappait de temps à autre par un petit trou dans le tissu. Sa maison n'avait jamais autant respiré la gaieté.

Il avait posé son immense service à thé au bout de la table. Il attendrait patiemment la fin du repas pour s'en concocter une bonne tasse bien chaude.



Le feu faisait crépiter la graisse des perdrix, pendant qu'Asuma sarutobi était en train de fabriquer une assiette pour Pakoun le croc blanc à l'aide d'une plaque en métal qu'il avait retrouvé dans son établi.

Quand il eut terminé son ouvrage, il s'autorisa quelques minutes de repos dans son fauteuil en cuir usagé. La chaleur des flammes vint lui lécher les pieds et lui détendre les muscles de son corps. Il faillit presque s'endormir, lorsqu'une braise éclata et vint atterrir dans sa barbe touffue.

Pendant un instant, il ne réalisa pas ce qu'il se passait. Il sentit tout d'abord une forte odeur de brûlé puis quelque chose remua dans sa barbe. Quand il y jeta un œil et vit le tison rougeâtre, il se mit immédiatement sur ses pieds, tapotant sa barbe pour que la braise en sorte, comme si cela allait l'aider à s'envoler.

Finalement, après l'avoir secoué dans tous les sens possibles et imaginables, le charbon ardent fini par tomber sur le sol, pour son plus grand soulagement. A l'aide de son gant de cuisine, il s'empara de la braise rougeoyante et la replaça dans le foyer de la cheminée.



Il voulut alors lisser sa barbe hirsute quand il se rendit compte que...

Un trou dans la barbe... il avait un trou dans la barbe ! Et pas un petit trou, non, un vrai trou. Un vrai grand trou dans la barbe... Il arrivait à y passer son index sans problème...

Pendant un instant, il se demanda comment il allait faire pour réparer ça, quand une idée lui vint. Madame Koharu devait bien avoir un moyen pour faire repousser les barbes. Elle en avait bien pour faire repousser les dents, alors pourquoi pas les barbes ?

Une autre braise crépita dans le feu et Asuma sarutobi eut un mouvement de recul instinctif. Il tenait trop à sa barbe pour ne pas se montrer plus méfiant à l'égard de son feu de cheminée.

C'est donc prudemment qu'il s'avança vers les deux perdrix en train de rôtir et, du bout de son long couteau effilé, vérifia leurs cuissons. Elles étaient parfaites !

L'heure était venue d'entamer le dîner.



Il retira doucement la broche de son support et la porta jusqu'à la table, où il avait installé sa planche à découper.

Il fit glisser les deux perdrix et entreprit de les dépiauter soigneusement. Il partagea ensuite la viande récoltée équitablement entre lui et Pakoun et posa l'assiette de l'animal sur le sol. Celui-ci, ne se faisant pas prier, se leva instantanément et se dirigea de lui-même vers son écuelle.

Asuma se servit une bonne lampée de Whisky Pur-Feu et, levant son verre bien haut, déclara :

- A nous deux, mon ami ! Et joyeux Noël !



Il vida son gobelet d'un trait. Quand il le reposa sur la table, son regard dériva sur un grand carton posé sur le meuble à sa gauche.

Non, pas pour l'instant, il devait penser à autre chose. Il ne devait pas se concentrer sur ce carton. Son heure viendrait, mais pour le moment, il devait terminer son repas de Noël.

Il jeta un coup d'œil à Pakoun, qui semblait plus heureux que jamais avec son écuelle en fer et ses morceaux de viande qu'il éparpillait un peu partout sur le sol. Souriant devant tant de bonheur, Asuma sarutobi se saisit de ses couverts et commença à s'attaquer à sa viande... lorsque trois coups furent frappés à sa porte.

Non... décidément, on ne le laisserait jamais tranquille !



Pendant un instant, il hésita à aller ouvrir, voulant conserver un brin de tranquillité dans sa petite maison.

Trois autres coups furent frappés à la porte, plus forts cette fois.

Ce devait être encore Shikamaru, Ino et Chöji qui venaient lui rendre visite. Peut-être s'inquiétaient-ils de ne pas le voir dans la Grande Salle au moment de Noël ? Cette pensée vint revigorer le géant qui décida malgré tout de se lever de sa chaise pour aller ouvrir.

Arrivé en face de l'immense panneau de bois qui lui servait de porte, il entendit deux voix au dehors. La première était celle d'un homme d'un grand âge mais dans laquelle pointait tout de même une grande sagesse. La deuxième, plus féminine portait elle aussi les stigmates de son âge et tremblait de froid.

Asuma sarutobi n'en crut pas ses oreilles. Le Hokage Tsunade et Le Hokage Hruzen étaient venus le chercher.

Pendant un instant, il vit sa petite soirée tranquille au coin du feu disparaître. Jamais il ne pourrait résister aux arguments de ces deux personnages.



- Hiruzen, êtes-vous sûr qu'il ait envie de nous voir ? questionna Tsunade.

- J'en suis sûr, Tsunade .Asuma sarutobi n'a jamais été un solitaire. Bien qu'il vive à l'orée de la Forêt Interdite il aime et aimera toujours la compagnie des autres.

- Mais nous écoutera-t-il au moins, Hiruzen ?

- De ça aussi je suis convaincu, je crois même qu'il nous écoute à l'instant où nous conversons...

Un grand homme, Hiruzen.



Asuma sarutobi n'eut plus d'autres choix que d'ouvrir la porte.

Dehors sur les marches gelées de sa petite cabane, se tenaient bien le Hokage Hiruzen, dans une lourde robe mauve, et le Hokage Tsunade dans ses habits verts.

- Bonsoir mon cher Asuma sarutobi, salua le Hokage à la barbe.

- Hokage Hiruzen , Hokage Tsunade, les salua le demi-géant.

Le Hokage medecin lui répondit par un sourire chaleureux.

- Asuma sarutobi, pourrions-nous entrer, s'il-vous-plaît ? demanda Hiruzen. Même s'il n'y a pas de vent, je sens que mes orteils sont en train de geler...

- Oh, bien sûr Hokage.

Le gardien de Konoha s'écarta pour les laisser passer. Seulement, à peine le Hokage Tsunade avait-elle posé un pied dans la cabane que Pakoun s'était levé et jeté sur elle. Elle ne put retenir un cri de stupeur devant cette énorme boule de poils.

- Pakoun ! rugit Asuma sarutobi. Veux-tu arrêter ?!

Au son de sa voix, le chien recula en mugissant.

Secouée, le Hokage rajusta son chapeau en chancelant.

- Hokage, s'inquiéta le garde-chasse en s'avançant vers elle, vous allez bien, Pakoun ne vous a pas fait trop mal ?

- Non, ne vous inquiétez pas, Asuma sarutobi, je vais bien, assura-t-elle.

Tsunade épousseta sa robe pour en retirer tous les poils qu'y avait laissés le chien.

- Le Hokage Tsunade et moi-même prendrons bien une tasse de thé, si cela ne vous ennuie pas, intervint le Hokage Hiruzen.



Hochant la tête en signe d'approbation, il guida donc les deux Hokage à la table, où il les pria gentiment de s’asseoir. Il avança ensuite le plateau portant sa théière et en servit deux tasses.

- J'imagine, commença Asuma sarutobi , que vous n'êtes pas venus, tous le deux, jusque chez moi pour boire le thé ?

Tsunade eut un sourire entendu :

- Effectivement, Asuma sarutobi, répondit-elle, nous sommes venus vous chercher.

- Me chercher ? s'étonna-t-il

- Exactement, confirma la Godaime. Vous cherchez, vous et personne d'autre.



Quand Asuma sarutobi s'affala sur sa chaise, elle produisit un craquement sinistre, annonciateur de fin du monde.

- Enfin Asuma sarutobi ! continua la Godaime. Aujourd'hui est un jour spécial ! C'est Noël ! C'est un jour de fête ! Pourquoi passez-vous cette soirée seul, enfermé chez vous quand vous pourriez être au festin qui se donne dans la Grande Salle ?



Le regard de Asuma sarutobi se tourna instinctivement vers la boite en carton posée sur le buffet.

C'est alors qu'Hiruzen se leva. D'un pas nonchalant, il se dirigea vers ce même meuble que le géant venait de fixer. De ses longs doigts fins il caressa doucement le carton moisi par le temps. Enfin, il posa son regard sur le couvercle de la boîte. Pendant un instant, il sembla voir au-delà de la paroi et distinguer l'intérieur.



Relevant la tête, il se tourna vers le géant :

- Peut-être pouvez-vous nous expliquer ce qu'il se cache à l'intérieur et pourquoi cette boîte vous obsède tant...



Ce fut un moment dur à supporter pour Asuma sarutobi. Il n'avait jamais révélé à personne l'existence de ces photos. Il avait toujours eu peur que personne ne comprenne l'enjeu qu'elles représentaient pour lui, que quelqu'un se moque de lui... Seulement, Asuma sarutobi n'était pas en face de personnes capables de tourner en dérision un homme parce qu'il aimait regarder des photos de ses parents. Et ça, le demi-géant le savait, mais il ne pouvait s'empêcher d'y penser.

Faisant un grand effort sur lui-même, il se redressa sur sa chaise et, lançant un regard craintif au Hokage Tsunade, il répondit :

- Des photos.

- Des souvenirs, reformula le Hokage à la barbe.



Le demi-géant hocha la tête.

- Pourquoi en avoir si honte ? demanda alors Hiruzen. Chaque dimanche, quand je viens boire le thé chez vous, cette boîte n'est pas présente. Contient-elle de bons souvenirs ?

- Oh,Hokage ! Si vous saviez !



Asuma sarutobi était au bord des larmes.

- Mon cher ami, fit le Hokage Tsunade, je constate que vous avez une piètre opinion de nous si vous nous pensez capable de rire à vos dépens... Nous sommes tous attachés à nos souvenirs, qu'ils soient bons ou mauvais ! Ce n'est pas pour autant que nous en avons honte...

- Le Hokage Tsunade est dans le vrai,Asuma sarutobi. Nous sommes tous attachés à nos souvenirs. Sans eux nous ne sommes rien. Aussi étonnant que cela puisse paraître, ce sont nos souvenirs qui nous rattachent à notre monde. Ils définissent ce que nous sommes, ils définissent ce que nous serons, comment nous serons. Un souvenir agréable réchauffe les cœurs autant qu'un souvenir désagréable, car le sentiment d'avoir franchi une étape difficile est une sensation incomparable. N'ayez pas honte de ce qu'il y a dans ce carton, Asuma sarutobi. Soyez plutôt heureux qu'il soit là, car au moins, vous ne le savez pas perdu à jamais.



Le demi-géant leva un regard mouillé vers le vieux Hokage.

- Cependant, ajouta ce dernier en se rasseyant, il n'est pas bon de ressasser le passer.

-Asuma sarutobi, demanda une nouvelle fois à Tsunade, joignez-vous à nous pour ce soir. C'est la nuit de Noël. En restant ici, vous vous enfermez dans un cocon de malheur, vous vivez au passé. Venez avec nous et je vous donne ma parole que vous ne le regretterez pas.



Une bouffée d'émotion remonta jusque dans la gorge d'Asuma sarutobi. Il ne savait plus que faire. La tentation de céder était trop forte, mais il avait l'impression de trahir le souvenir la mémoire de son père. Cependant, il sentait que ses défenses ne feraient pas long feu face aux attaques des deux Hokage.



- Asuma sarutobi... soupira Hiruzen. Vous savez, ce n'est pas parce que, pour une soirée, vous ne jetez pas un œil à vos clichés que le souvenir de votre père vous échappera. Certes, vous ne les verrai pas ce soir. Mais rassurez-vous, il n'est pas besoin de voir un souvenir pour qu'il continue à vivre. Un souvenir, aussi insignifiant soit-il, reste gravé à jamais en nous. Et le souvenir de vos parents est loin d'être insignifiant, je le sais. En fait,Asuma sarutobi , vous ressemblez en quelques points à ce cher monsieur Shikaku. Lui aussi tient à la mémoire de ses aînés.



Il y eut alors un silence .Asuma sarutobi se sentit confus pendant un instant. Comme s'il était irrémédiablement attiré par la terre. Comme si le poids lui tombait sur les épaules. Il ne savait plus quoi penser. Peut-être Hiruzen avait-il raison ? Peut-être devait-il aller dans la Grande Salle ?

Seulement, il ne pouvait pas s'y résigner, pas maintenant, pas alors qu'il allait bientôt toucher à son but.



- Nous cachez-vous quelque chose, mon cher ? interrogea soudain Tsunade, inquiète.

- C'est une très bonne question que pose le Hokage Tsunade, renchérit Hiruzen. Voyez-vous, mon cher Asuma sarutobi, j'ai l'impression que vous ne nous avez pas tout dit. Par exemple, pourquoi êtes-vous si attaché à vos photos ? Pourquoi tenez-vous tant à les cacher ? Mais surtout, pourquoi en avez-vous si honte ?

- Je n'en ai pas honte, professeur, rétorqua Asuma sarutobi. Jamais je n'aurai honte de ce qu'il y a dans ce carton.

- Alors, dans ce cas, questionna le Hokage, pourquoi les cacher ainsi ?

- Ils sont privés.



Hiruzen continuait à le regarder :

- Vous me cachez quelque chose,Asuma sarutobi. Ces souvenirs peuvent-être privés, mais ils ne doivent pas vous empêcher de venir avec nous. Il y a quelque chose d'autre qui vous en empêche. Peut-être un autre souvenir... Peut-être un souvenir qui n'est pas sur vos photos...



Le cœur d'Asuma sarutobi sombra dans sa poitrine. Comment avait-il fait ? Comment avait-il deviné ?

Le demi-géant ne sut quoi répondre. Il balbutia d'étonnement, il s'étouffa de tristesse mais aussi de colère, il serra les poings pour se retenir d'exploser. Comment diable Hiruzen avait-il fait pour deviner ?



- En fait, continua le Hokage, ce n'est pas ce qu'il y a dans ce carton que vous voulez cacher, ce ne sont pas ces photos que vous gardez égoïstement avec vous. Non, bien sûr que non. Il y a un autre souvenir. Un souvenir douloureux, que vous n'arrivez pas à oublier.

- Racontez-nous, fit Tsunade en posant sur la main du demi-géant ses doigts fins en signe de réconfort. Je vous prie, racontez-nous votre malheur.



Il n'avait plus le choix, il devait leur raconter.

- Pour tout vous dire,Hokage, cet épisode a resurgi l'année dernière, lorsque j'ai été envoyé à Kumo, commença le demi-géant. Pendant mon séjour, les Dé-traqueurs m'ont rappelé la pire journée de ma vie. J'étais dans la Grande Salle, c'était à l'heure de midi. Je finissais mes devoirs de Métamorphose. Je me rappelle avoir cassé mon stylo sur cet exercice. C'est alors que les portes dorées se sont ouvertes. Derrière elles, le professeur Danzo alors directeur, était en grande conversation avec le Ministre de la défense. Ils se sont approchés de moi et ils m'ont regardé droit dans les yeux. Le Ministre m'a demandé de rassembler mes affaires et de les suivre, ce que j'ai fait. Nous sommes allés dans le bureau du professeur Danzo. Vous nous attendiez là-bas, Hogage, vous étiez sous-directeur à l'époque. Et là, le Ministre m'a dit : « Mon garçon, il va falloir être fort. » Je ne voyais pas de quoi il voulait parler. Vous aviez la mine grave, professeur. Je sentais que quelque chose n'allait pas. Vous avez fait apparaître une chaise, sur laquelle vous m'avez demandé de m’asseoir, je vous ai obéit. Et puis le Ministre s'est posté devant moi, je voyais bien qu'il cherchait ses mots. Je savais qu'il avait quelque chose de désagréable à m'annoncer. J'espérais seulement que ce n'était pas trop grave. Je crois que je ne me suis jamais autant trompé de toute ma vie. Mon père était mort. Et le Ministre m'a annoncé cela dans le bureau de Danzo, en me parlant doucement, comme à un enfant qu'il faudrait rassurer. Seulement, à cet instant, je ne me suis jamais senti aussi seul. Qui me restait-il ? Ma mère m'avait abandonné, mon père en avait eu le cœur brisé, même si parfois, il le cachait bien. J'avais toujours su qu'il ne s'était jamais vraiment remis de cette rupture. Qu'elle le rongeait encore progressivement. Le Ministre m'avait dit que son cœur avait lâché, tout naturellement. Mais je savais que c'était faux. C'était le chagrin d'être seul lui aussi, pendant que j'étais à l’académie de Konoha, qui l'avait fait partir. Je n'étais à l'époque qu'un enfant de douze ans, comment vouliez-vous que j'assimile cette information ? Le Ministre m'a fait quitter l'école pour l'enterrement. Quand je suis revenu, je m'étais promis de conserver l'image de mon père à jamais. Je m'étais promis que jamais il ne disparaîtrait de ma mémoire. Et puis la vie reprit son cours, et les examens m'embrouillèrent le cerveau. Mon père vivait toujours en moi, mais il était devenu secondaire. Alors, quand les Détraqueurs m'ont rappelé cette terrible journée, je me suis senti coupable. Je devais me rattraper, je devais faire revivre mon père.



Un lourd silence vint accueillir cette confession. Le Hokage medecin mit sa main devant sa bouche en signe de surprise.

- Mon cher, réussit à articuler Tsunade, je suis sincèrement désolée de ce qui vous est arrivé. Je n'en savais rien !

- Ne soyez pas désolée, Hokage. Personne n'y peut rien.

- Et croyez-vous sincèrement, reprit Hiruzen, que c'est en vous morfondant sur le souvenir de cette terrible journée, que l'image de votre père en sera plus reluisante ?



Asuma sarutobi fut pris de court par la question du Hokage. De toute évidence, il ne voulait rien lâcher.

- La réponse est non, Asuma sarutobi. Vous alimentez le souvenir de votre père avec un souvenir triste, vous ne le laissez pas s'épanouir, vous le limitez à cette journée. Je pense, au contraire, que votre père ne doit pas être assimilé à ce jour. Vous l'aimiez et il vous aimait, ce n'était pas un homme triste, comme vous le faites croire. Il regorgeait de vie. Alors pourquoi le rapprocher de cette journée, qui représente à l'évidence tout ce qu'il n'était pas ?

- Mon cher Sarutobi, intervint le Hokage Tsunade, il vous faut ouvrir les yeux. Vous n'êtes pas entièrement heureux, ici. Tout le montre. Vous avez un devoir honorable à accomplir, mais vous vous y prenez de la mauvaise manière. Regardez autour de vous, voyez-vous de la gaieté dans ce qui vous entoure ?



Il jeta un regard sur son intérieur. Il lui sembla triste pendant un instant. Le feu de cheminée n'illuminait plus tant que ça son fauteuil. Les guirlandes en papier paraissaient délavées, tout comme la nappe sur laquelle il mangeait. Il sentit que quelque chose lui manquait. Quelque chose qui, une fois qu'elle lui était retirée, laissait un grand vide en lui. De la compagnie peut-être. Certainement même. La compagnie de ses amis lui manquait. Elle lui manquait même bien plus que la compagnie du papier glacé des photos en noir et blanc.

C'est alors qu'une voix retentit dans son esprit, la voix d'un souvenir, pas si vieux que ça, d'environ une vingtaine de minutes :

J'en suis même sûr, Tsunade. Asuma n'a jamais été un solitaire. Bien qu'il vive à l'orée de la Forêt Interdite il aime et aimera toujours la compagnie des autres.

Hiruzen Sarutobi ne s'était pas trompé. Asuma aimait la compagnie des autres. Mais par-dessus tout, il avait raison, Asuma était triste sans s'en rendre compte.

Il essuya une larme qui perlait d'un revers de sa manche.



Le Hokage à la barbe le regarda un instant, puis, voyant que son garde-chasse allait céder, il lui demanda :

- Acceptez-vous ma proposition, Asuma ? Venez-vous avec nous ?

Mais Asuma tint bon, il résista tant bien que mal à l'appel de la fête. Au moment où il allait formuler sa réponse, le Hokage Tsunade intervint :

- Hiruzen, je pense que notre cher garde-chasse a besoin d'un argument supplémentaire.



Un sourire facétieux venait d'apparaître sur son visage et Asuma sentit que quelque chose se préparait entre les deux Hokage.

- Je pense que vous avez raison, Tsunade, lui répondit le Sandaime en affichant le même sourire, alors tâchons de lui donner ce qu'il désir...



Se tournant sur sa chaise, il commença à malaxer les mundra de sa robe mauve et pointa les guirlandes bleues et rouges.

Soudain, dans un concert de bruit de papier, les géants jetant des pierres se dessoudèrent les uns des autres. Les dragons rouges les imitèrent. Tous s'envolèrent vers la table. Quand ils se posèrent, Asuma n'en crût pas ses yeux.

Un spectacle de papier. Un spectacle de bonhommes en papier !



Hiruzen, du bout de ses doigts, guidait les géants bleus et les dragons rouges dans une chorégraphie époustouflante. Les géants bleus dansaient la javanaise tandis que les dragons rouges faisaient des haies d'honneur en crachant leurs feux. Bien qu'ils soient en papier, Asuma jura que des étincelles sortaient de leurs gueules. Quand il regarda Tsunade, il vit qu'elle aussi avait effectué un jutsu. Cela expliquait les flammes.

Un sourire fleuri sur son visage. Quand ses muscles se tendirent, il sentit toute sa tristesse s'envoler par ses joues. Et il comprit, il comprit ce qu'avait voulu dire Hiruzen. Pour qu'un souvenir soit heureux, il fallait s'en rappeler comme tel.

Un géant, par une adroite pirouette, vint se poser sur l'épaule du demi-géant. Il commença à rire devant ce spectacle qui le remplissait de joie. Ses créations de papier dansaient devant lui.

- Bon, très bien, j'accepte ! céda-t-il, regardant toujours ce spectacle enchanté qui se jouait devant lui. Je viens avec vous dans la Grande Salle.

- Oh Asuma ! répondit Tsunade. Rien ne pouvait nous faire plus plaisir ! Et les élèves étaient si impatients de vous voir !



Les élèves étaient impatients de le voir ? Cette parole lui mit instantanément du baume au cœur. Les élèves avaient pensé à lui. Ils avaient envie de le voir.

Pas le temps de prendre un manteau, Asuma voulait s'y rendre maintenant. Il voulait aller là-bas, dans la Grande Salle, et passer le plus beau Noël de toute sa vie.




bonne lecture