Je n’arrivais pas à croire ce qui m’arrivait. Je commençais à avoir l’impression d’être maudite. J’étais devant ma voiture, prête à me rendre à mon rendez-vous avec Ino et Tenten pour un samedi entre filles, quand je vis l’énorme rayure sur mes portières. Il était écrit « bécasse ».
-Super… Marmonnai-je.
Je ne pouvais pas me promener en ville avec ça. Je devais préserver le peu de réputation qu’il me restait.
Je pris alors mon téléphone et composai le numéro de Tenten.
-Allô ?
-Salut, Tenten. Ecoute, les élèves de l’école se sont amusé à rayer ma voiture.
-Quoi ? Cria-t-elle.
-Oui je sais, c’est vache… Ils ont dû le faire hier soir, je ne le remarque que maintenant.
-Oh ! Les connards ! Tu veux que je leur botte les fesses pour toi ?
J’émis un faible rire.
-Non, c’est pas nécessaire. Garde tes forces, ils n’en valent pas la peine… Mais je vais pas pouvoir venir, aujourd’hui, il faut que j’aille faire réparer ça.
J’aurais juré qu’elle roulait des yeux à cet instant.
-Allez, Hinata ! T’as qu’à demander à l’un des innombrables employés de ton père de le faire !
-… Tu sais que j’aime pas faire ça.
-Une fois n’est pas coutume, j’te signale ! Insista-t-elle.
-Tenten…
Elle soupira, résignée.
-Ok… Je dirai à Ino que Hinata la rabat-joie s’est désistée…
Je me sentis coupable de les laisser tomber ainsi, mais pas assez pour importuner les domestiques pour une simple rayure dont je pouvais m’occuper toute seule.
Je ne voulais pas me rendre chez Hayate, je tenais quand même à mon argent de poche, même si je ne l’utilisais pas souvent. Et acheter de la peinture dans ce coin huppé de la ville reviendrait encore plus cher.
Je pris alors la décision de me rendre de l’autre côté de la ville, là où tout était moins cher. J’espérais que la qualité des produits de là-bas est tolérable…
En chemin, je passai devant la maison de Kiba. Je ne leur ai pas parlé depuis Lundi, blessée dans mon amour-propre par leur morale. J’étais consciente qu’il me disait ça pour mon bien, mais mes sentiments avaient le dessus, cette fois-là. Cela dit, ils me manquaient énormément.
J’arrivai dans le quartier des affaires. A mon soulagement, personne n’avait remarqué l’insulte gravée sur ma carrosserie. Et je priai pour ne pas croiser mon père, par ici. Je doute qu’il soit au courant de la persécution dont j’étais victime à l’école. S’il voyait ces rayures, je craignais qu’il allât m’enlever mon titre d’héritière, à nouveau. Et avec tout ce que je vivais, je ne pensais pas pouvoir supporter un autre déshonneur.
Tout se passa très bien, et je pénétrai dans la zone des quartiers modestes de Konoha.
Ici, les maisons étaient de taille raisonnables, les portails n’étaient pas blindés, et l’atmosphère était agréable, convivial.
Malgré mon aversion à mon mode de vie, je reconnus, honteusement, que je n’avais jamais cherché à découvrir et à explorer ce monde-ci. Les grandes maisons, les voitures de luxes, les soirées mondaines et la haute gastronomie étaient tout ce que je connaissais. Et cela ne m’avait jamais traversé l’esprit de venir dans cette partie de la ville.
A ma grande surprise, les gens ne se retournaient pas au passage de ma Ferrari. Pourtant, je notais que les véhicules d’ici étaient simples, et ne coûtaient pas très cher pour des voitures. Avaient-ils l’habitude de croiser des voitures de sport, par ici ?
Je mis trente minutes pour trouver le centre commercial. Celui-ci était plus petit que celui auquel j’avais l’habitude de me rendre, mais l’intérieur n’avait rien de différent. Cela me réconforta quelque peu. Je me sentais encore plus vulnérable ici, en territoire inconnu.
Je constatai avec soulagement que les produits vendus ici étaient les mêmes que ceux vendus chez moi, sauf que les prix étaient cinq fois moins cher.
Je me sentais quelque peu volée, en remarquant cela, mais devais admettre que ce n’était que justice, vu la somme d’argent dont on disposait, là-bas.
Je me rendis dans les rayons pour voitures, et eus un moment de solitude extrême. Je n’avais aucune idée de quelle peinture choisir. Je n’avais jamais repeint une voiture de toute ma vie…
-Si j’étais toi, je confierais ça à un pro. Dit une voix derrière moi.
Je me tournai pour me retrouver face à face avec un jeune garçon de mon âge. Il avait les cheveux rouges, pas de sourcils et des cernes très marqués autour de ses yeux verts. Il avait un kanji signifiant « amour » sur la partie gauche de son front.
Je me rendis compte qu’il me disait quelque chose… Et me rappelais qu’il était un des élèves transférés de mon lycée. J’avais cru comprendre qu’il venait de Suna, fils d’un extrêmement riche homme d’affaire de la ville…
Mais je ne pouvais mettre le doigt sur son nom.
-Euh…
-Gaara. Me dit-il.
-Oui ! Bien sûr, Gaara. Dis-je en rougissant… Euh… Qu’est-ce que tu fais par ici ? Demandai-je.
-Et toi ? Répliqua-t-il.
-… Ma voiture a été rayée…
-Je sais, je l’ai vue en entrant.
-… Tu me connais ?
-… Comment ne pas connaître Hinata Hyuga ? Demanda-t-il. On parle très souvent de toi, ces derniers temps.
Je baissai les yeux, attristée par cette nouvelle.
-C’est vrai.
-Mais ce que je comprends pas, c’est pourquoi tu viens ici pour la repeindre.
-… Hayate coûte cher. Expliquai-je.
Il sourit. Il était plutôt beau quand il souriait…
-Je te l’accorde.
-Et tu n’as toujours pas répondu à ma question. Insistai-je.
-Je viens souvent ici. En exploration…
-Oh.
Je me sentais soudain honteuse. Je vivais ici depuis toujours et il y avait encore des facettes de la ville que je ne connaissais pas, mais un étranger, qui n’avait emménagé que l’année dernière, la connaît déjà mieux que moi.
-Tu n’as pas l’air très douée pour repeindre une voiture, dis-moi.
-Ca se voit tant que ça ?
Il rit… J’aimais bien son rire.
-Oui, tu ne sais même pas quelle peinture choisir. Se moqua-t-il gentiment.
Je le regardai droit dans les yeux.
-Dans ce cas, tu veux bien m’aider ? Lui demandai-je, un peu timide.
Il me sourit tristement.
-Malheureusement, je suis aussi nul que toi. S’excusa-t-il.
-Oh.
-Mais, je connais quelqu’un qui pourrait te réparer ça ! Se rattrapa-t-il.
-Ah bon ? Tu connais bien le coin on dirait. Remarquai-je.
-Je viens ici tous les Samedis.
J’écarquillai les yeux.
-Ah bon ?
-Ouais. Allez viens, j’t’emmène là-bas.
Je le suivis en silence. Il était sympa, ce Gaara…
Sa voiture était une Porsche rouge sang. Ca sortait bien avec ses cheveux.
Je le suivis avec ma Ferrari vers un garage pas très loin du centre commercial.
C’était un ancien aérodrome, d’après ce que je voyais. Il était gigantesque et de nombreuses voitures étaient garées au parking – qui était une ancienne piste d’atterrissage—. J’adorais l’endroit. Je m’y sentais si libre !
Gaara me conduisit à l’intérieur. Et j’aperçus un homme assez âgé qui devait être un sexagénaire. Il était grand, et étaient encore très musclé malgré son âge. Il avait les cheveux blancs et longs qui lui descendaient jusqu’en bas du dos.
Il se retourna en nous entendant arriver, et je vis un visage sans ride. Je commençais à douter de son âge…
-Gaara ! Salut ! Salua-t-il, très joyeux.
-Bonjour, Jiraya. Je te présente Hinata. Dit-il en se tournant vers moi.
-Une Hyuga ? Que faites-vous aussi loin de chez vous, belle demoiselle ?
Étais-je en train de rêver ou il me draguait ? Et puis, d’où connaissait-il mon nom de famille ?
-Euh… et bien, j’avais besoin de repeindre ma voiture.
Il hocha la tête en mettant son poing sous son menton.
-Hayate est toujours aussi cher à ce que je vois. En conclut-il.
Je me contentais de hocher la tête, trop confuse. Comment connaissait-il autant ce milieu ?
-C’est laquelle ta voiture, petite ?
Je fus soulagée qu’il laissât tomber le ton dragueur. Cela m’avait mise extrêmement mal à l’aise.
-La Ferrari, là-bas. Répondis-je en l’indiquant du doigt.
Il siffla.
-Bel engin ! S’excama-t-il.
-Merci. Répondis-je tout bas.
-… Mais ça va prendre longtemps, y’a encore tout plein de voitures qui devront passer avant la tienne.
-Oh… Et elle sera finie à quelle heure, alors ? Demandai-je.
-Vers seize heures. Dit-il simplement.
J’ouvris en grand la bouche. Que pouvais-je bien faire jusqu’à seize heures ? Il n’était que huit heures et demie !
-C’est bon, je vais la distraire pendant ce temps. Annonça Gaara.
Hein ?
Je voulus protester, mais Gaara m’entraînait déjà vers sa voiture. Arrivée près de celle-ci, je me défis de sa main autour de mon bras.
-Attends, attends ! Qu’est ce qu’il se passe, là ? Demandai-je, suspicieuse.
-Relaxe, Hinata. Je vais pas te manger !
-Ca je sais mais…
Il rit un peu.
-T’en fais pas, je suis pas dangereux ! Je suis même sûrement plus inoffensif que Sakura.
Je mâchouillais les lèvres, hésitante.
-Et puis, si tu viens pas avec moi, tu vas t’ennuyer toute la journée. Reprit-il.
Je soupirai, vaincue ; puis montai dans sa voiture, sur le siège passager. Malgré tout, je n’étais pas très rassurée. Je ne le connaissais que de nom et de réputation. Comment ferais-je s’il s’avérait être un malade mental ?
Il nous conduisit à une grande bâtisse qui ressemblait à un monastère. Elle était gigantesque, et ses murs étaient en pierre.
-… Tu m’emmènes prier ? Lui demandai-je.
Il rit doucement.
-Non, c’est un orphelinat.
Je me tournai vers lui, surprise.
-C’est la raison pour laquelle je viens ici chaque semaine.
Il gara la voiture et me conduisit à l’intérieur.
La décoration était sobre mais élégante. Les murs étaient en bois et dans l’ensemble, la maison était très bien entretenue, malgré son âge.
Quand nous pénétrâmes dans la très grande pièce à vivre, je vis plusieurs élèves du lycée de Konoha, jouant avec un enfant, chacun.
-Beaucoup des nôtres se sont découvert une conscience, on dirait. Expliqua-t-il. Il paraît qu’ils sont venus ici comme moi, cherchant l’aventure, ont trouvé cette maison et sont tous revenus.
J’eus un sourire en coin, attendrie par la petite histoire.
Soudain, une petite fille d’environ cinq ans courut vers nous.
-Gaara ! Cria-t-elle, toute heureuse.
Gaara s’accroupit et la prit dans ses bras, le visage plus attendri que je ne l’ai jamais vu jusqu’ici.
-Coucou, Yûka ! Salua-t-il avec affection.
La petite fille était tout simplement à croquer. Elle avait le visage joufflu, les yeux bruns très grands, le nez aplati très mignon, des cheveux bruns foncés, et tout le corps potelet. J’avais envie de la serrer très fort contre moi.
Gaara se tourna vers moi.
-Hinata, je te présente Yûka. La fille dont je m’occupe ici.
-Enchantée ! Dit-elle en me tendant la main, les yeux brillants de joie.
Je vous jure que j’avais peur de devenir cannibale à ce moment-là, tellement j’avais envie de la manger. Je comprenais alors pourquoi Gaara revenait toujours ici.
Je me retins néanmoins de la dévorer, et lui pris la main. Lui montrant mon plus large sourire.
-Tout le plaisir est pour moi, Yûka.
-Qu’est-ce que tu faisais, avant que j’arrive ? Interrompit Gaara.
-Je dessinais. Répondit-elle.
-D’accord. Remets-toi au travail, je viens tout de suite.
-OK !
Gaara la déposa par terre et elle courut vers son poste de travail.
-Elle est adorable, n’est-ce pas ?
Je hochai la tête.
-Elle me donne envie d’avoir des enfants ! Dis-je. Je devais avoir les yeux brillants en ce moment.
Gaara rit.
-Ce sont tous des orphelins. M’informa-t-il en regardant les enfants.
Cela m’attrista beaucoup.
-Je suis bénévole ici depuis six mois maintenant. Et on m’a confié Yûka. C’était le coup de foudre entre nous. Finit-il en souriant.
Je lui rendis son sourire.
-Je vois ça ! En plus, difficile de ne pas aimer une fille aussi mignonne.
-Tu pourrais postuler aussi, si tu veux. Il y a encore un enfant qui n’a pas de gardien ici.
Je réfléchis un moment, et décidai de m’y mettre. Après tout, si je pouvais donner de moi-même et être utile à quelqu’un, cela me ferait très plaisir.
-Oui, je veux bien. Je dois m’adresser à qui ?
-A la dame près de l’escalier, là-bas. Dit-il en m’indiquant l’escalier en bois ancien devant moi.
Il la salua de la tête, avant d’aller voir Yûka.
C’était une femme d’environ trente ans. Elle avait les cheveux noirs, bouclés et les yeux rouges. Sa peau était pâle comme la mienne, et elle avait des formes généreuses. Elle était vraiment magnifique.
Je marchai vers elle.
-E-Excusez-moi, je m’appelle Hinata Hyuga, et je voudrais postuler pour être gardienne. Gaara m’a dit qu’il vous en manquait encore un…
La femme parut ravie.
-Oui, avec grand plaisir ! Je me présente, je m’appelle Kurenai Yuhi. Je suis la directrice de cet orphelinat.
-Enchantée de vous connaître.
-Moi de même. Répondit-elle en souriant.
-Alors, quelles sont les règles ? Demandai-je.
-Vous devez juste venir voir l’enfant au moins deux heures par semaine. Et vous n’avez pas le droit de l’emmener dehors.
Je hochai la tête.
-Très bien. De qui vais-je m’occuper ?
J’avais hâte de commencer.
-D’un petit garçon assez difficile. Me prévint-elle. Il a sept ans. Il est assez renfermé sur lui-même. On l’a amené à nous il y a deux ans. Ses parents ont été tués par des membres de la mafia. Ils étaient très pauvres et leur devaient de l’argent.
Mon visage se tordait de douleur. La dure réalité de la vie me tombait dessus sans prévenir.
-Oh… Le pauvre petit !
Kurenai acquiesça.
-Venez, je vous conduis à lui.
Je la suivis en silence vers une pièce au fond du couloir à droite de l’escalier. Elle était assez petite, mais bien éclairée. Sur les étagères s’entassaient des robots et des maquettes de maison.
Au centre de la chambre était un petit garçon aux cheveux de la même couleur que les miens qui lui descendaient jusqu’à la nuque, au visage bien ovale, aux yeux violets très tristes et en colère aussi. Malgré cela, il était très beau.
Il était agenouillé près de la table basse, coloriant ce qu’il me semblait être une poutre miniature.
-Jun, je voudrais te présenter quelqu’un.
Il leva les yeux vers moi, me considéra pendant quelques secondes, son visage soudain vide d’émotion, et se concentra à nouveau sur sa maquette.
-Voici Hinata. Elle va s’occuper de toi à partir de maintenant.
Il ne répondit pas.
Kurenai et moi nous regardâmes, avant qu’elle ne se tourne à nouveau vers Jun.
-Bon, je vous laisse. Amusez-vous bien !
Elle m’adressa un dernier regard reconnaissant avant de quitter la pièce et de fermer la porte derrière elle.
Il y eut un silence tendu pendant quelques minutes avant que je ne me décide à m’avancer et à m’asseoir en face de lui.
-Alors… Qu’est-ce que tu fais ?
Il m’ignora.
-… Je peux t’aider ?
Pas de réponse.
J’avais l’impression d’être en face d’un Sasuke en miniature.
Je soupirai, et pris doucement un pinceau et une fenêtre. Il ne réagit pas. Je pris ça pour un signe positif, alors je me mis à la peindre en blanc, comme les autres qu’il avait déjà finies.
Nous travaillâmes en silence, pendant deux heures. J’étais toujours très mal à l’aise, mais je ne voulais surtout pas le brusquer.
Quand je finis enfin par m’habituer à l’atmosphère, il prit la parole.
-Hinata, c’est ça ? Demanda-t-il.
Sa voix était douce et mielleuse, très agréable.
-Oui.
-Tu viens de là-bas ?
Je fronçais les sourcils.
-Où ça ?
-Du quartier des riches.
-…Oui. Acquiesçai-je.
-…J’ai jamais été là-bas.
Je haussai les épaules.
-Tu sais, les maisons sont juste plus grandes, c’est tout.
-Et les voitures plus jolies aussi…
Je souris. Il avait raison.
-Pourquoi tu es venue ici ?
-Ma voiture a été rayée, et j’ai cherché un garagiste ici. Ensuite, j’ai rencontré mon ami Gaara qui m’a amenée ici.
Silence de quelques minutes.
-Tes parents sont encore en vie ? Reprit-il.
-… Mon père est encore vivant, mais ma mère est morte quand j’avais cinq ans.
-De quoi ?
-Une embolie pulmonaire.
-C’est quoi ?
-C’est quand du sang solidifié appelé caillot obstrue l’artère pulmonaire.
-… Je comprends pas.
-Eh bien, le caillot a empêché le sang de bien circuler, et ça l’a tuée.
Il parut comprendre vaguement.
-Oh… Mes parents se sont fait tirer dessus par la mafia. Dit-il tout bas.
Je ne pus répondre, j’avais la gorge serrée.
-Mais ils m’aimaient beaucoup avant de mourir.
Je lui souris.
-Tu avais beaucoup de chance alors !
Il parut surpris.
-Ton père ne t’aime pas ? Me demanda-t-il.
C’est qu’il est perspicace, cet enfant !
Je secouai la tête.
-Non.
Il parut attristé par cette révélation.
-Mais tu sais, je fais avec. Le rassurai-je.
Il ne répondit pas.
Pour ne pas gâcher l’atmosphère qui commençait à se créer, je pris la parole.
-Tu aimes bien faire des maquettes ?
-Oui. Le résultat est mieux qu’un dessin, je trouve. Expliqua-t-il.
-C’est toi qui as imaginé le modèle ?
-Non, c’est la boulangerie, ça.
-Oh… En tout cas, tu es très doué ! Le complimentai-je.
Il hocha la tête.
-Je voudrais être architecte, un jour, quand je serai grand.
Je lui souris.
Je ne doutais pas une seule seconde qu’il allait y arriver. Ce petit était très doué. Et je me fis une promesse à moi-même de l’aider à réaliser ses rêves.
L’air de rien, je me suis beaucoup attachée à lui, depuis les deux heures et demie que je le connaissais.
-Pourquoi tu n’as pas peint ta voiture toi-même ? S’enquit-il, après quelques minutes de silence, moins lourde, cette fois.
-Peindre des voitures, c’est pas trop mon truc… Dis-je tout bas.
-T’es nulle, c’est ça ? Se moqua-t-il.
Je me mis à rire.
-T’as même pas idée ! Répondis-je.
A en juger par son sourire, il m’appréciait beaucoup, lui aussi.
-Hinata ?
-Mm ?
-… Je suis désolé que ton père te déteste.
Je hochai la tête.
-Et moi, je suis désolée que tes parents se soient fait tuer.
Ce fut à son tour de hocher la tête.
Quand l’heure du déjeuner arriva, nous rejoignîmes Gaara et les autres dans le réfectoire. Les gardiens avaient droit à un repas gratuit, une fois par semaine.
L’atmosphère était légère et confortable. Je remarquais que Yûka était la seule amie de Jun. Je souriais en les regardant interagir. De toute évidence, personne ne pouvait résister à cette fillette, même pas un « dur » comme Jun…
Je passai l’après-midi, dans la salle de jeu avec Gaara, à regarder mon protégé jouer avec Yûka.
-Tu dois vraiment être mordue de cet Uchiha pour t’attacher aussi facilement à tout ce qui te fait penser à lui. Constata-t-il.
Je me tournai vers lui, les yeux ronds ; puis me repris vite.
-Alors toi aussi t’as remarqué la ressemblance…
-Difficile de passer à côté. Il regarde le monde de cet air qui dit « laissez-moi tranquille ou mourez ».
J’éclatai de rire. Il exagérait un peu quand même. Sasuke n’était pas toujours comme ça…
-Il est pas toujours comme ça, Gaara.
-Que tu dis ! Rétorqua-t-il.
Je ne répondis pas.
-Au fait, est-ce que les rumeurs disent vrai ? Tu lui as vraiment brisé le cœur ?
Je le regardai dans les yeux, et à cet instant, j’eus l’impression que je pouvais tout lui dire.
-Non. Avouai-je.
-Alors, pourquoi vous vous êtes séparés ?
-Eh bien… On est sorti ensemble, je l’aimais, lui non, il a présenté Sakura à ses parents comme étant sa petite amie et leur a dit que j’étais personne quand ils m’ont vue avec lui dans leur maison d’été, à l’ouest du pays du feu. Alors je suis partie, et il m’avait jamais poursuivie. Fin.
Il avait la bouche légèrement ouverte.
-Waouh ! Ca c’est un résumé !
-…
-Alors, il a menti ? C’est lui qui a tout gâché ?
Je hochai la tête.
-Et toi ? Tu as connu des drames amoureux ? Demandai-je pour changer de sujet.
-Non… J’ai une copine à Suna. Elle s’appelle Matsuri. Je vais la voir pendant les vacances. On a une relation normale et stable. Dit-il en souriant.
Cela me rappelait une situation similaire.
-Mon ami Shikamaru va à Suna pour les vacances, aussi. Sa copine vit là-bas.
-Je sais, c’est ma sœur.
J’ouvris grand les yeux, surprise.
-Temari est ta…
-Oui. On se ressemble pas du tout, hein !
Je secouai la tête. Que le monde était petit !
-En revanche, j’ai connu un drame familial.
-Vas-y, déballe. Lui dis-je en posant ma tête sur mon poignet et en me tournant vers lui.
-… Ma mère est morte en me mettant au monde, mon père ne s’en est jamais remis, et il a même voulu me faire assassiner, quand j’avais quatre ans.
-…
Je ne pouvais dire un mot. C’était horrible…
-Oh mon Dieu ! Ton drame familial est encore pire que le mien !
Il sourit amèrement.
-Et pourquoi il t’a envoyé ici ?
-C’est pas lui. Il est mort il y a cinq ans. Et notre tuteur, Baki, s’est fait du souci pour moi, parce que je n’arrivais à me faire aucun ami. Je n’avais que Matsuri. Même avec Temari et mon grand frère Kankurô, je ne m’entendais pas bien. Alors il a décidé de m’envoyer ici.
-Et tu t’es fait des amis, ici ?
-Oui. Je m’entends très bien avec Naruto, d’ailleurs.
Cela ne m’étonnait pas le moins du monde.
-Naruto, il est ami avec tout le monde. Lui dis-je en souriant.
-Ouais, c’est vrai.
On restait silencieux par la suite.
-Et pourquoi tu ne dis rien ? Me demanda soudain Gaara. A propos de Sasuke, je veux dire. On te persécute à cause d’un mensonge, là. Me reprocha-t-il.
-Qui est-ce qui me croirait ? J’ai pas autant d’influence que lui.
-Mais au moins tu te seras battue.
J’eus un sourire triste.
-Mes amis m’ont dit ça Lundi dernier.
-Et ils ont raison. Le laisse pas te marcher dessus.
Je ne répondis pas pendant longtemps. Il était dans le vrai. Et Neji et les autres l’étaient aussi. Je ne pouvais pas le laisser gâcher ma vie ainsi sans me défendre. Avant, je ne pouvais le voir aussi clairement. J’imagine qu’il a fallut quelqu’un d’extérieur à tout cela pour que j’écoute réellement.
-Tu as sans doute raison… Mais le problème, c’est que je ne sais plus par où commencer, maintenant. C’est devenu un bazar tellement gigantesque !
-… Si tu veux, je peux t’aider. Offrit-il.
Je me tournai vers lui, surprise, encore une fois.
-Tu ferais ça ?
-Bien sûr ! T’as l’air d’être une fille sympa. Me dit-il en souriant.
J’y réfléchis pendant une minute, puis finit par accepter, reconnaissante.
Ce jour-là, je me suis faite un nouvel ami.
-Merci, Gaara !
Nous quittâmes l’orphelinat à seize heures moins quart, après que j’eus joué à cache-cache avec Jun. Je lui promis de revenir le Samedi suivant, lui fit la bise, et rejoignis Gaara dans sa voiture.
En route pour le garage, je lui posai d’autres questions :
-Dis…
-Mm ?
-Comment ça se fait que Jiraya connaisse autant notre milieu ?
Cette question me chatouillait sans arrêt depuis ce matin.
-Parce qu’il vient de là-bas. Tu te souviens du livre chelou que le prof de Physique-Chimie, Kakashi lit à chaque fois qu’il a du temps libre ?
Je hochai la tête.
-C’est lui qui l’a écrit.
Je fronçais les sourcils.
-Comment tu sais ça, toi ?
-Je l’ai vu en étalage dans une librairie, aux rayons pour adultes.
-Tu vas dans les rayons pour adultes ?
Le coquin !
-Je m’étais perdu. Expliqua-t-il.
-Mouais, bien sûr !
-Mais l’important, continua-t-il, les joues un peu rouges, c’est qu’il paraît que Jiraya en a eu marre de tout ce bling-bling et ces paillettes et est parti vivre ici… Mais avant de partir, il paraît qu’il a donné des cours de soutien à Naruto pendant un bon bout de temps.
Quoi ?
-Je ne le savais pas !
-Naruto n’aime pas en parler. Il l’a juste laissé échapper, un jour.
-Oh…Ce matin, j’avais l’impression qu’il me draguait…
Gaara sourit.
-Tu as vu juste. Malgré son âge, le mec est un vrai pervers ! Tu devrais rester loin de lui. Les belles filles lui ont toujours tapé dans l’œil.
Je rougis violemment en entendant le compliment déguisé. Je baissai la tête et la hochai légèrement.
-Mais il est bon, au moins, dans ce qu’il fait ?
-Il est meilleur que Hayate, en fait.
Cela me soulagea.
-Tiens, petite. Et fait attention à ne pas l’abimer, cette fois.
-Oui monsieur. Répondis-je, j’avais l’impression d’être retombée en enfance, en entendant le ton qu’il employait.
-Et dis bonjour à Naruto de ma part ! Lança-t-il.
-Sans faute ! Au revoir monsieur ! Merci encore !
Il me fit signe de la main avant de retourner dans son garage. La peinture m’avait coûté trois fois moins cher que ce qu’elle valait chez Hayate…
Avant que je ne montasse dans ma voiture, Gaara m’appela.
-Fais en sorte d’arriver tôt à l’école, Lundi !
-… D’accord.
Qu’avait-il prévu de faire ? Je ne le savais pas encore. Mais sa présence me rassurait. Je savais que je pouvais lui faire confiance.
Peut-être que, cette fois-ci, je commençais à voir la lumière au bout du tunnel…