Depuis cette après-midi où Yoshino avait débarqué dans sa cuisine arrangeant un contrat fictif entre les deux adolescents, ces derniers se réunissaient tous les trois jours durant la semaine et tous les jours le week-end dans la cuisine familiale des Nara pour expérimenter les œuvres du jeune candidat.
Pour l'évaluer, Temari avait confectionné des pancartes sur lesquelles étaient inscrits des chiffres allant de 0 à 10 et notait soigneusement les résultats et autres critiques sur un carnet appartenant au Nara.
Ce dernier épluchait les recettes des meilleurs pâtisseries du monde puisqu'il visait la première place du concours et pour cause, le meilleur d'entre les candidats aurait une place au plus prestigieux des concours, celui qui élit le meilleur pâtissier du monde. Cette année, l'édition du salon international de la restauration, l'hôtellerie et l'alimentation se déroulerait à Paris et rassemblerait les meilleurs pâtissiers du monde.
Des dizaines de nationalités seraient représentées et Shikamaru n'avait qu'une hâte : y participer. Peu importe s'il ne gagnait pas le prestigieux titre mais au moins qu'il y participe et puisse obtenir une place dans une bonne école européenne.
Pour atteindre ce but, il travaillait avec acharnement et comptait bien décrocher la première place du concours national pour vivre son rêve.
Temari no Sabaku était impitoyable, comme le serait sans aucun doute le jury, et la supporter était un excellent entraînement mental. Voilà comment Temari s'était retrouvée à déguster les œuvres sucrées du Nara et jouait son rôle de juge à la perfection. La semaine, vêtue de son uniforme, elle avait l'air un peu moins effrayante mais lorsque venait le week-end, elle venait en jean et se drapait dans une blouse blanche qu'elle utilisait en cours de chimie pour remplir son rôle. Elle s'en donnait à cœur joie, même si niveau conseil de cuisson ou autre, elle était ignare puisque c'était plutôt elle qui apprenait.
En effet, Shikamaru n'avait pas oublié pourquoi ils étaient venus à se revoir et tout en pratiquant, il l'obligeait à suivre un programme spécialement établi pour elle pendant que lui s'exerçait à six niveaux supérieurs.
Leurs ressentiments mis de côtés, il avait réussi à la faire nettement progresser : elle savait maintenant casser des œufs, séparer sans faire de dégâts les jaunes des blancs, respectait les dosages même si pour le coup de fouet, on repasserait.
- Dis, Shikamaru, pourquoi je n'utiliserai pas un batteur ?
Le jour où elle lui avait posé cette question, il ne détenait pas de réponse de telle sorte qu'il lui avait gentiment remis un batteur électrique pour son plus grand malheur. Résultat, il avait perdu quantité de blancs en neige, la cuisine avait été salie jusqu'au plafond et il avait même eu droit à un court-circuit.
C'était à se demander si Temari ne portait pas la poisse.
Depuis ce jour, il lui avait formellement interdit le batteur électrique, de sorte qu'elle battait ses œufs en neige à la seule force de ses bras ou plutôt à la seule force de ses bras à lui. Elle semblait assez débrouillarde pour suivre une recette toute seule mais dès lors qu'il s'agissait de monter les œufs en neige, elle se présentait devant lui avec des yeux suppliants et il n'avait pas d'autre choix que de prendre son saladier.
Après tout, elle le payait. Shikamaru ne saurait probablement jamais que l'adolescente détestait se fatiguer pour cette étape pour une unique raison.
Il détenait une telle élégance lorsqu'il s'emparait du fouet pour battre énergiquement ce liquide incolore, son avant-bras tendu au maximum exerçait des coups de poignet précis et rapides, sa blouse de travail dessinait la fermeté de son bras durant cet effort et elle ne pouvait s'empêcher de le trouver très mignon.
Il était concentré sur son travail, ses yeux bridés rivés sur le changement qui s'opérait à la force de son bras, parfois, lorsqu'elle avait de la chance, une mèche brune s'échappait de son haut catogan bien serré et lui conférait un côté sexy qui la séduisait complètement.
Cette détermination la ravissait et elle en avait rapidement déduit que le Nara n'était pas si flemmard que ce que l'on disait.
Elle le trouvait plus craquant encore lorsqu'il surveillait avec attention ses préparations au four, qu'il mesurait ses dosages, vérifiait quelque chose sur sa fiche, même s'il était contrarié par un ratage de pièce montée ou de ganache, il conservait une décontraction totale des muscles du visage qui l'impressionnait. Il y avait quelque chose aussi qui l'émoustillait lorsqu'il essuyait ses mains sur son tablier avec une lenteur et une précision propre à sa personnalité.
Quand il cuisinait, Temari ne pouvait s'empêcher de trouver le jeune Nara incroyablement attirant. Cela ne lui avait pas pris beaucoup de temps pour s'en rendre compte ; au début, elle pensait que seules ses créations l'émerveillaient complètement mais au bout de quelques séances de matage impuni, il lui était apparu évident qu'elle ne flashait pas que sur les sablés et autres biscuits magnifiques.
Shikamaru l'attirait, c'était indéniable.
Elle en était même venue au point de délaisser son fantasme des beaux hommes athlétiques ou des chirurgiens enveloppés dans une blouse sexy et préférer contempler allègrement le Nara. Ce dernier, elle en était quasiment certaine à 1000%, ne s'en doutait pas le moins du monde vu qu'il était profondément plongé dans ses pensées, absorbé par sa passion. Son plus grand bonheur, et certainement le moment qu'elle attendait le plus, était celui de la dégustation.
Là, il devenait littéralement son dieu.
Non pas parce qu'il faisait toujours des choses incroyablement bonnes mais parce qu'il avait un sourire incroyablement chavirant. Cela lui faisait plaisir qu'elle le complimente sur ses Paris-Brest ou vacherins avec un divin coulis de framboise alors il souriait superbement bien, surtout quand elle était complètement sur un petit nuage. En réalité, Shikamaru avait plus que réussi à se venger : non seulement, il n'avait plus besoin de le faire mais la jeune fille l'avait carrément donné vainqueur par K.O à chaque fois qu'elle prenait une bouchée.
Bon, il exagérait.
Il y avait bien des fois où elle faisait une grimace, secouait fermement la tête et lui disait que c'était purement infect (oui, c'était bien ce terme) et là, elle était vraiment intraitable quand elle détestait quelque chose. Les vrais chefs ne lui faisaient même pas peur, comparés à elle.
Mais lorsqu'elle aimait... c'était tout autre chose.
Son visage s'illuminait, prenait une douceur candide, enfantine, charmante qui le surprenait beaucoup. Il avait assisté à la raclée de Sasuke et voir que c'était ce même bout de fille qui lui faisait des éloges avait de quoi perturber son esprit. Elle avait une façon de s'asseoir, jambe droite repliée sous ses fesses, qui, doublée d'une attitude de grande occidentale, le faisait secrètement rire.
Il s'essuya les mains tout en ignorant les fourmillements que son geste, bien qu'anodin, provoquait chez l'adolescente qui s'empressa de découper avec couteau et fourchette sa part de Saint-Honoré.
Temari était ra-dieu-se.
Jamais elle n'aurait cru qu'un jour, on lui présenterait un Saint-Honoré délicat, pâtisserie difficile à réaliser pour des incultes comme elle, incarnant une vraie prouesse technique, rien que pour elle, si joliment décoré de cheveux d'anges caramélisés, accompagné d'une crème anglaise dispersée soigneusement sur l'assiette sans noyer la part. Elle avait l'impression d'être la Reine d'Angleterre dans un restaurant parisien quintuplement étoilé si ça existait tellement la présentation était royalement soignée.
- 10 pour la déco, commença-t-elle à juger, alors qu'il se tenait près d'elle. Belle harmonie bien que je trouve qu'il manque un peu de crème.
Évidemment, songea Shikamaru, non sans un sourire.
S'il y avait bien une question qui revenait sans cesser le triturer, c'était bien la gourmandise titanesque de la blonde. Comment pouvait-elle avaler des dizaines de gâteaux garnis de crème pâtissière, de chantilly, de crème aux amandes, de crème au beurre chocolatée, de coulis sans prendre le moindre gramme ?
À chaque fois, elle retirait sa veste printanière et il ne pouvait que constater qu'elle était toujours aussi svelte, élancée et vraiment mince.
Où passaient les calories que détenaient toutes ses pâtisseries ?
En une semaine, elle avait bien dû amasser deux bons kilos alors il n'imaginait même pas ce qu'elle allait prendre cette semaine. Sauf que, aussi étonnant que cela puisse paraître, elle lui avait affirmé de n'avoir pris aucun gramme et qu'elle trouvait qu'il ne lui donnait pas assez de garniture.
Galère, cette fille.
Pendant que les autres couraient après les régimes, elle, elle s'amusait à goûter les pâtisseries les plus caloriques du monde sans faire le moindre sacrifice, sans verser la moindre larme de culpabilité.
Chôji avait une sérieuse concurrente.
Sauf que là, il s'agissait quand même de la crème chiboust, l'une des plus complexes crèmes pâtissières à réaliser et certainement pas la moins calorique, il ne pouvait donc pas l'empiffrer de crème quand même, ce qui, visiblement, ne semblait pas lui poser le moindre des problèmes. Lorsqu'elle avait noté la présentation, un large sourire éblouissant illuminait son visage, aussi égayé que celui d'une enfant devant ses cadeaux à Noël et elle s'attaquait, au plutôt, prit son temps pour enfourner un premier morceau dans sa bouche.
Trois scénarios pouvaient se réaliser : dans le premier, elle faisait une grimace de dégoût, repoussait son assiette et l'incendiait carrément, dans le second, elle frappait des mains et attribuait un huit et dans le troisième, elle jubilait complètement.
Curieux de sa réaction et un poil angoissé, Shikamaru patientait sans broncher pendant qu'elle savourait la crème chiboust – un vrai régal – qui se mariait agréablement bien avec le nid de caramel, la texture moelleuse et ferme en même temps des choux et le croustillant de la pâte feuilletée.
Tout était parfait. Un délice suprême.
Le comble de la pâtisserie, le sommet du grand art.
Encore une fois, elle ferma les yeux pour savourer pleinement l'explosion en bouche et il sourit, devinant sa victoire et continua à la détailler minutieusement. La voir ainsi conquise la rendait vraiment très belle et Shikamaru voyait sa fierté revigorée à son maximum.
- C'est... épatant, finit-elle, par dire.
Elle reprit trois autres bouchées pour confirmer sa première impression et continua à complimenter les différentes pâtes, leur alliage, l'onctuosité et la légèreté de la crème chiboust, la parfaite crème anglaise et le mariage divin que formaient les différents éléments du Saint-Honoré.
C'était honorablement bien réalisé.
De tout ce qu'elle avait déjà goûté jusqu'à maintenant, il venait de la séduire totalement.
Shikamaru la vit soulever sa fourchette, détailler les vagues de la crème qu'elle avala sans accompagnement, même qu'une petite partie resta près de ses lèvres quand elle enfourna un chou lui aussi généreusement fourré.
Parler la bouche ouverte était impoli et pouvait paraître ragoûtant mais Shikamaru trouvait qu'elle le faisait d'une façon assez distinguée et très raffinée. D'autant qu'il n'avait pas besoin de traducteur puisqu'elle articulait exagérément pour qu'il puisse la comprendre.
- Tu es un chénie.
- C'est ce qu'on dit, oui.
- Non, che veux dire, reprit-elle, après avoir avalé. Tu es un génie en pâtisserie. Tu as vraiment bien fait de quitter le lycée pour faire ce que tu aimes.
Shikamaru ne s'était pas attendu à ce qu'elle change d'opinion sur ce sujet.
Elle qui avait débarqué en pensant comme tout le monde qu'il n'était qu'un abruti fini qui avait fait la pire erreur de sa vie, elle s'était rangée du côté de ceux – rares mais importants – qui le soutenaient et cela, il n'aurait pas imaginé qu'elle puisse le faire.
Elle et sa tête bien faite, ses deux mains gauches et son indifférence primaire pour les métiers manuels venaient d'admettre qu'il avait fait le bon choix d'ignorer les appels de détresse des professeurs, des gens qui lui avaient prédit un désastre. Il était aussi retourné qu'une tarte Tatin.
- Tu crées de belles choses, Shikamaru, ça aurait été vachement dommage que personne ne puisse bénéficier de ton talent, continua-t-elle, d'une voix douce.
Si douce que cela achevait de chambouler l'apprenti qui ne pouvait rien faire d'autre que la fixer, les yeux emplis d'interrogations. Il revit passer devant lui Uchiwa Sasuke, honteux comme jamais il ne l'avait été de toute son existence tandis que le lycée tout entier avait cessé de respirer, complètement sidéré par l'exploit inattendu de la blonde. Seuls ses frères n'avaient pas semblé choqués par sa victoire.
Même lui, éternellement blasé par le monde scolaire et ses soucis, avait été ébranlé par la défaite humiliante de l'Uchiwa. Depuis lors, il avait fui au maximum les embrouilles, évitant la jeune fille quand il la croisait dans les couloirs de l'établissement et ce qu'il entendait d'elle ne faisait que le tenir sagement éloigné.
Le Jack l'Éventreur des mecs, voilà comment on la surnommait et ça avait de quoi flanquer la frousse.
- Merci, c'est... très gentil, murmura-t-il.
- Je pense avoir droit à une autre part, non ?
Et là, il éclata de rire. Franchement. Cette fille était vraiment très gourmande. Elle battrait à plate couture Chôji à ce jeu-là et cela l'amusait et lui plaisait au lieu de l'effrayer. Oui, elle méritait bien une autre part mais il avait d'autres projets en tête.
- Et si nous essayons plutôt de te faire progresser ?
Elle fut étonnée de sa proposition et ne cachait pas sa surprise, ce qui semblait renforcer sa joie. Elle le trouvait réellement beaucoup plus beau quand il était de bonne humeur, gai, avec son sourire craquant. Temari n'eut même pas le temps de répliquer – bien qu'elle ne souhaitait pas – et se leva, délaissant à contrecœur l'assiette entière de Saint-Honoré qui la narguait gentiment.
- On va commencer ton fraisier, annonça Shikamaru, flatté par les paroles de la jeune fille.
- Chouette ! s'exclama celle-ci, en joignant ses mains dans un claquement.
Le Nara n'eut pas le courage et surtout la méchanceté d'ajouter que vu à quel point la jeune fille était nulle en pâtisserie, ils devraient s'activer de suite puisque le retour de sa mère approchait. S'il la coachait avec vigueur pendant trois jours, il était sûr qu'elle réaliserait quelque chose de comestible. Pour une fois.
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Jamais un four n'avait fait l'objet d'une telle contemplation.
Percés par quatre yeux de couleur différente, il fonctionnait pourtant comme à son habitude sans subir la pression exercée par les deux êtres. Temari n'était pas quelqu'un de foncièrement nerveux dans la vie courante mais en cet instant, elle stressait vraiment car ce gâteau devait être impeccable pour qu'elle puisse le réaliser chez elle pour l'anniversaire de sa mère. Si elle échouait, elle pouvait dire adieu à l'idée originale et se retrouverait sans rien pour sa mère. Inutile donc de dire qu'elle angoissait, que le résultat lui faisait ronger les ongles, chose qu'elle ne faisait pratiquement jamais.
Shikamaru n'avait pas son stress, néanmoins cela ne l'empêchait d'éprouver un peu de tension et s'il fixait aussi intensément la génoise en train de cuire, c'était bien pour la supplier d'être délicieuse. Cela l'ennuierait beaucoup que la jeune fille ne la réussisse parce que cela signifierait qu'il était un mauvais professeur mais aussi, il serait bien embêté de la décevoir. Elle était si jolie quand elle souriait et surtout quand elle mangeait avec plaisir qu'il n'aurait pas le cœur de la voir attristée par son échec.
Il avait bien prévu de lui faire un fraisier digne de son nom pour sa mère si elle ne réussissait pas, mais cela n'était qu'un plan B, son objectif premier était bien de l'amener à en faire un toute seule. Le minuteur se déclencha accroissant la tension dans la pièce et surtout, faisant sursauter l'adolescente. Il était temps de connaître le résultat.
L'ongle de son pouce contre ses incisives inférieures, elle regarda le Nara s'armer de gants pour sortir sa génoise du four. Il la déposa, la retourna, la démoula et les deux reportèrent leurs prunelles sur le disque rond marron clair qui libérait une intrigante effluve.
- Ça sent bon, dit Shikamaru, en brisant le lourd silence.
- Faut que ça soit bon, surtout.
Il hocha la tête en guise d'approbation avant de se débarrasser des gants et river son regard sur l'adolescente. C'était bien la première fois qu'il la voyait aussi agitée et sa compassion s'éveilla un peu plus.
- Tu es hors compétition, Temari, rassura-t-il.
- Si, contre moi-même.
Elle était vraiment galère comme fille. Pire que toutes celles qu'il avait rencontrées. Il hésita longuement avant de poser sa main sur l'épaule tendue de la jeune fille qui ne quittait pas des yeux son gâteau.
- Je suis sûr que cette fois, c'est la bonne. Allez, dégustation.
S'emparant d'un couteau, il l'inséra au centre du disque et se tourna vers elle.
- Moelleux, c'est bon signe.
Temari trépignait sur place, ses jambes tremblaient littéralement quand elle suivit le chemin que prit la fourchette jusqu'à la bouche du jeune Nara. Mordillant son doigt, gigotant de plus belle, elle le dévisageait, guettant le moindre signe négatif ou positif.
En vain.
Shikamaru cachait très bien ses émotions et il lui fut impossible de savoir ce qu'il pensait de sa génoise jusqu'à ce qu'il prenne la parole.
Il la vit, pendue à ses lèvres comme s'il était le messager divin tant attendu, ses beaux yeux verts brillants d'impatience et teintés d'une nette angoisse, sa bouche rose renfermant son pouce appuyé contre sa lèvre inférieure et il ne put formuler la phrase qu'il avait en tête.
À la place, il sourit franchement.
À la vue des dents entièrement découvertes de l'adolescent, la joie de Temari éclata comme le Mont Saint Helens exploserait un jour répandant un nuage de cendres qui chez Shikamaru se traduisait en un nuage ardent de contentement. Il n'était pas aussi heureux qu'elle l'était mais il s'en approchait considérablement.
Temari hurla un « Yatta ! » puissant dont le brun conserverait à jamais le souvenir tout en sautant sur une place. Elle exécuta une danse victorieuse de trois secondes en répétant qu'elle était la meilleure.
Elle avait réussi !
Elle avait réussi à faire quelque chose de comestible !
Sa génoise était bonne ! Elle l'avait fait toute seule, le Nara ne l'avait aidée qu'en paroles, et elle avait triomphé de son manque de talent culinaire ! Elle avait réussi !
Son allégresse déborda abondamment, déteint sur l'apprenti qui ne pouvait refouler son sourire.
Temari jubilait et lorsqu'elle reporta son regard lumineux sur ce dernier, ses prunelles vertes s'enflammèrent brusquement et sans crier gare, elle se rapprocha de lui, ses mains saisirent son visage et elle l'embrassa avec une douceur qui contrastait avec l'élan vif qu'elle avait pris pour avaler la distance qui les séparait.
Shikamaru perdit toute joie quand il sentit la bouche de la blonde contre la sienne. Il n'y avait rien de plus merveilleux comme contact, il n'avait jamais rien goûté d'aussi savoureux et divinement sucré.
Cette pression avait le goût d'une crème mousseline, légère et fruitée, la plus parfaite des crèmes.
Temari remonta une main dans les cheveux noirs de l'apprenti pour rapprocher son visage et exerça une pression un peu plus forte sur sa lèvre inférieure, jubilant de sa victoire sur son absence totale de talent culinaire. Elle se mit à suçoter les lèvres masculines comme s'il s'agissait d'une fraise garnie de sucre glace, qui emballa le rythme cardiaque du Nara, incapable de réfléchir et encore moins de réagir à l'assaut de la jeune fille qui força sans difficulté la dernière muraille.
Quand sa langue rencontra celle de l'adolescent, elle se sentit fondre comme le cœur coulant d'un fondant au chocolat, déjà séduite. Shikamaru avait l'incroyable impression de savourer la pâtisserie la plus exquise en ce monde, la création la plus complexe à réaliser, la gâterie divine qui ébranlait entièrement un humain, moult saveurs explosaient en son for intérieur, il en découvrait même certaines, inconnues et fortement succulentes.
Chaque fois que leurs langues se liaient, s'exploraient, il accédait à des parfums savoureux, des goûts délicats, raffinés, extraordinaires.
Temari dégustait la bouche du Nara qu'elle trouvait aussi délicieuse que toutes les pâtisseries qu'il réalisait. Elle goûtait à une création sucrée unique qui arrivait au summum de son classement des meilleures pâtisseries du monde. Elle se laissait totalement ravir par l'onctuosité du baiser qui la portait dans un monde exclusivement modelé par des mets sucrés.
L'apprenti répondait avec la plus grande réserve, impressionné et encore médusé par le geste de la jeune fille, fasciné par toutes les nouvelles saveurs qui émergeaient et l'électrisaient. Ses bras ballants reposaient sagement le long de son corps, son cœur battait toujours aussi fort et ses cellules nerveuses mémorisaient minutieusement toutes les sensations qu'il ressentait.
Des fourmillements prenaient naissance un peu partout en lui pendant que la blonde tâtait une dernière fois, dans un léger frôlement sa langue avant de s'écarter, joues joliment rosies par l'extase pleine et totale ressentie. Il la vit sourire d'un large et éblouissant sourire qui lui ôta toute faculté d'expression et si on ajoutait à cela, son souffle saccadé, on pouvait lui attribuer la tête du garçon le plus béat de l'Univers.
Il vira violemment au rouge vif quand il réalisa que la Sabaku no, qui avait mis au tapis Uchiwa Sasuke, venait de l'embrasser et pas innocemment. Les étoiles qui scintillaient dans ses prunelles vertes l'intriguaient, le perturbaient, le firent réfléchir densément jusqu'à ce qu'il saisisse une nouvelle exceptionnelle et déroutante.
Temari recula de deux pas lorsqu'elle aperçut le regard déstabilisé de l'adolescent. Il avait compris à quel point il l'attirait. Qui ne l'aurait pas deviné après tout ? Elle s'était carrément jetée sur lui et l'avait embrassé avec une telle fougue, son attirance ayant refusée d'être refoulée.
N'importe qui comprendrait qu'il ne laissait pas indifférente.
Un génie comprendrait sans aucune difficulté qu'elle ne lui demeurait pas insensible.
Mesurant à quel point elle s'était dévoilée, l'angoisse de Temari se mua en embarras titanesque, amplifié par le regard dérouté du Nara dont l'esprit vif rassemblait toutes les pièces du puzzle sentimental.
- J...Je v... vais y... aller, bafouilla-t-elle, en évitant soigneusement le regard scrutateur du brun.
Les mains tremblantes, elle ne parvint même pas à défaire son tablier et partit sans demander son reste, laissant l'adolescent dans la confusion la plus absolue.