Je ferme les yeux, concentrée. Je cherche au fond de moi cette étincelle, cette petite flamme que je dois transformer en brasier. Quand je parviens aux endroits les plus reculés de mon esprit, je la perçois enfin. Je tente de la faire grandir, sans trop de succès... puis la chaleur réconfortante de mon chakra m'envahit, et c'est sereine que j'accomplis le signe commandé par Iruka-sensei. Je reprends peu à peu conscience de la réalité, pour entendre les compliments de mon maître. Je suis la seule qui ait réussi cet exercice... Je redresse la tête, fatiguée mais heureuse. Ce n'est pas tous les jours que j'impressionne quelqu'un...
Quand je reprends ma place, je saisis quelques bribes d'une conversation... "Elle a fait mieux que toi, mais attends le cours de taijutsu, tu verras..." une immense envie de pleurer remplace ma fierté. Même ainsi, alors que j'ai prouvé ma valeur, mes faiblesses me sont jetées à la tête ?
Peu importe. Le sourire de ma voisine suffit à me réconforter... ainsi que les quelques sucreries qu'elle me tend, accompagnées de l'un de ses légendaires clins d'œil.
La mâtinée passe à une vitesse affolante, et déjà, je suis sur l'herbe du terrain d'entraînement des premières années. Face à nous, Iruka-sensei nous montre les principes élémentaires du taijutsu.
Équilibre, endurance, vitesse, précision... et force, mais force contrôlée.
Y a-t-il la moindre chance pour que je devienne un génie en taijutsu ? Un regard sur mon bras maigrelet suffit à démontrer que c'est impossible.
Mais je n'abandonnerai pas. Jamais. Je l'ai promis à Onee-chan... et les promesses sont pour moi chose sacrée.
Alors, comme les autres, je tente de reproduire les gestes du professeur. Et tant pis si j'ai mal, horriblement mal, tandis que mes articulations protestent contre le moindre de mes gestes.
Tant pis si mon cœur pulse dans ma poitrine, de plus en plus fort, jusqu'à envahir ma tête tandis que l'air se raréfie dans mes poumons et que ma respiration, sifflante, devient erratique.
Tant pis...si mon regard se voile, et si ma perception du monde extérieur diminue de seconde en seconde. Il faut... j'ai promis... promis...
Lorsque je reprends conscience, c'est pour découvrir un environnement familier, que sans doute j'ai visité plus de fois qu'un certain nombre de shinobis adultes... c'est l'environnement blanc et stérile d'une chambre d'hôpital. Un sceau médical sur mon bras, m'indique que je suis soignée pour crise d'asthme... c'est presque navrant de voir, qu'à force, je reconnais les sceaux. Peut-être finalement devrais-je envisager une carrière de médic-nin?
Ma porte s'ouvre pour laisser passer Yakushi-san. C'est presque mon médic-nin attitré; je ne sais pas pourquoi, mais je suis presque toujours soignée par lui. Il sourit malicieusement avant de se laisser tomber, dans une attitude très peu professionnelle, sur la chaise placée à côté de mon lit.
"Sora-chan... tu as encore fait des bêtises...
-C'est pas de ma faute... j'ai juste voulu m'entraîner au taijutsu, et..."
Je n'ai pas fini ma phrase que ses bras m'entourent et me pressent doucement contre lui.
"Je sais. Il faut que tu comprennes, Princesse... que tu ne pourras jamais pratiquer le taijutsu."
Une grande inspiration... ça sent les mauvaises nouvelles.
"Hokage-sama m'envoie pour te demander si... enfin si être ninja est vraiment ta vocation. Peut-être que tu devrais arrêter l'Académie et chercher une autre formation... peut-être que tu n'es pas faite pour ça."
Cette fois, je me détache de lui, estomaquée. Non, il ne peut pas! Il n'a pas le droit de m'empêcher d'être ninja !
C'est mon rêve, c'est ma vie... Non !
Et, presque naturellement, la chaleur réconfortante de mon chakra m'envahit, de la tête jusqu'au bout de mes doigts.
Presque aussi naturellement, je forme les signes que deux troisièmes années m'ont montrés l'autre jour.
Quelques fractions de secondes plus tard, une bûche a pris ma place dans le lit d'hôpital, et je marche dans la forêt, aussi rapidement que mon corps veut bien me le permettre. Vers où? Aucune idée... ailleurs, c'est tout.
Et je marche, encore et encore, de plus en plus lentement à mesure que le jour fait place au soir et que les ombres s'allongent...
Je casse une branche d'arbre pour m'appuyer dessus, et aussi peut-être pour me rassurer un peu.
Le silence qui m'entoure exacerbe chaque bruit de la forêt, faisant du moindre bruissement de feuilles le pas d'une bête féroce...
Le sentier que je suivais est devenu une sente, puis a totalement disparu, remplacé par un épais tapis d'humus.
Lentement, la nuit tombe, et le froid monte proportionnellement. Les cris inquiétants que je croyais entendre au loin sont bien réels, et semblent se rapprocher de minute en minute. J'ai peur, maintenant... peut-être que Yakushi-san ne me voulait pas de mal, peut-être que j'aurais dû l'écouter, au lieu de partir comme une voleuse... mais non. Je réaliserais mes rêves. Ce n'est pas une petite forêt, quoique sombre et intimidante, qui m'empêchera de devenir ninja !!!
Soudain, dans mon dos, un énorme craquement me fait sursauter.
Cette fois, j'en suis sûre; je suis suivie par quelque chose... ou quelqu'un. Ce n'est pas le vent qui a écrasé cette branche...
Je me retourne, nerveuse, serrant entre mes mains moites le bois solide et rassurant de mon bâton, regrettant de ne pas avoir emporté des shurikens, un katana... n'importe quel objet coupant ferait l'affaire.
Mais rien ne différencie le bosquet devant moi de ceux qui l'entourent...
Je laisse passer quelques minutes puis, un peu plus détendue, je me détourne pour continuer ma route.
Un nouveau craquement, provenant cette fois de ma gauche. Suis-je donc poursuivie par plusieurs monstres? Ou bien mon adversaire s'est-il déplacé?
Cette fois, je suis résolue à me battre. Poussant un grand cri, je me jette sur les ombres qui m'effraient depuis maintenant trop longtemps. Je balance mon arme improvisée dans tous les sens, priant pour parvenir à toucher, plus ou moins gravement, l'un de mes insaisissables adversaires.
Mais je ne frappe que des esprits intangibles...
Au bout de quelques instants, essoufflée, je m'arrête, priant pour ne pas faire une crise d'asthme.
J'attends quelques minutes, le temps de réguler mon souffle irrégulier et les battements trop rapides de mon cœur.
Et les bruits de la nuit ont repris leur rythme infernal, qui me stresse même si je sais que le silence signifierait plus de dangers encore...
Calmée, je me remets en route, remarquant au passage que le lune éclaire à présent les arbres sur mon chemin.
Enfin, épuisée, je me couche au pied d'un arbre majestueux.
Je n'irai pas plus loin ce soir...
Je serre contre moi les pans de mon gilet sans manche, regrettant pour une fois de ne jamais mettre ma doudoune...
Lorsque j'ouvre les yeux, quelques instants plus tard, le soleil réchauffe agréablement mon côté droit. Mais ce n'est pas ça qui m'a réveillée, et je hume avec appétit le bol de nouilles au miso qui fume à côté de moi.
Une minute. Un. Bol. De. Nouilles. Chaud.
Poussant un petit cri paniqué, je me redresse brusquement, tentant de repérer la présence d'un intrus.
Jaillissant d'un buisson, une... chose verte se dresse alors devant moi.
Comment définir d'une meilleure façon l'énergumène qui me fait face?
Un peu estomaquée, je prends tout de même le temps de détailler son étrange combinaison moulante, d'un vert vif absolument immonde, ses cheveux noirs coupés au bol qui ne masquent qu'une toute petite partie de ses immenses sourcils...
Et son sourire rayonnant.
On sourie rarement de cette façon en me regardant... parfois c'est un sourire de compassion ou de pitié, souvent c'est un sourire de moquerie. Mais jamais un sourire aussi grand, jamais un sourire sincère comme celui-là.
Alors, stupidement, je pousse un petit rire nerveux, et je souris aussi. Un sourire coincé, tordu, mais un sourire tout de même.
Et c'est là que le rêve devient totalement fou. Parce qu'en voyant mon sourire, il se met à sauter partout en poussant des grands cris de joie, puis il lève son pouce vers moi en criant "Nice guy!"
Mon manque de réaction paraît le gêner, parce qu'il s'approche de moi en bondissant, me recommandant de réveiller la"Fougue Printanière de ma Jeunesse Étincelante". Ou quelque chose comme ça.
Puis il penche la tête, et m'ordonne de manger tant que mes nouilles sont encore chaudes.
Ce coup-ci, je lui obéis, et j'entame avec gloutonnerie mon plat.
Ce que c'est bon ! Je pourrais en dévorer des kilos avant de me sentir rassasiée...
Lorsque j'ai enfin terminé mon bol, je me rends compte que l'inconnu (que je décide d'appeler "Vert") et moi ne sommes plus seuls. Trois enfants, âgés peut-être de trois ou quatre ans de plus que moi, ont pris place à ses côtés.
Le premier, ou plutôt la première, est une grande fille ,assez maigre, qui me sourit gentiment. Ses cheveux bruns foncés, presque noirs, sont roulés autour de sa tête en deux chignons plats. Je la surnomme aussitôt "Macarons". Le second, grand et pâle, me regarde d'un air méprisant, fronçant ses fins sourcils sur son regard blanc. C'est un Hyûga.... son air supérieur me l'indique aussi clairement que ses yeux sans pupilles, ce très fameux Byakugan.
Quand au troisième élève de Vert... c'est sa copie conforme. De la combinaison verte au sourire radieux.
Les cris du Jounin instructeur( puisqu'il a des élèves, il doit être jounin) interrompent mes pensées.
Il me présente son équipe.
Tenten, Hyuga Neji, et Lee. Rock Lee.
Ce dernier me prend le bras avec empressement, et m'abreuve de questions sur ma présence dans la forêt. Son équipe m'a trouvée lors d'un entraînement nocturne...
Euh, comment dire? "J'ai fugué".
Sous son regard curieux, j'entame mes explications.
Voili-voilou!!!
Vert est emprunté à Ywëna, sur ff-net...